24 octobre 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Hollande, Président de la République, sur le système d'écoutes américain et l'Union européenne, l'économie numérique et sur l'Union bancaire, à Bruxelles le 24 octobre 2013.

LE PRESIDENT « Bonsoir, ce Conseil européen a été marqué par trois questions.
La première, sur la question posée à la suite des révélations, sur les surveillances, les interceptions que « laffaire SNOWDEN » a mises à jour. La seconde question qui a été débattue est celle du numérique, cest-à-dire lobjet même de ce Conseil européen, en tout cas pour cette première journée. La troisième question, cest lUnion bancaire sur laquelle une conclusion importante a été adoptée.
Je reviens sur chacun de ces points. Le premier, cest quil y a des comportements et des pratiques qui ne peuvent pas être acceptés. Quand, à un certain niveau et avec cette ampleur, des surveillances sont pratiquées, en loccurrence par les services américains, et qui peuvent concerner tous les citoyens y compris un certain nombre des dirigeants européens, il y a un coup darrêt à porter et il y a des clarifications à exiger.
Cest ce quon fait les Européens ce soir, et de manière unanime, en considérant quil y avait, avec notre allié américain, un certain nombre de réponses qui devaient être obtenu. Ce soir, il y a eu une initiative franco-allemande pour, dune part, provoquer ce débat qui simposait £ et pour faire avancer, de plusieurs manières, la cause des libertés.
Certes, je suis le premier à souhaiter que les services secrets ou les dispositifs de sécurité soient pleinement mobilisés pour lutter contre le terrorisme. Mais, je suis également convaincu avec les Européens de la nécessité de protéger les libertés individuelles et les droits fondamentaux.
A partir de là, il faut dabord un code de bonne conduite entre Européens. Nous devons nous-mêmes être au clair et ne pas pratiquer ce que nous reprochons à dautres. Donc, entre Européens, un code de bonne conduite doit être établi entre les services concernés.
Ensuite, la France et lAllemagne prendront linitiative de provoquer une discussion avec les Américains pour établir un cadre commun de coopération et de clarification, dici la fin de lannée. Les Européens qui voudront se joindre à nous seront les bienvenus. Pour être plus précis, nous allons donc faire en sorte quentre les services, il puisse y avoir non seulement la clarification sur le passé, mais létablissement de règles pour lavenir. Cest ce que jappelle le cadre commun de coopération.
La France et lAllemagne sont unies dans cette démarche. Elle nest pas exclusive, elle vise à associer dautres pays européens qui voudraient, avec nous, obtenir ce cadre commun.
Il y a eu un groupe de travail européen qui avait été mis en place dès la révélation de « laffaire SNOWDEN », en même temps que souvrait dailleurs, la négociation commerciale avec les Américains. Il a été rappelé ce soir, tous les Européens lont fait, et ce sera dailleurs une conclusion du Conseil européen, que ce groupe de travail devait accélérer encore ces démarches avec les alliés américains. De manière à ce que cela porte sur le passé et que tous les éléments puissent être connus.
Cest un sujet qui ne va pas cesser dinterpeler car nous savons quil y aura dautres révélations. Chaque jour en apporte son lot. Plutôt que dattendre ce que la presse prépare, à partir des documents « SNOWDEN », il convient dengager tout de suite des procédures.
Au niveau franco- allemand, cela sera fait. Et au niveau européen, ce groupe qui avait été établi au lendemain de la révélation de laffaire, sera une nouvelle fois réactivé. Il y a une obligation de résultats, parce que la confiance est essentielle entre alliés. Si nous voulons travailler en bonne compréhension, avec le même souci de lutter contre le terrorisme et de permettre la sécurité de nos concitoyens, nous devons avoir des règles. Cela vaut pour chacun des pays, cela vaut pour lEurope, cela vaut pour les Etats-Unis.
Finalement, ces révélations « SNOWDEN » peuvent être utiles, puisquelles permettront davoir, à la fois, plus defficacité dans laction des services et plus de protection des libertés des citoyens.
Voilà le premier point qui a été évoqué dans ce Conseil et qui devait lêtre.
