15 octobre 1990 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Mitterrand, Président de la République, notamment sur les récents événements au Liban, le conflit dans le Golfe et la proposition d'une conférence internationale pour régler les conflits au Proche et Moyen-Orient, Paris, le 15 octobre 1990.

Mesdames,
- Messieurs,
- J'ai souhaité vous revoir ce soir en raison de diverses informations et des événements qui se sont produits surtout au Proche-Orient, mais en liaison directe avec, bien entendu, le Moyen-Orient. Il m'a paru souhaitable que vous puissiez me poser les questions qui vous paraîtraient nécessaires pour que vous connaissiez la position de la France et que cela vous évite les interprétations qui seraient inexactes pour peu qu'il y en ait.
- Je crois que l'on pourrait parler d'abord du Liban, puisque là se sont déroulés des faits récents, des faits nouveaux, avec le départ du Général Aoun des fonctions qu'il occupait et sa présence à l'ambassade de France à Beyrouth.
- J'ai lu beaucoup d'interprétations qui m'ont paru infondées. La politique de la France est connue depuis déjà longtemps. Il faut remonter, en tout cas, à l'année dernière exactement, le 24 octobre 1989, et aux accords dits de Taef qui est une ville importante d'Arabie saoudite, où se sont réunis les parlementaires libanais, lesquels ont souscrit aux propositions émanant d'un comité tripartite reconnu par tout le monde, composé du roi du Maroc, du roi d'Arabie et du président algérien. Ne nous attardons pas sur ces accords de Taef, sinon pour noter deux choses. D'abord, on demandait d'établir une loi fondamentale au Liban, capable de modifier les accords anciens qui remontent, je crois, à 1943. Il s'agissait d'une démarche tendant à mettre fin à la guerre civile. Il était donc demandé le départ des troupes étrangères, le retour à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité, à l'unité.
- Un président a été élu, conformément à ces accords. Ce président est un président chrétien conformément au partage des pouvoirs traditionnels au Liban où, comme vous le savez, le président est chrétien et le chef de gouvernement musulman. Le premier président élu dans ces circonstances a été peu de temps après assassiné, le président Moawad. Un autre président a été élu, le président Hraoui. Et la France aussitôt a reconnu l'existence de ce gouvernement, résultat d'un accord qui devait poursuivre la mise à exécution des principes, dont la France se réclame, c'est-à-dire la fin de la guerre civile, le départ des armées étrangères, et en attendant leur départ, leur cantonnement, si je puis dire, dans des zones préalablement définies et, surtout, le retour à l'indépendance et à la souveraineté du Liban sous une unique autorité.
- Nous avons reconnu ce gouvernement et nous avons mandaté notre ambassadeur au Liban pour qu'il présente ses lettres de créances au Président Hraoui, ce qui a été fait. Nous avons en même temps informé le Général Aoun de ce que nous faisions et nous lui avions recommandé de se soumettre à la loi commune afin de mettre fin à la guerre civile.\
J'ajoute qu'il y a eu, à cette époque, - cette fois-ci c'est le 7 novembre 1989, Taef, c'est le 24 octobre - une déclaration du Conseil de sécurité adoptée par les 15 membres, mais une déclaration, ce n'est pas une résolution, cela n'a pas tout à fait le même poids juridique. Cette déclaration en rappelait deux précédentes : l'une du 15 août et l'autre du 20 septembre de la même année. Ce qui veut dire que le Conseil de sécurité s'est occupé de cette affaire au moins à trois reprises entre le mois d'août et le mois de novembre. La France n'a pas manqué d'être active au sein du Conseil de sécurité dont elle est membre permanent.
- Cette déclaration que je rappelle, c'était sous la présidence chinoise à l'époque, a proclamé, de nouveau, affirmé la souveraineté, l'indépendance, l'intégrité et l'unité du Liban. J'ai cité ces quatre mots, parce qu'ils figurent tous les quatre dans le texte. Cette déclaration demandait aux Libanais de se regrouper autour de leur Président. La France a de nouveau insisté dans le même sens auprès du général Aoun. Ont suivi une série de péripéties qui ont conduit les différents partenaires-adversaires à rechercher des appuis à l'extérieur, tantôt le président syrien, parfois le président irakien. Et cela est devenu de plus en plus une guerre civile entre chrétiens maronites, une guerre civile entre chrétiens, déplorable, insoutenable. Les forces armées se sont séparées, le patriarche maronite s'est opposé au maintien du Général Aoun. Un nouveau chef d'Etat major des armées a été désigné, les milices chrétiennes ont engagé le feu, ont répondu au feu, on ne va pas chercher qui a commencé, des troupes du Général Aoun ou des autres. Bref, une guerre civile entre chrétiens dont ont naturellement profité les autres fractions et en même temps les pays étrangers, surtout les pays voisins qui entendaient bien maintenir la présence de leurs troupes sur le sol libanais, j'entends la Syrie et Israël.\
Voilà la réalité, pourquoi la contrefaire ? Pourquoi sembler dire que untel représente une cause et l'autre l'autre ? Non, la réalité c'est qu'il existe un Président libanais chrétien, régulièrement élu, reconnu par l'ensemble des nations et en particulier par la France et quand dans le débat s'est ouvert entre chrétiens, la plupart de ceux qui ont eu à s'exprimer, en particulier les autorités religieuses se sont prononcées en faveur de la légalité telle que je viens de la définir. Alors, où est le procès s'il y a procès ?
