24 juin 1987 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, sur le rôle des chefs d'entreprises dans le développement des échanges internationaux, Paris, mercredi 24 juin 1987.

Mesdames,
- Messieurs,
- Je suis heureux de vous accueillir, amis, familiers, parents des personnalités que je vais dans un moment distinguer, par leur entrée ou leur promotion dans notre Ordre National de la Légion d'Honneur. Et vous, messieurs, vous savez bien que votre présence ici ensemble, a une signification particulière pour moi, mais aussi pour beaucoup de Français, en raison du rôle que vous jouez, que vous avez joué, que vous continuerez de jouer à la tête de vos entreprises, mais aussi dans les échanges internationaux et particulièrement dans vos relations avec la France.
- Pourquoi la France a-t-elle tenu à vous décerner la Légion d'Honneur - je le répète soit une promotion, soit une première distinction - ? C'est parce que nous avons voulu marquer notre solidarité avec un développement international dont vous êtes les principaux acteurs, naturellement, et cela ne vous est pas indifférent. Aussi, parce que votre action s'est orientée vers notre pays, que vous lui avez montré de la sympathie, que vous lui avez rendu des services.\
En effet, les choix de la France sont ceux de l'ouverture et de la compréhension dans le monde. Elle a travaillé, elle continue de travailler pour affirmer ses talents et ses moyens, elle est un des grands pays industriels du monde, mais aussi elle est un grand pays culturel. Elle assure sa défense en faisant un effort qui trouve peu de comparaison dans le monde. Bref, la France continue d'être, en dépit d'une population qui reste encore trop faible, un pays qui compte dans toutes les décisions mondiales, membre permanent du Conseil de Sécurité `ONU`, membre éminent de la Communauté européenne `CEE`, présente aux sommets industriels, présente pratiquement dans toutes les assemblées de toutes sortes, et particulièrement économiques, financières où se décide le sort de millions et de millions d'être humains. La France entend pratiquer l'ouverture sur les autres pays.\
C'est un peu une mode que de critiquer le protectionnisme que tout le monde pratique. Rarement, j'ai vu autant de désaccords entre le verbe et l'action. J'ai souvent remarqué que les pays qui s'indignent avec le plus de vigueur, sont ceux qui montrent le plus d'obstination à perpétuer ces mauvaises pratiques. Et cependant, il faudrait un jour, aussi prochain que possible, mette tout sur la table. On a commencé avec ce que l'on appelle "l'Uruguay round", c'est-à-dire les nouvelles négociations commerciales du GATT. Mais quand je dis tout sur la table, cela veut dire : l'industrie, l'agriculture, les services, les normes, de façon que véritablement une certaine hypocrisie générale cède le pas à une épreuve de vérité et je crois à sa nécessité. Bientôt la France franchira une étape très importante dans son histoire politique et économique, en 1992 £ j'ai moi-même négocié cet accord qu'il a été très difficile d'obtenir en 1985, après plusieurs tentatives qui ont échoué et il a fallu le bon accord de quelques-uns des grands pays de l'Europe et de la Commission européenne pour y parvenir contre mille oppositions, des oppositions multiples y compris dans notre pays. Mais à partir du moment où ce choix a été fait, il convenait de le réussir. Et tout doit être organisé pour que la France s'installe dans une concurrence totalement ouverte et sans frontière intérieure et en l'espace de peu d'années. Il en irait de même sans mélanger les choses en établissant une hiérarchie des valeurs et particulièrement par -rapport aux devoirs qui sont les nôtres dans notre environnement immédiat, je veux dire au sein de la Communauté économique européenne qui devrait à mes yeux devenir de plus en plus une communauté politique et même une communauté qui n'hésite pas à aborder la totalité des domaines où s'exerce l'activité humaine.
- Mais ces devoirs ne doivent pas nous laisser ignorer les problèmes qui se situent ailleurs aussi bien ceux des pays en voie de développement que la libre concurrence où les meilleurs gagnent £ alors que chacun soit le meilleur là où il peut dans le commerce international. Eh bien, les chefs d'entreprises qui se trouvent ici devant moi ont fait leurs preuves, des preuves particulièrement remarquables vous en jugerez. Ces preuves maintenant qu'elles sont faites les situent parmi ceux qui peuvent exercer une influence grâce à leur expérience pour que jouent tous ensemble tous les ressorts économiques et financiers c'est votre domaine, premier domaine, mais culturel aussi ou humain tout simplement £ c'est aussi votre domaine dès lors que vous êtes responsables. Que la France ait tenu à souligner votre mérite, messieurs a quelque chose aussi d'égoïste, vous avez bien deviné £ la France attend aussi de vous que vous continuiez d'être ses amis pour faciliter son propre développement sans qu'il soit besoin de demander rien à personne mais simplement parce que l'on va toujours plus loin quand on a des amis que lorsque l'on a la simple faculté de se faire des ennemis.\