19 mai 2015 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les défis et priorités de la politique du gouvernement, à Carcassonne le 19 mai 2015.

Madame,
Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs les Parlementaires,
Monsieur le Président du Conseil régional,
Monsieur le Président du Conseil départemental,
Monsieur le Maire. Mesdames, Messieurs les élus.
Je vous remercie d'abord pour votre accueil, je vous ai pris un peu au dépourvu, j'étais prévu pour le mois de juillet ?si j'ai bien compris ? pour visiter l'hôpital et participer à la fête, mais j'ai voulu anticiper, prendre les devants et répondre à une invitation que vous ne m'aviez pas lancée encore à ce moment.
Mais en entendant le maire, le président du Conseil départemental et le président du Conseil régional, je sais, les uns, les autres, ce que vous faites pour vos territoires. Quelle que soit la taille de la commune dont vous êtes responsable ou de la collectivité dont vous avez la charge, vous avez à cur de servir la République.
Finalement, nous avons la même vocation : être au service de l'intérêt général, vouloir préparer l'avenir, et être capable de rendre des comptes à nos concitoyens. Vous avez aussi, dans vos interventions, montré votre attachement à ce que représente l'Aude, ce département, dans cette région, Languedoc-Roussillon, demain, grande région du Sud de la France.
C'est vrai que l'Aude n'est pas n'importe quel département : c'est une terre dont les valeurs sont connues et reconnues, la ténacité, l'honnêteté, la résistance, et une fidélité. Une fidélité à l'histoire, une fidélité à des principes, une fidélité à la République. C'est une terre de viticulture, le ministre de l'Agriculture, Stéphane LE FOLL, me fait souvent apparaître ce que représente la viticulture française.
Dix milliards d'euros d'excédent pour notre balance commerciale. Il faut en vendre des Rafale pour atteindre ce résultat. La viticulture, c'est un produit d'excellence, c'est aussi une tradition, c'est un savoir-faire, c'est un investissement patient qui peut parfois être anéanti par des catastrophes ou par des calamités. Je sais ce que cela représente de faire une modernisation, comme elle a été faite ici, dans ce département, pour la viticulture, et en préservant la qualité tout en respectant l'environnement.
Alors, c'est un atout pour la France, cette viticulture et cette agriculture. L'Aude, c'est aussi une terre qui attire des touristes en grand nombre, plus de deux millions et demi de visiteurs, rien que pour la cité de Carcassonne. C'est une terre aussi le Président de la région insistait là-dessus qui gagne de la population chaque année, sans pouvoir toujours fournir les emplois qui sont espérés.
Donc l'Aude, c'est une terre qui innove, invente, investit, mais qui souffre aussi, et j'en ai conscience, je peux le mesurer à travers le taux de chômage ou à travers le nombre d'allocataires du RSA que le département prend en charge, et cherche à donner un avenir à travers l'insertion.
L'Aude, c'est une terre qui ne renonce jamais, nous l'avons vu encore avec la belle aventure de Fabrique du Sud, la Belle Aude, que je voulais visiter, non pas que ça représente beaucoup d'emplois, mais ce sont des emplois qui ont une charge symbolique très forte £ que des travailleurs aient été capables, après une longue lutte, de reprendre leur outil de production, de le moderniser, de se former, d'y mettre toutes leurs indemnités pour servir de capital de départ, et puis ensuite, se lancer dans l'aventure de la création d'entreprise, d'une nouvelle entreprise.
J'ai lu sur leur visage, à ces femmes et à ces hommes, une fierté. Une fierté qu'ils ne pouvaient pas dissimuler. Fierté d'être propriétaires d'abord, de leur outil de production, fierté de la qualité de ce qu'ils pouvaient offrir aux consommateurs. Fierté aussi de me recevoir ? comme un signe de reconnaissance ? et puis j'ai vu aussi une consécration de ce que nous avions voulu avec la ministre de l'économie sociale et solidaire Carole DELGA, c'est-à-dire ce mouvement de coopératives, qui peuvent être une solution mais qui ne peuvent pas être la solution à toutes les difficultés d'entreprises.
Il faut, là, qu'il y ait une situation, une circonstance, des hommes et des femmes qui sont capables de se lancer, et en même temps, qu'il y ait un marché, parce que même une coopérative, elle est dans l'économie de marché et ne peut pas s'en défaire. Elle doit trouver des consommateurs, elle doit trouver des banquiers pour apporter des financements.
C'est cette réussite-là que je voulais donner en exemple pour que d'autres travailleurs, dans d'autres départements, puissent se dire que c'est possible, et que dans l'Aude, il y a, là, une référence et un exemple.
Je sais aussi ce que vous attendez de l'Etat, je connais ce paradoxe bien français, qu'on n'aime pas beaucoup l'Etat, mais on attend beaucoup de lui. On n'aime pas beaucoup payer des impôts, mais on demande qu'il y ait toujours plus de dépenses qui viennent abreuver ce qui est l'ensemble des responsabilités publiques, et personne, ici, ne fait exception.
Néanmoins vous avez raison d'attendre de l'Etat, parce qu'il a ce rôle d'assurer, par sa présence, la solidarité. Sa présence, ici, dans ce département, et vous l'avez souligné, Monsieur le maire, c'est une présence glorieuse, c'est le 3ème RPIMa. Ce n'est pas simplement un régiment sur une carte le 3ème RPIMa, c'est un régiment qui va sur les lieux les plus exposés, les plus difficiles, qui remplit des missions qui exigent une grande bravoure.
Alors, en regardant ce sujet, parmi d'autres ? quand il s'agit de la Défense, ce sont des sujets particulièrement graves ? j'ai tenu compte aussi de ce qu'avait été le RPIMa et de ce qu'il est encore, de ce qu'il pouvait représenter pour une ville comme Carcassonne, et pour le département de l'Aude.
Oui, présence aussi de l'Etat à travers l'hôpital de Carcassonne, celui que je n'ai pas encore visité, qui m'attend, mais qui, néanmoins, fonctionne, je l'espère, puisque les portes ont été ouvertes il y a peu. Là aussi, pouvoir fournir un service de qualité et de proximité, et je sais qu'il y a, ici, un certain nombre de situations hospitalières qui appellent également une intervention de l'Etat.
Solidarité également, quand il faut venir en aide aux collectivités qui ont été, comme ici, mais pas seulement ici, durement touchées par les crues de novembre dernier. Près de deux millions et demi d'euros seront versés dans les prochains jours par le fonds pour la réparation des dommages causés par les calamités publiques.
Je sais que ce n'est pas assez pour beaucoup, il a fallu d'ailleurs compléter par des dotations de développement rural, et c'est bien légitime. Vous êtes un département où il y a beaucoup de ce qu'on appelle des petites communes, ? c'est quelquefois même péjoratif ? dont la moitié des communes du département doivent avoir moins de 200 habitants. C'est une chance. C'est une chance pour les citoyens de pouvoir avoir ainsi cette représentation, c'est une chance pour la République d'avoir ici des relais partout.
Donc nous devons venir en soutien, bien sûr que nous devons aller dans le sens de l'intercommunalité. Qui peut prétendre qu'une commune de quelques centaines d'habitants peut assumer les charges et les investissements. Mais le rôle de l'Etat, c'est aussi d'assurer, malgré les difficultés budgétaires, cette péréquation, cette solidarité entre les collectivités.
Vous m'avez parlé, Monsieur le maire, et les parlementaires aussi, du site exceptionnel de Carcassonne, et de votre volonté de faire classer le site de Carcassonne parmi les opérations que l'on appelle Grand Site. C'est une belle épreuve que vous vous donnez, parce que là aussi, tout le monde est pour le Grand Site, mais en même temps, cela inquiète, parce que cela peut avoir quelques conséquences sur les constructions.
