22 novembre 1989 - Seul le prononcé fait foi
Conférence de presse de M. François Mitterrand, Président de la République, sur la construction de l'union économique et monétaire, la création d'une banque pour le développement et la modernisation de l'Europe de l'Est et les relations internationales face aux bouleversements de l'Europe de l'Est, Luxembourg, le 22 novembre 1989.
LE PRESIDENT.- Je vous remercie, monsieur le Premier ministre. Dans le cadre des visites que j'ai effectuées dans les capitales de la Communauté, je viens maintenant au Luxembourg un peu en fin de parcours puisqu'il me reste à aller à Athènes. Mais cela n'est pas de mon fait, n'est-ce pas, monsieur le Premier ministre, puisque j'avais proposé de le faire il y a déjà quelque temps. Simplement les commodités de mes partenaires ont fait que c'est simplement aujourd'hui, cela ne change rien au fond de la question. Cela ne change rien au fait que nous sommes partenaires, que nous sommes partenaires et amis, que nos deux pays ont des relations très fécondes, que tout le reste de leur vie quotidienne représente des débats, parfois des contentieux mais qu'ils ne sont jamais d'ordre majeur sur le plan de la politique générale. Nous sommes, bref, deux pays entièrement engagés dans la construction européenne.
- Alors, l'objet de mes visites, on vient de vous le dire, c'est la préparation du Sommet des 8 et 9 décembre. Quels sont les sujets majeurs ? Il y en a trois. Le premier, c'est la construction de l'union économique et monétaire, le deuxième, c'est la mise au net de la charte sociale, le troisième, c'est le parachèvement du marché intérieur. Voilà, si j'ose dire, c'est simple. A quoi s'ajoutent naturellement les commentaires inévitables et les décisions à prendre à la suite de la réunion des douze pays de la Communauté, le 18 novembre à Paris, pour la mise en place des systèmes de coopération avec les pays de l'Est. Alors nous avons parlé de tout cela et maintenant je vais répondre aux questions que vous me poserez, de façon à entrer dans le vif du sujet.\
QUESTION.- (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Je vous remercie de cette question, elle est très importante pour nous tous et particulièment ici. La France en tant que France, non pas en tant que Présidence, aurait souhaité une harmonisation fiscale accompagnant la libération des changes au 1er juillet 1990. Mais, à vrai dire, notre situation est bonne, nous avons en fait déjà supprimé l'essentiel du contrôle des changes. Cela ne nous pose pas un problème de principe et ne nous pose même plus de problèmes pratiques, il n'en restait pas moins logique de tenter de veiller à ce que des inégalités ne se créent pas à l'occasion de cette libération des changes. Nous souhaitons aussi trouver une façon d'enrayer la lutte contre toutes les formes délictueuses d'agissements fiscaux. Le Luxembourg ne nous est pas apparu comme un pays désireux de protéger la fraude. Mais ce pays demande qu'il soit tenu compte de sa situation particulière, des efforts qu'il a entrepris. Sur ce terrain il demande, au moins, de ne pas avoir un traitement inférieur ou désavantageux par rapport aux places financières, non seulement extérieures à la Communauté mais intérieures à la Communauté, il s'agit de territoires particuliers de tel ou tel pays de la Communauté. Je vous passerai tous les éléments d'appréciation autres que ceux-ci : notre conversation a surtout porté sur la définition de ce que nous entendions faire. Un premier principe, c'est que les investigations doivent garder un caractère national. Chaque pays reste maître de l'enquête. D'autre part il convient de rechercher tout ce qui est d'ordre délictueux - c'est pourquoi j'ai employé ce terme, une présomption délictueuse par la voie judiciaire -. Le Luxembourg n'y fait aucunement obstacle et nous non plus. Si donc on réunit ces deux notions d'enquêtes judiciaires ou poursuites judiciaires sur des faits qui apparaissent comme délictueux en matière fiscale et si l'investigation reste nationale, ce qui est la moindre des choses - cela fait partie de nos moeurs habituelles, même à l'intérieur de la Communauté, je crois que l'on pourrait s'approcher d'une solution à ce problème.
