Le Président de la République a appris avec tristesse que l’avocate et magistrate Michèle Bernard-Requin, grande vulgarisatrice de la justice, auteure d’un texte de défense des hôpitaux qui avait ému la France, a été emportée par un cancer à 76 ans.

Il est des hommes et des femmes pétris de l’idéal qu’ils se sont donné au point de faire corps avec lui, si bien que ni l’âge ni la maladie ne peuvent le ternir, et que leurs derniers jours sont à l’image de toute leur vie. Michèle Bernard-Requin est partie comme elle avait vécu, en femme libre, actrice de sa propre existence, fidèle à son fervent combat pour la justice.

D’un bout à l’autre de son cursus honorum, de la toge noire aux simarres de soie à la toge vermillon fourrée d’hermine, elle montra de la poigne, de l’humour et du cœur, prônant des débats sereins et respectueux. Avocate à la Cour d'appel de Paris, puis substitut du procureur de la République, elle devint vice-présidente au Tribunal de grande instance de Paris. Après avoir exercé la présidence de la Cour d'assises de Paris, elle occupa le rôle d’avocat général à Fort-de-France en Martinique jusqu’à sa retraite en 2009.

Soucieuse de rendre lisible au plus grand nombre la finesse de la machinerie judiciaire, elle publiait régulièrement une chronique dans Le Point et intervenait dans les lycées pour vulgariser le fonctionnement des institutions juridiques. La caméra de Raymond Depardon suivit son travail dans les documentaires Délits Flagrants en 1994 et 10e chambre, instants d'audiences en 2014. On put même la voir incarner dans le film césarisé 9 mois ferme d’Albert Dupontel une présidente du Tribunal, avec un jeu d’autant plus habité que ce fut un rôle qu’elle incarna réellement.

Sa dernière grande plaidoirie, elle la tint depuis un lit de douleur, au service des soins palliatifs de l’hôpital Sainte Perrine de Paris. Exténuée par la maladie, elle trouva encore la force de transcender sa souffrance en gratitude : sa bouleversante dernière tribune, parue il y une semaine, qu’elle voulait « cri d’alarme » et « cri d’amour », rend hommage à la sollicitude et au dévouement infinis du monde hospitalier, et pointe du doigt les difficultés financières, la surcharge et la fatigue qui le minent.

Fustigeant une société qui se désincarne et se déshumanise, où les procédures dématérialisées remplacent le dialogue entre les magistrats, où la lecture des analyses de laboratoire tiennent lieu d’auscultation, où les continents s’émiettent en îles et les organismes en cellules, Michèle Bernard-Requin plaidait pour le retour des liens humains dans la trame la plus profonde de nos existences.

Le Président de la République salue la carrière de cette femme de justice qui, jusqu’à son dernier souffle, porta haut l’étendard de ses combats. Il transmet à ses proches, au monde juridique qui fut le sien, et au monde médical dont elle embrassa la cause, ses condoléances attristées.

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