Mais vous avez pris le risque, nous vous suivrons, et si vous avez besoin d'un conseiller, vous me trouverez. Sur aussi ce qui est votre volonté de faire que Carcassonne, le site, mais aussi tout l'environnement, puisse être porté au patrimoine de l'UNESCO, patrimoine de l'humanité, nous vous accompagnerons dans cette démarche.
Il y a néanmoins d'autres candidats, car nous sommes un pays où il y a tellement de paysages merveilleux, tellement de sites et de monuments, que nous avons parfois une concurrence, une compétition entre nous, mais nous devons aller vers cette exigence de pouvoir être reconnus sur le plan international.
Nous avons une grande volonté de développer le tourisme, ici, je sais ce qu'il représente, à l'échelle du pays, c'est encore davantage, donc c'est un atout tellement considérable. Nous attendons des millions de touristes supplémentaires, pas simplement des chinois, mais partout, nous avons des sollicitations, alors vous devez avoir, et je sais que vous vous y préparez ici, dans le département, comme dans la région Languedoc-Roussillon, toutes les structures, tous les équipements, tous les sites pouvant accueillir tous ceux qui voudront découvrir la France.
L'Etat, c'est aussi l'égalité de tous partout sur le territoire, l'Aude fait partie ? et André VIOLA l'a voulu ? des départements qui représentent l'expérience, l'expérimentation même pour l'accès au service public. Des points multiservices existent, là aussi, ils servent de référence pour notre pays £ et je souhaite qu'ils puissent être, non seulement soutenus, mais développés et généralisés. Parce que ça sera un moyen de permettre l'accès de tous au service public.
Vous avez voulu, le département de l'Aude parce que vous êtes conscient qu'on ne peut pas vivre simplement de son histoire être les premiers, et notamment en matière de très haut débit. Vous avez présenté un projet ambitieux, pour le très haut débit, permettant de desservir 136 communes, 68 sites d'entreprises et c'est absolument indispensable si nous voulons accueillir, là encore, des activités économiques.
Vous avez présenté ce dossier, vous êtes en droit d'espérer près de 43 millions d'euros, et je pense que, grâce à la qualité de votre démarche, vous pourrez les obtenir. Vous êtes aussi attachés à ce que la téléphonie mobile puisse passer partout, alors, le ministre MACRON est très insistant, et il a raison, auprès des opérateurs, parce que bientôt, on voudrait faire payer à l'Etat ce qui relève des opérateurs.
On ne peut pas vouloir accéder à toutes les fréquences, à avoir toutes les possibilités, pour faire du commerce, et c'est bien légitime, et nous souhaitons être un grand pays moderne, et ne pas assurer partout sur le territoire le passage de la téléphonie mobile, même s'il faut accompagner ce mouvement, nous ferons la pression nécessaire, parce que la ruralité, ce n'est pas simplement d'avoir des paysages. C'est d'avoir aussi des habitants qui vivent et qui puissent disposer des mêmes services et des mêmes outils et c'est aussi une chance pour notre pays.
Si nous n'avons qu'un territoire où il n'y a que des champs et des paysages ? faut-il encore les entretenir ? nous n'aurons pas cette vitalité. Nous avons donc besoin qu'il y ait des entreprises, qu'il y ait des particuliers qui s'installent dans l'espace rural, et que l'agriculture puisse également y vivre, et sans qu'il y ait de conflit d'intérêt, parce que nous sommes aussi conscients que, un certain nombre de nouveaux ruraux voudraient qu'il y ait moins d'agriculteurs.
Mais non, il faut qu'il y ait aussi une agriculture, et c'est ce que le ministre LE FOLL a permis à travers sa loi pour que notre territoire, que nos terres agricoles puissent être aussi préservées. J'ai conscience aussi de ce que vous attendez en termes d'infrastructures : les routes, les autoroutes, les lignes LGV Tout cela fait partie, là aussi, de nos grands projets, et c'est légitime qu'un territoire ait une grande ambition et veuille également être desservi.
Nous voulons donc que la ligne LGV Perpignan-Montpellier puisse trouver enfin un début de réalisation, ce qui suppose des études, nous en sommes là. Les études seront financées par les crédits européens, et si elles sont financées par les crédits européens, alors nous pourrons engager plus tard les travaux. Je sais ce que cela représente pour Narbonne et combien cette ville a besoin de retrouver son rôle de carrefour qu'elle a été capable de réaliser dans le passé et qu'elle peut encore réussir dans l'avenir.
Je sais aussi que vous vous interrogez sur la réforme territoriale et on s'est interrogé tellement longtemps sur la réforme territoriale, on a réfléchi tellement d'années qu'on n'a jamais rien fait. Il a fallu à un moment, prendre la décision ? l'idée des grandes régions, elle courait dans beaucoup d'esprits ? mais fallait-il encore tracer ces grandes régions £ cela n'a pas été celle, Languedoc-Roussillon-Midi-Pyrénées, la plus difficile à concevoir parce qu'elle a une réalité, même si ce n'est pas toujours facile à faire accepter.
Mais quel est l'intérêt de cette grande région ? D'ailleurs, vous l'avez souligné, et Damien ALARY y a insisté, c'est d'avoir une capacité. C'est de pouvoir compter, dans le Sud de la France ? ça sera une des grandes régions, la grande région et avec aussi une compétence qui sera reconnue sur le plan économique ? sur le plan universitaire, sur le plan de la recherche. Cette grande région sera l'une des plus peuplées de France.
Donc elle a toutes les conditions pour réussir. Mais faut-il aussi que nous puissions assurer la proximité, j'ai bien entendu, proximité communale, avec des intercommunalités plus fortes elles aussi, proximité que donne le Conseil départemental, qui a été concentré sur ses missions, clarifié quant à ses compétences, et c'est bien que le Conseil départemental puisse être justement le coordinateur de l'ensemble des collectivités pour assurer cette proximité.
Après, faut-il que nous puissions offrir aux citoyens, aux acteurs économiques, une organisation claire et une bonne répartition entre les deux anciennes régions, et entre les deux métropoles. Un mot des métropoles, l'erreur serait d'opposer les métropoles aux territoires ruraux. L'erreur, c'est toujours d'opposer comme s'il y avait des intérêts contradictoires, mais s'il n'y avait pas de grandes métropoles dans notre pays, nous ne pourrions pas avoir le développement économique universitaire, recherche que nous avons.
Les métropoles assurent aussi une certaine solidarité territoriale. Il y a des territoires ruraux qui sont dans les espaces métropolitains, et en même temps, si les métropoles concentrent toute l'activité, alors c'en est fini de l'aménagement du territoire et de la vitalité de notre pays. Donc nous devons concevoir notre organisation avec des métropoles, mais pas simplement autour des métropoles.
Ensuite, il y a la question de la répartition, et le président Damien ALARY a raison, il faut, pour qu'un tel schéma puisse être accepté, qu'il y ait une bonne organisation, que chacun s'y retrouve. Non pas une espèce d'arbitrage où on ferait un compromis et qui ne fonctionnerait pas, mais qu'est-ce qui peut relever de l'intérêt de cette future région ? Qu'est-ce qui doit être mis à Montpellier ? Qu'est-ce qui doit être mis à Toulouse ? De façon à ce que cela puisse véritablement fonctionner, et que cela ait un sens, et j'y veillerai, un préfet préfigurateur a été désigné, il nous fera des propositions. Avec le Premier ministre, nous serons très attentifs également à ce que vous pourrez nous suggérer.
Voyez, Mesdames et Messieurs, il faut garder l'esprit de réforme, sinon, on finit par renoncer à ses plus hautes ambitions. Rien n'est pire que le statu quo, on croit que cela arrange le statu quo, mais il y a même des mécontents du statu quo qui ne sont pas forcément des défenseurs de la réforme. C'est là aussi la contradiction, tout change, rien ne change, et en même temps, il faut bien qu'il y en ait qui prennent les décisions.