Le second, cest léconomie numérique, et ce quelle représente pour lavenir de lEurope. Cest un enjeu de création demplois, cest un enjeu de croissance, là aussi, cest un enjeu de bien-être pour les citoyens européens. La France avait des propositions et elle se reconnait dans les conclusions.
Cinq objectifs :
Le premier : cest de faire en sorte que nous ayons un marché unique du numérique. Cest-à-dire que nous puissions décloisonner et éviter une fragmentation. Avec une ambition technologique qui est de prendre de lavance sur ce que lon appelle linformatique en nuage, « Cloud computing », et sur le traitement massif des données, « le big data ».
Deuxième objectif qui a été atteint : avoir une réglementation en matière de protection des données, cest-à-dire justement, permettant à nos concitoyens dêtre en sécurité par rapport à lusage du numérique. Une date a été fixée, léchéance donnée, fin 2014, début 2015, le cadre réglementaire doit être fixé.
Troisième objectif, là-encore que nous avions posé et qui se retrouve dans le communiqué final : cest que linternet doit être ouvert aux innovations. Il faut ouvrir le jeu et donc tous les principes douverture de non-discrimination, dinteropérabilité, de portabilité ont été actés. Ce qui permettra davoir une dynamique pour léconomie numérique.
Quatrième point qui nous tenait particulièrement à cur : la fiscalité. Harmonisation des règles fiscales en Europe sur le numérique mais aussi lutte contre loptimisation fiscale. Un groupe dexperts va être mis en place. Au mois de décembre, nous aurons loccasion déjà den faire une première évaluation.
Enfin, le dernier enjeu : cest celui de lemploi. Il y a des perspectives très fortes en matière de création demplois. Faut-il encore quil y ait des formations. Cela vaut pour un pays comme la France, cela vaut pour toute lEurope. Les fonds européens doivent être utilisés pour les actions de formation, aussi bien pour léducation que pour la formation professionnelle.
Troisième point qui mérite dêtre salué dans le travail du Conseil européen, cest lUnion bancaire. LUnion bancaire a été précisée dans son calendrier et a été encore améliorée dans ses procédures.
Dabord, le mécanisme de supervision a été adopté dans son texte juridique. La Banque centrale européenne va maintenant procéder à la revue des actifs des banques, « les stress test ». Le président de la Banque centrale européenne a défini la méthodologie, les filets de sécurité dans le jargon « les Backstops » nationaux et européens sont en place ou devront lêtre. Et nous pourrons rentrer dans la voie de la résolution unique.
Un accord devra être trouvé dici décembre pour que le mécanisme de résolution puisse être conclu avant la fin de la législature du Parlement européen actuel, cest-à-dire avant les élections du mois de mai. Là-encore, il y a eu un bon compromis, entre la France et lAllemagne, sur ce calendrier et sur cette procédure. Nous pouvons avoir la supervision et la résolution avec un calendrier qui nous permet dassurer leffectivité et donc la crédibilité.
Sur la coordination des politiques économiques, le Conseil européen a également débattu, notamment de la dimension sociale de lUnion économique et monétaire. Cétait aussi une proposition française et nous aurons loccasion den débattre de nouveau, notamment sur la directive « détachement » et également sur la perspective dun salaire minimum en Europe. Mais nous nen sommes pas encore là.
Voilà, moi, ce que je retiens du Conseil européen. Cétait un Conseil dont lobjet essentiel était le numérique. Demain, il y aura la question qui sest également imposée avec la tragédie que lon appelle « Lampedusa » et qui nest pas la première. Mais là, le Conseil européen a montré que lEurope pouvait être unie pour répondre à des défis qui lui sont posés. Cest vrai sur la zone euro : depuis déjà un certain nombre de mois et nous avons progressé £ cest vrai également sur la protection des libertés, lexigence de sécurité et, en même temps, le respect que lEurope doit susciter, y compris de son allié surtout de son allié américain !
Je suis prêt à répondre à vos questions ».
