6 mars 1996 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Déclaration de M. Jacques Chirac, Président de la République sur le développement régional de la Franche Comté, sur la réforme de l'armée, la réduction des effectifs et des implantations militaires et sur l'achèvement du TGV Rhin - Rhône, et l'avenir du canal Rhin - Rhône, Besançon le 6 mars 1996.

On m'avait dit, monsieur le maire, et je le savais, vous l'avez rappelé tout à l'heure avec beaucoup d'esprit, que les Bisontins et les Franc-comtois étaient des gens de caractère, ce qui n'est pas pour m'inquiéter car il y a du Franc-comtois dans les Limousins sur ce plan. Il s'agit là pour moi d'une qualité mais vous avez aussi une très grande courtoisie dans cette région et c'est au fond bien agréable.
- La démocratie ne fonctionne réellement bien que dans le respect mutuel et ce qu'il faut de courtoisie. C'est sans aucun doute l'une des caractéristiques également de votre région, de votre département et de votre ville.
- Je voudrais également saluer particulièrement les élus parlementaires, départementaux et municipaux. Vous remercier d'avoir indiqué que c'est à l'ensemble des élus, c'est-à-dire, aux racines même de votre démocratie, de votre département, que je voudrais accorder un très cordial salut ayant bien conscience, surtout dans les périodes difficiles ou de crise, de la chance extraordinaire que nous avons d'avoir dans notre pays un nombre aussi important d'élus qui défendent à la fois un certain nombre d'idées mais aussi un territoire qui en a aujourd'hui besoin, qu'ils soient élus des communes rurales ou qu'ils soient élus des communes urbaines.
- Je voudrais aussi, monsieur le maire, vous remercier de cet accueil auquel je suis naturellement très sensible et j'ai le souvenir agréable de la visite que j'avais faite à Besançon et de votre réception, monsieur le maire, dont je vous remercie encore et c'est avec joie que je signerai à nouveau votre Livre d'Or.
- Vous avez également évoqué, alors là de façon plus sérieuse, les problèmes auxquels vous êtes confrontés dans une ville dont le dynamisme est bien connu. Vous avez évoqué les problèmes de l'emploi qui sont bien ceux qui nous préoccupent tous, quelles que soient nos options et qui aujourd'hui représentent pour la France un grand danger.
- Un grand danger, parce que c'est cet emploi défaillant, c'est ce chômage qui est à l'origine d'une sorte de fracture qui a touché notre société et qui a pour conséquence de laisser un nombre croissant de nos concitoyens se marginaliser un peu sur le bord du chemin. Il n'y a pas de pays dynamique, il n'y a pas de pays actif qui s'impose s'il n'y a pas de cohésion sociale, s'il n'y a pas donc de solidarité et la lutte contre le chômage si difficile qu'elle soit, nous en avons tous conscience, est naturellement notre première priorité.
- C'est la priorité lancinante des élus locaux. J'ai été moi-même longtemps élu local et je les connais et les comprends bien. C'est également celle de ceux qui nous gouvernent cela va de soi. Vous avez évoqué et cela supposera sans aucun doute un effort d'imagination de sortir un peu des sentiers battus. Cela exigera des réformes dans la formation des hommes.
- Tout-à-l'heure, l'un de vos adjoints, monsieur le maire, me disait très justement penser au lycée professionnel. Il est évident que la formation professionnelle est l'un des éléments qui mérite non seulement attention mais également impulsion nouvelle et probablement une approche un peu différente de l'approche classique dans la formation des jeunes.
- Je ne veux pas développer longuement, j'aurai l'occasion de le faire ici dans le département demain et après-demain, mais je voulais simplement vous dire que je partage avec vous sans réserve cette inquiétude sur tout ce qui touche le chômage.\
Vous avez évoqué le rouge et le noir et plus particulièrement le noir en parlant des inquiétudes qui sont aujourd'hui les vôtres compte tenu de l'importance des implantations militaires dans cette région et notamment dans ce département et des projets de réforme de l'armée que j'ai initiés.
- Je voudrais vous dire deux choses. La première, est qu'une grande nation se doit d'avoir une armée moderne et efficace correspondant aux besoins de son temps, qu'il s'agisse de sa défense ou qu'il s'agisse de ses responsabilités internationales. Il était aujourd'hui nécessaire de faire une réforme pour donner à notre défense les moyens de ses missions. Cela bien entendu comporte quelques contraintes et notamment la diminution du nombre de nos grandes unités qui inquiète beaucoup un certain nombre de maires.
