20 juin 2013 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur la politique économique et sociale du gouvernement, à Paris le 20 juin 2013.
Monsieur le Premier ministre,
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs qui représentez lensemble des forces vives de la Nation,
Lidée qui nous réunit cest de faire de la conférence sociale un moment déchange, de dialogue, et même parfois de confrontation. Cest de faire de la conférence sociale le cadre, le lieu, et le moment au terme desquels une feuille de route est présentée par le Premier ministre pour mener à bien les réformes qui doivent conduire notre pays à avancer et à réussir.
La méthode choisie par le gouvernement depuis un an cest la réforme par le dialogue. Le travail conduit depuis 12 mois atteste de la pertinence de cette démarche. Concertation sur les emplois davenir, négociation sur les contrats de génération, sur légalité professionnelle dans la fonction publique, accord - même sil na pas été à lunanimité sur la sécurisation de lemploi, sur les retraites complémentaires et espoir dun débouché sur la négociation sur la qualité de vie au travail.
Tous ces chantiers, nous en avons fixé le principe lors de la conférence sociale de lannée dernière. Certains, je le disais, ont été conduits dans le plus large consensus, je pense notamment au contrat de génération à légalité professionnelle £ dautres ont été adoptés par des accords majoritaires et chacun, ici, a à lesprit la sécurisation de lemploi.
Je respecte les divergences de point de vue. Jai de la considération pour les organisations qui signent des accords mais jen ai aussi pour celles qui, pour des motifs qui leur appartiennent à un moment, préfèrent ne pas signer, et, pourtant, sont dans une démarche de dialogue social.
La feuille de route donc qui avait été présentée par le Premier ministre en juillet dernier a été respectée à la fois dans son esprit et dans son contenu. Nous nen voyons pas encore tous les effets des mesures qui ont été prises, mais nous voulons leur donner toute lampleur nécessaire compte tenu de la gravité de la situation.
Chacun connaît ici le contexte dans lequel cette conférence se tient. La zone euro est en récession et elle est en récession depuis maintenant près de trois ans. La France en subit les conséquences avec un chômage qui progresse continûment depuis cinq ans. Certes, il y a des signes encourageants : la production industrielle a rebondi en avril dernier £ les embauches - hors intérim - sont reparties à la hausse £ lintérim, lui-même, connaît un surcroît dactivité £ linflation en France est la plus basse de toute la zone euro ce qui peut être dailleurs interprété de deux manières. Une positive : si linflation est faible, notre compétitivité est plus forte, lune plus négative qui est le reflet de la déflation qui existe à léchelle de lEurope.
Mais, un des points positifs sur lequel je veux insister, cest que les taux dintérêt dans notre pays, ceux qui sont servis sur les emprunts dEtat mais aussi les taux dintérêt pour le financement des entreprises ou des collectivités locales, sont les plus faibles de notre histoire.
Alors, il y a aussi des inquiétudes, et nous les connaissons tout autant. Dabord parce que la croissance sera nulle dans lannée 2013, ce qui dailleurs signifie quil y aura une amorce de reprise au second semestre. Comment expliquer la situation que nous traversons ? Il y a dabord des facteurs extérieurs. Ce nest plus la crise financière qui nous menace, cest la récession en Europe. Il y a aussi le manque de visibilité pour les consommateurs, pour les investisseurs. Et puis, il y a un mal beaucoup plus profond, celui sur lequel nous devons nous pencher dans cette conférence sociale, cest celui de la défiance, du doute, du désarroi, chacun en connaît les raisons et chacun doit aussi en mesurer les conséquences.
Les économies qui repartent, il y a des facteurs objectifs, mais il y a aussi des facteurs psychologiques. Si nous voulons redonner aux consommateurs et aux investisseurs capacité à décider pour lavenir, nous devons retrouver la confiance, lespérance. Et les pays qui réussissent sont ceux qui sont capables de porter un tel projet. Depuis que jai accédé aux fonctions qui sont les miennes, je vais partout dans le monde. Je peux distinguer, pas simplement en rencontrant les chefs dEtat, ou de gouvernement, mais en voyant les entreprises, entreprises françaises qui sont installées dans ces pays, ou entreprises étrangères qui nous font concurrence.
Je vois létat desprit. Les pays qui avancent sont ceux qui ont décidé collectivement de se doter dune volonté collective, dune stratégie, dun dépassement des intérêts particuliers pour porter un intérêt commun supérieur. Cest ce que nous devons faire nous aussi. Cela suppose deux urgences. Lurgence de remettre léconomie européenne sur la voie de la croissance £ lurgence en France de préparer sans délai notre avenir.
Préparer notre avenir, cest dabord se désendetter. Cela ne peut pas être un but en soi, mais cest une condition. Le sérieux budgétaire nest pas et ne sera pas en France laustérité £ et pour une raison que jai défendue en Europe, cest quil ne peut pas y avoir de croissance durable sans assainissement budgétaire, jen conviens. Mais il ny aura pas de redressement financier durable sans croissance. Cest le sens des positions que je défends depuis un an et qui commencent à être entendues, y compris par la Commission européenne puisque plusieurs pays, dont le nôtre, ont obtenu un délai pour parvenir au déficit de 3 % de la production nationale. Ce report, je le dis aussi avec clarté, nest pas un répit, il ne nous exonère pas de ce que nous avons à faire pour notre pays.
Certes, je mesure ce que le gouvernement a demandé aux Français en termes de prélèvement aussi bien aux ménages quaux entreprises. Cétait la condition pour en terminer avec la spirale de lendettement et des déficits non contrôlés. Mais, en 2014, ce que jai demandé au gouvernement, cest de poursuivre lajustement par des économies essentiellement plutôt que par des impôts supplémentaires.
Les économies ! Tout le monde est pour les économies, sauf quand on les présente. Et ceux qui étaient les plus ardents à les réclamer deviennent les plus frileux. Ce nest jamais la bonne, il faut aller en chercher une autre. Lexpérience a été faite et je ne veux pas être cruel. On ouvre un dossier, on nous en présente un autre. Mais les économies cest la condition pour ne pas avoir de prélèvement supplémentaire.