- Mais nous avons un certain nombre de partenaires, parmi les douze, au moins deux ou trois, qui voudraient davantage de garanties. Cela c'est un problème à débattre lorsque nous serons ensemble, à Strasbourg mais aussi auparavant, lorsque les ministres vont avoir à se réunir. Quel jour ? Lundi prochain ? très bien, bientôt vous aurez donc une réponse à votre question. Mais, en tant que Présidence d'une part et en tant que responsable de la politique française, nous n'avons pas de désaccord de fond avec le Luxembourg et ce qui a pu apparaître comme désaccord est éclairé aujourd'hui.\
QUESTION.- Monsieur le Premier ministre vient de parler de discussions utiles et concluantes. Est-ce que vous pourriez nous dire quels ont été les sujets qui ont été concluants ?
- LE PRESIDENT.- C'est ce qu'on vient de dire. Il n'y a pas que cela mais c'est déjà important. Il reste à y avoir une décision, j'y insiste, une décision collective les 8 et 9 décembre. Mais sur la base ce que je viens de vous dire, notre comportement sera convergent. Voilà ce que je peux vous dire maintenant.
- Mais nous avons également serré de plus près, non pas le principe sur lequel nous sommes a priori d'accord, mais les procédures pour l'union économique et monétaire. Sur la charte sociale il n'y a aucune discussion entre nous car nous en sommes a priori convenus. Mais, il s'est aussi mêlé un autre élément dans la discussion : c'est sur la préparation des mesures à prendre pour l'Europe de l'Est. Nous avons également resserré notre débat et précisé les conditions de création d'une banque de développement pour l'Est. Car des questions d'ailleurs fort judicieuses se posent : mais il existe déjà la BEI, pourquoi changer cela ? On sait parfois, quand on va un peu au coeur de ces sujets, que la BEI est une banque à douze, qu'elle a une spécificité essentiellement communautaire, c'est sa vocation. Donc la mission en Europe de l'Est, c'est déjà autre chose. Encore pourrait-elle s'adapter, mais, dans ce cas-là, elle ne pourrait plus être simplement la banque des douze, car la banque de développement doit être ouverte à tous les capitaux qui s'offrent. Je crois que cette différence de nature doit entraîner la création d'un nouvel organisme. Nous n'en faisons pas, nous, Présidence, une question de principe : si un autre organisme peut faire ce travail de la même façon, nous n'y voyons pas d'inconvénients. Mais nous n'en voyons pas. Seule la Banque européenne existante pourrait sembler apporter l'organisme adéquat : tel n'est pas le cas. A partir de là, il faut que l'on avance vite. C'est une objection qui nous a été faite aussi par nos amis du Luxembourg : est-ce qu'on ne va pas mettre un temps fou avec les ratifications. Or le temps presse £ on risque d'arriver après les échéances politiques ce serait bien dommage. Comme il existe d'autres fonds, on peut peut-être déjà agir.
- Retenons toutes ces idées, mais je présenterai à Strasbourg un projet de banque de développement sur la base de ce que je viens de vous dire - sur la base élargie, il y a déjà les vingt-quatre pays - mais pourquoi est-ce qu'il n'y en aurait pas d'autres ? Et sur la base aussi d'une spécificité de l'Europe de l'Est, ce qui est très important pour ces pays, car les pays qui bénéficieraient des services de la banque pourraient aussi participer au conseil d'administration de la banque. Donc vous voyez que la BEI n'est pas tout à fait prête à cela. De ce point de vue-là c'est également concluant.
- Nous n'avons pas du tout de débat de fond ni de procédure sur la charte sociale. Le débat de procédure sur l'union économique et monétaire pourrait, à la limite, se poser sur la date d'ouverture de la conférence intergouvernementale chargée de préparer un nouveau traité. Il y aurait aussi le contenu de ce futur traité : s'en tenir à quelques questions précises, chercher l'accord à Strasbourg, ce qui est mon point de vue, entre tous. Là dessus, je crois que l'on peut dire que nos conclusions ont été positives.\
QUESTION.- (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Ce que je proposerai, moi, comme Président en exercice, ce sera l'ouverture de la conférence intergouvernementale au deuxième semestre 1990.\
QUESTION.- Dans le contexte de la Banque de développement pour les pays de l'Est, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager le fonds de rétablissement du Conseil de l'Europe ?