- Vous savez, j'ai été près de trente ans élu de la Corrèze : la Corrèze vit en particulier grâce à un régiment d'infanterie qui se trouve à Brive et une manufacture d'armes qui se trouve à Tulle. Tout cela pour vous dire que je n'ignore pas les problèmes ou les conséquences des restructurations qui s'imposeront.
- Mais je voudrais vous rassurer d'une certaine manière en vous disant que cette évolution va se faire dans des conditions aussi sages que possible. D'ailleurs il faut savoir que cette restructuration qui touchera soit des industries d'armement, mais ce n'est pas votre problème immédiat, soit des unités, cette réforme va prendre six ans. Elle ne sera achevée qu'en 2002, ce qui veut dire que nous ne faisons pas cela dans la précipitation comme certains pays, la Belgique par exemple - pour ne citer que les derniers - l'a fait, ce n'est pas de ma part une critique à l'égard de la Belgique, mais on voit que ce sont des réformes qui doivent être faites avec le temps nécessaire.
- Deuxièmement, vous avez indiqué qu'il y avait à Besançon près de 5000 militaires. Vous avez cité le nombre des enfants dans les écoles et vous avez indiqué que cela représentait peut-être quelque chose comme 5 % de l'activité économique de la ville, et c'est vrai dans d'autres endroits. Ce que je peux vous dire, c'est que cette transition se fera avec l'objectif qu'il n'y ait pas de conséquences sur chacun des sites.
- Je suis tout à fait déterminé à ce que soit mise en oeuvre une structure d'accompagnement qui aura pour objectif de remplacer d'une façon ou d'une autre, dans une liaison, et dans une concertation totalement étroite avec les élus le cas échéant - surtout lorsqu'il s'agit des industries d'armement - bien entendu avec des organisations syndicales des travailleurs de ces industries. Ceci doit se faire dans mon esprit sans qu'il y ait de dommages et que les contreparties devront être apportées.
- J'ajoute que j'entends dire des choses, ou je lis des choses dans la presse sur les décisions prises dans telle ou telle région ou telle ou telle ville. Je sais que l'on parle beaucoup dans les popotes et c'est naturel. Tout ceci est totalement dépourvu de fondement car dans l'état actuel des choses, le ministère qui ne pouvait pas le faire en quelques semaines, vous le comprendrez bien, n'a pas encore arrêté son plan de restructuration. Mais soyez sûr, monsieur le maire, que mon désir, ma volonté, est que ces choses se passent normalement avec le temps nécessaire et les contreparties qui s'imposent de façon à ne pas créer un traumatisme économique s'ajoutant au traumatisme social qu'impliqueraient une rapide ou des décisions trop rapides ou trop légères dans ce domaine.\
Vous avez enfin évoqué les grands axes de communication. Vous avez dit que le TGV Rhin - Rhône avançait ou reculait. Je ne crois pas, je crois qu'il reste. Le TGV Rhin - Rhône est sans aucun doute une nécessité. Il est inscrit au plan de 92, personne ne le conteste, il est donc sur la liste. Il est en concurrence, c'est vrai, avec le TGV Est qui est plus avancé, il est en concurrence avec le TGV Sud, mais ce qui est certain c'est qu'il sera réalisé. Je suis incapable de vous dire aujourd'hui la date mais on ne peut pas dire qu'il recule. On peut dire qu'il n'avance pas suffisamment vite mais on ne peut pas dire qu'il recule. C'est une décision définitivement prise de réaliser ce TGV.
- Je n'évoquerai pas, ayant été immédiatement informé de l'avis d'un certain nombre de personnalités de cette région, le canal Rhin - Rhône, c'est un sujet très long. Je veux simplement que ceux qui s'y intéressent, sachent que j'ai reçu les informations nécessaires, en tous les cas, émanant de ceux qui ne sont pas d'accord avec sa réalisation. Je ne trouvais personne d'ailleurs encore qui soit tout à fait d'accord ou en tous les cas qui ose le dire. J'étudierai avec beaucoup de soin naturellement les arguments des opposants qui m'ont été donnés tant par les élus de Besançon que par les élus de la région.
- M. le maire, vous avez bien voulu me donner cette copie d'une superbe statue que je connaissais et qui est d'ailleurs d'un Franc-comtois, d'un sculpteur franc-comtois. J'y suis très sensible. La prochaine fois que vous viendrez à Paris, j'aurai le plaisir de vous recevoir et vous la verrez en bonne place, en l'honneur de Besançon et de la Franche-Comté, dans le Palais de l'Elysée.
- Encore une fois, monsieur le maire, merci, je me permets de vous laisser quelque chose de beaucoup plus modeste, mais qui n'est pas une copie, et qui est tout simplement la médaille de la République française. Nous nous rejoignons en effet, au moins sur un point, c'est notre respect pour la République française et la République en général.\