15 janvier 2013 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations entre la France et les Emirats arabes unis et sur l'intervention militaire française au Mali, à Dubai le 15 janvier 2013.


LE PRESIDENT : « Mesdames, Messieurs. Ce déplacement, ici aux Emirats, était prévu de longue date. Jen avais fait la promesse lors dune visite du Prince héritier à Paris. Je lai donc honorée avec les ministres qui mont accompagné avec une large délégation de chefs dentreprise.
Ce voyage sest effectué dans un contexte qui nétait pas celui où javais pris la décision dêtre là aujourdhui. Ce contexte, vous le connaissez. Cest la décision dintervenir au Mali que nous avons prise, vendredi, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité et à la demande du Président du Mali. Les autorités des Emirats mont apporté tout leur soutien dans les opérations que nous conduisons et dans lattente de la formation de la force africaine qui doit prendre le relais. Cet appui des Emirats prendra toutes les modalités qui seront utiles : aide humanitaire, aide matérielle, aide financière et éventuellement aide militaire nous en reparlerons plus tard.
Jai eu loccasion de visiter la base qui est ici et qui témoigne du partenariat exceptionnel que nous avons entre nos deux pays, mais aussi de la capacité des forces françaises à pouvoir poursuivre plusieurs grandes missions, dont lune va être de nous accompagner aussi pour une intervention au Mali. Puisquil est envisagé quun certain nombre de matériels et notamment davions qui sont aux Emirats puissent venir sur le théâtre du Mali tant que de besoin.
Pour le reste, ce voyage a été utile et fructueux. Dabord parce que nous avons traité dun grand sujet, celui sur lequel les Emirats sont en pointe, cest-à-dire les énergies renouvelables et plus largement les énergies du futur. Je me suis exprimé lors de cette conférence qui je le rappelle va durer une semaine et coïncider avec dautres évènements autour du même thème : préparer le monde à laprès-pétrole, mobiliser des ressources et des forces pour lefficacité énergétique et pour le développement des énergies renouvelables. La transition énergétique que nous engageons en France est parfaitement cohérente avec le discours que nous pouvons tenir dans les enceintes internationales et la volonté qui est la nôtre daccueillir la Conférence pour le climat en 2015.
Ce déplacement a été aussi utile et fructueux puisque nous avons pu évoquer un certain nombre de sujets, de partenariats économiques, culturels et politiques.
Commençons par la politique. Entre les Emirats et la France, il y a une large convergence de vues sur tous les dossiers de la région. Que ce soit sur la Syrie, où nous voulons accélérer la transition politique et faire en sorte que la coalition qui rassemble toute lopposition puisse être lautorité légitime £ que ce soit sur lIran, où nous voulons que la négociation soit reprise pour que lIran respecte les obligations en matière nucléaire £ et nous avons aussi une très large identité de vues sur le dossier israélo-palestinien avec le souci qui est le nôtre, après les élections en Israël, dune reprise des négociations. Sur le Mali et plus largement sur la question de la lutte contre le terrorisme, nous avons là encore affirmé des principes qui seront utiles dans cette région du monde comme dans dautres.
Le partenariat économique concerne plusieurs domaines. Jai évoqué la Défense où il y a une partie qui relève de laction économique, notamment pour nos industries de défense. Tous les sujets ont été abordés. Je demanderai au ministre de la Défense, dans un contexte sans doute différent de celui daujourdhui, de revenir aux Emirats pour que nous puissions aborder tous ces sujets.
Sur lénergie, la présence dun grand nombre dentreprises françaises mobilisées dores et déjà sur la question nous laisse penser quune coopération qui peut encore saccentuer. Je rappelle ici la place de Total dont la concession vient à expiration en 2014 et dont nous souhaitons quelle puisse être encore amplifiée. Il y a les domaines également du transport, du tourisme et, là encore, nous avons de grandes espérances.