- Je juge tout cela très triste et je suis intervenu personnellement plusieurs fois tout en voyant bien de quelle façon inéluctable s'engageait ce nouveau conflit cent fois répété depuis si longtemps. J'ai demandé plusieurs fois au Président Hraoui d'éviter le recours à la force et j'ai retenu autant que j'ai pu le bras du Président syrien appelé au secours par le Président chrétien du Liban. Je suis obligé de rappeler là que c'est un Président chrétien du Liban qui pour se défaire des Palestiniens a appelé l'armée syrienne à occuper le Liban, il y a quelques années. Les choses ne sont pas si simples que l'on pourrait le croire à la lecture d'un certain nombre de déclarations d'hommes politiques qui s'expriment avec légèreté sur un sujet aussi grave. Si vous le voulez bien, je suis prêt à répondre à vos questions sur ce thème avant de traiter les autres, ce sera plus clair pour ceux qui nous entendent.\
QUESTION.- Monsieur le Président, la France souhaite accueillir le Général Aoun et le gouvernement libanais refuse de le laisser partir. Comment peut se résoudre cette contradiction ?
- LE PRESIDENT.- Ecoutez, il faut avoir des idées simples. Le Général Aoun s'est réfugié à l'ambassade de France. Il a demandé l'asile politique à la France. La France le lui a accordé, c'est désormais une question d'honneur pour elle. Elle préservera le Général Aoun en veillant à ce qu'il puisse rester à l'ambassade de France, terre française jusqu'au jour, le plus proche possible, je l'espère, où il pourra venir en France comme il le souhaite.
- QUESTION.- Le Gouvernement libanais reproche à la France d'avoir accordé le droit d'asile au Général Aoun sans consulter le gouvernement libanais. Quel est votre réponse, monsieur le Président, à cela et pensez-vous que l'obstacle majeur de la crise libanaise est écarté maintenant avec le départ du Général Aoun ?
- LE PRESIDENT.- Permettez-moi, madame, de vous faire cette observation. Si la France devait demander l'accord des autorités du pays que quitte tel ou tel exilé, afin de trouver refuge chez nous, elle n'obtiendrait jamais cet accord, ce n'est pas une formalité juridique exigible. La France est une terre d'asile pour beaucoup de gens menacés dans leur vie ou dans leur liberté pour les idées qu'ils défendent. Eh bien, nous avons appliqué cette règle au Général Aoun, cela nous paraissait évident, et si bien des personnalités amies du Liban nous demandent la livraison du Général Aoun, je le leur dis à l'avance, ce sera non !
- QUESTION.- Pensez-vous que l'obstacle majeur à la solution de la crise libanaise est écarté avec le départ du Général Aoun ?
- LE PRESIDENT.- C'est un obstacle. Je pense en tout cas que le départ du Général Aoun enlève désormais tout alibi aux puissances étrangères qui souhaiteraient maintenir des troupes sur le sol du Liban.\
QUESTION.- Vous avez dit tout à l'heure unité, indépendance, souveraineté, on peut se poser la question de ce que vaut le pouvoir constitutionnel du Président Hraoui quand l'ordre règne actuellement au Liban du fait de l'armée syrienne beaucoup plus que de l'armée israélienne au sud. La question est la suivante : est-on bien assuré que dans les deux ans qui viennent, c'est-à-dire qu'avant 91 les troupes syriennes et les troupes israéliennes se retireront du Liban et que pouvez-vous faire personnellement pour accélérer ce mouvement : retrait des uns et des autres ?
- LE PRESIDENT.- Je n'en suis pas plus assuré qu'aucun chef de l'Etat en France n'a été assuré d'obtenir la fin des pressions syriennes et des pressions israéliennes qui ne datent pas d'hier. Ce dont vous pouvez être assuré, c'est que la France au sein du Conseil de sécurité continuera d'agir en faveur de l'indépendance et de la souveraineté du Liban afin d'obtenir que les délais soient respectés et que ces occupations étrangères permettent aux Libanais de vivre, enfin, entre eux et en paix.
- QUESTION.- Monsieur le Président, est-ce que vous accepteriez le principe d'un gouvernement libanais en exil ? Vous savez que de nombreux Libanais ne reconnaissent pas la constitutionnalité et même la légitimité du gouvernement Hraoui. Si le Général Aoun se retrouvait en France, certains parlent déjà d'un gouvernement en exil.