QUESTION « Monsieur le Président, concernant la multiplication des révélations sur les pratiques américaines, est-ce que quand vous dites « On va marquer un coup darrêt », est-ce que cela veut dire uniquement linitiative franco-allemande, et une discussion avec les américains sur ce qui sest passé et clarification ? Est-ce que cela ne va pas au-delà ? Est-ce, par exemple, ce qua demandé Martin SCHULZ, de faire une pause dans les négociations sur laccord de libre-échange ? Comment linterprétez-vous ? Comment réagissez-vous ? »
LE PRESIDENT « Il y a plusieurs procédures et plusieurs objectifs. La première procédure, cest de savoir exactement ce qui sest passé. Cela était déjà lancé avec ce groupe de travail européen qui avait été mis en place en même temps que souvrait la négociation commerciale. Ce groupe de travail doit être de nouveau conforté compte-tenu de ce que lon sait à partir des informations de presse, qui reprennent les « documents SNOWDEN ». Cela, cest pour le passé.
Linitiative franco-allemande va bien au-delà du passé : cest fixer un cadre commun pour les fonctionnements des services et pour leur pratique. Cela doit se faire dici la fin de lannée. Si rien naboutissait dici la fin de lannée mais je ne me place pas dans cette hypothèse, puisque Barack OBAMA lui-même a convenu quil devait y avoir non seulement, clarification sur le passé mais établissement de règles pour lavenir alors nous aurions à prendre un certain nombre de dispositions. Nous nen sommes pas là.
Maintenant, cest la question de la confiance qui est posée. Cest-à-dire : vérité sur le passé, et règles de conduite pour lavenir ».
QUESTION « Monsieur le Président, la vérité sur la passé dites-vous Le quotidien britannique The Guardian, explique que dans son édition de demain, que 35 chefs dEtat ont été écoutés par les services américains. Est-ce que vous disposez dinformations vous permettant de dire que vous-même avez fait lobjet dune surveillance téléphonique, comme la Chancelière Angela MERKEL ? »
LE PRESIDENT « Non, je nai pas déléments dinformations. Cela peut viser des dirigeants qui mont précédé The Guardian ne donne pas les noms, donc je ne peux pas faire de commentaires. Mais ce qui est en cause, ce nest pas de savoir si tel ou tel dirigeant a été éventuellement surveillé, cest de savoir quelle était lampleur du système. Parce que ce système concerne des dirigeants, mais également des entreprises et des citoyens. On parle de millions et de millions de communications qui ont pu être connues ou en tout cas surveillées.
Cest un enjeu qui dépasse simplement les relations que lon pourrait avoir, jallais dire, dEtat à Etat. Cest un problème majeur et cest pourquoi il convient de savoir. Cest pour cela quentre Français et Américains, dans le cadre dune coopération bilatérale, nous avons demandé à pouvoir disposer des documents qui sont révélés. Mais cela ne concerne que la relation franco-américaine. Nous, nous voulons connaître ce que la presse sait déjà. Et quelle va continuer à publier jimagine, à partir des documents dit « SNOWDEN ». Donc, nous demandons à la partie américaine de nous fournir ce que la presse a déjà.
Je pense que cest lintention, telle est en tout cas la réponse que jai eu de Barack OBAMA, des Américains. Mais, nous ne devons pas simplement régler le passé, il convient justement dengager une discussion avec les Américains, et pas seulement les Français. Les services voudront avoir cette bonne règle de conduite pour que nous ne revivions pas ce qui sest produit.
Pour ce qui me concerne, je nai pas dinformation, si vous en avez, je ne doute pas que vous les publierez ».
QUESTION « Monsieur le Président, vous avez évoqué à maintes reprises le chainon manquant dans cette histoire, tout en le saluant, qui est M. SNOWDEN lui-même. Le Front National a proposé il y a quelques jours, par la bouche de M. PHILIPPOT, de lui accorder le droit dasile en Europe. Les Verts européens, il y a quelques semaines, avaient proposé quil soit nommé pour le « Prix Sakharov ». Est-ce que demain, dans les conclusions du sommet vous allez saluer dune manière ou dune autre ce lanceur dalerte citoyen ? Et est-ce que les européens réunis ici, peuvent faire un geste ? »
LE PRESIDENT « Non, il ne sagit pas de cela. Ce cas-là a été posé au moment où lui-même, lançait au-delà des alertes, des demandes. Aujourdhui, il est en Russie. Cela na pas empêché la transmission dinformations à travers des intermédiaires.