- LE PRESIDENT.- Si, si... Vous avez tout à fait raison et même dans l'intervalle, d'ici la mise en ordre des décisions, quelle que soit celle qui sera prise, ce fonds sera très utile et il faut le mettre en branle.\
QUESTION.- Est-ce que les problèmes de Cattenom ont été évoqués ?
- LE PRESIDENT.- Non, non, pas du tout. Il est d'ailleurs pratiquement résolu entre nos gouvernements.
- QUESTION.- C'est peut-être trop dire parce que le Luxembourg a toujours eu une opposition de principe...
- LE PRESIDENT.- Mais c'est résolu... Si vous m'en aviez parlé, je vous aurais dit, nous avons l'intention de continuer, nous, mais sans offenser le Luxembourg et donc en cherchant au maximum toutes les mesures qui pourraient, sinon faire renoncer à son opposition de principe, du moins faire mieux admettre cette réalité. Enfin nous n'avons pas l'intention de renoncer à notre politique nucléaire.\
QUESTION.- Monsieur le Président, il y a deux semaines à Strasbourg, vous avez dit, il faut aider Gorbatchev. Dans quelques semaines, vraisemblablement, vous allez vous rendre en Union soviétique. Vous voulez démontrer que vous aidez Gorbatchev sur le terrain parce qu'il a d'énormes problèmes ou vous voulez montrer l'exemple ?
- LE PRESIDENT.- Non, je ne veux rien démontrer du tout, cela fait partie des relations internationales tout à fait normales. J'ai déjà rencontré M. Gorbatchev au cours de ces dernières années au moins cinq fois et, comme je suis de plus es-qualité Président actuel du Conseil européen et que M. Gorbatchev va avoir des relations avec M. Bush au début décembre, tout cela fait que nous avons quand même pas mal de choses à nous dire. Nous nous sommes vus il n'y a pas très longtemps, c'était le 4 juillet. Nous avons correspondu depuis lors, par lettre ou par téléphone, mais une rencontre sera plus utile encore. D'autant plus que cela va vite du côté de l'Europe de l'Est, toutes choses qui n'étaient pas prévues le 4 juillet dernier.\
QUESTION.- Vous vous rendrez en RDA probablement donc avant le Chancelier Kohl ?
- LE PRESIDENT.- Ce serait d'un excellent symbole mais cela n'a pas été fait pour ça. C'est une invitation déjà ancienne, qui était formulée par M. Honecker il y a cinq ou six mois, et que les événements ont repoussée et pour cause ! Vous observerez que cette date est postérieure de quelques jours à la réunion du congrès extraordinaire du parti communiste est-allemand. Est-ce que, pour autant, ma visite coïncidera avec des événements en nouvelle évolution ou pas, moi, je n'en sais rien. C'est une question cela entre la France et la République démocratique allemande. Mais comme s'y ajoute l'Europe, cela peut ne pas être inutile.\
QUESTION.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- Je n'ai pas du tout l'intention de m'opposer en quoi que ce soit aux allées et venues de MM. Bush et Gorbatchev. Ils ont libre circulation, surtout sur leur territoire et vous savez qu'un navire c'est le territoire américain, c'est le territoire russe. En quoi est-ce que je me mêlerais de savoir où M. Bush se rend lorsqu'il reste dans son pays et où M. Gorbatchev agit de même ? Si j'ai des impressions, je ne vous les dirai pas.\
QUESTION.- Est-ce que j'ai bien compris que, même en cas de présomption de délit, il peut y avoir collaboration au niveau des administrations ...
- LE PRESIDENT.- Nous avons un droit qui est commun et qui veut que le pouvoir judiciaire ait une compétence particulière devant laquelle s'inclinent les autres pouvoirs.
- QUESTION.- Dans la région française voisine, la Lorraine, on craint l'évasion des capitaux en direction du Luxembourg, est-ce que c'est exact ?
- LE PRESIDENT.- Non, c'est-à-dire que tout ce qui peut être évasion de caractère naturel, simplement en raison des circuits qui se créent, de l'attraction de l'intérêt, qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse ? C'est la libre compétition. Moi je ne serais pas fâché de voir en France, en Lorraine, que nous exercions le même attrait que le Luxembourg. On va essayer.