- LE PRESIDENT.- Absolument pas. Nous avons reconnu le Gouvernement légitime du Président Hraoui et nous ne changerons pas d'idée.\
QUESTION.- Monsieur le Président, la France estime-t-elle que parallèlement à l'action diplomatique menée par des états arabes dans le contexte de l'accord de Taëf dont vous avez parlé, l'ONU pourrait être appelée à élargir son rôle au Liban pour rétablir la souveraineté de ce pays et assurer l'évacuation des troupes syriennes et israëliennes. En particulier le chapître sept de la Charte de l'ONU qui est évoqué parfois par la communauté internationale pour obtenir l'évacuation du Koweit ne pourrait-il pas également être utilisé pour permettre à la force des Nations unies au Sud-Liban d'imposer l'évacuation des troupes étrangères conformément aux déclarations et résolutions de l'ONU.
- LE PRESIDENT.- En droit ce que vous dites est indiscutable, le Conseil de sécurité pourrait le décider. En fait, les choses sont malheureusement souvent différentes.
- Les puissances étrangères qui se trouvent au Liban invoquent - je pense à la Syrie et je pense à Israël - des raisons différentes. Elles n'ont pas le même passé, elles n'ont pas les mêmes ambitions. Vous savez que la Syrie n'a jamais reconnu l'existence du Liban en tant que tel, considérant que ce qu'elle appelle une province lui a été autrefois arraché. Mais vous savez aussi qu'Israël a estimé utile, sur sa frontière nord, d'assurer sa propre sécurité par la présence de troupes, soit des troupes proprement israéliennes, soit des milices nées comme cela, vraisemblablement sous son influence et qui tiennent certaines fractions de ce territoire pour le compte d'Israël. Donc les motivations sont différentes et devant le Conseil de sécurité les arguments seraient donc différents. En droit le Conseil de sécurité peut parfaitement demander cela. Mais je voudrais vous faire une observation, à ceux qui au-delà de vous réclament constamment des résolutions du Conseil de sécurité, plusieurs fois je l'ai demandé dans le passé et ce sont les autorités libanaises quelles qu'elles soient, de tous les camps, qui ont toujours refusé, comme elles disaient, d'internationaliser ce conflit. Peut-être leurs considérations étaient-elles tout à fait juste selon leur point de vue, je ne le conteste pas pour l'instant, mais je dis simplement cela empêchait le recours aux Nations unies. Est-ce qu'il en ira de même demain, je n'en sais rien. Mais les membres permanents du Conseil et les autres peuvent prendre les initiatives de leur choix, rien ne l'interdit.\
QUESTION.- Monsieur le Président, lors de votre allocution devant les Nations unies, vous disiez qu'il ne fallait pas faire l'amalgame, que cet amalgame serait dangereux entre tous les conflits dans le Golfe, est-ce que vous n'avez pas l'impression aujourd'hui que ce sont les autres qui ont fait l'amalgame, c'est-à-dire qu'aujourd'hui tous les conflits s'imbriquent les uns dans les autres et qu'une solution globale s'impose.
- LE PRESIDENT.- Je pense que la procédure d'une conférence internationale est la bonne. D'abord, je suis obligé de constater que toutes les autres ont échoué. Quant à appliquer les mêmes recettes, à agir de la même façon, cela me paraît très dangereux et inopérant. Que ce soit au Koweït ou que ce soit au Liban, que ce soit dans les territoires disputés en Israël, ceux de Cisjordanie notamment, le principe d'une intervention des Nations unies me paraît le meilleur. Afin d'orienter les débats vers une conférence internationale où ce sont les diplomates qui s'expriment et non plus les pierres, les fusils, les mitraillettes, ou les grenades. Voilà la direction de la France.
- Vous savez, nous avons constamment agi dans ce sens. J'ai là un document dans lequel j'ai apporté l'appui de la France à la mission de M. Perez de Cuellar, mission confiée par le Conseil de sécurité au mois d'avril de l'an dernier. De la même façon, j'ai pris l'initiative pour la déclaration du Conseil de sécurité qui appelait au cessez-le-feu. Rappelez-vous qu'il y a eu une déclaration franco-soviétique à ma demande qui a été adoptée sur le Liban, au moins de juillet 89. J'ai renouvelé un appel au cessez-le-feu à la fin de novembre 89. Nous avons suscité plusieurs déclarations des Douze européens, j'en passe... Il est vraiment très difficile de prétendre que la France n'a pas été constamment très active en recherchant la conciliation plutôt que la guerre.
- Mais les passions partisanes, le goût incendiaire de la guerre civile dont souffre tant ce peuple ont pris le dessus. Et au moment où nous assistons à une conclusion provisoire ou définitive - je ne sais -, où l'on peut enfin avec des partenaires connus envisager la suite et demander l'application intégrale jusqu'à leur terme des accords de Taëf, je pense que le moment est opportun et la France agira dans ce sens.\
QUESTION.- Est-ce que dans votre analyse, c'est la crise du Golfe et l'appui américain à la Syrie qui lui ont permis de faire cette opération contre le Général Aoun et êtes-vous en accord avec la politique américaine au Liban ?