Je suis dans la situation, depuis trois ans, où je prends les décisions. Et quelle est mon inspiration sur tous les sujets ? C'est que le monde ne nous attend pas. Bien sûr, on a une très grande idée de la France, tous, nous pensons que nous sommes un pays exceptionnel, certains le croient d'ailleurs, heureusement, parce que c'est vrai, mais en même temps, nous ne pouvons pas nous calfeutrer, fermer les portes et les fenêtres et penser que le monde va servir nos propres intérêts.
C'est à nous d'imposer la règle, c'est à nous de distribuer le jeu, c'est à nous de faire prévaloir nos ambitions, et parfois nos intérêts. Donc le pays doit être fort pour qu'il puisse être justement plus libre, c'est la force qui donne la liberté et la souveraineté. Il se trouve que je viens dans l'Aude trois ans presque jour pour jour après que j'ai accédé aux responsabilités du pays, c'était le 15 mai 2012, je m'en souviens bien, puisque, il faisait le temps que vous savez, mais je m'en souviens bien parce que le soir même, j'étais allé à Berlin rencontrer la Chancelière Angela MERKEL. Aujourd'hui, coïncidence des événements, je reviens de Berlin, après avoir vu de nouveau la Chancelière et je suis dans l'Aude pour finalement revenir sur ces trois ans, pour dire le chemin parcouru et ce qui reste à accomplir.
Des efforts ont été demandés, je ne les avais pas dissimulés, une nouvelle donne s'annonce sur le plan économique, mais il reste encore beaucoup à accomplir, l'essentiel, et le plus dur, c'est la confiance, elle ne se proclame pas, elle se conquiert. La confiance c'est aussi un combat, un combat contre la morosité, un combat contre les discours qui font commerce du dépit, du déclin, on en entend tellement. Or, la France, ce n'est pas une nostalgie, ce n'est pas une histoire ancienne, la France, c'est un projet, c'est un destin.
Dans ma fonction et à ma tâche, je ne peux participer aux débats publics autant que parfois je le désirerais, je me retiens, mais je suis attentif à son déroulement, à ce qui se dit. J'entends comme vous d'ailleurs, des discours flatter les passions, attiser des tensions, creuser des divisions, et c'est pourquoi je m'exprime aussi aujourd'hui, non pas pour rétablir l'équilibre, ce serait trop long, mais pour expliquer, expliquer toujours, expliquer encore.
Je crois aux arguments, pas aux affrontements, aux emportements, aux emballements, je laisse cela à d'autres. Je crois à la réussite de la France et à la réussite des choix que nous avons faits. Présider la République, c'est prendre chaque jour des décisions, certaines répondent à l'urgence, j'en ai évoqué plusieurs devant vous, d'autres ne produisent et ne produiront leurs effets que dans plusieurs années, et alors !
C'est ma responsabilité que de les prendre. Parfois, elles sont lourdes de conséquences, comme lorsqu'elles engagent nos forces armées et j'ai été amené à le faire très tôt dans le quinquennat.
Présider la République c'est aussi moderniser le pays, ses structures, ses procédures, son organisation, son économie, ses rapports sociaux, parce que je veux que le pays avance.
Présider la République, c'est donner plus de chance au plus grand nombre, c'est-à-dire d'abord à la jeunesse, et c'est pourquoi j'ai fait de l'Education nationale ma priorité, parce que c'est la promotion de chacun et c'est aussi l'excellence pour tous.
Présider la République française, c'est aussi faire face aux défis du monde. D'abord, le défi du terrorisme, vous y êtes revenu, Paris a été frappée au début de l'année, puis après, cela a été Copenhague, Tunis et d'autres villes sont prises pour cibles, en Syrie, en Irak, au Sahel, les populations civiles, souvent musulmanes, les minorités religieuses, je pense aux chrétiens d'Orient, les femmes, les enfants sont les premières victimes de la barbarie terroriste.
Alors, j'ai fait le choix de la protection de la France et de la sécurité des Français. J'ai rappelé l'intervention des forces armées au Mali, c'était en 2013, puis l'engagement de la France dans le cadre de la coalition en Irak, pour lutter contre le terrorisme. Terrorisme qui peut aller jusqu'à nous, terrorisme qui fait qu'il y a des jeunes français, des jeunes européens, des jeunes partout dans le monde qui pensent que combattre avec les djihadistes peut être un salut pour leur âme ou pour leur vie, et qui perdent leur âme et leur vie.
A la suite des attentats du début de cette année, j'ai passé au plus haut niveau le plan Vigipirate, et j'ai lancé ce qu'on appelle l'opération Sentinelle ? d'ailleurs, le régiment de Carcassonne y participe ? qui vise à protéger les lieux et les sites les plus sensibles. J'ai fait ce choix aussi comme chef des armées, et j'ai été amené à dégager près de quatre milliards d'euros supplémentaires pour le budget de la Défense sur les quatre prochaines années.
Ce n'était pas prévu, et il y avait sûrement d'autres priorités, d'autres besoins à satisfaire, mais l'essentiel, c'était d'assurer à nos armées les moyens de remplir leurs tâches. C'est un effort, il est indispensable, il est considérable. J'ai également pris la décision d'améliorer notre système de renseignement dans le respect de nos libertés, une loi vient d'être votée par l'Assemblée nationale, j'en remercie les députés, qui n'est pas une loi de circonstance, mais qui est une réponse aux temps que nous connaissons, et là encore, c'était ma responsabilité pour anticiper, pour prévenir, pour empêcher.
Car le ministre de l'Intérieur, qui viendra bientôt pour l'inauguration du futur commissariat, il m'en a fait la promesse, me dit combien nous déjouons un certain nombre de tentatives, combien nous interpellons encore un certain nombre d'individus, et la sécurité, c'est notre première liberté. Nous devons l'assurer.
Il y a un autre défi, qui est pour partie lié au précédent. Il s'agit du défi des migrations, provoquées par l'exode des déshérités, l'exil des réfugiés. La Méditerranée, vous l'avez, en face de vous, c'est maintenant une des routes les plus meurtrières pour ceux qui fuient. L'Europe répond à l'urgence, porte secours, sauve des vies, elle doit faire davantage : combattre les passeurs, les filières criminelles. Elle va le faire, mais elle doit agir aussi sur les causes profondes, d'abord, les crises humanitaires. Mieux vaut les régler sur place que d'attendre que les personnes qui n'en peuvent plus se déplacent.
Il est nécessaire de faire une véritable coopération de développement, parce que sinon, nous ne pourrons jamais appréhender les flux migratoires. L'Europe doit contrôler ses frontières, c'est son devoir. Elle doit aussi accueillir les réfugiés, mais en faisant bien la distinction entre ce qui relève de l'asile et qui nous oblige, car c'est un droit fondamental, et entre ce qui correspond à l'immigration illégale, qui doit être traitée humainement mais fermement, avec les reconduites qui s'imposent.
La France prend déjà sa part de l'effort mais elle ne veut pas en venir à des quotas, qui seraient contraires au principe même du droit d'asile, comme si nous limitions le nombre de bénéficiaires du droit d'asile, c'est un droit. En même temps, nous ne pouvons pas non plus accepter que ce soient les mêmes pays qui fassent l'effort, le seul effort dans l'accueil des réfugiés, d'où la nécessaire répartition.
Il s'agit d'un défi immense que de parvenir à juguler les crises et le rôle de la France est aussi d'être à l'initiative. Nous le sommes également pour le défi climatique, puisque nous allons accueillir la conférence sur le climat à Paris en décembre prochain. Laurent FABIUS a toujours cette expression, elle est heureuse. Il dit : « nous l'accueillons parce que personne n'était candidat. Parfois, c'est plus facile de gagner une compétition quand on est le seul candidat. »
Pourquoi était-ce finalement périlleux ? Parce que la précédente conférence avait échoué, c'était à Copenhague, et qu'il y a des intérêts tellement contradictoires : il y a des pays développés qui ont émis des gaz à effet de serre pendant des années, et qui maintenant se disent qu'il faut arrêter et des pays émergents qui disent : eh bien, nous, nous sommes au début de notre cycle de développement, pourquoi faudrait-il nous brider ? Les pays les plus pauvres, eux, disent : mais de toute façon, nous, on n'émet rien du tout, pourquoi allez-vous nous imposer quoi que ce soit ?