- QUESTION.- On a une excellente coopération avec la Lorraine étant donné qu'il y a 14000 frontaliers lorrains ou du Nord de la France qui viennent travailler ici au Luxembourg, je crois également que le marché intérieur, je l'ai dit tout à l'heure à M. le Président de la République, va aboutir à une revalorisation des grandes régions, pas seulement la grande région "Sar-Lor-Lux", avec la Lorraine, la Sarre, le Luxembourg belge, mais également partout ailleurs en Europe. Et je crois que c'est une bonne chose et que c'est aussi un résultat de cette communauté européenne que nous voulons.
- LE PRESIDENT.- Je dois me rendre chez le Grand Duc du Luxembourg et je ne voudrais pas manquer à l'heure du rendez-vous.\
- Alors, l'objet de mes visites, on vient de vous le dire, c'est la préparation du Sommet des 8 et 9 décembre. Quels sont les sujets majeurs ? Il y en a trois. Le premier, c'est la construction de l'union économique et monétaire, le deuxième, c'est la mise au net de la charte sociale, le troisième, c'est le parachèvement du marché intérieur. Voilà, si j'ose dire, c'est simple. A quoi s'ajoutent naturellement les commentaires inévitables et les décisions à prendre à la suite de la réunion des douze pays de la Communauté, le 18 novembre à Paris, pour la mise en place des systèmes de coopération avec les pays de l'Est. Alors nous avons parlé de tout cela et maintenant je vais répondre aux questions que vous me poserez, de façon à entrer dans le vif du sujet.\
QUESTION.- (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Je vous remercie de cette question, elle est très importante pour nous tous et particulièment ici. La France en tant que France, non pas en tant que Présidence, aurait souhaité une harmonisation fiscale accompagnant la libération des changes au 1er juillet 1990. Mais, à vrai dire, notre situation est bonne, nous avons en fait déjà supprimé l'essentiel du contrôle des changes. Cela ne nous pose pas un problème de principe et ne nous pose même plus de problèmes pratiques, il n'en restait pas moins logique de tenter de veiller à ce que des inégalités ne se créent pas à l'occasion de cette libération des changes. Nous souhaitons aussi trouver une façon d'enrayer la lutte contre toutes les formes délictueuses d'agissements fiscaux. Le Luxembourg ne nous est pas apparu comme un pays désireux de protéger la fraude. Mais ce pays demande qu'il soit tenu compte de sa situation particulière, des efforts qu'il a entrepris. Sur ce terrain il demande, au moins, de ne pas avoir un traitement inférieur ou désavantageux par rapport aux places financières, non seulement extérieures à la Communauté mais intérieures à la Communauté, il s'agit de territoires particuliers de tel ou tel pays de la Communauté. Je vous passerai tous les éléments d'appréciation autres que ceux-ci : notre conversation a surtout porté sur la définition de ce que nous entendions faire. Un premier principe, c'est que les investigations doivent garder un caractère national. Chaque pays reste maître de l'enquête. D'autre part il convient de rechercher tout ce qui est d'ordre délictueux - c'est pourquoi j'ai employé ce terme, une présomption délictueuse par la voie judiciaire -. Le Luxembourg n'y fait aucunement obstacle et nous non plus. Si donc on réunit ces deux notions d'enquêtes judiciaires ou poursuites judiciaires sur des faits qui apparaissent comme délictueux en matière fiscale et si l'investigation reste nationale, ce qui est la moindre des choses - cela fait partie de nos moeurs habituelles, même à l'intérieur de la Communauté, je crois que l'on pourrait s'approcher d'une solution à ce problème.
- Mais nous avons un certain nombre de partenaires, parmi les douze, au moins deux ou trois, qui voudraient davantage de garanties. Cela c'est un problème à débattre lorsque nous serons ensemble, à Strasbourg mais aussi auparavant, lorsque les ministres vont avoir à se réunir. Quel jour ? Lundi prochain ? très bien, bientôt vous aurez donc une réponse à votre question. Mais, en tant que Présidence d'une part et en tant que responsable de la politique française, nous n'avons pas de désaccord de fond avec le Luxembourg et ce qui a pu apparaître comme désaccord est éclairé aujourd'hui.\
QUESTION.- Monsieur le Premier ministre vient de parler de discussions utiles et concluantes. Est-ce que vous pourriez nous dire quels ont été les sujets qui ont été concluants ?
