14 janvier 2008 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, notamment sur les relations franco-saoudiennes, à Riyad le 14 janvier 2008.

Mes Chers compatriotes,
Je vous demande de bien vouloir excuser mon retard qui est dû à un emploi du temps extrêmement chargé. Si j'ai bien compris aujourd'hui, il fait froid. Je ne le sens pas, mais apparemment.
Je voudrais vous dire combien c'est un plaisir de venir à votre rencontre. Je vous remercie d'être si nombreux. Les Français de l'étranger ont une place particulière dans la communauté nationale à laquelle ils apportent leur vision du monde, leur expérience. Je voudrais vous remercier parce que partout vous donnez l'image du dynamisme, de la diversité et des talents de notre pays.
Et si la France a une vocation à l'universel, c'est parce qu'il existe des Français comme vous, qui n'ont pas hésité à tenter l'aventure, car c'en est bien une, de l'expatriation.
Je suis tout particulièrement heureux de saluer aujourd'hui les Français d'Arabie Saoudite. Vous êtes plus de 4 000 qui vivez dans un pays bien différent du nôtre, auquel nous sommes liés par une amitié forte et ancienne et qui est un partenaire absolument stratégique de la France au Moyen Orient. Je suis sûr que vous trouvez ici des activités passionnantes et que votre rôle y est indispensable, mais j'imagine également les difficultés du quotidien, pour chacun ici, pour vous-même et pour vos familles.
L'accueil chaleureux que nous recevons à Riyad et la qualité de nos entretiens, me confirment dans l'intuition qui était la mienne qu'en Arabie Saoudite, ils ont envie de faire plus et mieux dans les faits et pas simplement dans les discours.
Je veux dire d'ailleurs toute l'estime que j'ai pour mon hôte, Sa Majesté le Roi Abdallah. Ses analyses lucides et sages, ses initiatives courageuses et constructives sont particulièrement précieuses, c'est pour moi... Je ne savais pas que j'avais tant d'amis ici qu'il me faut un hélicoptère sur la tête. Et si tous les pays arabes du monde tenaient un discours aussi ouvert et modéré que celui du Roi d'Arabie Saoudite, les risques de conflit seraient moins élevés.
J'ai de grandes ambitions pour nos relations bilatérales dans tous les domaines. Je dis notamment aux Français qui travaillent pour des entreprises ici que nous les y aiderons de toutes nos forces.
Mais je veux remercier chacun d'entre vous pour sa contribution personnelle. Je compte sur vous individuellement pour que notre pays ait toute sa part dans la réalisation des nombreux projets structurants, industriels et éducatifs que les autorités saoudiennes mettent en oeuvre.
Je veux saluer par la même occasion les conseillers du commerce extérieur, les nombreux amis saoudiens de la France en Arabie, en particulier le Conseil d'affaires franco saoudien et le Club des amis de la culture française.
Je sais que votre communauté a pu subir ces dernières années beaucoup de pressions en raison de la violence des attaques terroristes. Et vous comprendrez que j'ai une pensée particulière pour les familles de nos compatriotes lâchement assassinés. Je pense à Jean-Claude Abesca, Jean-Marc Bonnet, à son fils Romain et à Jean-Michel Novella. C'était dans la Région de Médine, le 26 février 2006. Je veux leur rendre hommage. Je veux saluer la mobilisation des Français d'Arabie et je dois vous dire que nous avons le devoir d ne pas les oublier.
Je salue également les associations françaises, en particulier l'UFE, la AFE, la Maison des Français qui font beaucoup pour l'animation et la cohésion de votre communauté. Je rends aussi hommage à la communauté éducative, au dynamisme des écoles français de Riyad, de Jeddah et d'Alocoubar qui font un travail remarquable au service de la Francophonie et de nos valeurs républicaines. D'ailleurs de ce point de vue, je vais vous dire que cette année, c'est la première année de scolarité gratuite dans les lycées français. Je n'ai pas cédé à la pression d'une certaine technostructure qui voulait me faire augmenter le nombre de boursiers. Je vais m'en expliquer avec vous. Lorsqu'on est dans l'hexagone et qu'on s'inscrit dans un lycée ou un collège public, on ne paie pas la scolarité de ses enfants. Il est injuste que lorsqu'on vit à l'étranger et qu'on inscrit son enfant dans un lycée ou un collège public, on doit payer des sommes considérables. Ce n'est pas l'idée que je me fais de l'égalité entre Français. Bernard Kouchner le sait bien, je n'ai pas voulu de bourses, l'augmentation simplement des bourses, parce que je connais trop le système. On est toujours trop riche pour bénéficier de la bourse et trop pauvre pour payer soi même le lycée. Chaque année, nous rendrons gratuite les études dans une année de scolarité de plus. Et cela mettra à égalité les deux millions de Français qui vivent à l'étranger, comme ceux qui vivent dans l'hexagone.