Dores et déjà, nous nous sommes mis daccord pour créer un Fonds commun franco-émirien qui puisse rassembler des financements et servir des investissements en France, dans les Emirats, voire même pour un certain nombre de projets qui nous seraient communs dans le monde. Nous allons définir prochainement les modalités de constitution de ce Fonds. Je rappelle quil en existe déjà dans notre pays avec la Chine ou avec la Qatar. Nous lui donnerons une ampleur particulière avec les Emirats.
Nous avons aussi, sur la question de la ville durable, une volonté de mobiliser toutes les entreprises françaises concernées et les entreprises émiriennes pour faire un modèle de ville du futur où nous pourrions utiliser toutes les technologies que nous avons développées en France ou aux Emirats, cest-à-dire ce qui peut lier lhabitat, la mobilité, lisolation des logements et également lénergie.
Nous avons aussi, sur lEspace, un certain nombre de projets qui peuvent se réaliser rapidement et sur lesquels là encore nos entreprises se sont investies.
Pour en terminer sur déplacement, je considère donc quil est déjà à la hauteur des relations que nous avons su nouer mais quil peut aller encore beaucoup plus loin dans ses résultats. Jai donc invité les autorités émiriennes à venir en France mais surtout à engager ce partenariat exceptionnel qui est le nôtre et qui ne ressemble à aucun autre. Jen prendrai pour preuve le projet du Louvre dAbou-Dabi qui ma été présenté et qui va aboutir à une ouverture en 2015. Ce premier grand musée à Abou-Dabi préfigurera dautres installations, dautres musées du monde qui témoignent de la place particulière de la France dans cette région. Jai aussi insisté sur la Sorbonne et sur les grandes Universités qui sont accueillies ici à Abou-Dabi.
Ce partenariat exceptionnel, cette amitié exceptionnelle, cette coopération exceptionnelle nous laissent de grandes perspectives pour les prochaines années. Vous connaissez ma méthode : je ne parle pas de contrats. Mais les entreprises qui nous suivent ont à aller chercher ces contrats et faire en sorte quelles soient les plus compétitives, les plus acharnées pour les conclure. Nous ne demandons aucun privilège, aucun avantage, au prétexte que nous aurions ici des partenaires particuliers. Mais en même temps nous souhaitons que nos entreprises prennent toute leur place, ce quelles font, et en prennent même davantage. Je rappelle que les Emirats constituent notre 4ème excédent commercial nous nen avons pas beaucoup, donc raison de plus pour lamplifier encore ! Le Fonds dont jai parlé entre la France et les Emirats aura aussi pour vocation de lier nos deux économies pour quelles échangent et investissent davantage.
Je suis prêt à répondre à vos questions ».
QUESTION : « Je voudrais connaître la mission précise des troupes françaises engagées au Mali. Sagit-il de stopper les combattants que vous avez qualifié vous-même de terroristes ou sagit-il de les capture et de les juger le cas échéant ? »
LE PRESIDENT : « Nous avons trois buts dans notre intervention qui, je le rappelle, seffectue dans le cadre de la légalité internationale avec la demande expresse des autorités maliennes, avec le soutien de tous les pays africains et avec lappui de lEurope. Jajoute que le Conseil de sécurité, hier soir, a de nouveau donné à la France et à lopération que nous avons engagée, le cadre dans lequel nous avons légitimité pour opérer.
Les buts sont donc les suivants : un, arrêter lagression terroriste qui consistait à vouloir y compris jusquà Bamako le contrôle du pays. Le second but est de sécuriser Bamako où, je le rappelle, nous avons plusieurs milliers de nos ressortissants. Troisième but, cest de permettre au Mali de recouvrer son intégrité territoriale. La mission en a été confiée à une force africaine qui aura notre appui et qui sera prochainement sur le terrain pour accomplir cette tâche.
