16 avril 2018 - Seul le prononcé fait foi

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Transcription de la conférence de presse conjointe du Président de la République et du Premier ministre canadien

LE PRESIDENT : Monsieur le Premier ministre,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureux d’accueillir aujourd’hui à Paris le Premier ministre du Canada, Monsieur Justin TRUDEAU, pour sa première visite bilatérale en France. Cela fait suite à plusieurs échanges et rencontres que nous avons partagés ces derniers mois lors de rencontres internationales et cela quelques semaines avant une visite bilatérale que j’effectuerai donc au Canada et la participation au G7 organisé par le Canada. Et je suis très heureux que nous ayons pu, à l’occasion du déjeuner de travail et d’amitié que nous venons de partager, de revisiter à la fois les grandes convergences de vue que nous avons sur le plan international et sur le plan bilatéral.

Notre dialogue est en effet en plein essor et je crois pouvoir dire que sur le plan international, nous avons beaucoup de convergences tant Justin TRUDEAU s’est engagé avec force en défense du multilatéralisme. Je veux ici l’en remercier. Il en a tiré toutes les conséquences dans les prises de position récentes et je veux le remercier pour son soutien également de l’opération menée par les Etats-Unis, la France et le Grande-Bretagne il y a maintenant trois jours, mais aussi parce que la Canada a pris la décision de s’engager au sein de la MINUSMA avec l’envoi d’hélicoptères, de personnels militaires associés. Et vous savez combien nous sommes aujourd’hui extrêmement liés à la MINUSMA par l’opération Barkhane et je crois que ce geste très fort qui est aujourd’hui le vôtre est apprécié.

Nous avons d’ailleurs passé en revue les grandes crises internationales pour, là aussi, constater nos convergences dans l’action à conduire et convergences également qu’on retrouve dans les grandes enceintes internationales où, au G7, au G20, à l’OTAN, comme l’OIF, nous avons décidé de travailler ensemble. Le grand rendez-vous qui s’annonce, c’est celui du G7 qu’organise le Canada et je veux dire ici, d’abord, combien la France soutient et appuiera les initiatives prises par le Canada autour de la lutte contre, justement, le réchauffement climatique avec cette initiative très forte sur les océans et la lutte contre le plastique dans les océans, sur l’égalité hommes-femmes, les emplois d’avenir, une croissance inclusive, la paix et la sécurité.

Sur chacun de ces sujets, nous avons une convergence de vue très forte et la France apportera tout son soutien pour que le G7 de Charlevoix soit un succès. Vous savez pouvoir compter sur notre implication. Et je saisis d’ailleurs cette occasion pour saluer l’initiative canadienne de mettre en place un comité consultatif du G7 sur l’égalité entre les femmes et les hommes et l’échange que nous venons d’avoir avec les coprésidentes, Melinda GATES et Isabelle HUDON, nous a permis, avec la ministre, de voir justement là aussi nos convergences de vue et, je crois, les initiatives très fortes qui seront promues dans le cadre de cet agenda. C’est dans ce cadre aussi que nous souhaitons poursuivre les initiatives concrètes en matière de climat, comme nous l’avons vu avec le ministre HULOT.

Nous travaillons également ensemble sur des grands sujets internationaux que nous aurons à aborder dans le cadre du G7 mais sur lesquels notre action dans la durée va se structurer, en particulier la neutralité et la gouvernance de l’Internet ou les enjeux associés à l’intelligence artificielle. Et notre volonté est véritablement d’adopter aujourd’hui une déclaration sur, justement, la diversité culturelle et la transparence de l’information dans l’espace numérique, comme les deux ministre l’ont fait, et par ce biais, de pouvoir manifester notre volonté de, je crois, préserver à la fois nos valeurs et défendre la vitalité de nos industries culturelles, de nos grands acteurs, mais faire un pas, par cette coopération franco-canadienne, vers une meilleure régulation et la défense de nos préférences collectives en la matière, qu’il s’agisse de l’Internet ou de l’intelligence artificielle. Notre volonté est également sur ce sujet d’aller vers la création d’une expertise mondiale indépendante pour favoriser un débat serein et nous sommes convenus de poursuivre nos travaux en commun dans la perspective justement de ma visite à Ottawa et au Québec au mois de juin.

Notre proximité sur ces sujets se retrouve aussi dans l’engagement qui est le nôtre en matière justement de défense des grands biens publics mondiaux et tout particulièrement du climat. Nous sommes extrêmement attachés l’un et l’autre à la lutte contre le réchauffement climatique et votre gouvernement, Monsieur le Premier ministre, a mis en place des mesures très ambitieuses de réduction des émissions de gaz à effet de serre et s’est fortement impliqué, je vous en remercie, lors du One Planet Summit que nous avions organisé le 12 décembre dernier. Vous avez adopté peu après la signature de l’Accord de Paris un cadre pancanadien sur la croissance propre et le changement climatique qui prévoit notamment un prix plancher sur le carbone, la fermeture graduelle des centrales à charbon traditionnelles, des investissements en technologie propre. Je crois que nous ne pouvons que nous retrouver dans ces initiatives et le Plan Climat présenté il y a quelques mois par le ministre, si je puis dire, adopte la même stratégie pour la France : nous avons d’ores et déjà augmenté le prix du carbone et nous avons une trajectoire qui va dans cette direction ; nous avons pris des engagements que, dans ce mandat, l’intégralité des centrales thermiques à charbon soient fermées et notre volonté est de poursuivre au niveau européen ce même engagement.