Alors il faut tout de même bien se mettre au travail, et c'est ce que j'avais comme mission à Berlin avec la chancelière, d'appeler à la mobilisation car c'est un enjeu. C'est un enjeu, le défi climatique. D'abord parce qu'il faut réussir cet accord, et nous nous y préparons, mais ensuite parce que c'est tout l'enjeu de l'excellence environnementale, qui est notre intérêt. C'est la raison pour laquelle nous avons fait voter à l'Assemblée nationale une loi : la transition énergétique. Ségolène ROYAL s'y est engagée, après Philippe MARTIN, et puis, nous avons fait voter une loi sur l'agriculture pour bien montrer que nous pouvions faire une agriculture respectueuse de l'environnement, c'est Stéphane LE FOLL.
Nous avons fait voter, et nous allons faire voter une loi sur la biodiversité. Il y aura une agence pour la biodiversité qui va être d'ailleurs très utile ici, puisque votre département, l'Aude, a été reconnu comme territoire à énergie positive. Ce sont des concepts qui sont parfois difficiles à entendre, mais je m'y plie. Territoire à énergie positive, cela signifie que nous pouvons faire moins de consommation d'énergie et produire davantage de renouvelable, que nous pouvons faire de l'efficacité et en même temps de la production d'énergie qui ne pollue pas la planète.
Le département de l'Aude a donc été reconnu et va bénéficier d'un certain nombre de soutiens. C'est un enjeu pour notre pays, également sur le plan économique, parce que cela va créer des emplois. D'ailleurs, il y a dans les plans industriels que le ministre MACRON a présentés, tout ce qui a trait à la transition énergétique, qui est d'ailleurs très liée au numérique. Parce que, plus nous faisons de numérique, plus nous pouvons également faire la transition énergétique.
Il y a aussi le défi de la mondialisation, parce que le monde n'est pas facile, et parfois, il n'est pas gentil. On ne peut pas penser qu'il va nous laisser une place : la concurrence est rude, la compétition est féroce sur le plan économique, nous le savons, parce que des pays veulent prendre également leur place, et ils en ont bien le droit, avec leurs moyens propres. Alors, nous avons le devoir aussi de faire en sorte que la finance, j'en avais parlé, puisse être mise au service de l'économie réelle, et non qu'elle se serve de l'économie pour ses seuls profits. C'est une longue bataille, mais pour partie, nous l'avons non seulement engagée, mais sur certains points gagnée.
Depuis trois ans, parce que c'est finalement devenu notre combat, mais c'est le combat de tous, la lutte contre la fraude fiscale, l'évasion fiscale, l'optimisation fiscale, les paradis fiscaux, a largement progressé. Même sur le plan des marchés financiers, quelle était notre inquiétude ? C'est que les taux d'intérêt puissent flamber puisqu'il y avait notamment des doutes sur la zone euro, et qu'a-t-on constaté ? Que les taux d'intérêt n'ont jamais été aussi faibles et que c'est donc une manière pour nous de pouvoir aussi nous financer et nous protéger.
Lorsque je parle de l'Europe, cela a été là aussi un combat difficile, réorienter l'Europe. Que constate-t-on trois ans plus tard ? La parité entre l'euro et le dollar est devenue maintenant plus réaliste, plus conforme à nos intérêts et notamment aux intérêts de nos entreprises qui exportent. Nous avons permis qu'il y ait des flexibilités budgétaires, pour pouvoir aller vers la réduction des déficits mais au bon rythme. Nous avons obtenu du président de la Commission, monsieur JUNCKER, un plan d'investissement pour soutenir la croissance.
Je demande d'ailleurs à tous les élus qui sont ici, avec le gouvernement, de fournir un certain nombre de projets, parce que là aussi, il ne suffit pas de dégager des moyens, faut-il aussi aller les chercher. Nous avons également fait en sorte que la politique agricole commune puisse être, non seulement préservée, parce que certains voulaient la mettre en cause, mais verdie, parce qu'il s'agissait de notre intérêt.
La Banque Centrale Européenne, que nous avions parfois critiquée, a été capable grâce à la pression que nous avons mise, mais aussi grâce à la lucidité qui s'est emparée de leurs dirigeants, de mettre en place une politique monétaire qui permette justement d'avoir des taux d'intérêt plus bas. Alors, qui peut nier qu'il y ait eu depuis trois ans, pour l'Europe et pour la France, un certain nombre d'avancées. Je sais que c'est long, je sais que c'est plus long que prévu. Mais gouverner, ce n'est pas cliquer sur un bouton, ou claquer dans les doigts. Ça, c'est pour les prestidigitateurs, il y en a toujours.
Nous ne sommes pas seuls en Europe, c'est cela le problème. J'ai souvent dit d'ailleurs, avant même que je ne devienne président de la République, que l'Europe serait tellement plus simple s'il n'y avait que la France.
Le problème, c'est qu'il n'y a pas que la France, il y en a 27 autres, et parfois, ils voudraient être à égalité les uns avec les autres. Alors nous devons convaincre, et pour convaincre, nous avons besoin d'avoir une relation forte avec l'Allemagne. Une relation forte avec l'Allemagne telle qu'elle est, c'est-à-dire une puissance économique, capable de réussir sur bon nombre de marchés. Mais une Allemagne qui comprend aussi qu'il doit y avoir des évolutions, que l'investissement doit être privilégié, que le chômage est insupportable.
Une Allemagne qui a une population vieillissante, et qui sait bien qu'elle doit composer, et notamment avec la France. Il se trouve que nous, nous avons une démographie qui est plus dynamique, et l'Allemagne sait qu'elle peut compter sur l'amitié de la France dans toutes les circonstances. Nous l'avons démontré, Angela MERKEL et moi-même, notamment sur la question ukrainienne, où nous avons passé des heures et des heures, nuit complète, pour convaincre le président POUTINE et le président ukrainien POROCHENKO qu'il fallait trouver une issue à la crise.
C'est cela qui peut faire avancer l'Europe, la force de l'amitié entre la France et l'Allemagne. Cela nous conduit d'ailleurs à préserver la langue allemande dans la réforme du collège, j'y reviendrai, pour qu'il y ait plus de jeunes qui parlent l'allemand, et plus même de professeurs allemands. J'ai d'ailleurs demandé que la réciproque soit vraie. Mais la chancelière à juste raison m'a fait observer que ce n'était pas de sa responsabilité, que c'était les Länder, les régions allemandes. Donc à travers vous, je m'adresse à tous les Länder allemands : faites apprendre le français comme nous allons faire apprendre l'allemand à nos jeunes enfants.
Mais je voulais aussi vous faire part de ma conviction, tirée de mon expérience depuis trois ans. Il s'agit de notre capacité à influencer l'Europe, à faire bouger le monde, à assurer même notre propre sécurité. Cette capacité dépend d'une seule chose sur le long terme, de la force de notre économie. Sur le court terme, nous pouvons toujours, grâce à ce que représente la France, donner notre point de vue et le faire respecter, et je l'ai montré ces derniers mois. Mais sur le long terme, si nous ne sommes pas une économie forte, si nous n'avons pas des entreprises solides, si nous n'avons pas des territoires qui, eux-mêmes, soient robustes, si nous n'avons pas cette vitalité, cette activité, cette créativité, cette industrie, cette agriculture et c'est le rôle du gouvernement que de l'assurer alors, nous ne pourrons plus jouer le rôle qui est le nôtre, et celui que notre histoire nous a commandé de faire encore pour aujourd'hui.