- LE PRESIDENT.- C'est ce qu'on vient de dire. Il n'y a pas que cela mais c'est déjà important. Il reste à y avoir une décision, j'y insiste, une décision collective les 8 et 9 décembre. Mais sur la base ce que je viens de vous dire, notre comportement sera convergent. Voilà ce que je peux vous dire maintenant.
- Mais nous avons également serré de plus près, non pas le principe sur lequel nous sommes a priori d'accord, mais les procédures pour l'union économique et monétaire. Sur la charte sociale il n'y a aucune discussion entre nous car nous en sommes a priori convenus. Mais, il s'est aussi mêlé un autre élément dans la discussion : c'est sur la préparation des mesures à prendre pour l'Europe de l'Est. Nous avons également resserré notre débat et précisé les conditions de création d'une banque de développement pour l'Est. Car des questions d'ailleurs fort judicieuses se posent : mais il existe déjà la BEI, pourquoi changer cela ? On sait parfois, quand on va un peu au coeur de ces sujets, que la BEI est une banque à douze, qu'elle a une spécificité essentiellement communautaire, c'est sa vocation. Donc la mission en Europe de l'Est, c'est déjà autre chose. Encore pourrait-elle s'adapter, mais, dans ce cas-là, elle ne pourrait plus être simplement la banque des douze, car la banque de développement doit être ouverte à tous les capitaux qui s'offrent. Je crois que cette différence de nature doit entraîner la création d'un nouvel organisme. Nous n'en faisons pas, nous, Présidence, une question de principe : si un autre organisme peut faire ce travail de la même façon, nous n'y voyons pas d'inconvénients. Mais nous n'en voyons pas. Seule la Banque européenne existante pourrait sembler apporter l'organisme adéquat : tel n'est pas le cas. A partir de là, il faut que l'on avance vite. C'est une objection qui nous a été faite aussi par nos amis du Luxembourg : est-ce qu'on ne va pas mettre un temps fou avec les ratifications. Or le temps presse £ on risque d'arriver après les échéances politiques ce serait bien dommage. Comme il existe d'autres fonds, on peut peut-être déjà agir.
- Retenons toutes ces idées, mais je présenterai à Strasbourg un projet de banque de développement sur la base de ce que je viens de vous dire - sur la base élargie, il y a déjà les vingt-quatre pays - mais pourquoi est-ce qu'il n'y en aurait pas d'autres ? Et sur la base aussi d'une spécificité de l'Europe de l'Est, ce qui est très important pour ces pays, car les pays qui bénéficieraient des services de la banque pourraient aussi participer au conseil d'administration de la banque. Donc vous voyez que la BEI n'est pas tout à fait prête à cela. De ce point de vue-là c'est également concluant.
- Nous n'avons pas du tout de débat de fond ni de procédure sur la charte sociale. Le débat de procédure sur l'union économique et monétaire pourrait, à la limite, se poser sur la date d'ouverture de la conférence intergouvernementale chargée de préparer un nouveau traité. Il y aurait aussi le contenu de ce futur traité : s'en tenir à quelques questions précises, chercher l'accord à Strasbourg, ce qui est mon point de vue, entre tous. Là dessus, je crois que l'on peut dire que nos conclusions ont été positives.\
QUESTION.- (inaudible).
- LE PRESIDENT.- Ce que je proposerai, moi, comme Président en exercice, ce sera l'ouverture de la conférence intergouvernementale au deuxième semestre 1990.\
QUESTION.- Dans le contexte de la Banque de développement pour les pays de l'Est, est-ce qu'on ne pourrait pas envisager le fonds de rétablissement du Conseil de l'Europe ?
- LE PRESIDENT.- Si, si... Vous avez tout à fait raison et même dans l'intervalle, d'ici la mise en ordre des décisions, quelle que soit celle qui sera prise, ce fonds sera très utile et il faut le mettre en branle.\
QUESTION.- Est-ce que les problèmes de Cattenom ont été évoqués ?
- LE PRESIDENT.- Non, non, pas du tout. Il est d'ailleurs pratiquement résolu entre nos gouvernements.
- QUESTION.- C'est peut-être trop dire parce que le Luxembourg a toujours eu une opposition de principe...