- LE PRESIDENT.- Vous avez d'abord posé une question et partant de la réponse que vous avez supposée, vous avez posé la deuxième. C'est un moyen dialectique assez commode mais c'est vous qui avez parlé, ce n'est pas moi. Les Syriens sont au Liban depuis de longues années - je le répète - appelés par le Président chrétien du Liban afin d'agir contre les Palestiniens et depuis cette époque les Syriens sont restés. Voilà la vérité. Dans le conflit récent qui a opposé le gouvernement légitime libanais et le Président Hraoui au Général Aoun, tantôt l'un, tantôt l'autre, a fait appel à la Syrie. Voilà la réalité telle qu'elle est. Il n'y a donc pas à supposer une influence de celui-ci ou de celui-là, l'abandon par celui-ci ou par celui-là. Non. Les antagonistes ou les protagonistes étaient tous sur le terrain face à face depuis des années. Et puis, il y a la tragique solution qui vient de s'imposer. Il se trouve que cette solution est conforme au voeu du Conseil de sécurité et est conforme, il faut le dire, au voeu de la plupart des Nations qui se préoccupent de l'avenir du Liban, et conforme à la légalité telle que la France l'a reconnue. Tout cela naturellement ne prend pas en compte la somme des drames individuels et collectifs vécus dans ce pays. Je suis le premier à sentir toute la souffrance qui est recelée par des faits que nous sommes obligés d'évoquer aujourd'hui d'une façon un peu sèche, de cette population dans une fraction de Beyrouth, quand on dit le Liban, non ce n'est pas le Liban et ce n'est pas Beyrouth. C'est une fraction du quartier chrétien de Beyrouth. C'est une fraction des chrétiens qui vient, derrière le Général Aoun, de vivre des moments de grande souffrance. La France se doit à leur égard, comme à l'égard des autres, une fois les prises de position politique affirmées - et je viens de les redire clairement - d'exercer un rôle de compréhension. C'est pourquoi, elle a accordé l'asile politique au Général Aoun, à sa famille et à quelques autres personnes.
- QUESTION.- Si je comprends bien, l'erreur que font certains en France, c'est d'accorder leur sympathie exclusivement au Général Aoun, cela fausse le jugement global.
- LE PRESIDENT.- Moi, je ne fais pas d'appréciation de ce genre. Je dis simplement qu'il y a des chrétiens des deux côtés. Le Président Hraoui est chrétien, le chef des milices chrétiennes est chrétien, le chef d'Etat-Major est chrétien, le patriarche maronite est chrétien. Je pourrais continuer. Et puis de l'autre côté, il y avait le Général Aoun et les siens. C'est une guerre civile, vous disais-je. Je ne cherche pas a priori, sur le plan humain et sur le plan de l'instinct patriotique, à donner l'avantage à celui-ci sur celui-là. Je dis simplement que sur le plan de la loi et du droit, les choses sont ainsi.\
QUESTION.- Après les derniers développements qui ont eu lieu au Liban et notamment avec l'entrée des troupes syriennes dans les zones où elles étaient absentes depuis plusieurs années, quelle est votre opinion sur la poursuite de l'application de l'accord de Taëf ? Croyez-vous que cela va faciliter son application et quel rôle la France entend-elle jouer pour influencer la bonne application de ces accords ?
- LE PRESIDENT.- Absentes depuis plusieurs années ? Vous voulez dire du quartier dont nous parlions à l'instant ? Du réduit chrétien comme on disait dans la presse. Elles étaient absentes de ce réduit car elles n'avaient pas pu y entrer, appelées une fois de plus par les autorités libanaises dont certains sont dirigeants chrétiens. La France va continuer d'agir dans les instances internationales où elle siège et particulièrement au Conseil de sécurité. Elle continuera d'agir aussi dans ses relations bilatérales avec les différents pays du Proche-Orient, et notamment le Liban, pour que soient poursuivis la mise en ordre et le retour à la souveraineté du Liban. Je vous répète que pour nous c'est un objectif que de voir les armées étrangères partir, pour qu'enfin le Président et le gouvernement libanais puissent se sentir dépositaire d'une souveraineté réelle à l'égard d'un peuple qui mérite d'avoir cette garantie.\
QUESTION.- Est-ce que vous pensez aujourd'hui que la solution de la crise du Koweït doit aussi se trouver dans le cadre d'une conférence internationale ?
- LE PRESIDENT.- C'est ce que j'ai dit aux Nations unies lorsque j'ai tenté de décrire un processus possible et je l'ai mis en point final en disant qu'au terme de ce processus, il serait bon de réunir une conférence internationale qui pourrait traiter de tous les problèmes en suspens. J'ai même imaginé, comme on a su le faire en Europe et pour les relations entre l'Est et l'Ouest, que l'on pourrait parvenir au Moyen-Orient et au Proche-Orient à s'entendre sur un accord de désarmement qui serait bien utile, vous le reconnaîtrez.
- QUESTION.- M. Jean-François Deniau vient de suggérer que pour le cas où les Syriens - c'est lui qui parle - ne laisserait pas le Général Aoun sortir de l'ambassade de France, la France signifierait à la Syrie et à l'Arabie saoudite qu'elle est décidée à retirer ses troupes d'Arabie saoudite. Une telle hypothèse vous paraît-elle adaptée à la situation et envisageable ?
