20 mars 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur l'action de la France et de la francophonie en faveur des droits des femmes, à Paris le 20 mars 2013.

Monsieur le Secrétaire général de la Francophonie, cher Abdou DIOUF,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,
Mesdames et Messieurs,
Cest un grand honneur que vous nous faîtes de venir au palais de lElysée.
Je tiens à vous accueillir donc pour ce premier Forum mondial des femmes francophones. Cest une initiative qui est venue du président Abdou DIOUF. Je veux remercier ladministrateur de lOIF, Clément DUHAIME, et toutes les équipes qui ont permis, grâce à leur dévouement, le rayonnement de cette initiative et, au-delà, de la langue française que nous partageons.
La Francophonie, cest plus quune idée £ cest même davantage quune organisation. La Francophonie, cest dabord une communauté humaine à travers 77 Etats qui y adhèrent et près de 250 millions de locuteurs dans le monde. A lhorizon 2050 nous serons encore là on annonce 750 millions de francophones. Cest dire si ce que vous représentez la Francophonie est une belle idée promise à un grand avenir.
Ce forum est loccasion de rappeler que la Francophonie, cest une diversité. Cest laccumulation, lajout, laddition de tant de différences qui font que nous sommes unis et rassemblés. Vous êtes ici, nombreuses venant de différents continents. Vous témoignez de la grande richesse de la Francophonie.
Nous avons une langue en partage. Elle a une grande histoire. Et elle ne cesse de senrichir, car la langue, cest la vie.
Beaucoup des mots que nous avons en usage sont des héritages et des métissages. Lhistoire de la langue française, cest lhistoire de lhospitalité, de léchange et du partage des mots. Venant de beaucoup de pays, vous avez participé à la construction et à lélaboration de la langue française. La langue française, ce nest pas la langue parlée par les Français. Cest la langue parlée, à travers le monde, par toutes celles et tous ceux qui nous font lhonneur de la partager avec nous.
La Francophonie, cest aussi un rassemblement qui porte des valeurs et des principes. Je rappelle que cest en français que sest écrite la déclaration des droits de lHomme et du Citoyen, en 1789, et que cest en français aussi qua été rédigée la déclaration universelle des droits de lHomme, en 1948. Notre organisation est donc héritière de cette tradition, de cette volonté, de cette affirmation démancipation. Notre langue est un instrument du droit et de la paix.
Autant de raisons pour porter aujourdhui le combat des femmes.
En France, cest lune des priorités du gouvernement portée par Najat VALLAUD-BELKACEM qui, je crois, vous a présenté ce quelle a engagé avec le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT. Un gouvernement strictement paritaire non, il ne lest plus ! Puisquhélas un membre nous a présenté sa démission. Ce qui fait que dans le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT, il y a aujourdhui plus de femmes que dhommes.
Une feuille de route a été mise en uvre dans chaque ministère et nous veillons à ce quelle puisse être respectée, dans les nominations, dans les choix de responsables à tout niveau, dans les autorités indépendantes Nous faisons en sorte que ce principe de parité puisse trouver sa traduction.
Mais nous avons une autre ambition que je voulais vous faire partager car elle peut être aussi la vôtre. Nous avons inventé une troisième génération des droits des femmes. La première, cétait les droits politiques : droit de vote, droit de participer pleinement aux décisions. Cest fait... enfin, pas partout. La seconde génération, cétait et cest encore les droits sociaux et sanitaires, que les femmes ont chèrement conquis dans les années 1970, et notamment le droit à la contraception ou le droit même à linterruption volontaire de grossesse.
Et puis, aujourdhui, ce que nous avons à faire à travers cette troisième génération, cest de réaliser légalité réelle entre les femmes et les hommes : légalité dans les rémunérations, légalité dans la répartition des temps de vie, pour léducation des enfants, légalité des destins à travers lécole et les filières.
Mais si nous voulons être à la hauteur des valeurs que nous portons, nous devons justement aller au-delà des frontières de chacun de nos Etats. Nous avons regardé avec faveur et enthousiasme même les « printemps arabes ». Parce que les femmes ont incarné linspiration à la démocratie. Elles ont mis la question de légalité des droits dans toutes ses dimensions : civiques, politiques, sociales.
Mais ces printemps ne se déroulent pas toujours comme il était prévu. Il y a des replis, il y a des ruptures. Là encore, à chaque fois, ce sont les femmes qui en sont victimes. Je veux donc saluer leur rôle en Tunisie, en Libye, en Egypte et en Syrie, alors que ce pays senfonce depuis deux ans, chaque jour davantage, dans la violence.