- LE PRESIDENT.- Mais c'est résolu... Si vous m'en aviez parlé, je vous aurais dit, nous avons l'intention de continuer, nous, mais sans offenser le Luxembourg et donc en cherchant au maximum toutes les mesures qui pourraient, sinon faire renoncer à son opposition de principe, du moins faire mieux admettre cette réalité. Enfin nous n'avons pas l'intention de renoncer à notre politique nucléaire.\
QUESTION.- Monsieur le Président, il y a deux semaines à Strasbourg, vous avez dit, il faut aider Gorbatchev. Dans quelques semaines, vraisemblablement, vous allez vous rendre en Union soviétique. Vous voulez démontrer que vous aidez Gorbatchev sur le terrain parce qu'il a d'énormes problèmes ou vous voulez montrer l'exemple ?
- LE PRESIDENT.- Non, je ne veux rien démontrer du tout, cela fait partie des relations internationales tout à fait normales. J'ai déjà rencontré M. Gorbatchev au cours de ces dernières années au moins cinq fois et, comme je suis de plus es-qualité Président actuel du Conseil européen et que M. Gorbatchev va avoir des relations avec M. Bush au début décembre, tout cela fait que nous avons quand même pas mal de choses à nous dire. Nous nous sommes vus il n'y a pas très longtemps, c'était le 4 juillet. Nous avons correspondu depuis lors, par lettre ou par téléphone, mais une rencontre sera plus utile encore. D'autant plus que cela va vite du côté de l'Europe de l'Est, toutes choses qui n'étaient pas prévues le 4 juillet dernier.\
QUESTION.- Vous vous rendrez en RDA probablement donc avant le Chancelier Kohl ?
- LE PRESIDENT.- Ce serait d'un excellent symbole mais cela n'a pas été fait pour ça. C'est une invitation déjà ancienne, qui était formulée par M. Honecker il y a cinq ou six mois, et que les événements ont repoussée et pour cause ! Vous observerez que cette date est postérieure de quelques jours à la réunion du congrès extraordinaire du parti communiste est-allemand. Est-ce que, pour autant, ma visite coïncidera avec des événements en nouvelle évolution ou pas, moi, je n'en sais rien. C'est une question cela entre la France et la République démocratique allemande. Mais comme s'y ajoute l'Europe, cela peut ne pas être inutile.\
QUESTION.- (inaudible)
- LE PRESIDENT.- Je n'ai pas du tout l'intention de m'opposer en quoi que ce soit aux allées et venues de MM. Bush et Gorbatchev. Ils ont libre circulation, surtout sur leur territoire et vous savez qu'un navire c'est le territoire américain, c'est le territoire russe. En quoi est-ce que je me mêlerais de savoir où M. Bush se rend lorsqu'il reste dans son pays et où M. Gorbatchev agit de même ? Si j'ai des impressions, je ne vous les dirai pas.\
QUESTION.- Est-ce que j'ai bien compris que, même en cas de présomption de délit, il peut y avoir collaboration au niveau des administrations ...
- LE PRESIDENT.- Nous avons un droit qui est commun et qui veut que le pouvoir judiciaire ait une compétence particulière devant laquelle s'inclinent les autres pouvoirs.
- QUESTION.- Dans la région française voisine, la Lorraine, on craint l'évasion des capitaux en direction du Luxembourg, est-ce que c'est exact ?
- LE PRESIDENT.- Non, c'est-à-dire que tout ce qui peut être évasion de caractère naturel, simplement en raison des circuits qui se créent, de l'attraction de l'intérêt, qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse ? C'est la libre compétition. Moi je ne serais pas fâché de voir en France, en Lorraine, que nous exercions le même attrait que le Luxembourg. On va essayer.
- QUESTION.- On a une excellente coopération avec la Lorraine étant donné qu'il y a 14000 frontaliers lorrains ou du Nord de la France qui viennent travailler ici au Luxembourg, je crois également que le marché intérieur, je l'ai dit tout à l'heure à M. le Président de la République, va aboutir à une revalorisation des grandes régions, pas seulement la grande région "Sar-Lor-Lux", avec la Lorraine, la Sarre, le Luxembourg belge, mais également partout ailleurs en Europe. Et je crois que c'est une bonne chose et que c'est aussi un résultat de cette communauté européenne que nous voulons.
- LE PRESIDENT.- Je dois me rendre chez le Grand Duc du Luxembourg et je ne voudrais pas manquer à l'heure du rendez-vous.\