- LE PRESIDENT.- Cela c'est le cas type de l'amalgame. Des parlementaires français éminents peuvent parfaitement désirer que cet amalgame soit fait mais il ne faut pas qu'ils le reprochent au gouvernement français. Je ne pense pas cet amalgame heureux.\
QUESTION.- Monsieur le Président, avec le temps qui passe êtes-vous toujours aussi convaincu de l'efficacité de l'embargo pour faire céder M. Saddam Hussein ou faut-il tenter autre chose : conflit, discussion ?
- LE PRESIDENT.- Quand nous avons parlé pour la première fois de l'embargo, c'était au mois d'août, il y a deux mois, j'ai dit qu'il faudrait plusieurs mois avant de savoir le degré d'efficacité de l'embargo. C'est facile à comprendre et l'opinion l'a très bien compris. C'est donc une oeuvre de longue haleine et de grande patience. Il ne faut donc pas par impatience culbuter les dés qui se trouvent sur la table. C'est une épreuve difficile pour les caractères, mais il faut tout de même garder son sang-froid. On a lancé l'embargo, il est très efficace. J'observais, la dernière fois que je vous ai vu, que la marine française à elle seule - elle est moins importante que la marine américaine - a quand même interpellé plus de 1100 navires. Les Américains ont dû en interpeller beaucoup plus et les autres pays, qui en ont interpellé moins que la France, ont quand même un bilan à présenter. C'est dire qu'on peut estimer que les navires ne passent plus, sauf exception qui ne permet pas de conclure que l'embargo serait rompu.
- L'embargo aérien a été décidé récemment par le Conseil de sécurité. Ce qui passe par la route à travers la Jordanie, qui est elle-même bornée par des pays comme l'Arabie saoudite, Israël ou la Syrie, ne doit pas être grand chose. Donc je pense qu'il faut considérer, avant d'admettre par exemple que la guerre serait un nécessité, c'est quand même un énorme enjeu, qu'il faut pousser plus loin le choix qui a été fait. J'ajouterai que l'unique production irakienne pouvant être exportée et donc rapporter des devises au trésor étant le pétrole, celui-ci ne passe plus du tout : plus de pipe-line, plus de transport maritime. C'est-à-dire que pour les deux tiers des ressources irakiennes l'embargo est d'emblée efficace. Je pense que l'on doit continuer de considérer que la stratégie c'est l'embargo.
- J'ai, puisque l'on a déjà débordé sur l'autre question mais vous aviez raison de le faire, moi-même dit que la France devrait agir en dehors de l'embargo, si le Président irakien multipliait ses agressions, ce qu'il a fait malheureusement. C'est ce qui a valu l'envoi des troupes en Arabie saoudite, dont je vous avais fait part lorsque je vous ai rencontré l'autre semaine. Je n'en conclus pas qu'il faille passer au stade d'une offensive armée. Je dis simplement que le Président irakien expose gravement son pays en agissant comme il le fait. Quant à la négociation, je suis tout à fait pour et, devant les Nations unies, j'ai tracé un cheminement pour la négociation. Seulement, cela suppose que les préalables fixés par le Conseil de sécurité des Nations unies soient remplis. Ils ne le sont pas à ma connaissance aujourd'hui. Voilà pourquoi l'embargo continue, la négociation reste possible mais n'est pas ouverte, espérons seulement que la raison l'emportera.\
QUESTION.- Monsieur le Président, vous avez parlé tout à l'heure du cheminement que vous aviez indiqué lors de votre discours devant les Nations unies, quel bilan tirez-vous des réponses qui ont été faites ou des évolutions qui ont pu être faites autour de cette proposition ? D'autre part, on parle de "frémissement" sur le chemin d'une négociation, peut-être de quelques ouvertures de la part du Président irakien, quelle est votre analyse sur ces fameuses ouvertures ?
- LE PRESIDENT.- Vous savez, ce n'est pas à moi de juger l'effet produit par mon intervention devant les Nations unies. Je crois qu'il est indiscutable que mes propositions ont retenu l'attention générale et qu'elles font l'objet constamment de conversations diplomatiques les plus nombreuses. C'est autour de ces thèmes-là que se développe la chance de la négociation qui n'est qu'une chance dans un ensemble dont on ne peut dire qu'il soit, jusqu'ici, positif. Alors voilà, pour la première question c'est à vous de juger et non pas à moi. J'ai posé là un acte politique, de politique internationale dont le Président américain a tenu compte quelques jours plus tard et bien d'autres encore, pas assez, puisque nous sommes encore là, tous ensemble, à nous interroger sur le proche avenir. Quant à votre deuxième question, je ne peux pas dire. J'ai appris comme vous qu'il y aurait eu, hier ou avant-hier, des déclarations, des confidences par le canal soviétique, cela a été démenti, je ne suis pas en état de confirmer ou d'infirmer.