Il y a une procédure judiciaire qui est engagée, venant des Etats-Unis contre SNOWDEN. Nous avons un accord avec les Etats-Unis, je ne pense pas que ce soit la bonne méthode de se déterminer par rapport à SNOWDEN. Nous, nous constatons les informations. Ce qui compte aujourdhui, cest davoir la certitude que cela ne se reproduira plus.
Voilà pourquoi je me bats et voilà pourquoi, avec Angela MERKEL, nous avons pris cette initiative ce soir. Faire en sorte que non seulement nous puissions établir ce qui sest passé, obtenir des informations, mais surtout, tout faire pour que les règles de bonne conduite puissent être établies.
Cest un point très important. Parce que quest ce qui est en cause ? Cest de préserver notre relation avec les Etats-Unis. Nous sommes des alliés, cette relation nous y tenons les uns et les autres, Américains et Européens, Américains et Français. Elle ne doit pas être altérée par ce qui sest produit. Mais pour quelle ne le soit pas, il faut que la confiance puisse être établie, puisse être même, renforcée. On ne sespionne pas entre alliés. Au nom même de la relation entre les Européens et les Américains ou entre la France et les Etats-Unis, nous devons tout faire pour que justement la confiance puisse être établie.
Mais il y a un deuxième enjeu, cest de préserver les capacités du renseignement, des services. Nous ne sommes pas des naïfs. Nous ne sommes pas dans un monde où il ny aurait que des gens qui voudraient notre bien. Il arrive même que des gens veuillent notre mal. Donc, à partir de là, il y a des risques pour notre population, en Europe, aux Etats-Unis, partout dans le monde. Il faut que nous ayons des services efficaces. Il faut que nous puissions lutter contre le terrorisme. Et, il est très important quil ny ait pas de doute sur la capacité de ces services, mais en même temps quil ny ait pas de suspicion par rapport aux libertés. Plus nous protégerons les libertés, plus il sera possible davoir des services efficaces ».
QUESTION « Vous avez parlé du besoin dun cadre, mais il existe déjà un cadre entre les pays anglophones ? »
LE PRESIDENT - « Oui ».
QUESTION - « Est-ce que vous voulez faire partie de ce cadre ou est-ce que vous parlez de quelque chose de complètement différent ? Est-ce que je peux poser une deuxième question sur lunion bancaire ? Vous avez parlé dun bon compromis entre la France et lAllemagne, mais sachant quaujourdhui, vous avez seulement vérifié le calendrier qui existait déjà Je ne sais pas si vous parlez dun compromis ce soir ou des compromis du passé ? »
LE PRESIDENT - « Vous évoqué dabord ce qui existe entre certains pays britannique, australien, le groupe des cinq et les Etats-Unis Cest à eux davoir des règles. Jimagine que ces pays en ont. Mais nous ne sommes pas dans ce cadre-là. Nous ne tentons pas de lêtre. La France est un pays qui a une alliance qui est dans lEurope. Cest un pays et jinsiste beaucoup là-dessus, indépendant dans ses décisions, dans ses choix. Donc, ce que nous avons à faire avec les Américains, sur le plan bilatéral, cest davoir ces informations sur le passé et dans un cadre qui peut être, au-delà du bilatéral, avec les Allemands et avec ceux qui voudront bien nous joindre pour avoir des règles de conduite pour lavenir.
Sur le second point, lUnion bancaire, cétait très important de pouvoir ensemble dire que maintenant la supervision est arrivée à un niveau juridique le texte est prêt £ la Banque centrale européenne pourra procéder aux vérifications des banques et que les filets de sécurité existent et pourront intervenir. A ce moment-là, nous pourrons passer à la suite, à la résolution unique. Avec la confirmation que cela se fera dans le premier semestre 2014 pour le principe même de ce mécanisme. Donc, je considère que ce qui vient de se passer ce soir, cest à la fois une confirmation et en même temps un engagement. LUnion bancaire est un processus maintenant irréversible ».
QUESTION - « Monsieur le Président, je voudrais prolonger la question de mon confrère du Monde. Vous dites quil faut que la confiance soit établie. Vous navez pas déléments concernant le fait que vous-même avez été écouté. Est-ce que vous avez pris des précautions particulières concernant votre téléphone personnel que toute la presse sait que vous continuez à utiliser ? Pardon de cette indiscrétion ».
