1 juillet 1990 - Seul le prononcé fait foi

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Article de M. François Mitterrand, Président de la République, paru dans "le bulletin de la CNUCED" de juillet-août 1990, sur les perspectives de la deuxième conférence des Nations unies sur les pays les moins avancés.

La deuxième Conférence des Nations unies sur les pays les moins avancés (PMA) s'ouvrira le 3 septembre prochain à Paris. Notre pays avait déjà accueilli en 1981 la première Conférence internationale concernant cette catégorie la plus défavorisée des pays en voie de développement. La France est très sensible à l'honneur qui lui est ainsi fait. Elle est parfaitement consciente du devoir qui est celui de l'Assemblée de la Communauté internationale, à l'aube d'une nouvelle décennie, de faire de cette réunion une étape décisive sur la voie conduisant ces pays à combler leur retard et à bénéficier enfin d'un niveau de vie convenable.
- Sous l'égide avisée de la CNUCED, et de son secrétaire général, des progrès réels ont été accomplis ces derniers mois pour analyser les difficultés qui ont entravé jusqu'ici la croissance des PMA et compromis leur développement à long terme. Dans une conjoncture internationale plus ouverte il nous appartient maintenant, loin des a priori politiques et des débats idéologiques d'un autre âge, de définir et de mettre en oeuvre, à l'intention des PMA, un véritable plan d'action fondé sur quelques constatations de bons sens :
- Les gouvernements des pays les moins avancés sont les responsables au premier chef de leurs politiques de développement. A eux de décider de leurs orientations et de leurs priorités. A eux de mettre en oeuvre sans retard les réformes politiques, économiques et sociales indispensables, dans le sens d'un progrès plus affirmé vers la démocratie, d'une participation plus étroite des hommes et des femmes, d'une plus grande liberté laissée aux initiatives privées de tous ordres.
- Pour atteindre ces objectifs, les PMA doivent continuer à bénéficier d'un environnement international plus favorable et d'un soutien accru de tous leurs partenaires : les Etats, les organismes d'aide multilatéraux et régionaux, les organisations non gouvernementales. Tous ces partenaires doivent apporter aux PMA une assistance technique mieux adaptée et un soutien financier approprié en leur faisant partager les fruits de leur propre expérience.
- La France avait pris l'engagement en 1981, lors de la première Conférence des Nations unies sur les PMA, de porter à 0,15 pour cent de son PIB la part de son aide en direction des pays les moins avancés. C'est chose faite en 1989.\
Le succès des politiques de développement repose à l'évidence sur une coopération renforcée ente les PMA et leurs partenaires, coopération faisant l'objet d'engagements mutuels clairs et précis, dont le suivi doit être controlé avec méthode et régularité. Faute de tels engagements, la Conférence de Paris n'aurait d'autre résultat que d'établir un nouveau catalogue de recommandations, louables certes mais sans impact direct sur le développement des PMA. Le sort de ces pays, qui ont besoin d'un supplément d'aide mais aussi de compréhension, se trouve directement lié à celui des autres pays plus ou moins développés qui ne peuvent, dans un monde interdépendant, prétendre à un progrès continu en laissant derrière eux des populations souvent à la limite de la survie. Comment imaginer, au moment où un vent de liberté souffle un peu partout, où des pays jusqu'ici fermés commencent à s'ouvrir, que les populations du sud puissent être laissées dans le dénuement et la désespérance ?
- Mais au-delà des aspects purement économiques et financiers, l'action à entreprendre relève d'une solidarité élémentaire fondée avant tout sur un devoir moral impliquant le respect des choix de l'homme partout et en toute circonstance. La Communauté internationale tout entière doit avoir conscience de l'importance des enjeux et faire preuve de détermination dans la recherche des solutions adaptées aux besoins des pays les moins avancés. Je me refuse à croire que leurs problèmes soient insolubles. Seule a manqué jusqu'ici la volonté d'y porter efficacement remède. C'est là un des défis majeurs auxquels nous sommes désormais confrontés.
- La France, pour sa part, aborde la Conférence de Paris, dans l'esprit le plus ouvert et avec confiance. Elle ne doute pas que tous les partenaires sauront faire preuve du même esprit et de la même volonté.\