Vous demandez ce que lon va faire des terroristes si on les retrouve. Les détruire, les faire prisonniers si cest possible et faire en sorte quils ne puissent nuire à lavenir. Nous sommes dans une opération qui nest pas simplement de défendre une ligne laquelle dailleurs ? il ny a pas de frontières à lintérieur du Mali. Je vous lai dit, cest darrêter lagression, de permettre à Bamako dêtre sécurisé, de préserver les autorités du Mali et nos ressortissants et enfin quil y ait cette force africaine qui va mettre encore quelques jours avant de sinstaller, même si une réunion des Etats-majors africains a déjà eu lieu aujourdhui. Cette force, appuyée par la France, va répondre à ce quest dailleurs la résolution du Conseil de sécurité pour le retour à lintégrité du territoire malien ».
QUESTION : « Vous avez ce matin rencontré le Président mauritanien lors dun rendez-vous qui nétait pas prévu à votre agenda. On a appris par votre entourage que vous avez eu au téléphone le roi du Maroc et le Président BOUTEFLIKA. Quel rôle spécifique attendez-vous de ces pays du Maghreb qui sont limitrophes au Mali ? Est-ce que vous leur demander de faire partie de cette force africaine destinée à stabiliser le Mali ? »
LE PRESIDENT : « Jai rencontré effectivement le Président de la Mauritanie ce matin. Il a déjà pris une décision qui est de sécuriser et fermer sa frontière avec le Mali dans lhypothèse où des terroristes voudraient se réfugier au cur du territoire mauritanien. Ensuite, le Président de la Mauritanie a dit sa disponibilité si un appel lui était adressé par le Président du Mali, par le Président de la CEDEAO. A ce moment-là, la Mauritanie aurait à prendre ses responsabilités.
Pour les autres pays dont vous avez parlé : le Président BOUTEFLIKA et je len ai remercié a autorisé le survol de lAlgérie pour un certain nombre de passages de nos avions et a également fermé sa frontière avec le Mali pour empêcher justement que les terroristes puissent y trouver refuge. Le Maroc nous a également autorisés à survoler son territoire. Ensuite ces pays auront à savoir ce quils ont à faire dans lhypothèse où le conflit durerait plus longtemps quil nest prévu ».
QUESTION : « Est-ce que vous pouvez détailler le soutien des Emiriens à la France ? Sous quelle forme se fera-t-il ? »
LE PRESIDENT : « Je lai dit. Il prendra plusieurs formes : humanitaires - et je pense que cela sera nécessaire à travers les ONG £ financières, il y aura une conférence des donateurs prochainement et tous les pays qui voudront participer non seulement au financement de la MISMA, la force africaine, mais également au financement des aides aux réfugiés et à la reconstruction du Mali ces donateurs seront donc sollicités £ et enfin une aide matérielle. Vous savez que beaucoup de pays nous ont prêté leur concours : des avions de transport, des ravitailleurs, parfois davantage. Enfin les Emirats auront à déterminer eux-mêmes ce quils veulent faire pour nous soutenir ».
QUESTION : « La France nest-elle pas trop seule dans ce conflit ? Vous dites quelle est en première ligne. Il y a des soutiens internationaux au moins verbalement. Ny a-t-il pas au niveau européen quelques absences regrettables et des mobilisations un peu minimales comme le dit votre ministre Alain VIDALIES ? Vous avez dit que si nous retrouvions des terroristes il fallait les détruire. Quavez-vous voulu dire précisément ? »
LE PRESIDENT : « Je reviens sur cette parole : si nous sommes attaqués, nous nous défendons. Si nous voulons appuyer larmée malienne pour arrêter lagression, nous sommes partie prenante. Si ces terroristes ne veulent plus terroriser, ils nont quà abandonner leurs armes et à quitter le territoire malien, parce que beaucoup sont extérieurs au Mali. Pour le reste, si nous pouvons faire des prisonniers nous en feront et je sais que le Mali en détient déjà quelques-uns. Cela pourra être utile.