LE PRESIDENT - « Ce nétait pas une indiscrétion. Vous avez parfaitement le droit et même le devoir de poser la question. Jutilise un téléphone heureusement. Je ne suis pas revenu à lâge de pierre et même, sans aller jusquà lâge de pierre, je ne communique pas par le morse par exemple ou par tout autre mécanisme Ce nest pas parce quil y a des risques dinterception, de surveillance, quil faudrait revenir à dautres modes de communication qui dailleurs pourraient être eux-mêmes surveillés. Donc, nous avons pris toutes les dispositions, dès mon arrivée aux responsabilités pour que, en ayant un téléphone, il puisse être sécurisé. Ce nest pas parce quon peut me joindre que la conversation est surveillée ».
QUESTION « Monsieur le Président, jaurai deux questions. La première par rapport aux données personnelles. Vous avez évoqué fin 2014, début 2015 pour le règlement Est-ce que ce nest pas un petit peu tard puisque cest après les élections européennes, alors que Viviane REDING demande depuis très longtemps que cela soit fait et justement avant les élections ? Pourquoi ce report de six mois après les élections ? »
LE PRESIDENT - « Pour la protection des données personnelles ? »
QUESTION « Oui ».
LE PRESIDENT - « Que lon soit bien clair. La protection des données personnelles, cétait une volonté qui existait avant même les révélations surprises, parce que lEurope doit assurer à ses concitoyens des règles de protection et de sécurité ».
QUESTION - « Mais pourquoi attendre ? »
LE PRESIDENT - « Ce qui était dans le communiqué tel quil était prévu, cétait fin 2014. Nous avons toujours donné cette date ».
QUESTION « Dans les projets de conclusions de début de semaine, cétait marqué printemps 2014 ».
LE PRESIDENT - « Il y a les élections européennes. Il faut un mécanisme juridique qui soit accepté par tous. Il y a encore toujours des réticences pour certains. Ce qui a été discuté et décidé ce soir, cest que fin dannée 2014, début 2015, la réglementation serait prise. Certains voulaient plutôt une autre formule, prendre une réglementation dans les prochains mois ou dans lurgence. Moi, je préfère, plutôt que ces formules qui ne signifient plus rien, avoir une date précise ».
QUESTION « Et sur la recapitalisation directe des banques, est-ce qua été évoqué avec la Chancelière Angela MERKEL laccord de juin qui est remis en cause aujourdhui par lAllemagne ? »
LE PRESIDENT - « Qui nest pas remis en cause ! Mais pour linstant, nous devons aller vers le mécanisme de supervision et avec les filets de sécurité. Une fois que nous aurons passé ce stade et que nous serons dans la résolution unique, alors, il y aura cette question qui devra être réglée avec la réponse que vous connaissez du côté français, la recapitalisation ».
QUESTION - « Il y a quelques mois, le Monde a affirmé que la DGSE avait déployé un système de surveillance équivalent à celui de la NSA sur les échanges entre la France et létranger, un système qui sortirait du cadre légal prévu pour les interceptions. Est-ce que oui ou non ce système de surveillance existe ? »
LE PRESIDENT - « Nous, nous restons dans le cadre légal. Cest-à-dire la CNIL nous a demandé, il y a plusieurs semaines, de donner des informations. Le Premier ministre y répondra. De la même manière que la délégation parlementaire du renseignement souhaite un renforcement, nous y sommes prêts. Mais nous sommes dans le cadre légal.
Je ne voudrais pas quon laisse penser que, finalement, cette pratique de prise serait générale. Donc, il y a un cadre légal, il doit être respecté. Avec la CNIL, nous veillerons à utiliser toutes les informations dans le respect de la loi ».
QUESTION « Plusieurs experts disent « qui contrôle les équipements, contrôle linformation ». Or, la plupart des équipements et des technologies sont dorigine américaine. Alors que nous reste-t-il comme arme pour demander aux Américains de respecter certains codes de bonne conduite à notre égard ? »
LE PRESIDENT - « Je pense que ce nest pas simplement la fabrication des produits. Il y a des technologies de plus en plus raffinées, de plus en plus massives. Donc, penser que cest simplement parce que nous aurions nous-mêmes le contrôle du produit que nous pourrions être protégés déventuelles surveillances ou interceptions, ce serait une illusion. Cela suppose, cest le sens de la démarche que nous engageons, que les services eux-mêmes, aient des règles de conduite.