Quelle méthode utiliser ? Celle du gouvernement, cest celle de lévaluation des politiques publiques. De voir ce qui marche, ce qui ne marche pas, ce qui est coûteux, ce qui nest pas efficace. Ce nest pas la coupe automatique, ce nest pas la baisse arithmétique, cest une méthode qui permet aussi aux agents publics de comprendre les missions qui sont leur proposées, de sinvestir dans les tâches qui sont essentielles pour le pays. Et, dans ce cadre-là, le gouvernement respectera ses priorités.
Ses priorités cest léducation, cest la sécurité de nos compatriotes, et cest lemploi. Mais reconnaissons aussi que toutes les dépenses nont pas la même utilité et que lEtat, comme les collectivités locales dailleurs, peuvent rendre un meilleur service aux usagers avec une organisation, une gestion plus efficace de leur ressource.
Je salue tous les efforts qui sont faits dans cet esprit-là. Ceux de lEtat et des fonctionnaires, ceux des collectivités locales. Mais il y a aussi un rééquilibrage de nos régimes sociaux. Comment admettre depuis dailleurs trop dannées que la sécurité sociale soit obligée demprunter pour financer ses dépenses ? Pas toutes ses dépenses, et évitons les caricatures, mais chaque fois quil y a un déficit que ce soit pour lassurance maladie, pour les retraites, pour la famille, cest par lemprunt - je dis bien par lemprunt - que nous couvrons les comptes sociaux. Ce qui revient à dire que ce sont les générations futures qui vont payer pour nos dépenses daujourdhui.
Un mécanisme avait été prévu à lorigine quand je dis à lorigine, cétait en 1995 - et cela été raffiné depuis. Chaque fois quil devait y avoir constatation dun déficit, il devait y avoir augmentation dune contribution pour éviter que la dette sociale puisse semballer. Cette contribution na jamais été activée et des reports déchéance ont été, hélas, décidés.
Nous, nous avons considéré que nous devions rééquilibrer les comptes sociaux. Et le faire là-encore dans la justice. Cela a été mené pour la famille, ce nétait pas facile, et jai veillé, avec le Premier ministre, à maintenir luniversalité des allocations familiales, quand beaucoup et avec de bons arguments évoquaient le plafonnement ou la modulation. En revanche, ce qui nous paraissait plus juste était de passer par le quotient familial, cest à dire par limpôt qui, en réalité, permettait à des familles aisées davoir un avantage fiscal parfois élevé alors même que des familles, qui nétaient pas redevables de limpôt sur le revenu, navaient aucun retour en terme de fiscalité.
Nous avons également clarifié un certain nombre de prestations, et cétait nécessaire. Nous ne nous sommes pas arrêtés là, puisquil y a eu - et cest les partenaires sociaux qui en ont décidé - une réforme courageuse des retraites complémentaires, et du côté de lassurance maladie, je dois relever que les dépenses ont été contenues par rapport aux objectifs qui avaient été fixés.
Voilà, préparer lavenir cest se désendetter. Mais préparer lavenir cest surtout renforcer notre appareil productif. Il faut en finir, tous les constats ont été faits, tous les rapports ont été délivrés. Il faut en finir avec le décrochage industriel, avec les pertes demploi, avec le déficit de nos échanges commerciaux. Cest le sens du pacte de compétitivité que le gouvernement a adopté en novembre dernier et du crédit dimpôt qui lui est attaché. Cest une amélioration des marges des entreprises - chacun doit en être bien conscient - de 20 milliards deuros.
Ce dispositif, il a plusieurs mérites : il est simple, il est net de toute imposition fiscale, à la différence dune baisse des charges et il simpute dès 2013, contrairement à bien des idées reçues. Il prévoit un mécanisme de préfinancement pour les entreprises qui veulent tout de suite en avoir lavantage en terme de trésorerie, et sans quil soit besoin de lourdes démarches. La Banque publique dinvestissement (la BPI) a mis en uvre ces avances pour 2 milliards deuros, 500 millions ont déjà été utilisés.
Par rapport à cet enjeu de lallègement du coût du travail, qui fait débat, mais dont le gouvernement a pris la responsabilité, faut-il aller plus loin ? Cela suppose avoir des marges de manuvre, chacun les connaît. Faut-il envisager la réforme de lassiette ou de nouvelles modalités pour les prélèvements sociaux ? Cela fait toujours partie de la discussion dans le cadre de la conférence sociale.
Jai évoqué la BPI, nouvelle institution qui rassemble des éléments éparts qui avaient vocation à soutenir linnovation, linvestissement des entreprises, mais, cette fois-ci, nous avons mis en place une banque qui a une force de frappe, 40 milliards deuros, et qui est capable de servir aussi bien des prêts pour la trésorerie que des concours pour linnovation, que lapport en fonds propres pour les entreprises qui affrontent avec talent des nouvelles étapes de développement.
Cette BPI est un instrument au service du financement de léconomie. Elle nest pas un substitut au financement de léconomie. Ce sont les banques qui doivent continuer à alimenter en crédit les entreprises. Et ce serait dailleurs un risque très sérieux davoir fait penser quil y aurait comme une forme dexonération de la responsabilité des banques. Cest pourquoi, nous avons avec la loi bancaire, bien fixé les objectifs et séparer ce qui relevait justement de lactivité de dépôt et de crédit, de lactivité de spéculation. Nous avons besoin de banques qui prêtent à léconomie. Je lai dit, les taux dintérêt sont parmi les plus faibles de ceux que nous avons connus ces dernières années.
Mais à quoi sert-il davoir des taux dintérêt faibles sil ny a pas des crédits qui sont délivrés ? Il y a donc là une mobilisation pour le financement des entreprises. Parce que préparer lavenir, cest investir.
La France a toujours connu de grands défis pour porter son avenir. Et ces défis passent par lavance technologique. Aujourdhui, nous avons besoin dinvestissements pour la transition énergétique, dinvestissements nouveaux pour le numérique, pour les nouvelles technologies, dinvestissements pour léconomie de la santé, dinvestissements pour les infrastructures de transport, même pour les industries de défense. Ce sont autant de grands projets qui dessineront la France de demain.