Ensuite sur les européens : ils ont tous je dis bien tous prodigué leur soutien et même leur aide matérielle. Je ne vais pas citer tous les pays qui nous en ont fait la proposition. Le premier à le faire et je le salue a été le Premier ministre britannique pour des avions de transport et des avions ravitailleurs. Dautres ont suivi, y compris les pays qui ne sont pas parmi les plus puissants dEurope, comme le Danemark. Dautres se proposent, comme la Belgique, pour des aides de formes différentes.
Sur le plan politique, tous les pays sont non seulement solidaires mais convaincus que nous avons pris la bonne décision et que la France a une responsabilité particulière parce quelle est la France. Non pas parce quelle a des intérêts au Mali nous nen avons aucun mais parce que nous avons la capacité dintervenir. Il se trouve que nous sommes une puissance, que nous avons un outil de défense et que lorsque nous sommes mandatés par la communauté internationale, appelés par un pays ami, soutenus par les pays africains et que nous avons vocation à leur laisser la place nous prenons notre responsabilité.
Si nous ne lavions pas prise, vendredi matin, si je navais pas décidé cette intervention, mais où en serait le Mali aujourdhui, compte tenu de ce que nous savons de larmement des terroristes, du nombre de véhicules dont ils disposent, de leur intention qui était daller chercher une position y compris à Bamako et peut être même dans dautres pays africains ? Tous les pays ont donc reconnu que la France avait pris ses responsabilités. Maintenant, nous navons pas vocation à rester.
Nous avons pris une décision, il y a longtemps, dans le cadre des résolutions du Conseil de sécurité : favoriser la création dune force africaine et cest toute lEurope qui doit apporter son soutien à cette force et cest toute lAfrique de lOuest et même au-delà parce que la Mauritanie et le Tchad ne sont pas dans la CEDEAO qui doit également se mobiliser. Dès que cette force africaine sera en situation de pouvoir faire la mission qui lui a été confiée, nous naurons quà lappuyer ».
QUESTION : « Que pouvez-vous nous dire sur le sort des otages ? Navez-vous pas le sentiment davoir mis leur vie en danger en lançant la France dans cette opération ? »
LE PRESIDENT : « Sur le sort des otages, vous me permettrez de ne rien dire. Non pas que je ny pense pas jy pense à chaque instant mais jai considéré y compris pour leur libération que lintervention était la seule solution. Nous ferons tout pour quils puissent être libérés. Ceux qui les ont capturés et détenus, doivent réfléchir. Il est encore temps de les rendre à leur famille ».
QUESTION : Quelle a été la teneur de vos discussions économiques aujourdhui avec les dirigeants des Emirats ?
LE PRESIDENT : « Nous avons parlé de tous les sujets, avec le Président de la Fédération Cheikh Kalifa -, avec le Prince héritier et avec le Premier ministre. De tous les sujets : des sujets de défense, des sujets économiques, de linvestissement et de la constitution dun Fonds. Nous avons même avec Cheikh Mohamed fait et les ministres ici étaient présents une rencontre avec les chefs dentreprises des Emirats et les chefs dentreprises françaises. Nous navons donc écarté aucun domaine ni aucun sujet. Mais ce sont les entreprises qui signent des contrats. Nous pouvons appuyer, soutenir, éclairer ce que nous avons fait montrer lenjeu, trouver des instruments nouveaux. Par exemple ce Fonds que nous pourrions former entre les Emirats et la France pour financer un certain nombre dinvestissements innovants. Mais les entreprises doivent aller chercher ensemble les formes de leurs partenariats ».
QUESTION : « Partagez-vous les inquiétudes et les peurs de la région sur les pratiques de lIran? Le conseil de coopération du Golfe avait critiqué ces pratiques. Mis à part le dossier nucléaire, pensez-vous que lIran est une menace pour la région, sachant ce quils font en Syrie ? »
LE PRESIDENT : « Notre préoccupation est le dossier nucléaire et nous ne voulons pas mettre tous les sujets indifféremment et indistinctement. La prolifération nucléaire est un danger majeur, pas seulement pour cette région mais pour le monde. Vis-à-vis de lIran, cest donc cet appel que nous lançons et formons une nouvelle fois pour aller vers la négociation.