Cest la raison pour laquelle la réunion sur légalité de lUnion pour la Méditerranée, que nous organisons les 4 et 5 juillet à Paris, devra nous fournir loccasion dexplorer les moyens de renforcer les liens entre les sociétés civiles de part et dautre de la Méditerranée. Et donc de prolonger ce que vous avez fait aujourdhui.
Et nous devons faire de la lutte contre les violences faites aux femmes une grande cause de la Francophonie.
Les violences faites aux femmes causent en effet plus de décès et de handicaps que le cancer, le paludisme, les accidents de circulation et même les guerres réunis. On estime à 650 000 je ne sais ce que valent ces statistiques et comment elles peuvent être établies mais on estime donc à ce chiffre terrifiant de 650 000, le nombre de femmes qui font lobjet de trafics chaque année dans le monde.
Je pense aussi à celles qui sont mutilées, empêchées, reléguées.
Je pense enfin à celles qui sont massacrées et qui sont lobjet des conflits eux-mêmes : femmes congolaises, femmes centrafricaines, femmes maliennes, qui ont été les premières victimes du terrorisme.
Et si la France est au Mali, cest parce quelle a été appelée par un pays ami, cest parce quelle agit au nom de la communauté internationale mais cest aussi parce que des femmes étaient victimes doppression, dobscurantisme et de fondamentalisme que nous sommes aussi allés là-bas. Parce que nous considérons que la cause des femmes vaut aussi que nous déployons nos armées pour les défendre.
Je veux saluer ici les pays qui représentent cette volonté, avec nous, de protéger les femmes et de garantir, à travers le droit, leur intégrité corporelle et donc la dignité.
Le plan daction francophone sur les violences faites aux femmes a été adopté récemment, Monsieur le Secrétaire général, et je vous en félicite. Cétait à loccasion de la commission de la condition de la femme à New York. Cest une étape importante.
Dans la même direction, il y a eu cette résolution sur la prévention, lélimination des violences faites aux femmes et aux filles. La France y a contribué.
Et ce texte déclare que les Etats ne peuvent invoquer des considérations culturelles, religieuses ou traditionnelles pour ne pas respecter leurs obligations en matière délimination de toutes les formes de violences à lencontre des femmes et des filles. Aucune religion nappelle à la violence contre les femmes. Nous avons donc à prendre toutes les mesures partout. Aucun pays nest exempt de cette responsabilité pour que soit éliminé un certain nombre de pratiques. Je pense aux mutilations génitales et aux mariages forcés et précoces.
Cest le rôle aussi de la Francophonie de demander la stricte application de ces recommandations.
Le XVème sommet de la Francophonie sera très important, parce que cest le XVème, parce quil est à Dakar, parce que nous aurons à saluer Abdou DIOUF et lui dire notre amitié. Pour ce XVème sommet, nous aurons à porter à un niveau plus élevé cette exigence de défense des droits des femmes et même de leur protection.
En France, nous entendons montrer lexemple. Sous lautorité de Laurent FABIUS, laction qui est conduite pour le développement, avec Pascal CANFIN, cest dassurer lautonomie économique des femmes, de veiller à la scolarisation des filles, la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, notamment en Afrique, et de faire partout prévaloir le principe dégalité entre les femmes et les hommes.
Cest une des conditions que nous posons pour la politique de développement.
Nous ne le faisons pas dailleurs, que pour des raisons de droit mais aussi pour des motifs defficacité. Car il est démontré que, lorsque laide passe par les femmes, elle est souvent beaucoup plus efficace et plus durable, et mise au service de léducation des enfants.
Vous me remettez ce soir le texte dun appel, lAppel des femmes francophones.
Vous demandez à lensemble des acteurs de la Francophonie, à travers ce texte, de renforcer la promotion des droits des femmes dans les programmes qui sont menés. Vous demandez la modification, voire même labolition de toutes les lois, réglementations, pratiques et coutumes qui sont discriminatoires envers les femmes.
La France souscrit à cet engagement et je pense que cet Appel doit bien aller au-delà de la Francophonie. Il marque pour la première fois la création dun réseau de solidarité entre les femmes francophones. Vous avez donc été, de ce point de vue, des pionnières.
Je vois dans cet Appel aussi une obligation pour les gouvernements, ceux qui adhérent à lOrganisation internationale de la Francophonie. Je pense que cet Appel vivra jusquau sommet de Dakar et pourra même être intégré dans nos textes fondamentaux.
Voilà, Mesdames, Messieurs, lAppel de lElysée que vous avez prononcé.
Cet Appel est le vôtre, mais cet Appel, désormais est le nôtre.
Merci.