Et ce sera le sens du nouveau programme dinvestissements davenir que le Premier ministre présentera le mois prochain. Et qui permettra de nouer des partenariats entre le public et le privé. Parce que lenjeu cest de redresser notre production dans tous les domaines : industriels, agricoles, services, et même tourisme. Et nopposons pas les secteurs les uns par rapport aux autres, tout doit concourir à élever le niveau de la production, de la qualité et de lemploi. Nous avons à la fois à valoriser nos atouts, soutenir la marque « France », attirer des investissements étrangers, et exporter davantage.
Aussi, depuis un an, le gouvernement a défini une stratégie à travers 12 contrats de filière qui visent à adapter les normes - il y en a parfois trop à valoriser les formations, à développer linnovation, à faciliter lexportation, et à fédérer les grandes entreprises et les petites autour dobjectifs communs. A y mettre autant que possible la recherche avec les moyens publics, mais aussi le crédit dimpôt recherche et faire en sorte que nous soyons leader dans un certain nombre de domaines. Et que, là où nous sommes plus en retard, nous puissions être demain en avance avec le nouveau champion industriel.
Voilà ce qui relève de la responsabilité de lEtat. Non pas se substituer aux entreprises, ce sont elles qui décident de leurs alliances, de leurs investissements, de leurs innovations et de leurs recherches, mais de fédérer tous ces efforts et en lien avec les partenaires sociaux.
Jen arrive à notre conférence sociale. Cest un espace de concertation, de dialogue. Cette conférence nous permet de connaître ce que sont les chantiers sur lesquels lEtat et lensemble des partenaires vont se mobiliser.
Si je devais retenir quun seul enjeu, cest celui de lemploi. Cest un défi qui nous concerne tous. Plus de 10 % de la population active sont aujourdhui privés demploi. 3 millions de demandeurs demploi, 5 millions si nous prenons toutes les catégories. Cest un gâchis pour léconomie compte tenu de lensemble des savoir-faire, de ses disponibilités. Surtout quand on regarde le chômage des jeunes. Plus de 25 % aujourdhui des moins de 25 ans sont au chômage. Cest aussi un risque pour la société, de fracture, de fracture générationnelle, de fracture sociale, de fracture civique, on le voit bien.
Cest aussi une angoisse pour ceux qui sont concernés par le chômage ou une inquiétude pour ceux qui craignent de lêtre et pour toutes les familles. Alors, parlons franchement, le chômage, qui progresse depuis cinq ans, va continuer, hélas, encore à progresser jusquà la fin de lannée. Je nai jamais caché cette réalité. Car quand il ny a pas de croissance, il ny a pas de créations suffisantes demplois £ cela ne veut pas dire quil ny ait pas dembauches, il y a toujours des embauches ! Mais il y a aussi des pertes demplois, et il y a une population active qui augmente, 150 000 par an, et qui ne trouve pas les débouchés nécessaires. Mais jai aussi affirmé un engagement : inverser inverser durablement la courbe du chômage, pas un mois, pas deux mois, durablement, la courbe du chômage à la fin de lannée.
Je veux, ici, réaffirmer ma volonté, mais aussi vous dire ma conviction, pourquoi nous pouvons y arriver, pourquoi nous devons y arriver. Dabord, il y a des signes de reprise économique, en France et en Europe parce que léconomie mondiale est en expansion, les pays émergents, un ghetto de croissance de 7 à 8%, les Etats-Unis, qui vont connaître une croissance de 2 à 3%, les pays dAsie, et même les pays dAfrique, qui connaissent des croissances aujourdhui supérieures à 5%. Nous avons donc un problème en Europe, nous avons réglé les questions liées à la zone euro, à sa stabilité, à son intégrité, nous devons tout faire pour que la croissance reparte. Et elle va repartir.
Il y a donc ces signes de reprise, mais en attendant la reprise, ce qui est le travail quotidien que nous avons à faire pour créer de lemploi, pour être plus compétitifs, nous avons aussi à mettre en place des instruments de la politique de lemploi, ce quon appelle les emplois aidés. Logiquement, ils vont monter en puissance pour atteindre, progressivement, 440 000 contrats, parce que cest le niveau généralement atteint dans les périodes de chômage élevé.
Bien sûr, nous pourrons dire enfin, certains diront que ce sont des emplois aidés, mais il y a toujours eu des emplois aidés. Quand il y a un chômage élevé, certains diront : mais ce ne sont pas des emplois durables. Ce sont des emplois qui, pour certains dentre eux, peuvent aller jusquà trois ans. Dautres ajouteront : mais cela ne peut pas remplacer les emplois dans le secteur privé. Ils auront raison, parce que lemploi doit être essentiellement dans le secteur privé. Et lorsquil est dans le secteur public, cest avec des procédures de recrutement. Mais nous avons besoin de contrats aidés à condition quils soient utiles, pas simplement pour régler momentanément une difficulté, mais pour former, qualifier ceux qui en sont les bénéficiaires.
Premier objectif, cest datteindre 100 000 emplois davenir dici la fin de lannée. Ces emplois vous le savez sont destinés aux jeunes les moins qualifiés, à ceux qui nont aucune chance, dans létat actuel de notre économie, daccéder à un emploi dans le secteur privé. 33 000 à la fin du mois de juin sont déjà dans ce dispositif. Nous devons accélérer la montée en charge. Et, ici, je lance un appel, une fois de plus, aux collectivités locales et aux associations, je sais ce qui leur est demandé à travers ces emplois davenir, former des jeunes, cest indispensable, cest leur devoir. Mais je rappelle ce qui est lampleur de la participation de lEtat, 75%. Et jinsiste sur les perspectives dinsertion que ces emplois représentent pour les moins de 25 ans.
Jai demandé au ministre du Travail de faire plein usage de toutes les souplesses prévues par la loi pour permettre lembauche de jeunes non qualifiés, mais aussi de jeunes qualifiés, sils sont issus des quartiers les plus difficiles. Jai également souhaité que ces emplois davenir soient élargis dans certaines conditions et dans certaines limites au secteur privé, parce quil y a des branches, comme le tourisme, les services à la personne et la santé, qui peuvent se montrer disponibles, ce qui suppose, bien sûr, une participation de lEtat beaucoup plus faible, et un effort de formation pour ces jeunes.