- QUESTION.- Monsieur le Président les informations dont nous disposons font état d'exodes massifs des Koweïtiens de leur pays et des Irakiens s'installent à leur place, Saddam Hussein n'est-il pas en train de créer une situation de fait accompli, irréversible, même s'il évacuait le Koweït ?
- LE PRESIDENT.- Non, irréversible, cela ne l'est jamais. Mais une opération de grande envergure, c'est tout à fait possible qui consisterait à dire, comme vous le suggérez, les nouveaux Koweïtiens sont en mesure de s'exprimer démocratiquement, alors procédons à des référendums ou je ne sais quoi encore. C'est possible, moi, je ne sais pas, je crois qu'il faudrait se garder de lui donner des idées, enfin, autant que je le suppose, il aurait pu y songer lui-même. Il n'est pas le seul, il est évident que ce ne serait pas sincère et que cela ne pourrait servir de légitimité aux yeux des nations libres, c'est évident.\
QUESTION.- A propos de la Conférence internationale sur le Proche-Orient et le Moyen-Orient, est-ce que vous pouvez nous indiquer s'il y a un lien dans votre esprit entre la négociation qui peut s'engager sur Israël, la question de la Palestine et l'affaire du Koweït, est-ce que les deux peuvent être menées simultanément ou parallèlement ou distinctement, ou y a-t-il un préalable ?
- LE PRESIDENT.- Vous revenez sur la même question, le préalable au Koweït est fixé par les Nations unies, il n'est pas de même nature que ce qui a été dit aux Nations unies sur les événements récents de Jérusalem. C'est donc différent, mais le droit, en fin de compte, une fois que l'on a dit tout ce que l'on veut dire, une fois que chacun a défendu sa thèse, le droit, dois-je me répéter, il est le même partout. Il faut bien qu'un peuple vive sur la terre qui est la sienne, mais cela nécessite des discussions multiples, il vaut mieux éviter de les mélanger, cela ne fera que compliquer les choses. La procédure que j'indique est de même ordre, c'est-à-dire Conférence internationale, mais à l'intérieur de ces conférences, je n'imagine pas que l'on puisse débattre de tout en même temps.
- QUESTION.- Pour en revenir au Liban, qu'est-ce qui se passerait si le Général Aoun refusait de quitter les locaux de l'ambassade pour venir en France ?
- LE PRESIDENT.- C'est une hypothèse encore, une nouvelle, jusqu'ici elle ne m'avait pas été soumise, nous serons des hôtes courtois.\
QUESTION.- Monsieur le Président, je rentre de Bagdad où les otages français se sentent de plus en plus délaissés et oubliés par la France. Qu'avez-vous à leur dire, aujourd'hui, à eux qui nous écoutent en direct sur RFI et deuxième question, monsieur le Président, certains de vos interlocuteurs arabes, notamment M. Arafat, hier à Tunis ont réclamé à la France d'ouvrir un dialogue direct avec Bagdad pour promouvoir au nom de la communauté internationale un règlement négocié, pourquoi Paris n'ouvre-t-elle pas un dialogue direct sur la base précisément de votre initiative à l'ONU ?
- LE PRESIDENT.- Votre première question traitait de nos compatriotes retenus en otage en Irak. Ils se sentent délaissés c'est un sentiment bien normal, non pas parce qu'ils seraient délaissés, ils ne le sont pas, mais parce que le temps est long à vivre, quand on vit dans ces conditions. C'est pour moi une pensée constante et je veux leur exprimer le sentiment que j'éprouve £ à aucun moment, je n'oublie que la France et que moi-même avons des devoirs au regard de ces otages. Mais leur situation ne peut être traitée pour l'instant par les moyens de la force. Est-il sûr que cela favoriserait une issue heureuse pour eux-mêmes ? Nous cherchons la meilleure issue. En attendant, nous veillons et, s'il y a quelques observations à faire, il faut me les faire. Nous veillons à ce que tous les contacts possibles soient maintenus et je crois que l'on doit reconnaître qu'il y a une grande vigilance et un vrai courage de la part de nos agents diplomatiques sur place pour voir, rencontrer, conseiller tous les français à Bagdad. On va continuer, on va intensifier autant qu'on le pourra.
- Ensuite, vous me demandez pourquoi nous ne saisirions pas l'occasion d'une négociation séparée, que la France mènerait par divers intermédiaires avec l'Irak. La France est et sera solidaire du Conseil de sécurité. Si l'on demande à la France de transmettre tel ou tel message, nous ferons comme les autres, nous ne le garderons pas pour nous et nous n'engagerons pas une négociation particulière. Le Conseil de sécurité s'est engagé en tant que tel, il a voté des résolutions, il a posé quelques principes, peu de principes mais fermes, il les a posés en préalable, pour l'instant, nous en restons là et aucun des membres du Conseil de sécurité ne pourrait se permettre de faire dériver la question posée, par une négociation particulière. Toute information qui me serait communiquée sera aussitôt transmise au Conseil de sécurité.\
QUESTION.- Les Etats-Unis ont décidé ce week-end d'envoyer 15000 hommes de plus dans le Golfe. Est-ce que la France va elle aussi renforcer son dispositif ?