Alors c'est la raison pour laquelle, j'ai fait des choix depuis trois ans : tout pour l'emploi, tout pour la jeunesse, tout pour l'avenir. Lorsque je suis arrivé aux responsabilités du pays, mais est-ce bien finalement le moment de le dire, la zone euro était dans une situation de doutes, on se demandait même si la monnaie unique allait encore passer l'été, la croissance était nulle, les déficits étaient nombreux, l'Etat était en faillite, ce n'était pas moi qui l'avais dit. Alors ma responsabilité n'était pas de déplorer, ce n'était pas de marteler la dégradation de la situation, c'était d'agir et de changer.
C'est ce que j'ai fait avec Jean-Marc AYRAULT, puis avec Manuel VALLS. J'ai fait des choix, conformes à l'intérêt national, car il n'y a que l'intérêt national qui compte. J'ai fait des choix conformes aussi à ce que j'avais dit durant la campagne, et cohérents également par rapport aux objectifs que j'avais fixés non pas pour plaire, mais pour faire : redressement des comptes publics, non pas par goût de la comptabilité, mais parce que c'est le principe même de la souveraineté. Vous êtes d'ailleurs ici des élus, vous mettez en ordre vos comptes publics, quelquefois même, parce que, on vous crée des situations plus difficiles.
Aujourd'hui, la France a atteint ses objectifs, pas encore, les 3 %. Nous les aurons, par rapport à la richesse nationale, d'ici 2017 et peut-être même avant, au rythme qui est le nôtre. Nous laisserons donc un pays qui n'aura plus à s'endetter encore au-delà de ses capacités. Il fallait faire des économies, et sans austérité, et je rappelle qu'en France, à la différence de bien des pays, il n'y a eu ni prestations sociales supprimées, ni réductions de salaires, ni baisses des pensions, ni fonctionnaires licenciés, ni couverture maladie réduite. Au contraire, nous avons préservé le modèle social, et nous avons bien fait.
Pour la première fois depuis au moins cinq ans, les prélèvements se sont stabilisés l'an dernier. Je mesure l'effort qui a été demandé depuis deux ans, et qui s'ajoutait aux prélèvements supplémentaires de nos prédécesseurs, trente milliards. Moi, j'ai considéré que le temps d'une forme de redistribution était venu : l'impôt sur le revenu va donc baisser pour neuf millions de ménages cette année. Je ferai en sorte qu'ils en soient bien conscient au mois d'août, lorsqu'ils recevront leurs feuilles d'impôts.
J'ai également fait le choix de la compétitivité parce que c'est une évidence, il n'y a pas de grande Nation sans production, sans innovation, sans performances. Nous avons créé de nouveaux instruments comme la Banque Publique d'Investissement, qui peut d'ailleurs être mobilisée pour une grande entreprise sur trois, une entreprise intermédiaire sur trois. Nous avons mobilisé l'Etat actionnaire, et même avec intelligence, en donnant des droits de vote double. Cela nous a permis de valoriser notre patrimoine, j'en remercie Emmanuel MACRON, et aussi de garder le contrôle d'un certain nombre d'entreprises pour que les activités puissent rester en France, autant que nécessaire.
Nous avons également réindustrialisé la France, présenté des plans industriels. Il fallait aussi reconstituer les marges des entreprises, c'était nécessaire. Ce n'était pas non plus chose facile, au moment où on demandait des sacrifices aux Français, de dire qu'il fallait que les marges des entreprises augmentent. Mais pourquoi augmenter les marges des entreprises ? Pour l'investissement, pour l'embauche, pour la compétitivité. Et nous allons bientôt faire voter définitivement la loi dite Macron, pour simplifier les règles d'installation des usines, pour améliorer les financements des PME, pour créer une nouvelle incitation fiscale à l'investissement, pour moderniser des secteurs, comme le transport en autocar, les professions réglementées. Nous allons organiser le travail dominical pour créer plus d'emplois, mais aussi pour offrir de meilleures compensations aux salariés concernés.
Nous allons également réformer la justice prudhommale qui est trop lente, aussi bien d'ailleurs pour les entreprises que pour les salariés. Voilà ce que nous devons faire pour la croissance, et nous n'avons pas terminé. A l'évidence, l'enjeu est la baisse du chômage. Alors il a fallu agir avec les emplois d'avenir, avec la garantie jeune, avec les contrats de génération, avec la formation des demandeurs d'emploi, mais cela ne suffit pas, s'il n'y a pas, dans l'économie, une reprise de l'investissement, et donc des embauches. Voilà l'origine du pacte de responsabilité. Il n'est pas né simplement d'une lubie, d'une intuition, d'une formule.
Il s'agissait justement de permettre que les entreprises puissent avoir moins de charges, moins de cotisations, moins de prélèvements, pour investir J'ai alors demandé qu'il y ait des négociations, des discussions qui s'engagent, elles ont tardé, certaines se sont faites. Nous ferons l'évaluation du pacte de responsabilité, puisque ce sont quand même quarante milliards qui sont prévus et certains ont déjà été transférés. Il est donc légitime de faire cette évaluation, non pas pour faire un contrôle tatillon, pour aller voir entreprise par entreprise, ce qui s'est passé et qui n'a pas de sens , mais tout simplement pour faire une estimation de ce qui a pu être efficace, ce qui a pu être négocié ou ce qui ne l'a pas été.
Parce que le pacte de responsabilité est un pacte économique mais c'est aussi un pacte patriotique : il n'y a pas de plus grand défi que la diminution du chômage. Enfin j'ai fait le choix aussi de l'investissement dans l'Education. L'école de la République est une cause nationale, ce n'est pas une variable d'ajustement avec moins de postes, moins de jours de classe, et moins de formations des maîtres. La première de nos matières premières, c'est la matière grise, voilà pourquoi nous avons recruté plus de professeurs, 35.000 déjà, dont beaucoup sont en formation. 60.000 seront recrutés d'ici 2017, ouvert donc les écoles supérieures du professorat, car il faut former les enseignants, c'est un métier.
Nous avons donné la priorité aux primaires, et c'est une nécessité, parce que c'est au début que ça se joue. Nous avons renforcé l'éducation prioritaire, pour lutter contre les inégalités, pour donner plus à ceux qui en ont le plus besoin, sans en enlever à d'autres, puisque nous avons créé davantage de postes. Nous avons repensés les rythmes scolaires. On en a entendu parler, et parfois, parce que ça représentait une charge pour les collectivités, et vous êtes, ici, bien placés pour le savoir. Mais moi, je me demande qui va remettre en cause demain les rythmes scolaires ? Qui va aller remettre sur la table la discussion pour les activités périscolaires ? Je veux saluer tous ceux qui y ont contribué parce que c'est une chance de plus pour les enfants.
Nous avons fait également en sorte qu'il y ait un enseignement moral et civique dès la prochaine rentrée, qui puisse se faire du primaire jusqu'à la terminale. Le budget de l'Education est redevenu le premier de la Nation. Nous allons également passer à l'école du numérique et je sais que beaucoup de collectivités ici ont déjà anticipé, ça sera généralisé en 2017. Et puis, soutien à l'université, ainsi qu'à l'enseignement professionnel et technologique. Il y a aussi la réforme du collège.
L'école a besoin d'une politique, pas d'une polémique, et c'est pourquoi je n'oppose pas à ceux qui caricaturent cette réforme la controverse. Mais la réalité, quelle est la réalité ? Elle n'est pas plaisante à constater : depuis la décennie 2000, les élèves qui ne maîtrisent pas la lecture sont passés de 15 à 20 %. En mathématiques, de 17 à 22 %, en histoire-géographie, de 15 à 21 %. Il faudrait faire les fiers ? Il faudrait tourner la tête, il faudrait dire que tout va bien ? Eh bien, non. Moi, je refuse l'immobilisme, et je refuse le fatalisme. Parce qu'il y va de ce qu'il y a de plus cher pour nous, l'avenir de nos enfants, c'est-à-dire l'avenir de la France.