Deuxième dispositif, les contrats de génération : ils sont entrés en vigueur il y a à peine trois mois, ils connaissent un indéniable succès dans les petites entreprises. La procédure est simple, et aujourdhui, il y a 1 000 contrats qui sont signés par semaine, avec la prime de 4 000 euros qui est attachée à chacun de ces contrats. Dans les autres entreprises, une négociation entre partenaires sociaux est nécessaire, ce qui peut entraîner du temps, et je le comprends. Il y a déjà eu un premier accord de branche dans le secteur de lassurance, cest bien, mais cest beaucoup trop peu.
Loccasion mest donc, là encore, donnée. Je demande aux entreprises concernées, aux organisations professionnelles, aux acteurs sociaux, dengager, au plus vite, toutes les discussions, branche par branche, entreprise par entreprise, pour favoriser le déploiement de ces contrats. Notre objectif, cest 75 000 contrats dici mars prochain. Ce qui veut dire en fait 150 000 personnes concernées, les 75 000 jeunes recrutés par un contrat à durée indéterminée, et les 75 000 seniors qui vont être maintenus dans lemploi. Mais, au-delà de ces deux dispositifs, dont nous devons tout faire pour quils montent le plus rapidement possible en régime, dans lintérêt des jeunes, dans lintérêt des activités qui sont proposées à ces personnes, et dans lintérêt même des entreprises, je souhaite que la conférence sociale ouvre dautres pistes.
Je pars dun constat simple qui nous rassemble, ce sont les entreprises qui créent des emplois, encore faut-il quelles réussissent à les pourvoir. Nous avons donc un effort considérable à mener de formation, jy reviendrai. Nous avons également à regarder une réalité, elle nest pas nouvelle : il y a à peu près de 200 000 à 300 000 recrutements dailleurs, personne na la véritable statistique - qui sont entamés, puis abandonnés, parce quil ny a pas des candidats suffisamment qualifiés par rapport aux emplois qui sont proposés. Si je veux prendre juste un exemple, nous sommes dans la semaine du Salon du Bourget, de nombreux contrats et je men félicite ont été signés pour des AIRBUS, et la filière aéronautique nous annonce déjà, depuis plusieurs mois, que, compte tenu de lampleur de la charge, il est nécessaire de pouvoir tout de suite pas dans quelques années tout de suite avoir les salariés qualifiés qui correspondent à ses commandes. Mais cet exemple, il vaut pour dautres.
Nous devons donc regarder cette réalité, sans pour autant poser des questions inutiles. Le débat je lai dit nest pas nouveau, et la seule interrogation qui vaille, cest : comment remédier à ces demandeurs demploi qui ne demandent quà travailler, et à ces entreprises, qui ne trouvent pas les personnels qui correspondent à leurs besoins. Sil sagit donc dun manque de personnels qualifiés, alors, quavons-nous à faire ? Nous tous, former les demandeurs demploi pour quils y répondent dans les meilleurs délais et les meilleures conditions. Sil sagit dun problème de mobilité, alors, réglons-le par des incitations financières, des facilités de logement. Sil sagit dun différentiel de salaire, cela peut arriver, alors, comblons-le, cela peut être la responsabilité de lEtat, parce que, mieux vaut un tel soutien que la poursuite dune indemnisation de chômage, cela coûtera moins cher et cela permettra de favoriser le recrutement, et donc lembauche.
Nous devons nous donner cet objectif : former rapidement et massivement les demandeurs demploi pour les secteurs qui sont en manque structurel de main-duvre qualifiée. Je vous propose donc et le Premier ministre y reviendra une action conjointe de lEtat, de Pôle Emploi, des régions, des partenaires sociaux, des organismes de formations, et des entreprises, pour que nous puissions atteindre lobjectif. Quest-ce que nous avons à faire ? Evaluer les métiers concernés, territoire par territoire, filière par filière, réaliser les formations indispensables et accompagner les futurs salariés jusquà lembauche.
Ce sujet me conduit à évoquer le chantier de la réforme de la formation professionnelle. Là-aussi, le constat est connu, la France consacre plus de 30 milliards deuros à la formation professionnelle, et les critiques qui sont adressées à ce système sont les suivantes : trop opaque dans son organisation, trop concentrée sur les salariés déjà qualifiés, et trop dispersée pour les demandeurs demploi. Et il est vrai que les chômeurs ne représentent que 13% de la dépense totale de formations. De même, les salariés des grandes entreprises bénéficient trois fois plus que ceux des plus petites des actions de formation professionnelle.
Enfin, les salariés âgés, ceux-là même qui peuvent être concernés par des départs à la retraite, repoussés de quelques mois ou de quelques années, ont rarement accès à une nouvelle chance. Doù dailleurs, le chômage particulièrement élevé des seniors. Nous devons donc revenir à lesprit de la grande loi de 1971 sur la promotion sociale et professionnelle. Ce qui suppose de clarifier les rôles de chacun. A lEtat, le cadre légal, aux régions, de former les jeunes et les demandeurs demploi en complémentarité avec Pôle Emploi, aux partenaires sociaux, dans le cadre des organismes de formation professionnelle, de fixer les objectifs au sein des entreprises pour élever le niveau de qualification £ niveau de qualification qui est un élément essentiel pour la compétitivité de notre économie.
Je souhaite et le Premier ministre y reviendra au terme de la conférence sociale que la réforme aboutisse avant la fin de lannée. Elle devra aussi traiter de lapprentissage et de lalternance. 70% des jeunes qui sortent dune formation en alternance sont en emploi dans les six mois qui suivent. Six mois qui suivent ! Je rappelle que lapprentissage ou lenseignement professionnel nest plus seulement limité au niveau 4 et 5, il peut aller jusquau BTS, à la licence professionnelle et même au diplôme dingénieur. Il faut changer limage de lalternance, de lenseignement professionnel, de lapprentissage. La France compte actuellement 450 000, soyons plus précis, 435 000 apprentis en formation. LAllemagne en compte 1,5 million. Cest un autre système, jen conviens. Mais cela en dit long sur la manière de préparer les emplois de demain. Lobjectif que je fixe est plus modeste, cest au moins darriver à 500 000 dans les prochaines années, dans les trois prochaines années. Là-encore, le pilotage doit être régional, parce que cest à cette échelle que lon doit adapter loffre de formation aux besoins économiques.
