24 janvier 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les convergences de vue entre la France et le Vatican sur les grands sujets internationaux, au Vatican le 24 janvier 2014.

Mesdames, Messieurs,
Je tenais à venir aujourd'hui au Vatican pour exprimer au Pape François le respect du peuple français pour son message de paix, de solidarité et de justice.
Je voulais aussi saluer la simplicité rayonnante qui marque les premiers mois de son pontificat et qui a impressionné tous nos compatriotes, au-delà même de leurs convictions.
Ma visite est également l'occasion de souligner la convergence entre le Vatican et la France sur les grands sujets internationaux.
Le premier, que nous avons abordé ce matin avec le Pape François, c'est l'Afrique, notamment la situation en Centrafrique, où les risques d'un conflit interreligieux sont réunis et où nous devons tout faire, chacun à notre place, pour appeler au dialogue et à la réconciliation.
A cet égard, hier, je recevais, à Paris, l'archevêque de Bangui et l'imam qui préside la communauté musulmane de Centrafrique. Ensemble, ils ont lancé un appel au dialogue, que le Pape ne peut que soutenir et il me l'a confirmé.
J'ai aussi voulu que nous parlions du père Georges qui a été libéré. Il était retenu au Nigeria et ce fût, pour le Pape François et pour moi-même, un moment de joie, que de le retrouver ici.
Nous avons parlé de l'Afrique aussi, parce que c'est un continent plein de promesses mais qui connaît aussi la pauvreté et des risques pour son environnement. Nous travaillerons, dans nos responsabilités respectives, pour que l'Afrique soit au cur des discussions qui peuvent avoir lieu au plus haut niveau.
Le second sujet que nous avons évoqué, c'est la situation au Proche-Orient, et notamment en Syrie.
Je rappelle que le Saint-Siège est partie prenante de la Conférence de Genève. J'ai exprimé le souhait que le Vatican puisse accueillir la coalition démocratique syrienne pour bien faire comprendre que la paix doit être recherchée à travers une solution politique, qui permette le pluralisme. La Conférence de Genève doit être tournée vers la transition. C'est ce qui nous a permis de nous retrouver, le Saint-Père et moi-même. Nous devons tout faire pour arrêter les combats et permettre de déployer l'aide humanitaire.
Nous avons toujours rappelé au Proche-Orient notre attachement à une solution négociée entre Israël et les Palestiniens. Le Pape aura l'occasion d'exprimer sa position et son message de paix lors d'une visite qu'il fera dans quelques semaines sur place.
Pour ma part, j'ai rappelé l'attachement de la France pour la protection des lieux saints et je l'avais fait moi-même lors de ma visite à Jérusalem devant les autorités religieuses. Le libre accès aux lieux saints doit être garanti dans le cadre de la négociation qui est en cours.
Avec le Pape François, nous avons aussi voulu marquer notre inquiétude par rapport à la situation des chrétiens d'Orient. J'ai rappelé que la France était mobilisée pour que les chrétiens restent là où ils ont toujours vécu depuis des siècles et ne prennent pas le chemin de l'exil à cause des conflits qui sont en cours. Je pense notamment en Syrie, mais cela a été vrai en Irak et cela peut l'être au Liban. Les chrétiens d'Orient, et j'aurais aussi l'occasion de le dire lors de mon prochain déplacement en Turquie, doivent être partout soutenus et protégés.
Nous avons ensuite abordé une grande question qui est celle de la Conférence sur le climat, ou plus exactement la question du réchauffement climatique. La France tiendra donc à ce que la Conférence sur le climat puisse être un succès. Il ne s'agit pas simplement de l'accueillir, il faut qu'à son issue puisse être porté un accord global, universel permettant d'atteindre les objectifs. Ce n'est pas une simple affaire entre Etats.
J'ai souhaité que les autorités religieuses, et donc le Pape, puisse lui-même porter ce message. Je n'ai pas eu besoin d'insister car le Pape François est en train d'écrire un texte et de faire en sorte que la nature puisse être considérée comme le bien de toute l'humanité et avec toutes les précautions qui doivent entourer le comportement humain. Il a lui-même utilisé une formule, je la lui laisse, qui est que : « Dieu pardonne toujours, les hommes parfois et la nature jamais, quand on ne prend pas soin d'elle ». Retenons au moins la dernière partie de la formule, car elle est juste. Nous avons donc eu une convergence totale sur la mobilisation qui doit être la nôtre pour le succès de cette conférence.
Nous avons aussi évoqué la condition des réfugiés. Sujet qui tient beaucoup à cur au Pape François et qui appelle, bien sûr, les réponses appropriées de l'Europe et de la communauté internationale, pour que nous soyons à la hauteur des drames humains, que l'on voit trop se reproduire. Les paroles qu'avait pu prononcer le Pape, lorsqu'il s'était rendu à Lampedusa, sont dans tous les esprits et doivent donc appeler les Européens à prendre les mesures appropriées, c'est-à-dire faire en sorte que les conflits puissent être réglés et que les accueils de réfugiés puissent être faits dans des conditions humaines.
Nous avons, enfin, dans cet entretien, parlé de la mondialisation, de ses excès, de ses abus et des inégalités qu'elle provoque. J'ai dit également le plein soutien de la France à tout ce que le Pape François développe en ce moment, par rapport au trafic des êtres humains qui est un sujet qui doit être porté dans les négociations internationales.
J'ai confirmé au Pape François que la France défend partout la liberté religieuse parce que la France, c'est la patrie des droits de l'homme et donc de la liberté. De la liberté de conscience, de la liberté de conviction, de la liberté religieuse. En France, encore avec davantage de détermination, par rapport à tous les actes anti-religieux qui peuvent être commis et notamment chaque fois qu'ils se produisent dans un lieu de culte. Cela vaut pour toutes les religions et notamment par rapport à la religion catholique. Nous avons la même détermination par rapport à tous les actes, sans distinction.
J'ai rappelé que la laïcité de la République française garantit le respect de toutes les convictions et permet de vivre ensemble avec les mêmes règles, les mêmes principes qui valent pour tous les citoyens et pour ceux qui résident dans notre pays. La laïcité permet le débat avec tous les cultes et avec l'Eglise catholique, en particulier dans le cadre d'une instance de dialogue qui se réunit annuellement, bientôt au printemps et qui est présidée par le Premier ministre. Elle aborde tous les sujets, y compris les plus graves, les plus lourds qui intéressent toute notre société. Ce débat avec l'Eglise catholique est possible dans le plein respect de nos principes laïcs.
S'il y a un mot, une valeur qui nous a rassemblés au cours de cet entretien, le Pape François et moi-même, c'est le mot de dignité, la défense de la dignité humaine. C'est ce qui doit nous mobiliser, en tous cas c'est la volonté de la France, partout où elle a une responsabilité.
Enfin, j'ai dit au Pape François qu'il était le bienvenu dans notre pays quand il le voudrait et lorsqu'il pensera que venir en France peut être un moment important de son pontificat.
Je vous remercie pour votre attention.