2 décembre 1981 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution de M. François Mitterrand, Président de la République, à l'occasion de la réception des Lettres de créance de M. Robert du Plooy, ambassadeur de la République d'Afrique du Sud, Paris, Palais de l'Élysée, mercredi 2 décembre 1981

Monsieur l'ambassadeur.
- C'est avec plaisir que je reçois aujourd'hui les Lettres par lesquelles Son Excellence M. Marais VILJOEN, Président de la République d'Afrique du Sud, vous accrédite auprès de moi en qualité d'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire. J'ai remarqué les sentiments d'amitié et d'estime que vous avez exprimés à l'égard de la France. J'ai apprécié l'évocation des événements qui ont, de l'arrivée des Huguenots français au Cap aux souffrances partagées pendant les deux conflits mondiaux, marqué l'histoire des relations entre nos deux pays.
- Monsieur l'ambassadeur, le message que beaucoup de peuples attendent traditionnellement de la France est un message de liberté, de justice et de fraternité. C'est celui auquel j'entends être fidèle. Je l'adresse bien évidemment aux pays d'Afrique, continent avec lequel la France se sent particulièrement solidaire. Je souhaite qu'il y soit entendu par tous ceux qui s'acharnent à remporter une victoire difficile contre la misère et le sous-développement et qui luttent pour l'affirmation ou le respect de leur dignité individuelle et collective.
- Dans cette Afrique fragile et troublée, certaines situations me paraissent spécialement préoccupantes. Il en est ainsi de celle qui règne en Afrique australe où le règlement de la question namibienne tarde à venir et où beaucoup d'hommes attendent encore de se voir reconnaître leurs droits les plus élémentaires.
- La France souhaite pour sa part que la Namibie accède le plus rapidement possible à l'indépendance conformément à la résolution 435 du Conseil de sécurité des Nations unies et elle est décidée à participer activement à la mise en oeuvre de ce règlement international. Elle souhaite vivement que l'afrique du Sud joigne ses efforts, sans aucune arrière pensée et avec la ferme volonté d'aboutir, à ceux qui tentent de trouver à cette affaire une solution juste et satisfaisante.\
L'Afrique du Sud est un grand pays. Ses capacités, ses moyens, ses atouts sont immenses. Elle a un grand rôle à jouer sur la scène africaine mais elle ne pourra le faire que si elle parvient à nouer avec ses voisins un dialogue confiant. Ceci exige certes que soient prises en-compte les évolutions inéluctables de la pensée et de la sensibilité contemporaines et les conséquences qu'elles entraînent sur la structure de nos sociétés modernes. Mais je suis certain que l'Afrique du Sud a suffisamment de ressources en elle-même, et suffisament de force, puisée aux sources de sa propre histoire, pour affronter avec lucidité, détermination et courage les mutations naturelles et inévitables de ce dernier quart de siècle.
- Vous avez indiqué, monsieur l'ambassadeur, que vous souhaitiez être pour les autorités françaises un interlocuteur sincère et franc.
- C'est cette même volonté de sincérité et de franchise qui me conduit à vous dire mon désir ardent de voir reconnaître en Afrique australe la dignité à laquelle les peuples ont droit et de voir s'y instaurer la paix, la sécurité et la liberté qui leur sont si nécessaires. Si elle est elle-même décidée à engager cette -recherche et à viser ce but, l'Afrique du Sud pourra compter sur l'appui et la sympathie de la France.
- En espérant que, les événements évoluant dans le sens que je viens d'indiquer, l'Afrique du Sud et la France pourront donner, au-cours des années qui viennent, une vigueur renouvelée à leurs relations, je formule des voeux pour le succès de votre mission et je vous prie de transmettre à Son Excellence M. Marais VILJOEN l'expression de mes sentiments de haute considération.\