La question nest pas, comme on peut limaginer souvent dans lopinion, un problème dinformation politique. Très franchement, il y a suffisamment déchanges entre chefs dEtat pour quil ny ait pas beaucoup de secrets qui demeurent, surtout entre alliés. Lenjeu, il est économique le plus souvent, parce que ces données ont un prix. Et enfin, il est bien sûr sur les libertés, même si lobjectif est la lutte contre le terrorisme et la sécurité. Il peut y avoir effectivement des risques.
Ce que nous devons faire, cest dutiliser la technologie pour nous protéger. Cest toute la question de la cybersécurité qui figure parmi les objectifs de la loi de programmation militaire. Nous savons bien que cela existe, donc cest la cybersécurité qui doit assurer notre protection mais en même temps, cela ne nous dispense pas davoir des règles de bonne conduite entre alliés et amis ».
QUESTION « Quelles sont ces règles de bonne conduite ? »
LE PRESIDENT - « Cest que lon ne surveille pas et que lon ne contrôle pas, par exemple, les portables de personne que lon rencontre dans les sommets internationaux. Règles de bonne conduite, cela veut dire que lorsque lon veut procéder à des surveillances, on sinforme mutuellement, cela peut arriver. Règles de bonne conduite, cela veut dire que lon ne stocke pas les informations qui peuvent mettre en cause un certain nombre de libertés.
Voilà ce que sont les règles de bonne conduite, qui doivent aussi assurer lobjectif, parce que nous sommes dans une monde dangereux, et parce quil y a ces révélations dites « SNOWDEN », de ne pas dun seul coup baisser la garde. Cela serait une très grave responsabilité. Il ny a donc pas de naïveté à avoir, il faut assurer la sécurité et donc faire des contrôles, faire des surveillances. Cest légitime, mais dans un cadre qui doit être organisé au plan national et au plan européen. Cest pour cela que jai dit quil fallait également avoir des règles de bonne conduite entre Européens et, bien sûr, au plan des alliances ».
QUESTION « Monsieur le Président, une question qui sort un tout petit peu du cadre du Conseil européen mais qui parle de lEurope, sur loffensive aujourdhui au Mali, offensive importante dit-on. Jai, en fait, une double question : quel est son objectif ? On pouvait avoir limpression que la lutte sur le terrain était victorieuse de la part de la France £ est-ce que ce nest pas un premier signe de risque denlisement au Mali ? »
LE PRESIDENT - « Nous navons jamais prétendu que notre intervention allait faire disparaitre le terrorisme dans la région. Il est installé au sud de la Libye, sans doute encore au nord du Niger, parfois en Algérie, au sud de lAlgérie. Il na pas été vaincu par notre simple intervention au Mali. Il a été abimé, il a été attaqué mais il na pas disparu.
La meilleure preuve, cest quil y a eu ces derniers jours des attaques kamikazes qui ont fait plusieurs victimes notamment du côté des forces tchadiennes. Jai donc décidé quil y aurait, avec les forces françaises encore présentes au Mali, plus de 2 500 soldats, et avec les forces armées maliennes, une opération pour lutter contre les groupes qui avaient attaqué à Tessalit.
Notre calendrier demeure. Il y a des élections législatives dans quelques semaines au Mali et on voit bien lobjectif de ces terroristes : cest essayer de perturber ce scrutin. Nous faisons donc en sorte que ces élections puissent être organisées en sécurité. Après nous devrons diminuer notre présence et faire en sorte que la mission des forces des Nations Unies puisse prendre le relais, ce qui est dailleurs largement le cas, y compris dans lintervention de ces dernières heures.
Nous aurons aussi à lutter contre le terrorisme par rapport à des situations en Libye où il y a une forme de chaos qui sest installé. Même si les autorités légitimes font tout ce quelles peuvent, elles sont assez désemparées. Nous devons donc coopérer et nous voyons bien que cela a des conséquences, y compris sur le sujet dont on parlera demain : celui des réfugiés.