Je souhaite également que nous puissions étendre cet objectif à lenseignement professionnel qui doit être renforcé, valorisé, qualifié. Il y a une idée aussi que je veux lancer, il y a des entreprises, je le disais, notamment des PME, qui accueillent des alternés, et qui souhaitent être davantage associées au contenu des formations qui sont délivrées, et qui doivent correspondre à ce qui est attendu de technologies nouvelles ou de savoir-faire, y compris traditionnel.
Cette demande est légitime mais elle doit avoir une contrepartie, cest-à-dire la garantie dun débouché pour le jeune. Alors pourquoi ne pas imaginer que lentreprise qui contribuerait à la définition de la formation dun jeune en alternance, qui laccompagnerait tout au long de son parcours, puisse signer un contrat dapprentissage avec engagement dembauche, sous réserve, bien sûr, de lobtention du diplôme. Oui, cela serait une formule nouvelle qui partirait du contrat dapprentissage existant, mais qui enverrait un signe fort aux jeunes, aux familles sur la réussite et lexcellence des parcours professionnels.
Lenjeu, cest de mettre plus de jeunes dans lemploi, et dans lemploi durable, cest une obligation pour aujourdhui, mais cest également une nécessité pour demain, si lon veut financer les retraites. Et je veux arriver à cette réforme qui nous attend, la conférence sociale est saisie de cette question, et cest bien légitime. Parler des retraites, cest parler de lavenir. Cest parler de cette promesse que la société fait à chaque génération et à chacun de ses membres. Parler des retraites, cest envoyer un message de confiance, et non pas de peur. La peur est là aujourdhui. La peur, cest celle des pensionnés de voir remises en cause leurs retraites. La peur, cest celle des actifs qui arrivent en fin de carrière de ne pas pouvoir partir dans de bonnes conditions à la retraite. La peur, cest celle des jeunes qui pensent trop nombreux aujourdhui quils ne pourront jamais accéder à une retraite convenable.
La réforme que nous avons donc à faire nest pas pour ajouter une peur à une autre, cest au contraire pour donner une confiance et une espérance dans le système des retraites par répartition. Les jeunes ne sont dailleurs pas les seuls je le disais gagnés par le scepticisme, les aînés le sont aussi, il y a eu pas moins de trois réformes ces vingt dernières années, présentées, chacune comme définitives. Il y a eu beaucoup de sacrifices qui ont été demandés, et malgré les promesses qui ont été faites, sans doute de bonne foi, les chiffres, eux, sont implacables, 20 milliards de déficit en 2020, 7 milliards pour le seul régime général, la dernière réforme, elle ne date pas dil y a longtemps, de 2010, qui devait régler tous les problèmes, aussi bien de court terme que de long terme, connaît ses limites £ la crise, il est vrai, est passée par là et a fait perdre des recettes qui étaient attendues.
Pour autant, léquilibre à long terme de nos régimes fondés sur la répartition nest nullement hors datteinte. Car la France dispose, à la différence de tous ses voisins en Europe, dun atout majeur, cest notre démographie, cest-à-dire notre taux de natalité, et pas simplement depuis quelques années, depuis maintenant une vingtaine dannées, et qui continue, grâce aux efforts que nous pouvons faire dans le cadre de la politique familiale et de la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale. Ce qui fait que notre modèle est regardé comme original et même exemplaire. Alors, si notre démographie nous protège durablement, en même temps, elle ne nous règle pas les conséquences heureuses de lallongement de la vie. Nous avons donc deux obligations, renflouer les régimes dici 2020, et, au-delà, les équilibrer durablement. Un rapport a été donc demandé à Mme Yannick MOREAU. Ce rapport a porté un diagnostic, il a ouvert des pistes, et je nentends pas fermer le débat avant même quil nait été ouvert.
Mais je veux ici rappeler les trois principes qui guideront le gouvernement au moment des choix. Le premier principe, cest celui de la responsabilité, être responsable, cest assurer léquilibre de la branche vieillesse et être capable de financer le paiement des retraites au cours des six prochaines années. Des efforts seront demandés, nous aurons à en discuter, ils devront être équitablement répartis. Etre responsable, cest aussi tirer toutes les conséquences de cette chance formidable qui est lallongement de lespérance de la vie.
Il y a deux options qui sont possibles et qui sont évoquées, première option : augmenter lâge légal de départ à la retraite, cela a été fait, cétait le principe de la réforme de 2010. Jai considéré que cela revenait à pénaliser ceux qui ont commencé à travailler tôt. Lautre option, cest de prolonger la durée de cotisation, cest la mesure la plus juste, à condition de lappliquer à tous, et à tous les régimes, et de tenir compte de la pénibilité des tâches, mais aussi dun autre élément qui doit être dans la discussion, qui est lallongement de la période des études et qui appellera nécessairement un effort contributif, calculé dune manière différente daujourdhui.
Etre responsable donc, cest modifier à la fois le regard quon doit porter sur les jeunes, qui rentreront plus tard sur le marché du travail, mais aussi le regard sur les salariés seniors, le taux demploi des seniors est de lordre de 42%, au-delà de 56 ans. Il a progressé. Mais quand même, nous sommes loin de la moyenne européenne qui est près de 50%, et si nous ne parvenons pas à retenir les seniors dans lemploi, alors nous naurons fait quaugmenter la durée du chômage des plus de 60 ans sans faire déconomies pour le régime général.
Lenjeu, cest donc le travail des seniors £ des plans ont été négociés dans les entreprises depuis 2009. Nous devons les reprendre. Et le contrat de génération, quest-ce que cest, si ce nest de permettre à des jeunes de rentrer dans lemploi avec un contrat à durée indéterminée, mais aussi de permettre à des salariés de plus de 57 ans, 58 ans, de pouvoir rester eux-mêmes dans lentreprise pour avoir leur retraite à taux plein au moment où ils décideront de partir. Cest en fonction de ces principes de responsabilité que nous réussirons la réforme des retraites.
