15 avril 1982 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'occasion du dîner offert par S.M. Hiro Hito, empereur du Japon, au Palais Impérial, Tokyo, jeudi 15 avril 1982.

Sire,
- Madame,
- Ce soir, dans la capitale de votre grand pays, je ressens profondément la qualité de l'accueil qui nous est réservé à mon épouse et à moi-même depuis hier, à notre arrivée à Tokyo.
- Les paroles si chaleureuses que Votre Majesté vient de prononcer, les attentions et les prévenances, dont, avec cette courtoisie qui est le propre de l'hospitalité japonaise, nous nous sentons entourés, portent témoignage de la sympathie et de l'amitié qui unissent nos deux peuples.
- Il y a plus de soixante ans que Votre Majesté Impériale nous a fait l'honneur de venir, pour la première fois en France. Elle y est revenue en 1971 avec Sa Majesté l'impératrice. Et moi-même, j'ai déjà commencé à découvrir et apprécier votre pays au-cours des deux années passées, lors de deux premiers voyages. Mais aujourd'hui, c'est en qualité de Président de la République française que j'ai l'honneur d'accomplir la première visite officielle d'un chef d'Etat de mon pays dans le vôtre.
- Et je mesure, croyez-moi, le privilège qui m'échoit d'être ce soir votre hôte, dans ce Palais dont la grandeur, l'harmonie et la noble sobriété, sont comme un symbole de l'art et de l'âme du Japon.
- Le Japon et la France ont en commun de compter parmi les plus anciennes nations du monde. Nous y avons bâti deux des plus anciens Etats. Ni l'un ni l'autre n'ont peur de l'avenir. Nous nous sentons aussi riches de notre histoire que de nos promesses. Nos deux pays ont fait le même choix de construire une société libre, de maîtriser les grandes technologies modernes, tout en restant enracinés dans leur propre culture.
- Ces communes orientations, les ressemblances de nos pays dans de nombreux domaines, mais aussi les différences, mais surtout les incertitudes qui pèsent sur la situation internationale doivent nous conduire à donner un nouvel élan à nos -rapports.\
J'appelle ce soir, en ce Palais Impérial, à un départ vraiment nouveau dans nos relations et nos échanges. Que le Japon et la France, dans le plein sens du terme, se connaissent et se reconnaissent ! Nous avons beaucoup de choses à faire ensemble. Coopérons dans le monde industrialisé, dans le tiers monde. Cela est, me semble-t-il, nécessaire et urgent car les besoins sont illimités.
- Mais je veux souligner ce soir en-particulier la nécessité du dialogue entre nos deux cultures. Elles sont à la fois analogues et disais-je différentes, comment ne le seraient-elles pas ? Analogues parce qu'au Japon comme en France, la tradition reste vivante, incorporée dans le présent. Différentes par leur contenu, par les formes artistiques qu'elles véhiculent et les valeurs qu'elles transmettent. Le dialogue entre nos deux cultures n'est pas seulement possible, il est si riche de virtualité. Les rencontres et les entretiens que j'ai eus depuis hier, ceux que j'aurai au-cours des trois prochains jours, les multiples manifestations qui entourent ce voyage l'ont déjà montré et le montreront encore.
- Couronnant ces échanges, je souhaite qu'au-cours de mon séjour, un vrai dialogue politique - il a déjà commencé aujourd'hui - s'initie entre nous et se poursuive ensuite régulièrement sur tous les terrains, dans tous les lieux où se rencontrent les nations. A brève échéance, ce sera en France-même lors du sommet des pays industrialisés. Ce sera aussi au-sein de l'Organisation des Nations unies `ONU`. J'ai déjà eu le plaisir et l'agrément de rencontrer quatre fois en dix mois le Premier ministre du Japon `Zenko SUZUKI`. C'est dire que si nous savons saisir les occasions que l'histoire nous procure, alors nous saurons justifier pleinement les engagements qui sont nôtres.
- En exprimant les voeux de la France pour le bonheur et la prospérité du peuple japonais, je vous invite mesdames et messieurs, à lever vos verres et à boire à la santé de Sa Majesté l'empereur du Japon, image respectée de l'unité de la nation japonaise et de Sa Majesté l'impératrice. En souhaitant bonheur et bonne santé à Leurs Majestés impériales, je lève mon verre, chacun ici l'a compris, à l'amitié des peuples du Japon et de la France.\