24 mai 1982 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, devant la communauté française, Dakar, lundi 24 mai 1982.

Mesdames et messieurs,
- Mes chers compatriotes,
- Ce n'est pas matière à discours que cette rencontre de ce soir entre les Français du Sénégal et le Prles Français du Sénégal et le Président de la République française. C'est simplement une entrée en-matière, car j'espère pouvoir passer quelques quarts d'heure en votre compagnie, bien que votre nombre m'interdise un peu de remplir le programme auquel j'avais songé, c'est-à-dire parler avec le maximum d'entre vous.
- Cependant, après avoir visité le Niger, la Côte d'Ivoire et puis d'autres pays qui m'ont permis de rencontrer des Français de l'étranger, il est très important pour moi que de pouvoir vous entendre, de savoir d'une façon tout à fait directe que les problèmes se posent à vous. Je peux d'une façon abstraite me les poser. Je sais bien qu'il se pose des problèmes pour l'éducation des enfants, je sais bien qu'il se posent des problèmes pour ceux qui vont bientôt rentrer en France, qui ont coopéré et qui se demandent quel sort leur sera réservé. Je sais que se posent des problèmes à tous les Français appartenant à des sociétés ou à des professions diverses, qui sont obligés de rassembler à la fin de leur carrière des éléments divers, sans être assurés de disposer de toutes les sécurités auxquelles ils pourraient prétendre. Je sais bien, la liste des problèmes serait longue.
- Mais ce qui est très important pour moi, c'est que j'espère être en mesure d'apporter quelques réponses vivantes et complètes à ces questions sérieuses, comme je le ferai demain à Saint-Louis pour certains d'entre vous, notamment l'ensemble des anciens combattants du Sénégal qui ont été à nos côtés dans les périodes dramatiques de notre vie nationale et qui doivent bien, aujourd'hui, pouvoir se réclamer de la reconnaissance de la France.
- A vous, je vous dirais que ce qui me touche c'est la possibilité qui m'est offerte de mieux saisir, de mieux comprendre ce que peuvent ressentir les Français loin de leur patrie. Sans doute êtes-vous sur une terre que vous aimez, que vous servez £ sans doute, n'est-ce pas par hasard si vous êtes là. Cela représente, pour le plus grand nombre, un choix. Sans doute y a-t-il, parmi vous, un certain nombre de Français qui ont passé leur vie, leur vie active au Sénégal, qui comptent sur leur présence par décennie. Et puis d'autres, qui viennent d'arriver, d'autres encore qui n'en feront qu'un bref passage, bref les situations sont très diverses, de même que sont diverses vos occupations, vos préoccupations, vos opinions. Qui êtes-vous exactement ? Je vous regarde dans votre ensemble. Et bien ! Vous êtes une part de la France au Sénégal : c'est la seule chose qui m'importe.\
Quels que soient vos choix, votre rôle dans un pays comme celui-ci est un rôle qui peut remplir les plus grands services à notre pays. D'abord parce que c'est le Sénégal et que le Sénégal c'est l'Afrique. Vous savez quels sont les liens privilégiés qui continuent de nous unir à ces pays indépendants qui restent si intimement associés à la démarche de la France quand ce ne serait qu'au travers de la langue et de la culture. Et puis vous représentez une part de la France, au moment même où nous avons besoin d'affirmer, sur tous les continents, que notre pays continue d'avancer sur les chemins qui sont les siens historiquement, politiquement dans le vrai sens du terme. Cette présence de la France que j'essaie d'affirmer et dont vous êtes vous-mêmes les acteurs, c'est vous qui le faites très largement.
- C'est pourquoi, je suis très sensible à votre présence ici ce soir dans ce bel endroit alors que venu en visiteur un peu rapide, un peu pressé, je n'aurai dans mon souvenir que quelques images. Je souhaiterais aller au-delà de ces images afin, de retour en France, d'être en mesure toujours en dépassant nos différences inévitables et souvent légitimes de mieux ressentir encore, parce que je vous aurai rencontrés, la réalité de notre pays et de son peuple, et son unité en même temps que sa diversité.
- Je suis très heureux que vous soyez venus si nombreux. Ce que l'on peut se dire dans ces occasions, c'est bien peu de chose car nous sommes pris par le protocole, par les obligations officielles qui interdisent le plus souvent l'échange dont nous aurions besoin. Eh bien, puisque nous avons quelques quarts d'heures privilégiés, profitons-en ! Et quand nous aurons entendu notre hymne national, j'essaierai malgré tout d'aller d'un bout à l'autre de cette enceinte et de serrer tout simplement la main de quelques-uns et garder l'empreinte des Français du Sénégal à la veille de mon retour en France.
- Merci mes chers compatriotes.\