Le second principe, cest la justice. Or, les inégalités sont encore nombreuses dans notre système, et notamment au détriment des femmes, mais aussi des travailleurs qui ont connu des métiers pénibles. Sagissant de la justice, le rapport de Mme Yannick MOREAU aborde la question des différences qui existent entre le système privé et le système public. Les modalités cest vrai de liquidation de la retraite sont différentes. Mais la durée, comme le taux de cotisation sont les mêmes. Et surtout et cest ce que le rapport fait apparaître le taux de remplacement servi aux fonctionnaires est équivalent à celui dun salarié du secteur privé. Et si je regarde lévolution depuis quelques années, elle est moins favorable pour les fonctionnaires que pour les agents du secteur privé. Il ne sagit donc pas de faire silence sur le sujet, mais de regarder objectivement la réalité, et de voir les conclusions quil convient den tirer.
Le troisième principe dune réforme réussie des retraites, cest le pilotage à moyen et long termes, si nous voulons redonner de la confiance, si nous voulons lever les suspicions, les doutes, les inquiétudes, les angoisses par rapport à lavenir, il convient davoir, non pas des réformes des retraites tous les trois ans ou tous les quatre ans, qui, finalement, peuvent apparaître comme inutiles, puisquil faut y revenir, mais davoir un pilotage, non pas automatique, parce que cela doit être justement fondé sur le dialogue et la responsabilité, mais que nous puissions disposer dune visibilité à moyen et long termes, et faire évoluer de manière compréhensible et objective les paramètres dans le temps, de façon à ce que les actifs, comme les retraités, puissent comprendre que leur système de répartition sera garanti.
Voilà le sens de la réforme £ elle ne nous est imposée par personne, dailleurs, je refuserai quon puisse nous dire de lextérieur ce que nous avons à faire. Sil y a une réforme des retraites, ce nest pas parce quelle nous aurait été exigée dans le cadre dun programme de stabilité, ce qui nous a été demandé, et cest bien légitime, cest de remettre de lordre dans nos finances publiques, qui ont été dégradées depuis trop longtemps. Mais sur les retraites, ce nest pas de lextérieur que lon nous demande de les réformer, jallais dire cest de lintérieur que nous devons comprendre lenjeu et le défi, parce quil sagit tout simplement de la solidarité entre les générations, et du message que nous devons adresser à la jeunesse par rapport à son avenir.
Le Premier ministre et le gouvernement ont engagé, ou vont engager, au lendemain de la conférence sociale, une concertation, elle commencera donc dès le début du mois de juillet et se terminera à la fin de lété. Mais, comme je le disais pour sourire, comme il ny a plus dété, il faut donc fixer un certain agenda. Le mieux serait sans doute que, après une discussion qui pourra durer tous le mois de juillet, et si nécessaire, une partie du mois daoût, reprendre au début du mois de septembre, le gouvernement fera connaître ses choix à la rentrée.
Dans les mois qui viennent, les partenaires sociaux auront aussi à se prononcer sur la convention dassurance chômage qui arrive à terme en 2013, et notamment à la fin de lannée. Ce sera loccasion de simplifier, sûrement, les mécanismes, de mettre en uvre les droits rechargeables prévus par la loi de sécurisation de lemploi, et de faire en sorte que, là aussi, il ny a pas dinquiétudes nouvelles pour les demandeurs demploi, dans une période de chômage élevé. En même temps, lEtat doit aussi prendre sa responsabilité, au-delà des partenaires sociaux, et proposer des solutions au titre de la solidarité nationale, et cest la raison pour laquelle le gouvernement aura à définir une nouvelle articulation entre prime pour lemploi et RSA dactivité, et favoriser, autant quil est possible, lincitation au travail.
Vous avez souhaité que la conférence sociale aborde également la dimension européenne, et jen ai convenu bien volontiers, parce que nous sommes à la veille dun Conseil européen important, qui va se tenir le 28 juin. Quels sont les objectifs de la Confédération européenne des syndicats, et quels sont les objectifs de la France ? Ils sont proches, bien sûr chacun doit être à sa place.
Le premier objectif, cest de mettre en uvre le pacte de croissance qui a été décidé il y a un an. Vous allez me dire, mais pourquoi nest-il déjà pas appliqué ? Parce quil y a lenteurs, parce quil y a lourdeurs, parce quil y a résistances, et nous ne devons donc plus perdre de temps. Et je lai dit à mes collègues européens, le problème de lEurope cela peut être celui de son orientation mais cest surtout celui de son exécution. Ce que nous décidons devrait dailleurs être décidé plus vite, et être appliqué dans un délai court. Les procédures, dans une période de crise, nont plus de pertinence.
Sans plus attendre, en France, nous avons fait signer un contrat entre la Banque Européenne dInvestissement et la Caisse des Dépôts, bientôt entre la Banque Européenne dInvestissement et la Banque Publique dInvestissement, pour que tous les moyens qui avaient été dégagés, pour la croissance, puissent avoir des retombées dans notre pays, cela, cest le premier objectif. Il faudrait dailleurs en ajouter un autre, cest que ce programme de 120 milliards deuros, lannée dernière, paraît déjà dépassé, quil faudrait avoir une stratégie dinvestissement à léchelle de lEurope, et que, sil y a un thème, qui est celui de la transition énergétique, cela me paraît tout à fait essentiel de le porter.
Second objectif, lemploi des jeunes. Avec dautres pays, nous avons permis que, dans le budget européen, soit dégagés 6 milliards deuros pour cette cause-là, permettant ce quon appelle une garantie jeunes, c'est-à-dire la possibilité qui sera donnée pour tout jeune européen, sorti du système éducatif, de se voir proposer, dans un délai de 4 mois, un stage, une formation ou un emploi de qualité.