Voilà pourquoi nous réformons le collège. Mais nous le faisons dans le respect des professeurs qui instruisent les élèves, qui font un travail admirable, difficile, et quelquefois s'interrogent, et ils ont raison, sur leur profession, et sur les moyens qui leur sont donnés pour accomplir leur mission. Alors que dit cette réforme ? Meilleur accompagnement des élèves, notamment pour ceux qui sont les plus en difficulté, apprentissage plus précoce des langues vivantes, dès le CP, pour la première langue et en 5ème pour la deuxième langue vivante. L'enseignement interdisciplinaire pour pouvoir travailler ensemble, avec plusieurs professeurs, pour donner à des élèves, là encore, plus de chances, avec également une autonomie des établissements. Il ne s'agit pas d'une autonomie totale mais de 20 % simplement, pour permettre justement que les chefs d'établissement et les enseignants puissent aller ensemble vers ce qui est le plus spécifique dans la vie de l'établissement, compte tenu des caractéristiques des élèves.
Alors, comme dans toute réforme, il y a ceux qui la caricaturent et la vilipendent. On aurait fait une autre réforme que cela aurait été la même chose £ j'en entendais un qui mettait en cause le fait que nous fassions apprendre la deuxième langue vivante dès la 5ème, et proposait de la supprimer purement et simplement. Pour quoi faire ? Pour que des parents mettent leurs enfants dans l'école privée ? Est-ce cela le but d'une réforme du collège ? Nous, nous voulons qu'il puisse y avoir dans l'école publique, puisque c'est notre responsabilité, dans les collèges qui sont également sous convention, plus de chances pour tous, et l'excellence pour chacun. Cela n'arrivera pas en baissant le niveau, mais cela arrivera en élevant le niveau. C'est cela la justice et l'égalité.
Alors nous continuerons, nous tiendrons compte des observations, concertation sera engagée sur la mise en uvre, mais la réforme sera poursuivie et mise en uvre. Je veux aussi que nous puissions donner des garanties pour qu'on comprenne bien le sens de ce que nous voulons. Ecole, excellence, égalité, en République : ces trois mots ne font qu'un. Ces choix que je viens, devant vous de rappeler, auraient été faits bien avant nous et par d'autres s'ils avaient été faciles. Ils ne sont pas allés sans débats, et heureusement, dans le pays d'abord, où les empressés d'aujourd'hui sont souvent les frileux d'hier.
Même dans la majorité, je les entends, ceux qui auraient voulu distribuer ce qu'on n'avait déjà pas. Mais dans cette période, où nos voisins adoptaient l'austérité, partout, et où la fuite en avant aurait été une marche arrière, j'ai fait prévaloir l'intérêt général, qui est l'intérêt des générations qui viendront après nous. Alors les critiques, les attaques Elles sont légitimes en démocratie, et j'ai le cuir solide, et la peau tannée. Mais en même temps, ce qui compte, c'est la volonté d'agir et d'être fidèle aux engagements.
Je me souviens des paroles que j'avais prononcées au Bourget, c'était en janvier 2012.
Je vais me citer, pardonnez-moi de cette prétention, mais comme souvent, on me ramène au discours du Bourget. Je ne peux m'empêcher d'aller aux meilleures sources, c'est-à-dire les miennes : « après les réformes de structure, après les réformes d'urgence, disais-je à cette époque, nous pourrons redistribuer ce que nous aurons créé, ce que nous aurons fabriqué, ce que nous aurons engagé, ce que notre pays aura pu, par son redressement, favoriser, voilà les temps qui doivent être proposés, d'abord le redressement, ensuite la redistribution ». Mon projet, ma feuille de route figurent en toutes lettres, et je demande à chacun de se rapporter au discours du Bourget ou, pour ceux qui le préfèreraient, au discours de Carcassonne.
Les Français attendent des résultats, certains sont déjà là, d'autres vont venir. Hier, avec la crise, on craignait le pire : qu'est-ce qui va se passer ? Aujourd'hui, on m'interroge : est-ce que ça va aller mieux ? Je note donc la différence, mais je ne peux néanmoins m'en tenir là. C'est vrai que les perspectives de croissance sont revues à la hausse, c'est exact que le pouvoir d'achat s'est redressé, mais avec une inflation aussi faible, c'est imperceptible et je le comprends bien. C'est également exact que l'investissement des entreprises industrielles est reparti et depuis l'année dernière déjà.
Mais tant que le chômage n'aura pas été réduit, le doute subsistera, et je connais la précarité, les fins de mois difficiles de beaucoup de nos concitoyens qui finalement n'attendent pas des chiffres, mais que leur vie puisse effectivement changer. Je sais la désespérance qui peut s'emparer de certains esprits £ si on ne croit plus à rien, alors, on peut croire au pire. Si finalement rien ne vaut, alors pourquoi ne pas prendre une option qui nous rappelle le passé. Je sais bien ce que peut être à un moment l'attitude de tout rejeter, de tout écarter, de tout balancer, parce qu'on n'en peut plus.
Alors mon obligation, parce que je suis un républicain attaché à l'idée de mon pays, c'est qu'il n'y a pas de temps à perdre, et que l'erreur ce serait simplement d'attendre que l'emploi reparte mécaniquement. Soutenir, stimuler, réformer, c'est la mission que j'ai confiée au gouvernement de Manuel VALLS. Pour les entreprises et pour l'emploi, des mesures fiscales sur l'investissement ont été une fois encore présentées et des baisses de cotisations vont se poursuivre £ les freins à l'embauche dans les TPE vont être levés, l'apprentissage sera facilité puisque l'employeur qui recrutera un jeune de moins de 18 ans n'aura plus à payer ni charges ni salaires, tout lui sera remboursé.
Je dis donc aux maîtres d'apprentissage : allez-y, prenez des jeunes ! Souvent, on se plaint qu'ils ne sont pas bien préparés, qu'ils ne correspondent pas aux métiers qui sont ceux d'aujourd'hui et de demain. Alors, donnez-leur leurs chances à ces jeunes ! L'apprentissage, ce n'est d'ailleurs pas simplement dans les centres de formation des apprentis qui relèvent des régions mais c'est aussi dans les établissements publics. J'ai d'ailleurs demandé aussi à l'Etat d'accueillir des apprentis, il n'y en avait que 700 dans tous les effectifs de l'Etat. Je demande aussi aux collectivités locales de faire cet effort pour que les jeunes et notamment ceux qui sont les moins qualifiés, puissent avoir cette chance de plus.
Je sais bien aussi que pour les collectivités locales, à qui il leur a été demandé, parce qu'elles devaient aussi participer à l'effort de maîtrise de la dépense. Je sais que nous devons préserver à tout prix l'investissement public. Des dispositifs complémentaires et ciblés seront donc prévus dans la prochaine Loi de finances.
Depuis trois ans, si j'ai voulu aussi que nous fassions ces choix pour la compétitivité, pour l'emploi, pour l'investissement. Que nous fassions aussi un travail de justice, justice quand 300.000 salariés ayant commencé à travailler tôt ont pu prendre leur retraite à 60 ans, c'était la justice, c'était attendu. Justice quand est reconnue la pénibilité pour tous les travailleurs qui ont exercé des métiers rudes et pénibles et qui vont pouvoir partir à la retraite plus tôt qu'il n'était prévu.
Justice quand la complémentaire santé sera généralisée à tous les salariés, et que le tiers-payant sera élargi progressivement à tous. Justice quand un étudiant sur trois reçoit désormais une bourse. Justice quand on a fait pour la scolarisation des moins de 3 ans l'ouverture de près de 1.000 classes. Justice quand les revenus du capital sont maintenant traités comme les revenus du travail. Justice quand le 1er janvier prochain, il y aura la prime d'activité qui concernera quatre millions de salariés modestes, ceux qui n'arrivent pas forcément à trouver du travail de manière durable, ceux qui sont les précaires, pour les encourager justement à persévérer et à accomplir du travail.
