11 mai 1995 - Seul le prononcé fait foi
Interview de M. Jacques Chirac, Président de la République, dans "Le Figaro" du 11 mai 1995 sur sa politique en faveur de l'automobile et de la sécurité routière.
QUESTION.- Quelle place le dossier de l'automobile française tient-il dans votre projet de gouvernement qui sera confronté, durant le prochain septennat, aux concentrations de marques, aux problèmes énergétiques et environnementaux ?
- LE PRESIDENT.- Se déplacer est l'une de nos libertés fondamentales et l'automobile est, pour de nombreux Français, le moyen indispensable d'exercice de cette liberté. Quant à notre industrie automobile, elle est, depuis plusieurs années, à la pointe de la technologie dans de nombreux domaines et constitue l'un des secteurs clés de notre économie. Aussi, je suis particulièrement attentif à ce que ce secteur soit mis en situation de soutenir, dans les meilleures conditions, la compétition mondiale et à ce que les Français puissent continuer à avoir accès à l'automobile.
- Dans ce cadre général, je souhaite que l'action publique privilégie l'amélioration de notre réseau routier et autoroutier. L'effort engagé en ce sens, depuis de nombreuses années, doit être poursuivi, et la lutte contre la pollution automobile, dont les conséquences néfastes pour notre santé (asthmes, bronchites récidivantes) et sur la qualité de la vie (bruit, dégradation des façades), sont aujourd'hui parfaitement connues. Il est temps de mettre en oeuvre, en ce domaine, une véritable politique.
- L'effort devra porter dans trois directions : le soutien des scientifiques et des industriels qui travaillent sur la "voiture propre", le développement du transport combiné rail-route, le recours - dans les zones sensibles - aux revêtements anti-bruit des chaussées.\
QUESTION.- L'absence de mobilisation de la part des usagers - moins motivés que les motards ou les transporteurs routiers qui savent se faire entendre - a conduit l'Etat à augmenter sans relâche la pression fiscale sur les budgets automobiles, taxant moins l'achat (baisse de la TVA, prime Balladur) et plus l'usage (carburants, taxes à 34 % sur l'assurance, etc.). Quelle sera votre attitude en la matière ?
- LE PRESIDENT.- La question de la taxation automobile en France me paraît importante. En ce qui concerne les aides apportées, ces dernières années, à l'achat d'un véhicule neuf, celles-ci me paraissent efficaces et ont permis de "rajeunir" notre parc automobile. C'est un gage de sécurité important sur nos routes.
- Le problème de la taxation des carburants ne concerne pas seulement la France et doit naturellement être analysé dans sa dimension européenne. La réponse collective devra par conséquent être trouvée au niveau de l'Europe. De plus, les 150 milliards de francs prélevés chaque année au titre de la Tipp (taxe intérieure sur les produits pétroliers), doivent être mis en regard du coût de la route pour la collectivité. L'utilisation de l'automobile engendre en effet un certain nombre de nuisances, que les économistes appellent les effets extrêmes, telles que les dépenses liées à la prévention, au bruit, à l'effet de serre, au stress...
- Au total, ce coût induit est estimé approximativement à 200 milliards de francs, dont 100 milliards pour la seule sécurité routière. S'y ajoute, d'autre part, le coût pour l'Etat de la construction et l'entretien du réseau routier national. Si l'on tient compte de ces différents éléments, je constate que les problèmes liés à la route se posent, à peu de choses près, dans les mêmes termes pour tous les pays de l'Union européenne.\
Les bons résultats de sécurité routière sont justifiés officiellement par les limitations de vitesse, tandis que les progrès liés à l'automobile elle-même et au réseau sont escamotés avec beaucoup de constance. Pensez-vous rétablir un peu plus de sérénité dans les commentaires de la sécurité routière et orienter l'action de celle-ci vers une politique plus constructive avec, par exemple, la nécessaire réforme du permis de conduire ?
- LE PRESIDENT.- Près de 10000 morts par an sur les routes, c'est inacceptable. La sécurité routière doit rester l'une de nos priorités. Pour cela, tous les moyens disponibles doivent être mis en oeuvre. Cependant, en ce domaine, je crois plus à l'importance de la sansibilisation et de la formation des automobilistes qu'à la répression. Je souhaite que le prochain gouvernement engage, en ce sens, un plan de lutte contre l'insécurité routière. Ce plan devra faire l'objet d'une large concertation entre tous les partenaires et porter prioritairement sur la sensibilisation des conducteurs aux risques pour autrui d'une conduite imprudente ou dangereuse, l'amélioration du réseau routier et la formation des automobilistes.
- QUESTION.- La répression des infractions, avec des projets de délit de grand excès de vitesse ou de mise en danger d'autrui, ravale le conducteur "bon père de famille" au rang de délinquant de droit commun. Ne pensez-vous pas que l'on grossit exagérément le problème des infractions automobiles ?
- LE PRESIDENT.- La sécurité routière doit, je le répète, être une priorité. C'est une question de vie ou de mort dans certains cas. Doit-on, pour autant, accentuer la répression en ce domaine ? Je crois que, sur ces questions, il convient, avant d'envisager toute nouvelle réforme, de procéder à une étude sérieuse d'impact des lois déjà votées et de leurs effets.
- Je pense, entre autres, aux effets du permis à points. D'autre part, un effort important doit être mené pour sensibiliser les automobilistes sur ces questions. Je suis convaincu que de telles mesures produisent souvent plus d'effets qu'une multitude de textes et de contraintes.