Sur les indiscrétions, ou je ne sais quel mot il faut utiliser par rapport à la situation de nos otages, vous connaissez là-dessus mes principes. Cest de ne pas parler et de ne pas mettre en danger la vie de nos otages. Donc les contacts je lai dit déjà depuis plusieurs semaines pour ne pas dire déjà plusieurs mois nous les recherchons pour obtenir leur libération. Il ny a pas dautres commentaires à faire et tout ce qui vient comme cela interférer nest jamais bon. Il y a donc là un principe de responsabilité. Jai vraiment ce devoir de tout faire pour permettre la libération de nos otages et en même temps de ne rien compromettre, notamment leurs vies ».
QUESTION - « Monsieur le Président, pour revenir à un sujet français mais qui est aussi dune certaine manière européen : le chômage en septembre en France a bondi de 60 000 demandeurs demploi. Alors certes, il sagit dun contre-effet du bug de mois précédent, mais il traduit quand même une augmentation nette de 10 000 chômeurs en deux mois. Comme vous avez promis cette inversion de la courbe du chômage en fin dannée et que nous y sommes presque, est ce que vous comptez toujours tenir cette promesse ? »
LE PRESIDENT - « Nous parlons des deux mois daoût et de septembre qui marquent une stabilisation du chômage, pas une baisse du chômage si on fait la somme. Puisquil y a eu ces bugs statistiques, nous avons 5 000 chômeurs de plus chaque mois en août et en septembre, 10 000 sur les deux mois. Cest encore trop. Mais, il y a une évidente décélération par rapport à ce que nous constations depuis 1 an, où le chômage augmentait de 30 000 à 40 000 par mois.
Aujourdhui, nous sommes à 5 000 chômeurs de plus par mois, linversion de la courbe du chômage nous ny sommes pas encore. Cela sera sur les chiffres que nous aurons en décembre et en janvier, que nous aurons à faire ce bilan.
Mais je ne considère pas que ce soit chose faite sous prétexte que nous avons mis les dispositifs. Je demande donc chaque jour au gouvernement de se mobiliser pour que nous puissions atteindre cet objectif. Mais aussi puissants que sont les mécanismes dit « emploi davenir », « contrat de génération », « emploi aidé », ils doivent être accompagnés par la croissance. Donc, plus forte sera la reprise, pour linstant elle est encore trop timide, plus certaine sera la perspective dinverser la courbe du chômage.
Jai conscience que cest extrêmement rude pour nos concitoyens qui sont dans cette situation ou qui risquent de lêtre. Le chômage augmente maintenant depuis presque 5 ans continument. Mais tout ce que jai engagé va dans le sens de la reprise, de la croissance, de la compétitivité, et du soutien aux entreprises, même si cela peut parfois être discuté. Pourquoi je fais en sorte que nous puissions avoir un soutien à linvestissement ? Parce que cest la clé de la croissance, de la reprise et donc de la création demplois. Et comme cela va prendre encore du temps, nous devons utiliser tous les mécanismes qui sont ceux des « emplois aidés », des « emplois davenir » et des « contrats de génération ».
Quelle est lautre solution ? Aujourdhui, nous avons parlé de la croissance en Europe : une présentation a été faite par la Commission européenne et par la Banque centrale européenne. LEurope vient seulement de sortir de la récession. De notre côté, cela fait déjà plusieurs mois, mais nous ne sommes pas encore dans une phase de croissance solide, durable donc cest ce que nous avons à faire en Europe.
Comment lobtenir en Europe ? En mettant un peu plus laccent sur la croissance, en faisant en sorte que les trajectoires budgétaires soient assouplies, et en mettant aussi les mécanismes de crédit. Cest ce que nous allons faire : Banque européenne dinvestissement, garantie pour les entreprises, de manière à ce que la liquidité soit apportée et le rôle de la Banque centrale est important.
Voilà, vous me demandez si cet objectif sera atteint. Je fais tout pour quil soit atteint et les derniers chiffres, si on les regarde avec objectivité, cest-à-dire sur les deux mois, compte tenu de ce qui sest produit sur le plan statistique, nous montrent que nous sommes sur le chemin.
Merci.