Voilà, mesdames et messieurs ce que je devais faire pour faire réussir la France, pour nous permettre de nous dépasser. Je sais aussi combien nous avons besoin de nouveaux horizons face au repli, qui peut parfois nous saisir, de nouvelles perspectives face aux peurs, de nouvelles solidarités face aux égoïsmes. Nous avons besoin de projets pour avancer, nous ne pouvons jamais considérer que le travail est accompli, qu'on en a fait l'essentiel, que maintenant, il n'y aurait qu'à attendre.
Dans les deux ans qui viennent, nous ouvrirons donc de nouvelles réformes, la première, c'est de donner un capital à tous les travailleurs. Dans le monde qui est le nôtre, il sera de moins en moins fréquent d'effectuer toute sa vie professionnelle dans une même entreprise, en faisant le même métier, dans le même secteur d'activité, c'est pourquoi nous devons bâtir des droits qui accompagneront les personnes tout au long de leur itinéraire professionnel.
Nous avons déjà créé le compte individuel de formation, le compte pénibilité, nous allons aller plus loin : ça sera le compte personnel d'activité, pour qu'il puisse y avoir une deuxième chance pour les jeunes, qui d'ailleurs sortis du système scolaire auront des droits supplémentaires. Pour que ceux qui sont victimes de licenciements puissent avoir un accompagnement qui leur sera apporté, pour que ceux qui sont salariés puissent se former autant qu'il sera nécessaire, pour qu'ils puissent aussi organiser leur vie.
Pour parvenir à ce compte individuel, ce compte nouveau pour les droits des salariés, nous aurons besoin de tous : de l'Etat, des partenaires sociaux, des régions. Le financement sera assuré par des fonds existants, et notamment ceux de la formation professionnelle. Ce progrès, car cela en sera un, sera discuté au Parlement dans les prochains jours dans le cadre du projet de loi sur le dialogue social du ministre REBSAMEN.
Réformer, c'est aussi simplifier la vie des français. Là encore, leçon de l'expérience, les décisions prennent du temps à être élaborées et votées, ? trop de temps ? je veux donc raccourcir les délais. Ce n'est pas facile de faciliter les procédures, de mettre en uvre plus vite les réformes, mais la révision des procédures parlementaires me paraît nécessaire et c'est la responsabilité de l'Assemblée nationale et du Sénat.
Mais quand même, mettre au mieux six mois pour voter une loi, parfois un an, quand il y a autant d'attente entre le moment où le texte est annoncé et le moment où il va être appliqué et je parle de toutes les législatures, pas simplement de celles que nous connaissons. Il y a tellement de délais que les français s'y perdent, ils n'y croient plus. C'est donc vraiment un devoir national que de changer nos règles, non pas pour légiférer dans l'urgence, non pas pour prendre par ordonnance je ne sais quelle décision, non pas pour faire comme dans le passé des décrets et j'imagine que déjà, c'était venu à l'esprit de certains de mes prédécesseurs, encore qu'on était sous d'autres républiques.
Mais parce que tout simplement nous devons aller vite, comme la société va vite, parce que tout a changé aujourd'hui : le numérique, la mondialisation, la capacité d'une entreprise à s'installer là ou ailleurs, d'un agriculteur à pouvoir tout de suite vendre ses produits. Nous, dans notre organisation, c'est ainsi. Vous le vivez aussi dans vos conseils municipaux, il nous faut du temps quand on ne nous demande pas des études, ah, les études ! Bon, il faudrait faire des études sur les études et parfois, quand on change le projet, il faut refaire des études et quand on s'est trompé, refaire les études de ceux qui s'étaient trompés.
Donc il y a là un moment, où sans tomber dans je ne sais quelle démagogie ? car nous avons besoin aussi d'être éclairé dans nos décisions ? nous devons changer nos règles, et ça sera pour moi le choc de simplification que je continuerai à porter dans les deux prochaines années. Je vais donner quelques exemples : la fiche de paie sera rendue plus lisible pour les salariés parce que ce n'est pas facile de comprendre : on voit ce qu'il y a en bas de page, on ne comprend pas tout ce qu'on nous a prélevés, mais cela sera aussi rendu moins coûteux pour les entreprises parce qu'il faut aussi que les entreprises sachent exactement ce que l'Etat leur a versé en termes d'exonérations de cotisations, parce que beaucoup n'y croient pas.
Quand on dit par exemple que les salariés payés au Smic sont maintenant sans cotisations sociales pour l'essentiel, ce n'est pas sur la fiche de paie, cela vient après, c'est un remboursement qui, quelquefois, prend des mois, ce qui fait que l'employeur considère qu'il a toujours un salarié qui lui coûte payé au Smic 1,5 ? parfois davantage ? fois ce qu'est le salaire qui a été versé. Donc nous avons absolument besoin de simplifier les trentaines de lignes de la feuille de paie. Déjà, si elle en faisait la moitié, cela serait pas mal.
L'impôt sur le revenu lui aussi, même s'il doit être allégé, doit être rendu plus simple dans son prélèvement, c'est une condition de la justice et le paiement dématérialisé de l'impôt qui se déploie en ce moment, préfigurera ce que pourra être fait à la source même du revenu, ce qui sera une modernisation supplémentaire. Pour les entreprises, et notamment pour les PME ? je sais tout le débat autour de la pénibilité ? j'ai dit combien c'était un progrès social. La pénibilité, je sais que c'est pour beaucoup d'entreprises un risque de complexité, alors nous allons dans les prochains jours faire des propositions pour que cela soit clarifié, et là encore, simplifié.
De la même manière, pour les seuils fiscaux qui seront lissés, et les règles protégeant le patrimoine des entrepreneurs ? je sais que Carole DELGA s'y intéresse directement ? seront renforcées, parce qu'il n'est pas normal qu'un entrepreneur puisse perdre l'essentiel de ce qu'il a à cause d'une aventure d'entreprise. Il y aura cette réforme aussi de la justice du 21ème siècle, la justice du quotidien, parce que c'est compliqué la justice. Je ne parle pas des décisions qui sont rendues, parce que cela, c'est l'indépendance de la justice qui est très importante et que j'ai veillé à garantir pour que personne ne pense qu'il est jugé sur ce qu'il est, mais simplement sur ce qu'il aurait pu faire ou ce qu'il a fait. C'est cela la justice.
Elle ne rend pas des décisions par rapport à une situation mais par rapport au droit. Parfois, nous pouvons être surpris par telle ou telle décision, c'est la justice, et le rôle du Président de la République, c'est de respecter les décisions de justice. Mais faut-il encore que là aussi, la justice soit plus rapide, et notamment la justice sociale. Je parlais des Prud'hommes, mais je parle aussi des tribunaux pour la Sécurité sociale, pour les droits des familles, pour les séparations, et donc cela sera le projet de la justice du 21ème siècle.
Enfin, je souhaite encourager l'engagement républicain. La République, ce sont d'abord des institutions. La République, c'est ce qui nous permet d'avoir des règles en commun et la République, c'est aussi un système de valeurs dont on ne peut pas détacher l'une par rapport à l'autre et prendre ce qui nous intéresse dans la République. La République, comme avait dit un président du Conseil célèbre, pour la Révolution française : c'est un bloc, on ne la prend pas en détail, on ne prend pas les pages qui nous intéressent pour en jeter d'autres, la République, c'est ce qui nous rassemble, la République, c'est aussi un projet qui est fondé sur le vivre ensemble. Je dis bien « ensemble », pas en sous-ensemble où nous serions les uns à côté des autres.
