Le Président de la République s'est rendu auprès des militaires français déployés sur la base aérienne projetée (BAP) au Levant, jeudi 21 et vendredi 22 décembre 2023.

À l’approche des fêtes de fin d’année, et comme il le fait depuis 2017, le chef de l’État a souhaité offrir un dîner, préparé par le chef des cuisines de la Présidence de la République, aux 350 militaires engagés depuis cette base dans la lutte contre le terrorisme

Depuis cette BAP au Levant, la France assure un déploiement aérien permanent intégré à l’opération CHAMMAL, volet français de l’opération internationale INHERENT RESOLVE. CHAMMAL apporte un soutien militaire aux forces irakiennes engagées dans la lutte contre Daech

Lors de son discours, le Président Emmanuel Macron a exprimé sa fierté d'être à leurs côtés et la reconnaissance de la Nation

Revoir le discours : 

22 décembre 2023 - Seul le prononcé fait foi

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Avec nos forces armées françaises sur la base aérienne projetée au Levant.

Emmanuel MACRON

Monsieur le ministre des Armées,
Monsieur le président de la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l'Assemblée Nationale,
Mon Général, chef d'Etat-major des Armées,
Monsieur l'Ambassadeur,
Messieurs les officiers généraux,
Mon Colonel commandant la base aérienne projetée,
Messieurs les officiers de l'Armée de l'air jordanienne, officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, marins, aviateurs, militaires de tous les services, gendarmes de la base aérienne projetés au Levant.

Je suis particulièrement heureux ce soir d'être parmi vous, accompagné par le ministre, votre CEMA, dans un lieu qui parle, je le sais, au coeur des aviateurs, mais pas uniquement, à tous ceux qui en comprennent la force effective et symbolique, l'exigence et la nécessité des opérations qui s'y déroulent. Ici, nous sommes en effet au coeur de la défense de la paix et de la souveraineté de nos intérêts les plus précieux.
Je suis là, parmi vous, dans ce lieu entre guerre et paix, dans une région où les derniers mois ont rappelé l'importance pour tous, en cette avant-veille de Noël, et ce n'est ni un hasard d'agenda, ni une tradition émoussée, mais plutôt le témoignage d'une reconnaissance particulière, vivante, qui vous honore en même temps qu'elle grandit la Nation. Car c'est à Noël sans doute, plus qu'à aucun autre moment de l'année, qu'apparaît évidente la spécificité de votre engagement parce qu'à l'heure des rassemblements familiaux, elle vous vaut de passer cette fête loin des vôtres et que ce don, cette continuité de votre engagement en ces jours-là est le reflet d'un don de vous-mêmes, plus grand encore, quel que soit le moment, quel que soit le danger. Cette disponibilité et cet engagement total, c'est le choix que vous avez fait, c'est ce que la Nation attend de vous. Et pour cela, vous avez le respect et l'attachement de nos compatriotes et vous avez ma reconnaissance et ma confiance à vous et à toutes nos troupes sur nos théâtres d'opérations, tous ceux qui veillent et agissent pour notre défense, ceux qui vivent Noël dans la fraternité d'armes et dans l'exigence de leur mission et auxquels nous pensons aussi.

Dans ces moments, je veux avoir une pensée pour vos frères d'armes tombés en cette année, en combattant le terrorisme ou en luttant contre les trafics ou les prédations en mer : le sergent-chef Gauchot, l'adjudant-chef Latourte, le sergent-chef Mazier, l'adjudant Barcarel. Leur exemple est là et nous ne les oublions pas comme nous n'oublions pas les blessés que nous accompagnons, eux comme leurs familles.

De ces sacrifices quotidiens, de ces sacrifices ultimes, la Nation est consciente et reconnaissante. Et je suis devant vous, ce soir, quand je viens partager ce moment avec vous, redire leur nom et le remémorer à vos côtés et être en ce moment auprès de vous. Les Français savent combien ce que vous faites ici est important.

Le monde, je le disais, est traversé de soubresauts stratégiques. Ils se sont multipliés, aggravés et nos compatriotes, tout particulièrement depuis le début de l'année 2022, ont vu la guerre revenir dans leur quotidien.

Et si la période de Noël devrait être celle des trêves et des familles, elle est malheureusement aussi un temps de préoccupation et de gravité. Elle est aussi ce temps qui me permet de vous dire combien je suis conscient du niveau d'activité qui est celui de nos armées, combien je sais que ces derniers mois, sur tous les fronts, vous avez été mobilisés et vous continuez de l'être.