Et je crois qu’à ce titre, la coopération renforcée que nous pouvons avoir dans ces domaines est extrêmement structurante grâce notamment au partenariat bilatéral sur l’environnement et le climat que nous venons de conclure. Ce texte ambitieux vise à apporter une réponse coordonnée à l’enjeu que représente le changement climatique et nous y prévoyons une série d’actions communes sur justement les transports internationaux, l’organisation d’un séminaire euro-canadien sur la tarification carbone, l’articulation de nos politiques de développement en matière d’environnement, le soutien à la finance verte, une action conjointe au niveau de l’Organisation mondiale du commerce. Autant de sujets sur lesquels nous allons, je le sais, faire avancer ensemble le sujet climatique. Et je crois que cet engagement est particulièrement structurant alors qu’il nous faut non seulement défendre l’Accord de Paris, mais rentrer dans une phase active de mise en œuvre et prendre de nouvelles initiatives. Et nous prendrons l’un et l’autre nos responsabilités dans ce cadre mais je constate depuis un an que nous sommes parfaitement en ligne sur ce sujet.

Ce partenariat bilatéral répond aussi concrètement à l’un des objectifs fixés dans le plan d’action du gouvernement français sur le CETA, celui de compléter le CETA par une coopération renforcée sur les enjeux climatiques. Nous avons longuement, évidemment, parlé du sujet commercial avec le Premier ministre TRUDEAU et je veux ici saluer le travail qui a été fait entre nos gouvernements et avec l’ensemble de la représentation nationale pour clarifier tout ce qui devait l’être, permettre de mettre en place un système de suivi qui lève les doutes qui avaient à un moment pu exister et nous a permis de rentrer dans une phase de véritable coopération qui va non seulement nous permettre de mettre en œuvre ce traité commercial, mais de le faire dans les conditions qui correspondent à nos valeurs, nos préférences collectives et nos engagements en matière climatique.

Vous aurez, Monsieur le Premier ministre, l’opportunité de vous exprimer demain devant la représentation nationale à l’Assemblée nationale et je sais que vous aurez à cœur d’expliquer justement le cœur de la démarche du Canada et l’importance de ce traité. Nous avons d’ailleurs l’un et l’autre rappelé l’importance du commerce dans le développement de nos économies et je crois que nous portons l’un et l’autre cette volonté de développer les accords commerciaux en les rendant cohérents avec nos engagements sociaux, environnementaux et sanitaires, c’est-à-dire en conciliant l’exigence qui est la nôtre sur le plan économique avec celle que nous portons sur le plan environnemental, social et sanitaire.

Ceci m’amène à nos relations économiques qui sont en plein essor. La France échange chaque année 10 milliards d’euros de biens et services avec le Canada et toutes nos grandes entreprises y sont établies. Et de leur côté, les entreprises canadiennes ont également misé sur la France puisque 250 filiales sont implantées dans notre pays et emploient plus de 28 000 personnes. Le CETA va d’ailleurs nous permettre de développer encore ces échanges qui ont progressé de plus de 6 % depuis septembre et qui permettront, en particulier pour les petites et moyennes entreprises et les entreprises de taille intermédiaire, d’avoir un cadre clair, stable de développement. Tous ces sujets montrent la vitalité, la profondeur de nos liens bilatéraux, ainsi que la détermination et l’engagement conjoint que nous menons dans les combats mondiaux qui sont aujourd’hui les nôtres. Nos relations ont profondément changé de nature, elles se sont approfondies à des niveaux remarquables et c’est pourquoi nous avons évoqué la possibilité de tenir compte de cette évolution et organisé désormais aussi un séminaire intergouvernemental franco-canadien.

Et donc vous le voyez, qu’il s’agisse de l’égalité hommes-femmes, du climat et de la biodiversité, des relations culturelles, de l’économie, en particulier de l’innovation dans de nouveaux domaines que sont le numérique et l’intelligence artificielle, c’est une ambition que nous portons pour chacun de nos pays mais c’est aussi une ambition plus large que nous-mêmes. Ce qui, je crois, ressemble à l’amitié entre le Canada et la France, c’est-à-dire une volonté en commun de porter une vision progressiste du monde qui est le nôtre. Je me réjouis donc, Monsieur le Premier ministre, de poursuivre cette discussion lors de la visite que je ferai à Ottawa avant le sommet du G7 et durant les travaux du G7 que vous aurez à présider. Mais cher Justin, à nouveau, bienvenue en France et merci d’être là.

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