Mettons en uvre cet engagement plus rapidement ! Nattendons pas 2014, il y a des situations explosives, en France, mais aussi en Europe. Je parlais du taux de chômage des jeunes, en Espagne, au Portugal, il dépasse 50 ou 60%, mais en Outre-mer, en France, le taux de chômage des jeunes, cest déjà plus de 50%, utilisons donc ces fonds-là, parfois dailleurs même pas mobilisés, pour lemploi des jeunes, et avec un effet de levier pour que les entreprises, pour que les Etats membres, ajoutent encore à lambition.
Troisième objectif, cest de lutter contre le dumping social et contre la concurrence déloyale. A cet égard, il y a deux dispositions que nous devons faire adopter, cest un salaire minimum dans chaque Etat membre, et lapplication, différente daujourdhui, de ce quon appelle « la directive détachement. » Je ne peux pas accepter quil puisse y avoir, au nom de cette directive, des concurrences faussées qui détruisent de lemploi en France, et quon utilise, parce que cest le cas, le malheur dun certain nombre de pays, pour faire venir des travailleurs européens en les payant à des niveaux qui ne sont pas raisonnables. De la même manière, notre objectif doit être dorganiser une harmonisation fiscale en Europe et de commencer par limpôt sur les sociétés.
Voilà ce que je vais porter au cours de ce sommet, au cours des prochains mois, les partenaires sociaux, au niveau européen, doivent trouver toute leur place.
Je veux conclure sur le dialogue social. Nous lavons engagé depuis un an, nous en avons éprouvé, je pense, les uns et les autres, la qualité, la pertinence, lutilité, et, en même temps, nous ne devons pas rester simplement à des procédures. Le dialogue social, cest un état desprit, cest une conviction, cest une volonté, cest une méthode qui ne vaut pas pour un an, ou même pour un quinquennat, cest une méthode qui doit profondément changer les habitudes dans notre pays. M. Jacques DELORS disait dans une formule récemment et cétait un catholique qui sexprimait, quil faut se méfier des grandes messes sil ny a plus la foi. Ma conviction, cest que nous devons avoir la foi dans le dialogue social, car la France navancera et ne réussira que si elle respecte les acteurs.
La représentativité des syndicats, de salariés, est désormais établie, elle permet dasseoir la légitimité des organisations, qui sexpriment, et qui négocient, et donc qui engagent les travailleurs. Elle doit être prolongée par une représentation collective des petites entreprises, mais une démarche similaire doit être menée pour établir la représentativité des employeurs. Des propositions ont pris forme, je souhaite quelles aboutissent dans les semaines qui viennent.
La conséquence, de cette représentativité, de cette légitimité, de cette conviction dans le dialogue social, dans la démocratie sociale, cest de conforter le syndicalisme, en clarifiant ses moyens, quil sagisse de ressources dédiées aux organisations, ou au parcours professionnel des responsables syndicaux. Je suis favorable à louverture dune discussion tripartite sur le financement de la démocratie sociale.
Le dialogue social exige du temps, concertations, négociations, transpositions, et ce nest pas toujours compatible avec limpatience de nos concitoyens, ou lurgence des situations. Certains nous disent, « mais, il conviendrait daller plus vite, lEtat pourrait décider tout seul, et, au sein de lEtat le chef de lEtat, nous gagnerions du temps, cela serait fini de ces palabres, de ces pourparlers, de ces discussions. La crise est là, il faut aller vite. » Aller vite, cest aller nulle part. Aller vite, cest rester sur place. Aller vite, cest mettre chacun en opposition avec lautre. Donc, la méthode, ce nest pas de perdre notre temps, cest davoir nos rythmes, nos calendriers, nos chantiers. Cest le sens de la feuille de route de la conférence sociale. Et, en plus, cest une fausse vision du dialogue social, parce que, dans les entreprises et dans les branches, si cela négocie, les accords permettent daller bien plus vite quune modification de la loi ou une procédure judiciaire qui peut prendre des mois pour ne pas dire des années.
Voilà pourquoi notre réussite dépendra de notre ambition à régler, ensemble, avec nos points de vue, différents, les grands problèmes de notre pays, le chômage, la compétitivité, lavenir de la protection sociale, les inégalités, sans oublier la modernisation de lEtat, le service public, mais aussi notre réussite dépendra de notre capacité à engager ces réformes dans le respect des partenaires et dans le dialogue. Cest le sens de cette conférence sociale, qui doit permettre dentendre les points de vue, de prendre en compte les initiatives, les propositions, et de déboucher sur un agenda de réformes.
Je vous laffirme, comme nous lavons fait depuis un an, où de grands chantiers ont été menés, nous le ferons encore pour lannée qui vient, car il ny a pas de temps à perdre. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a 3,2 millions chômeurs. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a un endettement qui progresse, il ny a pas de temps à perdre quand il y a, hélas, une jeunesse qui peut douter de lavenir qui lui est réservé. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a un effort à engager sur la compétitivité des entreprises, sur lattractivité de notre territoire. Il ny a pas de temps à perdre pour lutter contre les inégalités. Nous sommes dans une bataille, mais pas entre nous, la bataille nest pas entre les uns et les autres, elle nest pas dêtre pour ou contre le gouvernement. La bataille que nous avons à engager, cest celle qui permettra de faire avancer la France et de donner espoir aux Français. Merci.
Mesdames, Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs qui représentez lensemble des forces vives de la Nation,
Lidée qui nous réunit cest de faire de la conférence sociale un moment déchange, de dialogue, et même parfois de confrontation. Cest de faire de la conférence sociale le cadre, le lieu, et le moment au terme desquels une feuille de route est présentée par le Premier ministre pour mener à bien les réformes qui doivent conduire notre pays à avancer et à réussir.
La méthode choisie par le gouvernement depuis un an cest la réforme par le dialogue. Le travail conduit depuis 12 mois atteste de la pertinence de cette démarche. Concertation sur les emplois davenir, négociation sur les contrats de génération, sur légalité professionnelle dans la fonction publique, accord - même sil na pas été à lunanimité sur la sécurisation de lemploi, sur les retraites complémentaires et espoir dun débouché sur la négociation sur la qualité de vie au travail.
Tous ces chantiers, nous en avons fixé le principe lors de la conférence sociale de lannée dernière. Certains, je le disais, ont été conduits dans le plus large consensus, je pense notamment au contrat de génération à légalité professionnelle £ dautres ont été adoptés par des accords majoritaires et chacun, ici, a à lesprit la sécurisation de lemploi.