- QUESTION.- Si vous deviez choisir une voiture qui vous ressemble, en faisant abstraction de sa nationalié et de l'époque, laquelle serait-ce ?
- LE PRESIDENT.- Peut-être une 2 CV, en souvenir de ma première voiture.\
- LE PRESIDENT.- Se déplacer est l'une de nos libertés fondamentales et l'automobile est, pour de nombreux Français, le moyen indispensable d'exercice de cette liberté. Quant à notre industrie automobile, elle est, depuis plusieurs années, à la pointe de la technologie dans de nombreux domaines et constitue l'un des secteurs clés de notre économie. Aussi, je suis particulièrement attentif à ce que ce secteur soit mis en situation de soutenir, dans les meilleures conditions, la compétition mondiale et à ce que les Français puissent continuer à avoir accès à l'automobile.
- Dans ce cadre général, je souhaite que l'action publique privilégie l'amélioration de notre réseau routier et autoroutier. L'effort engagé en ce sens, depuis de nombreuses années, doit être poursuivi, et la lutte contre la pollution automobile, dont les conséquences néfastes pour notre santé (asthmes, bronchites récidivantes) et sur la qualité de la vie (bruit, dégradation des façades), sont aujourd'hui parfaitement connues. Il est temps de mettre en oeuvre, en ce domaine, une véritable politique.
- L'effort devra porter dans trois directions : le soutien des scientifiques et des industriels qui travaillent sur la "voiture propre", le développement du transport combiné rail-route, le recours - dans les zones sensibles - aux revêtements anti-bruit des chaussées.\
QUESTION.- L'absence de mobilisation de la part des usagers - moins motivés que les motards ou les transporteurs routiers qui savent se faire entendre - a conduit l'Etat à augmenter sans relâche la pression fiscale sur les budgets automobiles, taxant moins l'achat (baisse de la TVA, prime Balladur) et plus l'usage (carburants, taxes à 34 % sur l'assurance, etc.). Quelle sera votre attitude en la matière ?
- LE PRESIDENT.- La question de la taxation automobile en France me paraît importante. En ce qui concerne les aides apportées, ces dernières années, à l'achat d'un véhicule neuf, celles-ci me paraissent efficaces et ont permis de "rajeunir" notre parc automobile. C'est un gage de sécurité important sur nos routes.
- Le problème de la taxation des carburants ne concerne pas seulement la France et doit naturellement être analysé dans sa dimension européenne. La réponse collective devra par conséquent être trouvée au niveau de l'Europe. De plus, les 150 milliards de francs prélevés chaque année au titre de la Tipp (taxe intérieure sur les produits pétroliers), doivent être mis en regard du coût de la route pour la collectivité. L'utilisation de l'automobile engendre en effet un certain nombre de nuisances, que les économistes appellent les effets extrêmes, telles que les dépenses liées à la prévention, au bruit, à l'effet de serre, au stress...
- Au total, ce coût induit est estimé approximativement à 200 milliards de francs, dont 100 milliards pour la seule sécurité routière. S'y ajoute, d'autre part, le coût pour l'Etat de la construction et l'entretien du réseau routier national. Si l'on tient compte de ces différents éléments, je constate que les problèmes liés à la route se posent, à peu de choses près, dans les mêmes termes pour tous les pays de l'Union européenne.\
Les bons résultats de sécurité routière sont justifiés officiellement par les limitations de vitesse, tandis que les progrès liés à l'automobile elle-même et au réseau sont escamotés avec beaucoup de constance. Pensez-vous rétablir un peu plus de sérénité dans les commentaires de la sécurité routière et orienter l'action de celle-ci vers une politique plus constructive avec, par exemple, la nécessaire réforme du permis de conduire ?
- LE PRESIDENT.- Près de 10000 morts par an sur les routes, c'est inacceptable. La sécurité routière doit rester l'une de nos priorités. Pour cela, tous les moyens disponibles doivent être mis en oeuvre. Cependant, en ce domaine, je crois plus à l'importance de la sansibilisation et de la formation des automobilistes qu'à la répression. Je souhaite que le prochain gouvernement engage, en ce sens, un plan de lutte contre l'insécurité routière. Ce plan devra faire l'objet d'une large concertation entre tous les partenaires et porter prioritairement sur la sensibilisation des conducteurs aux risques pour autrui d'une conduite imprudente ou dangereuse, l'amélioration du réseau routier et la formation des automobilistes.
- QUESTION.- La répression des infractions, avec des projets de délit de grand excès de vitesse ou de mise en danger d'autrui, ravale le conducteur "bon père de famille" au rang de délinquant de droit commun. Ne pensez-vous pas que l'on grossit exagérément le problème des infractions automobiles ?
- LE PRESIDENT.- La sécurité routière doit, je le répète, être une priorité. C'est une question de vie ou de mort dans certains cas. Doit-on, pour autant, accentuer la répression en ce domaine ? Je crois que, sur ces questions, il convient, avant d'envisager toute nouvelle réforme, de procéder à une étude sérieuse d'impact des lois déjà votées et de leurs effets.
- Je pense, entre autres, aux effets du permis à points. D'autre part, un effort important doit être mené pour sensibiliser les automobilistes sur ces questions. Je suis convaincu que de telles mesures produisent souvent plus d'effets qu'une multitude de textes et de contraintes.
- QUESTION.- Si vous deviez choisir une voiture qui vous ressemble, en faisant abstraction de sa nationalié et de l'époque, laquelle serait-ce ?
- LE PRESIDENT.- Peut-être une 2 CV, en souvenir de ma première voiture.\