29 novembre 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur Léopold Sédar Senghor et la Francophonie, à Dakar le 29 novembre 2014

Monsieur le Président de l'Assemblée nationale,
J'ai un grand souvenir de cette réception que vous m'aviez offerte à l'occasion de ma venue, ici à Dakar. J'avais pu m'exprimer, c'était un privilège, devant l'assemblée que vous présidiez et que vous présidez encore.
Monsieur le Maire,
Merci pour votre accueil, ici dans votre commune. Une commune qui est honorée par la présence dans ce cimetière de Léopold Sédar SENGHOR. Je voulais aussi devant sa famille, ses amis, m'incliner devant la dépouille, ici, de Léopold Sédar SENGHOR, parce qu'il a servi la France. Il est parti très tôt, de son pays natal, le Sénégal, pour suivre des études. Il avait été repéré par des instituteurs et comme il était l'un des plus brillants de sa génération, il fut envoyé dans un lycée parisien où il put préparer ensuite l'agrégation de grammaire. Il fréquenta à ce moment-là Georges POMPIDOU qui, à chaque fois qu'il pouvait le faire, rappelait les liens d'amitié qu'il avait tissés avec Léopold Sédar SENGHOR.
Et avant de rappeler POMPIDOU et cette période, je veux me souvenir de ce qu'a fait SENGHOR pour la République française. Parce qu'il s'était engagé lors de la Seconde guerre mondiale, il fut prisonnier, il est revenu. Il a été élu député à la Libération et il est resté en France jusqu'à l'indépendance de son pays, comme parlementaire. Il a été même deux fois ministre. Ministre sous la IVème République et ministre sous la Vème République pour préparer justement l'indépendance. Il aura donc d'abord servi la France, c'était une obligation qui lui était faite. Mais en même temps, c'était aussi une volonté.
Ensuite, il a servi son pays qu'il a conduit vers l'indépendance et lui a pu poser les institutions du Sénégal qui vivent encore et il fait en sorte de faire du Sénégal un pays moderne, ce qu'il voulait faire.
Il voulait que le Sénégal soit un exemple pour toute l'Afrique. Un exemple de développement économique, mais aussi de promotion culturelle, d'élévation par l'école. Je crois qu'il voulait rendre à l'école ce qu'elle lui avait donné et il a aussi voulu que l'un de ses plus proches lui succède, ce fut Abdou DIOUF. Ensuite, il s'en est allé comme peu de chefs d'Etat savent le faire. Et il est revenu en France parce qu'il y avait été reçu à l'Académie Française. Vous l'avez rappelé. Parce que le plus grand service qu'il voulait rendre de toute sa vie, c'était à la langue française.
J'ai rappelé qu'il avait été agrégé de grammaire et qu'il connaissait mieux notre langue que beaucoup de ceux qui prétendent bien la connaitre et bien la parler. Il avait été reconnu comme un écrivain de très grande qualité au point donc d'être reçu sous la coupole. Ce fut un honneur pour le Sénégal, un honneur aussi pour les populations noires, parce qu'il voulait exprimer comme Aimé CESAIRE, cette volonté qu'il y ait une promotion, une égalité et il y avait toujours le souci pour lui de montrer l'exemple, ce qu'il a fait, montrer l'exemple.
Si nous sommes réunis aujourd'hui à Dakar dans ce lieu exceptionnel, ce centre des Congrès, c'est parce que SENGHOR a voulu faire la francophonie. C'est lui qui a décidé de cette institution et de cette initiative.
La France ne pouvait pas le faire. Si la France l'avait fait, nous aurions dit que la France voulait par la francophonie exercer une influence, continue à peser sur le destin des peuples. Seuls les Africains, seules les personnalités qui avaient un lien avec la langue française pouvaient décider d'une institution comme la francophonie.
C'est pourquoi en ce jour, si je viens devant la tombe du Président SENGHOR, c'est aussi pour rendre hommage à ce qu'il a fait pour la francophonie, pour le rayonnement de la culture et pour la promotion des droits.
J'ai fait un discours ce matin devant les chefs d'Etat de la francophonie, pour dire que la francophonie était une communauté de valeur, une communauté de principe, plus qu'une langue. Elle est bien plus qu'une langue la francophonie, c'est une exigence.
Vous avez voulu rappeler, Monsieur le Président, que SENGHOR était socialiste. Il était socialiste parce que pour lui, c'était la façon d'exprimer sa volonté d'émancipation. Ce n'est pas un socialisme de gestion qu'il voulait faire, ce n'est pas un socialisme de doctrine, c'était un socialisme d'émancipation. Pour lui, c'était l'occasion de dire qu'il fallait que l'individu, l'être humain puisse avoir son plein accomplissement. Je crois que c'est ce qu'il a fait.
Son plus grand malheur a été de perdre son fils et pour lui, il avait considéré à ce moment-là que tous les Sénégalais étaient ses enfants. Et aujourd'hui, nous pouvons dire que tous ses enfants parlent le français.
Merci.