27 avril 2010 - Seul le prononcé fait foi

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Lettre de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, adressée à Mme le Docteur Elisabeth Hubert, Présidente de la la Fédération nationale des établissements d'hospitalisation à domicile, lui demandant d'organiser une large concertation sur la médecine de proximité.

Madame la Ministre,
La médecine de proximité est un service essentiel pour nos concitoyens. Elle constitue le premier élément de la chaîne de soins. Elle se situe à la fois en amont et en aval de l'hôpital dont la vocation est de prendre en charge les situations les plus complexes.
Les médecins libéraux, généralistes et spécialistes, constituent le coeur de la médecine de proximité. Leur engagement à accomplir chaque jour et sans relâche leur mission - soigner, soulager, accompagner -, leur dévouement au service de leurs patients, méritent la considération et la reconnaissance de la société toute entière.
La médecine de proximité repose aussi sur des professionnels paramédicaux qui assurent certains actes de premier recours ainsi que sur des centres de santé qui salarient des médecins.
Sous toutes ses formes, la médecine de proximité est confrontée aujourd'hui à des difficultés structurelles. Au premier rang de celles-ci, il faut citer l'évolution attendue de la démographie médicale. Le nombre de médecins pour 100 000 habitants, qui était de 290 début 2009, pourrait atteindre 275 en 2020, soit le niveau du début des années 1980. La baisse, qui a débuté, de la densité médicale et le non remplacement de médecins libéraux qui cessent leur activité suscitent des inquiétudes légitimes dans la population, particulièrement dans les territoires ruraux et dans les quartiers de la politique de la ville.
Au-delà des données quantitatives, l'exercice de la médecine a profondément a changé. La médecine est devenue hyperspécialisée, ce qui rend sa pratique plus ardue pour le médecin généraliste. Il est devenu plus difficile d'exercer seul pour répondre aux besoins de santé d'une population vieillissante. Les tâches autres que médicales, comme la gestion ou la bureautique, ont pris de l'importance. Les contrôles de l'assurance maladie sont plus fréquents. Et l'évolution de la carrière est un sujet de préoccupation pour nombre de médecins libéraux.
Après avoir engagé la réforme de l'hôpital, je souhaite que des réponses soient apportées aux difficultés structurelles de la médecine de proximité, Les deux mesures de revalorisation des médecins généralistes que j'ai annoncées - l'augmentation de l'acte de consultation « C » à 23 euros et la faculté de coter la consultation comme des spécialistes - sont une forme de reconnaissance de leur mission mais elles ne suffiront pas à traiter les problèmes de fond que rencontre aujourd'hui la médecine de proximité. Il faut identifier des solutions nouvelles pour que clans dix ou vingt ans les Français puissent accéder de façon satisfaisante et équitable aux soins de premier recours dispensés par la médecine de proximité.
Dans cette perspective, je souhaite vous confier la mission d'organiser une large concertation sur la médecine de proximité.
Cette concertation poursuit trois objectifs. Le premier objectif est de donner un nouvel élan au dialogue avec les médecins. Le second objectif est de permettre à tout le monde de s'exprimer : aux syndicats de médecins, mais aussi aux médecins qui font vivre la médecine de proximité au quotidien partout dans notre pays, aux autres professions de santé qui coopèrent avec les médecins ainsi qu'aux élus et aux patients, Le troisième objectif est de faire des propositions modifiant l'exercice libéral, apportant des réponses aux évolutions structurelles que connaît la médecine ambulatoire depuis de nombreuses années.
Vous vous attacherez à caractériser la médecine de proximité à horizon de dix ou vingt ans, en tenant compte des progrès attendus de la médecine et des technologies de la santé, Vous définirez le rôle que pourrait avoir, à cette échéance. la médecine de proximité dans notre système de santé. Pour enrichir votre analyse prospective, vous pourrez faire réaliser une monographie relative à la situation de la médecine de proximité dans deux départements représentatifs.
Vous vous appuierez sur les travaux d'ores et déjà disponibles, en particulier le rapport, que le Docteur Michel LEGMANN vient de me remettre.
Plusieurs thèmes pourront être abordés dans la concertation, parmi lesquels l'adaptation de la formation, la simplification du travail pour libérer du temps médical, l'attractivité du statut libéral, la prise en compte de l'expertise des praticiens, la répartition géographique de l'offre de soins de proximité, la responsabilité des médecins dans l'organisation de l'offre de soins ou le développement des maisons de santé et des coopérations entre professions de santé.
La concertation sera aussi l'occasion d'examiner la possibilité de développer des modes de rémunération plus adaptés à l'évolution du métier de médecin généraliste. Les modalités de paiement au forfait et à la performance devront être soumises au débat, à la lumière des enseignements tirés des expériences étrangères et de l'introduction, en France, du contrat d'amélioration des pratiques individuelles. Vous préciserez également les conditions techniques de cotation, par les médecins spécialistes de médecine générale, d'une consultation de spécialiste.
Vous proposerez, pour chacun de ces thèmes, des mesures concrètes dont vous tâcherez de préciser les modalités, juridiques et opérationnelles de mise en oeuvre. Vous procéderez à un chiffrage de leur coût. Vous veillerez à ce que vos propositions soient compatibles avec l'objectif de retour à l'équilibre des comptes sociaux.
La concertation sera organisée de telle sorte que des débats aient lieu dans les régions. Elle devra également avoir lieu sur un site Internet dédié. Vous pourrez également effectuer des déplacements sots le terrain.
Je vous demande de me remettre votre rapport à la fin du mois de septembre. Le ministère de la santé mettra à votre disposition toutes les ressources dont vous pourrez avoir besoin pour l'organisation de ta concertation.
Je vous remercie d'avoir accepté cette mission si importante pour le contrat social de notre Nation.
Je vous prie de croire. Madame la Ministre, en l'expression de mes sentiments les meilleurs.