Sur le dossier syrien, il est vrai que lIran soutient Bassar El ASSAD. Ce soutien a-t-il de lavenir ? Je ne le crois pas. LIran doit également réfléchir à ce que signifierait leffondrement du régime de Bassar El ASSAD ».
QUESTION : « Monsieur le Président, vous avez parlé dun partenariat économique avec les Emirats. Il y a un dossier récurent évoqué ce matin à Abou Dabi celui des Rafales. LElysée affirme que le dossier est toujours sur la table. Où en est-on exactement ? A-t-on une chance finalement de vendre cet avion aux Emirats ? »
LE PRESIDENT : « Nous pensons que cest un très bon avion. Je nose pas dire que lexpérience la démontré, mais cest pourtant le cas, aussi bien en Lybie que sur le théâtre malien. Nous pensons que cest une technologie exceptionnelle et nous lavons dit à nos amis émiriens. Ils ne le contestent pas dailleurs. Après cest une question de prix. Mais ce nest pas le Président de la République française qui fixe le prix des avions, cela obéit donc à une logique de discussions et de négociations. Cest pourquoi jai demandé au ministre de la Défense de revenir aux Emirats il la déjà fait pour que lensemble des questions sur les matériels militaires puisse être posé.
Mais vous savez les Emirats ont déjà fait beaucoup pour acheter des équipements français. La base qui est ici depuis 2009 peut y contribuer puisquil y a des opérations qui se font en commun. Nous ne conditionnons donc rien à rien, mais cest vrai quétant présents ici nous avons vocation à avoir des matériels qui puissent être les plus cohérents entre nos deux pays ».
QUESTION : « Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les contours de ce Fonds commun ? Est-ce que cela serait une association entre la Caisse des dépôts et les fonds souverain dAbou Dabi et Dubaï ? Etes-vous prêt à laisser monter les capitaux des Emirats dans les grands groupes français où lEtat est présent ? Concernant Areva, après léchec dun méga-contrat en 2009, loffre nucléaire française a-t-elle encore une chance daboutir dans cette région ? »
LE PRESIDENT : « Tout dabord sur le Fonds. Lidée en a été arrêtée aujourdhui et cest déjà un point très important : les modalités vont être définies. Je lai dit il y a déjà des exemples : entre la France et la Chine, plus récemment entre la France et le Qatar. Mais nous pouvons trouver dautres modalités. Ce qui est intéressant pour nous, ce nest pas simplement de rassembler les capitaux et daller au capital dentreprises françaises, cest de définir des domaines sur lesquels les Emirats et la France pourraient avoir un intérêt et un avantage stratégique à investir. Nous en avons cité quelques-uns : les énergies renouvelables, lefficacité énergétique, la ville de demain Tout ce que nous pourrions donc faire ensemble dans nos deux pays et pas simplement en France voire même dans un certain nombre de régions du monde, nous pourrions le faire à travers ce Fonds. Jai donc demandé au directeur général de la Caisse des dépôts - puisque normalement ces fonds sont adossés à la Caisse des dépôts de venir aux Emirats pour formaliser cette proposition avec eux.
Concernant le nucléaire civil parce que ce nétait pas seulement Areva qui na pas réussi précédemment nous y sommes revenus, bien sûr, dans nos discussions. Nous ne pouvons pas dire que lorganisation française avait été particulièrement brillante. Cest ce que jai retenu de notre conversation avec le Prince héritier. Les Coréens ont été plus agressifs sur ce dossier. Devons-nous en tirer des conclusions ? Oui. Il ne sera plus possible sur une question aussi importante que le nucléaire civil daller en ordre dispersé comme cela a été le cas sur ce contrat et nous mettrons donc les entreprises cest déjà fait en situation de gagner les contrats sur lesquels nous nous présentons, sans donner limage de la confusion ou de la surenchère ».