- LE PRESIDENT.- Nous allons le renforcer légèrement mais pas parce que les Américains viennent de le faire. Simplement parce que nous avons rencontré - je l'ai fait moi-même - sur place les chefs militaires responsables de la division française qui se trouve aujourd'hui en Arabie saoudite et qui nous ont fait valoir un certain nombre de demandes à caractère militaire pour qu'ils se sentent mieux équipés. Plusieurs de ces demandes très raisonnables, bien entendu se verront satisfaites. Cela n'a rien à voir avec l'accroissement des troupes américaines en Arabie saoudite.
- QUESTION.- Je voulais vous demander si la France envisage d'envoyer des hélicoptères supplémentaires pour conforter le régime d'hélicoptères de combat qui se trouve déjà sur place ?
- LE PRESIDENT.- Vous saurez cela en temps utile. Ce qui est demandé pour l'instant, ce n'est pas essentiellement des hélicoptères, c'est de l'artillerie. Le ministre de la défense vous fera connaître ces éléments, dès que les dispositions pourront être rendues publiques. Mais, ce n'est pas un bouleversement, simplement il faut que nos soldats là-bas sentent que leur pays les a mis en situation optimum pour leur sécurité et aussi pour la mission qu'ils ont à remplir.
- QUESTION.- Lors de votre précédente conférence de presse vous avez évoqué le cas de certaines entreprises françaises qui tentaient de détourner l'embargo. Alors, deux questions : est-ce que des sanctions ont été prises contre certaines entreprises ? Est-ce que ces tentatives ont disparu ?
- LE PRESIDENT.- Les entreprises auxquelles je pensais et dont j'avais la liste ont été vigoureusement saisies du cas qu'elles provoquaient. A ma connaissance elles ne semblent pas avoir maintenu leurs prévisions. Elles ont cessé d'organiser des transports de marchandises vers l'Irak. Bien leur en a pris. Si on nous signale de nouvelles défaillances de ce type, de nouveaux manquements à la loi commune, et bien nous aviserons.\
QUESTION.- Monsieur le Président, comment envisagez-vous le rôle des Nations unies dans la protection de la population civile dans les territoires occupés ?
- LE PRESIDENT.- Les Nations unies ont elles-mêmes rappelé récemment qu'il existe un article de la Charte qui oblige le gouvernement responsable, pas forcément le gouvernement représentant ces populations, mais celui qui les a en charge, là où il exerce son pouvoir, d'assurer leur sécurité. Il n'y a pas substitution par les Nations unies. La première étape consiste à dire : vous êtes responsables, nous vous tenons pour responsables et c'est d'ailleurs pour cela que les Nations unies ont voté un texte, celui que vous connaissez et qui s'adresse au gouvernement d'Israël. Je pense que les Nations unies doivent d'abord respecter leur Charte si elles veulent qu'on les écoutent.\
QUESTION.- Monsieur le Président, vous avez réuni un mini-conseil de défense la semaine dernière. Quelles conclusions tirez-vous d'ores et déjà de la crise du Golfe en ce qui concerne les forces classique et peut-on s'attendre à des évolutions importantes dans le domaine nucléaire ? On parle de la suppression de la troisième composante de la force stratégique.
- LE PRESIDENT.- Nous en parlerons une autre fois si vous le voulez bien. C'était bien l'objet en tout cas de la réunion. Il n'y a pas eu de Conseil de défense, parce qu'un Conseil de défense comporte un certain nombre de personnes présentes et ce n'était pas le cas. J'ai réuni, avec le Premier ministre, à l'Elysée, le ministre de la défense, quelques conseillers et chefs militaires et c'était une conversation qui devait justement préparer de futures décisions. Sur certaines d'entre elles, j'ai indiqué à ceux qui se trouvaient là et notamment au chef du gouvernement et au ministre de la défense, que je ferai connaître mes décisions au cours de la semaine. Alors ayez la patience de les attendre pour pouvoir les commenter.
- QUESTION.- Monsieur le Président, certains leaders de l'opposition estiment que la France pourrait être engagée dans le Golfe, dans un conflit qu'elle n'aurait pas décidé elle-même. Ce risque existe-t-il selon vous ?
- LE PRESIDENT.- Si la France doit participer à un conflit, c'est parce qu'elle l'aura décidé. Nous avons réservé notre totale autonomie de décision. Mais cela supposerait naturellement que la France agisse en raison d'un mandat des Nations unies.\
QUESTION.- Vous vous êtes félicité aujourd'hui de l'attribution du Prix Nobel de la Paix à Mikhaïl Gorbatchev. Si, il y avait un Prix Nobel de la Guerre, à quel homme d'Etat ou à quel pays vous l'aurez attribué cette année ?
- LE PRESIDENT.- Moi, je ne fais partie d'aucun jury. Mais je serais embarrassé, parce qu'il y en a plusieurs qui le mériteraient vraiment.