Non, nous devons d'ailleurs faire en sorte que nous puissions être dans une seule communauté, la seule communauté qui vaille, qui est la communauté nationale. Alors je souhaite qu'il puisse y avoir une participation de chacun dans la démocratie politique, nous y avons travaillé, avec le non-cumul des mandats, avec la transparence, mais dans la démocratie sociale également avec maintenant la représentation des salariés dans les conseils d'administration des grandes entreprises. Mais il y a aussi la démocratie participative, j'y suis sensible, je sais ce qui s'est produit à cause d'un défaut de consultation, d'une trop longue consultation. Quand elle met dix ans, comment croire à un projet et à un équipement quand c'est autant de temps ? Cela crée finalement une mobilisation qui n'aurait pas lieu d'être si la participation avait été bien organisée.
Il y a aussi un engagement personnel et c'est la raison pour laquelle j'ai voulu rendre universel le service civique, et cela sera notre tâche pour les deux ans qui viennent. C'est une idée généreuse, ambitieuse que de permettre à des jeunes de 16 à 25 ans de mener sur six mois, douze mois, des missions dans plein de domaines. Je sais que le Conseil départemental travaille avec le service civique, le domaine de la solidarité, le domaine de l'environnement, le domaine de l'éducation, de la santé, de la culture, du sport, de l'humanitaire.
J'ai moi-même vu des jeunes du service civique trop peu nombreux, 30 à 35.000 aujourd'hui, il y en aura 70.000 d'ici la fin de l'année et 150.000 à la fin de l'année 2016. Ce qu'ils veulent, c'est être volontaires, c'est-à-dire décider eux-mêmes de s'engager, mais faut-il encore qu'on leur propose une mission. A ce titre, tout jeune qui fera la demande d'un service civique à partir du mois de juin aura une mission. On ne pourra pas lui dire : « plus tard » ou « non » mais « tout de suite ». Il aura une mission, à condition aussi que les ministères, que les collectivités, que les associations ? mais je sais qu'elles y sont prêtes ? puissent offrir tellement de conditions, tellement de situations où on peut donner le meilleur de soi-même au service des autres.
Faudra-t-il aussi que nous puissions donner des formations, des expériences à ces jeunes, et qu'ils viennent de tous les milieux, de tous les quartiers, de tous les espaces ruraux. Nous avons supprimé le service militaire il y a vingt ans, certains veulent le rétablir Non ! Pour les missions que nous demandons à nos militaires, dans des situations extrêmement difficiles, nous devons écarter ce type de proposition.
En revanche, il y a une forme de service national dans le service civique, faire en sorte que nous puissions dans le même élan, avoir la même fierté, une forme de respect par ce que nous avons fait pour les jeunes et par les jeunes, et que les jeunes puissent démontrer au reste de la société qu'ils sont plein de talents, plein de vitalité, plein de volonté. Je n'oublie pas ce qui fait aussi notre ciment, la laïcité, elle ne va pas faire l'objet de surenchère, et encore moins de régression, ses règles, on n'a pas besoin de les redéfinir, elles sont inscrites dans nos lois. Elles doivent s'appliquer et non se discuter.
La laïcité n'est pas l'ennemie de la foi, elle en pose le cadre et les limites, et elle permet à toutes les religions de coexister pacifiquement, et à chacun d'appartenir ? je le disais ? à la seule communauté qui vaille, la communauté nationale. La République fait passer ce qui réunit avant ce qui oppose. C'est ça la République. C'est de rassembler, c'est de réunir. La République, elle refuse l'enfermement sur les origines ou sur les couleurs de peau, la République, c'est une promesse d'égalité.
C'est vrai que l'intégration connaît des ratés, ce n'est pas la faute de la République, c'est faute de République. Ces ratés qui se nomment : régression sociale, échec scolaire, discrimination, quartiers fermés sur eux-mêmes, abandon d'un certain nombre d'espaces ruraux, appellent non pas une condamnation des politiques éducatives sociales, territoriales, mais au contraire leur renforcement. C'est bien ce que nous ferons dans les deux prochaines années, parce que nous avons le devoir de faire la France et de faire France, c'est-à-dire d'être ensemble.
Faire France, c'est aussi avoir une mémoire commune. La mémoire d'une Nation, d'un pays, c'est comme une mémoire individuelle, tantôt, elle est oublieuse, tantôt, elle est généreuse, tantôt, elle est ingrate, tantôt, elle est reconnaissante. C'est pourquoi une Nation a besoin de l'histoire, ce sont les historiens qui nous montrent comment notre pays s'est construit, c'est pourquoi c'est si important dans l'Education de donner toute sa place à l'histoire avec ses lumières. Celles qui font que nous sommes tellement fiers d'être français, avec ses ombres, qui nous permettent aussi de partager un certain nombre de mémoires blessées. Je dis cela en pays cathare. On sait ce qu'est l'histoire et ce qu'elle nous donne encore comme conscience. Avec son unité, l'unité nationale et la diversité, qui n'est pas contradictoire.
Voilà ce que nous enseignent en une même connaissance et une conscience commune les historiens. Dans quelques jours, au Panthéon, je rendrai hommage à quatre grandes figures de notre histoire : Germaine TILLION, Geneviève ANTHONIOZ-De GAULLE, Pierre BROSSOLETTE et Jean ZAY. Chacun incarne une des valeurs de la République, l'égalité, liberté, la fraternité et la laïcité. Chacun a fait son devoir, sans penser d'ailleurs qu'il aurait une reconnaissance mais à chaque fois, avec la volonté d'être au service des autres dans la résistance. Au-delà de la résistance, je pense à ces deux femmes, Germaine TILLION et Geneviève ANTHONIOZ-De GAULLE, qui se sont données au service des plus pauvres, au service des déshérités, au service de la solidarité parce qu'elles étaient revenues des camps, et qu'elles avaient connu l'enfer. Elles auraient pu considérer que l'espèce humaine, l'humanité n'avait plus de place tant elles avaient vu d'horreurs, et au contraire, elles sont allées vers les autres, pour leur permettre d'être fiers d'être libres, et de pouvoir s'émanciper par rapport à leur situation.
Voilà, mesdames et messieurs. Il y a des moments dans la vie d'un grand pays comme le nôtre, la France. Ici, en terre audoise, nous devons redéfinir le contrat collectif, ce qui suppose des efforts, toujours des efforts, mais ce qui exige aussi des répartitions parce que lorsqu'on a travaillé, lorsqu'on a uvré, lorsqu'on a créé, lorsqu'on a produit de la richesse, nous pouvons à ce moment-là, sans signer des traites sur les générations futures, permettre que chacun soit associé à l'action collective et à la réussite de tous.
Nous le savons, la résignation, l'incantation sont les deux plaies d'une démocratie, mais la démocratie a aussi besoin de ses plaies si elle veut avoir ses gloires, ses fiertés, ses honneurs, il faut tout prendre. Il faut accepter, il n'y a jamais qu'une seule politique possible, jamais, et heureusement, dans une démocratie, il y a toujours le choix, quelquefois même, il y a l'embarras du choix.
Mais enfin, il faut se débarrasser de l'embarras, et prendre le choix. Il y a toujours d'abord le risque de la destruction, de la fermeture au dehors et de la fracture au-dedans. Il y a toujours l'option de la répétition, au moins on sait ce que l'on a ou ce que l'on a eu avec moins d'attention à chacun, plus de tensions pour tous. Puis il y a le chemin que je propose qui est la réussite partagée, celle qui élève le pays, sans abandonner les plus fragiles.
Le chemin aussi qui prépare les générations futures sans sacrifier celles du présent, et puis, il y a le chemin qui permet de vivre ensemble sans avoir peur de l'autre. Mesdames et messieurs, c'est quand la France sait où elle va que cette grande Nation que nous aimons tous, peut réaliser le meilleur et conjurer le pire. Elle peut réussir en restant fidèle à elle-même. C'est-à-dire un pays attaché à ce qu'il est, à la République et qui n'a peur de rien, comme vous, dans l'Aude, pays de résistance, pays de confiance, pays de fierté, pays de travail, et pays de la réussite. Merci.