QUESTION : « Combien de temps pourrait durer cette intervention française Michel Rocard ce matin évoque « une bagarre sur une dizaine dannées » ? Craignez-vous par ailleurs des représailles sur le sol français ou vis-à-vis des intérêts français dans le monde ? »
LE PRESIDENT : « Je vous lai dit nous avons pris une décision majeure. Nous étions les seuls à pouvoir la prendre et jai pris ma responsabilité. Lintervention compte tenu de lagression ne pouvait être décidée que par la France dans le cadre de la légalité internationale et à la demande du Président malien. Mais dès lors quil y aura une force africaine dans les prochains jours et les prochaines semaines, que cette force sera encadrée et soutenue par la communauté internationale et par lEurope, la France na pas vocation à rester au Mali. Nous avons en revanche un objectif à travers les buts que jai présentés : faire en sorte que lorsque nous partirons et cesserons notre intervention, il y ait la sécurité au Mali, des autorités légitimes, un processus électoral et quil ny ait plus de terroristes qui menacent lintégrité du Mali. Mais ce sont les Africains qui vont y contribuer et la France aura été lélément déclenchant, décisif, mais pas lélément permanent ».
QUESTION : « Une petite question personnelle si vous me le permettez : il y a un an on disait de vous que vous étiez incapable de trancher, de décider £ vous étiez un capitaine de pédalo incapable daffronter la tempête. Un an plus tard, on vous dépeint en chef de guerre, on dit de vous que vous navez pas la main qui tremble. Avez-vous limpression que cette épreuve vous change et change un peu votre façon de gouverner ? »
LE PRESIDENT : « Je vais vous faire une confidence : je suis exactement le même. Il y a un an jétais candidat aujourdhui je suis Président. Cela est un changement de responsabilités et de situation. Face à une épreuve, jai fait en sorte que la France puisse être là où elle devait être et je ne me suis pas posé dautres questions : ni par rapport au moment, ni par rapport à lopinion, ni par rapport aux circonstances intérieures. La seule question à laquelle jai répondu cest « quest-ce que devait faire la France dans cet instant ? ». Je pense quelle a été fidèle à son histoire, ses traditions et ses principes, et surtout respectueuse de la légalité internationale et utile à la Paix ».
QUESTION : « Monsieur le Président, que répondez-vous à ce qui disent que justement, la France est et restera le gendarme de lAfrique ? »
LE PRESIDENT : « Ce sont les Africains qui vont être leur propre défenseur et protecteur. Jai prononcé un discours à Dakar et je nen enlève aucune ligne, aucun mot. Ce sont les Africains qui doivent assurer leur sécurité. Mais la France est leur amie. Elle ne peut venir que lorsquelle est appelée et quelle intervient au nom de la communauté internationale dans le cadre de la charte des Nations-Unies et en fonction de résolutions du Conseil de sécurité. Elle ne peut intervenir que dans un moment exceptionnel, pour une période exceptionnelle et pour un temps limité. Cest ce que nous ferons.
Vous savez, il ny a aucun intérêt français, sauf nos ressortissants au Mali. Cela na donc rien à voir avec je ne sais quelle autre politique dun autre temps, où nous défendions un régime quel régime ? où nous défendions des entreprises qui pouvaient avoir des positions quelles entreprises ? Nous ne défendons quune cause, celle de lintégrité du Mali et nous navons quun adversaire, le terrorisme qui ne menace pas que le Mali mais toute lAfrique de lOuest et sans doute lEurope.
Tout à lheure une question ma été posée sil ny avait pas un risque pour la France. Il y a toujours des risques dès lors que lon lutte contre le terrorisme. Mais le pire des risques est de le laisser prospérer. Voilà ce qui aurait été le plus grave ! Que le terrorisme puisse sinstaller dans un pays, disposer darmes considérables, avoir de largent produit par le trafic de drogue, le trafic des otages, le trafic des armes Le plus grand risque que nous pouvions donc courir, cétait de ne rien faire. Ce risque-là nous ne lavons pas pris. Merci ».