- QUESTION.- Monsieur le Président, je suis désolé parce que vous étiez un peu court. Vous vous félicitez certainement tout de même encore une fois devant nous du fait que Mikhaïl Gorbatchev ait le prix nobel ?
- LE PRESIDENT.- Monsieur a fait état des féliciations que je lui ai adressé, ce qui était donc présupposer que je m'en réjouissais. Non ! Il peut y avoir des félicitations diplomatiques, je l'admets, mais celles-là n'étaient pas seulement diplomatiques, elles étaient chaleureuses sur le plan personnel.\
QUESTION.- Concernant un autre pays où les forces françaises sont présentes, le Rwanda, l'ensemble des ressortissants français qui étaient en danger sur ce territoire ont été évacués. Qu'est-ce qui justifie encore aujourd'hui la mission des troupes françaises sur place, quand elles se retireront, est-ce que la France serait favorable à un chapeautage des Nations unies, un parrainage quant à la mission sur place ?
- LE PRESIDENT.- Cela n'a pas été demandé, la France a envoyé deux compagnies qui ont permis l'évacuation des Français et d'un certain nombre d'étrangers qui se sont mis sous notre protection, nous avons d'ailleurs agi en harmonie avec le gouvernement belge, qui a agi de même. Voilà, c'est tout. Cette troupe n'a pas d'autre mission que celle-là, et cette mission remplie, bien entendu, elle rentrera en France.
- QUESTION.- Quelle est la mission remplie à l'heure actuelle ?
- LE PRESIDENT.- Je ne suis pas en mesure de vous dire s'il n'existe pas encore des Français dans tel ou tel village éloigné de la capitale, Kigali, mais c'est la seule mission qu'ont à remplir aujourd'hui nos deux compagnies au Rwanda. Le président Rwandais, M. Habyarimana doit venir en France demain, ou après-demain, il l'a fait savoir et souhaiterait me rencontrer. Bien entendu, je le recevrai, s'il vient.\
QUESTION.- Comment, à votre avis, devrait réagir le Conseil de sécurité au refus de M. Shamir de laisser rentrer sur le territoire israélien la mission dépendant du Secrétaire général ?
- LE PRESIDENT.- M. Perez de Cuellar, qui est le secrétaire général, a déjà répondu à cette question en disant d'abord : je voudrais avoir une relation officielle de la décision du gouvernement israélien. C'est un bon diplomate, vous voyez, il ne se contente pas de lire les journaux, il veut avoir un texte du gouvernement israélien. Je pense aussi que comme c'est un bon diplomate, cela lui donne le temps de réfléchir... Eh bien, moi aussi, et je pense, que s'il n'a pas l'assurance de pouvoir faire en sorte que cette mission serve à quelque chose, je pense qu'il ne l'enverra pas, mais on en n'est pas là, puisqu'il ne s'est pas prononcé lui-même. Alors votre question est pour moi un peu prématurée. Je pense simplement qu'un pays qui refuse l'application d'une résolution du Conseil de sécurité s'expose à un raidissement, c'est-à-dire à avoir une résolution qui suivra et qui sera peut-être plus sévère. C'est dans ce sens que cela peut aller, ou bien il n'y a qu'à décider que les résolutions du Conseil de sécurité ne servent à rien. Je dois dire que le Conseil de sécurité a laissé accréditer cette thèse pendant de très longues années, mais ce n'est pas au moment où il se ravise, en raison de la fin de la compétition Est-Ouest, qu'il faut l'arrêter dans ses élans. Je souhaite qu'Israël comprenne que c'est l'intérêt de tous d'accepter cette mission.\
QUESTION.- Une dernière précision, monsieur le Président, en ce qui concerne le Koweït : est-il exact que les diplomates français en poste au Koweït s'apprêtent à quitter l'ambassade de France, et si oui, quelles sont les conclusions à en tirer en ce qui concerne les liens entre les ressortissants français qui sont bloqués là-bas et la France ?
- LE PRESIDENT.- Mais ce n'est pas la France qui désire évacuer ses diplomates de l'ambassade. Nous ne tenons pas à exposer outre-mesure la vie de nos représentants. Actuellement restent, je crois, les représentants de la France, ceux de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis. C'est un siège en règle, l'eau a été supprimée, nous n'allons pas condamner nos diplomates à sécher sur place, donc nous leur donnerons les instructions voulues. Simplement nous avons voulu démontrer par notre attitude en restant là plus longtemps que tous les autres, notre désaccord profond avec ce genre de méthode. En fait il ne s'agit que d'un problème de force, et à partir de là, cela permettra de mieux juger le comportement de l'Irak. Je crois qu'on peut maintenant se séparer. Je vous remercie en tout cas d'être venus ce soir, une fois de plus. Lorsqu'il apparaîtra utile, à vous et à moi, de reprendre ce type de conversation, on le fera. Les événements du Liban m'ont paru relancer suffisamment les problèmes posés au Proche et Moyen-Orient, pour justifier cette rencontre.\