Je pense à l'Ukraine, bien sûr. Aujourd'hui, dans ce pays agressé par la Russie depuis le début de l'année 2022, dans l'hiver glacial, l'agression russe se poursuit. Vous qui savez ce qu'est le rapport de force, vous mesurer ce que l'on ne peut laisser faire et vous mesurez combien nous ne pouvons laisser la Russie gagner. Quel serait le lendemain, pour nous, Européens ? Nous continuerons donc à aider les Ukrainiens, ce que nous faisons, même si cela nous coûte, est déterminant pour notre sécurité future, pour notre rôle en Europe et pour la souveraineté de cette dernière. Sans faiblir depuis le début, nous avons financé, accompagné, secouru, mais aussi entraîné et dans le même temps, c'est l'honneur de la France d'avoir été l'une des premières armées à se déployer sur le front est de l'OTAN, et quelques jours simplement après le début des opérations, aller protéger ce flanc oriental en Roumanie.

Je pense également au Sahel. J'ai décidé d'importantes reconfigurations et me suis exprimé à ce sujet en février dernier. Le putsch de cet été au Niger en confirme d'ailleurs la nécessité et nous continuerons là-bas de protéger nos intérêts mais nos armées seront moins présentes en permanence, moins posées, aussi moins exposées. Vos frères d'armes mettent en oeuvre ces orientations avec courage, avec détermination, dans un contexte souvent difficile et le CEMA a donné des directives claires. C'est un immense défi logistique qui est relevé quotidiennement pour désengager nos éléments du Niger et les choses se déroulent avec professionnalisme, calme, respect.

Je pense évidemment à l'Indopacifique où, depuis la stratégie que nous avons déployée en 2018, la France n'a cessé d'accroître sa présence à travers, évidemment, notre présence ultramarine, mais par des partenariats repensés, des exercices conjoints multiples et une stratégie, une présence profondément repensée qui sollicite profondément et d'une manière inédite nos armées.

Je pense enfin à la sécurité de notre propre territoire, toujours. Nous maintenons un dispositif sentinelle, des postures permanentes de protection dans les airs et en mer car la menace terroriste demeure présente. Oui, nous continuons. Et quand je parle de terrorisme, je sais combien ce dernier point résonne ici, en Jordanie, pays allié et ami de longue date. Nos deux pays ont souffert dans leur chair du terrorisme et depuis des années, votre action contre ce fléau en Irak, en Syrie, s’est montrée décisive. La France reste engagée plus que jamais, à un moment où la stabilité de la région est à nouveau menacée. Avec les attaques barbares du 7 octobre, où la France a perdu 40 de ses enfants, et alors même que 3 d'entre eux restent encore en otage. Vous savez le travail sans relâche que nous menons pour leur libération.

Je n'oublie pas non plus le drame humanitaire qui se joue aujourd'hui à Gaza. Ce drame résonne davantage ici, sans doute, que nulle part ailleurs et je souhaite exprimer à nouveau toute ma solidarité avec nos partenaires jordaniens.

La France porte une initiative de paix et de sécurité pour tous en trois piliers : sécuritaire, humanitaire et politique, qui guident notre action résolue et souligne l'importance cruciale de travailler immédiatement à un cessez-le-feu qui, seul, permettra la réouverture d'un horizon politique indispensable et chaque jour volé à la trêve est prélevé sur l'avenir de la région. Chaque vie innocente volée est un don au fanatisme d'aujourd'hui et de demain. C'est de cela aussi et encore dont nous avons parlé avec le roi de Jordanie tout à l'heure.

Mais aujourd'hui, dans toute la région, la France oeuvre activement avec ses partenaires pour éviter que le feu ne se propage plus largement, au Nord bien sûr, avec le Liban et j'ai une pensée en cet instant pour vos camarades de la FINUL, mais aussi en Mer Rouge, où la menace des Houthis sur la liberté de navigation est intolérable. Je salue l'implication encore une fois de nos forces et le rôle essentiel que nous avons joué ces dernières semaines et tout particulièrement ces derniers jours, pour protéger certains de nos alliés et de nos partenaires pour sauver des vies. En Cisjordanie enfin, où il est temps de sévir contre les colons qui menacent la paix. Et quand je regarde la région au-delà de votre présence ici, de cette base, des forces françaises aux Émirats arabes unis, de la FINUL que j'évoquais, à notre présence en Irak dont nous avons parlée tout à l'heure, quel que soit le caractère de sensibilité de celle-ci au sein de l'opération INHERENT RESOLVE, de nos forces françaises à Djibouti... Oui, partout dans la région, la France est présente, déployant avec constance des femmes et des hommes qui luttent contre le terrorisme, qui aident à la souveraineté de nos partenaires et qui ont montré à chaque moment essentiel que nous étions là.