Je voudrais d'ailleurs dire, parlant sous le contrôle de Bernard, qu'il n'y a aucune raison -si je me heurte à des corporatismes, cela m'est totalement indifférent pour faire ce que j'ai à faire, pour moderniser la France- il n'y a aucune raison que les Français de l'étranger puissent voter pour un sénateur et n'aient pas le droit, comme tous les autres Français, de voter pour député. Il y aura donc des députés qui représenteront les Français de l'étranger, c'est une question d'égalité. Ce n'est pas parce qu'on vit à l'étranger... Ce n'est pas une attaque contre le Sénat, Philippe le sait. Parce que par moment on entend de ces choses... alors vous savez, dès qu'on bouge un truc, l'hystérie s'empare de tout le monde. Il vaut mieux bouger tout, comme cela tout le monde est hystérique, et puis au moins cela donne une vraie raison à l'hystérie. Mais il n'y a aucune raison. Il y a deux millions de nos compatriotes qui vivent à l'étranger, je veux qu'ils aient les mêmes droits que les autres. On ne peut pas dire aux gens : tentez l'aventure de l'expatriation, on en a besoin et en résumé, vous aurez moins de droits que les autres. Vous voterez pour des députés, comme les autres Français. Vous aurez, pour vos enfants, au fur et à mesure des années, des études gratuites, et vous serez considérés, j'y tiens beaucoup notamment pour les Français fonctionnaires qui sont ici. Quand un expatrié revient dans son administration, je demande à ce que l'administration lui fasse une place pour bénéficier de l'expérience de ces Français. Ce n'est pas parce qu'on est parti dix ans qu'on n'a pas le droit de revenir dans son entreprise ou dans son administration. Et quand on revient, ce n'est pas parce que les copains ont pris la place, ou plutôt ne veulent pas la laisser qu'il ne faut pas faire un petit effort. Parce que sinon, l'expérience internationale ne servira à rien. Si l'expérience internationale n'est valorisée que pour repartir à l'international, enfin, je n'ai rien contre ceux qui repartent, mais je souhaite que nos administrations et nos entreprises vous fassent une place.
Enfin, je voudrais également vous dire qu'on est en train de changer profondément notre pays. Ce n'est pas une affaire de gauche ou de droite. C'est une affaire d'avenir ou de passé. Le monde ne nous attend pas. Le monde change à la vitesse de la lumière. Si notre pays ne s'adapte pas aux réalités du monde, notre pays décrochera. Ce n'est pas un choix, c'est une évidence, c'est une ardente obligation. Il n'y a pas d'autre façon de faire. Les autres travaillent davantage pendant que nous, on a fait les 35 heures. La seule idée qu'il est inutile de breveter. Qualité exceptionnelle : il n'y a pas à la protéger celle là, personne n'est venu nous la piquer. De ce point de vue, c'est très économique. Cela coûte cher pour le reste mais là, c'est très économique. Donc, nous voulons libérer les forces de travail dans notre pays.
Aujourd'hui même, il se passe quelque chose de très important en France : les syndicats de salariés et les syndicats d'entrepreneurs sont sur le point d'aboutir à un accord sur un nouveau contrat de travail.
Enfin on apprend à se parler, à se comprendre, à s'écouter, à se respecter. Parce que ce que les autres ont fait pour obtenir le plein emploi, il n'y aucune raison pour que nous, nous ne le fassions pas. Dans ce combat, pour moderniser notre pays, pour le changer, pour que chacun ait le droit à la meilleure formation, pour que nous ayons le plein emploi, pour que la promotion sociale soit de nouveau possible, eh bien la meilleur façon, c'est que vous, les Français du monde, vous expliquiez à vos familles, à vos amis ce qui se passent partout dans le monde, que vous leur racontiez simplement ce que vous avez vu et ce que vous avez vécu. Pour que chacun soit bien persuadé de la nécessité de faire cet effort.
Et puis je voudrais dire combien je suis heureux d'être accompagné des membres du gouvernement : Bernard Kouchner, notre Ministre des Affaires étrangères, Christine Albanel, notre Ministre de la Culture, Xavier Darcos, notre Ministre de l'Education nationale, Christine Lagarde notre Ministre des Finances. Entre parenthèses, j'ai parlé de la place de la femme en Arabie Saoudite, mais je veux quand même dire que ce n'est quand même pas nos habitudes d'avoir attendu 2007 pour qu'une femme exerce la fonction de Ministre de l'Economie et des Finances, honnêtement. Rachida Dati, notre Ministre de la Justice, ce n'est par parce que tu es carrément chez toi ici, qu'on doit disparaître, Hervé Morin, notre Ministre de la Défense. Et puis les parlementaires qui m'accompagnent : Olivier Dassault, Député, le Sénateur Marini, Jean-Claude Guibal et notre ami Maurice Leroy. Et bien sûr, je veux saluer notre Ambassadeur et son épouse qui fait un travail remarquable.
Je voudrais terminer en vous disant ceci : je suis entouré d'une équipe diverse, mais il faut que vous compreniez qu'on ne peut pas diriger un grand pays comme la France si on n'est pas capable de transformer les élites françaises dans leur diversité, comme le pays est divers. Moi, j'ai voulu l'ouverture, j'ai voulu que des femmes et des hommes différents participent à l'application du projet présidentiel que les Français avaient choisi. Parce que pour faire des grands changements, il faut de grande majorité. Et je suis très fier que des hommes comme Bernard Kouchner aient accepté d'avoir le courage de sortir du train-train quotidien pour participer au service de son pays, à une action de réformes en profondeur. C'est comme cela que l'on construit un projet politique. Je suis très heureux qu'il y ait dans le gouvernement des Rachida Dati, des Fadela, des Rama Yade, parce qu'on ne peut plus continuer avec un pays comme le nôtre où les élites ressemblent si peu à la base : même origine, même costume, même école, cela suffit ! La diversité, elle est à la base et elle est au sommet.Et puis, enfin je voudrais vous dire une dernière chose : huit mois après, même pas fatigué.