Alors ce soir, ce que je veux vous dire très simplement est simple, c'est que je compte sur vous. Le combat que vous menez avec courage est essentiel. Nous avons pris ces dernières années des décisions massives : deux lois de programmation militaire. À l'issue de ces deux lois, nous aurons doublé le budget de nos armées mais nous avons durant ces années, par ces choix, consolidé un modèle complet. Nous avons surtout tiré les conséquences d'exercices stratégiques d'une analyse profonde, la dernière ayant été menée par nos armées elles-mêmes, dans une configuration totalement inédite. Ce que nous avons vu, et les derniers mois nous l'ont encore enseigné, c'est que nous ne pouvons abandonner aucun des risques possibles, aucun des théâtres d'opération.

On nous disait encore il y a quelques mois : le terrorisme n'est plus à l'heure du jour. C'est la guerre de haute intensité sur le sol européen qui est revenue. Nous n'avons pas, nous, lâché ce combat, à raison, malheureusement, le terrorisme est revenu dans la région comme sur notre sol. On voudrait nous faire croire qu'il faudrait lâcher le cyber, l'exo-atmosphérique, la haute mer et la protection en mer ou sous la mer de nos intérêts, non. Car ceux-là même qui aujourd'hui livrent un combat singulier au coeur de l'Europe nous menacent aussi et menacent nos intérêts dans ces espaces. C'est pourquoi les choix que nous avons faits, que nous avons portés, prenant en compte la pluralité de ces menaces et l'évolution du monde, ont décidé de réinvestir massivement dans nos armées, dans leur consolidation, dans le renforcement de vos capacités, dans des capacités nouvelles, dans l'innovation aussi et vous le savez ici ô combien et je n'en dirai pas davantage.

Mais surtout, et je terminerai par-là, les choix que nous avons faits sont d'investir dans les femmes et les hommes qui sont la solidité la plus essentielle, la plus fondamentale de nos armées. Et c'est pourquoi, en cette période, je suis à vos côtés, dans ce moment de fraternité, j'espère tout à l'heure un peu d'insouciance, pour vous redire qu'au-delà des chiffres, au-delà des équipements, au-delà des décisions de chaque jour que nous prenons, ce sont les vies que vous donnez à la Nation dont nous avons conscience. C'est le choix que vous avez fait et que vous faites chaque jour de donner votre vie jusqu'au sacrifice ultime pour servir la Nation. Ce choix-là n'a aucun prix. Il est ce qui forge votre singularité, ce qui scelle ce pacte séculaire entre la Nation française et ses armées. Le ministre des Armées qui m'accompagne veille au bon déploiement de cette loi de programmation militaire, veille à chacune des instructions que je lui donne, avec le même attachement et je sais, mon Général, combien vous êtes attaché, aussi, à ce lien unique, le vôtre, notre volonté.
C'est pourquoi, en ces heures, c'est mon immense fierté d'être à vos côtés, de pouvoir vous témoigner à nouveau la reconnaissance de la Nation, de pouvoir vous dire en son nom, dans ces moments, qu’elle sait dans ces moments, ô combien vos familles vous manquent, et vous dire combien nous savons qu'être là, c'est servir la France.
Et à travers vous, je veux remercier tous vos frères d'armes qui servent le pays sur tous les théâtres en ces jours si importants. Alors, merci pour cela, merci d'être là.

Vous avez ma reconnaissance, vous savez ma fierté et de manière indéfectible, vous savez, si je puis me permettre ce soir ce mot plus personnel, mon attachement.

Vive la République, vive la France !

Ce déplacement au Royaume hachémite de Jordanie a également été l’occasion pour le Président de la République de s’entretenir avec Sa Majesté Abdallah II, Roi de Jordanie. La France entretient un ambitieux partenariat stratégique avec la Jordanie, et coopère étroitement en matière de sécurité et de développement économique durable

Les échanges ont notamment porté sur le travail en commun en matière d’aide humanitaire et médicale à la population civile de Gaza. Le chef de l’État a redit l’urgence d'instaurer une nouvelle trêve immédiate devant mener à un cessez-le-feu pérenne, et a insisté sur la nécessité d’œuvrer aux conditions d’un retour de la paix et de la stabilité au Proche-Orient avec l’ensemble de nos partenaires.

Entretien avec Sa Majesté Abdallah II, Roi de Jordanie.

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