Je respecte les divergences de point de vue. Jai de la considération pour les organisations qui signent des accords mais jen ai aussi pour celles qui, pour des motifs qui leur appartiennent à un moment, préfèrent ne pas signer, et, pourtant, sont dans une démarche de dialogue social.
La feuille de route donc qui avait été présentée par le Premier ministre en juillet dernier a été respectée à la fois dans son esprit et dans son contenu. Nous nen voyons pas encore tous les effets des mesures qui ont été prises, mais nous voulons leur donner toute lampleur nécessaire compte tenu de la gravité de la situation.
Chacun connaît ici le contexte dans lequel cette conférence se tient. La zone euro est en récession et elle est en récession depuis maintenant près de trois ans. La France en subit les conséquences avec un chômage qui progresse continûment depuis cinq ans. Certes, il y a des signes encourageants : la production industrielle a rebondi en avril dernier £ les embauches - hors intérim - sont reparties à la hausse £ lintérim, lui-même, connaît un surcroît dactivité £ linflation en France est la plus basse de toute la zone euro ce qui peut être dailleurs interprété de deux manières. Une positive : si linflation est faible, notre compétitivité est plus forte, lune plus négative qui est le reflet de la déflation qui existe à léchelle de lEurope.
Mais, un des points positifs sur lequel je veux insister, cest que les taux dintérêt dans notre pays, ceux qui sont servis sur les emprunts dEtat mais aussi les taux dintérêt pour le financement des entreprises ou des collectivités locales, sont les plus faibles de notre histoire.
Alors, il y a aussi des inquiétudes, et nous les connaissons tout autant. Dabord parce que la croissance sera nulle dans lannée 2013, ce qui dailleurs signifie quil y aura une amorce de reprise au second semestre. Comment expliquer la situation que nous traversons ? Il y a dabord des facteurs extérieurs. Ce nest plus la crise financière qui nous menace, cest la récession en Europe. Il y a aussi le manque de visibilité pour les consommateurs, pour les investisseurs. Et puis, il y a un mal beaucoup plus profond, celui sur lequel nous devons nous pencher dans cette conférence sociale, cest celui de la défiance, du doute, du désarroi, chacun en connaît les raisons et chacun doit aussi en mesurer les conséquences.
Les économies qui repartent, il y a des facteurs objectifs, mais il y a aussi des facteurs psychologiques. Si nous voulons redonner aux consommateurs et aux investisseurs capacité à décider pour lavenir, nous devons retrouver la confiance, lespérance. Et les pays qui réussissent sont ceux qui sont capables de porter un tel projet. Depuis que jai accédé aux fonctions qui sont les miennes, je vais partout dans le monde. Je peux distinguer, pas simplement en rencontrant les chefs dEtat, ou de gouvernement, mais en voyant les entreprises, entreprises françaises qui sont installées dans ces pays, ou entreprises étrangères qui nous font concurrence.
Je vois létat desprit. Les pays qui avancent sont ceux qui ont décidé collectivement de se doter dune volonté collective, dune stratégie, dun dépassement des intérêts particuliers pour porter un intérêt commun supérieur. Cest ce que nous devons faire nous aussi. Cela suppose deux urgences. Lurgence de remettre léconomie européenne sur la voie de la croissance £ lurgence en France de préparer sans délai notre avenir.
Préparer notre avenir, cest dabord se désendetter. Cela ne peut pas être un but en soi, mais cest une condition. Le sérieux budgétaire nest pas et ne sera pas en France laustérité £ et pour une raison que jai défendue en Europe, cest quil ne peut pas y avoir de croissance durable sans assainissement budgétaire, jen conviens. Mais il ny aura pas de redressement financier durable sans croissance. Cest le sens des positions que je défends depuis un an et qui commencent à être entendues, y compris par la Commission européenne puisque plusieurs pays, dont le nôtre, ont obtenu un délai pour parvenir au déficit de 3 % de la production nationale. Ce report, je le dis aussi avec clarté, nest pas un répit, il ne nous exonère pas de ce que nous avons à faire pour notre pays.
Certes, je mesure ce que le gouvernement a demandé aux Français en termes de prélèvement aussi bien aux ménages quaux entreprises. Cétait la condition pour en terminer avec la spirale de lendettement et des déficits non contrôlés. Mais, en 2014, ce que jai demandé au gouvernement, cest de poursuivre lajustement par des économies essentiellement plutôt que par des impôts supplémentaires.
Les économies ! Tout le monde est pour les économies, sauf quand on les présente. Et ceux qui étaient les plus ardents à les réclamer deviennent les plus frileux. Ce nest jamais la bonne, il faut aller en chercher une autre. Lexpérience a été faite et je ne veux pas être cruel. On ouvre un dossier, on nous en présente un autre. Mais les économies cest la condition pour ne pas avoir de prélèvement supplémentaire.
Quelle méthode utiliser ? Celle du gouvernement, cest celle de lévaluation des politiques publiques. De voir ce qui marche, ce qui ne marche pas, ce qui est coûteux, ce qui nest pas efficace. Ce nest pas la coupe automatique, ce nest pas la baisse arithmétique, cest une méthode qui permet aussi aux agents publics de comprendre les missions qui sont leur proposées, de sinvestir dans les tâches qui sont essentielles pour le pays. Et, dans ce cadre-là, le gouvernement respectera ses priorités.
Ses priorités cest léducation, cest la sécurité de nos compatriotes, et cest lemploi. Mais reconnaissons aussi que toutes les dépenses nont pas la même utilité et que lEtat, comme les collectivités locales dailleurs, peuvent rendre un meilleur service aux usagers avec une organisation, une gestion plus efficace de leur ressource.
Je salue tous les efforts qui sont faits dans cet esprit-là. Ceux de lEtat et des fonctionnaires, ceux des collectivités locales. Mais il y a aussi un rééquilibrage de nos régimes sociaux. Comment admettre depuis dailleurs trop dannées que la sécurité sociale soit obligée demprunter pour financer ses dépenses ? Pas toutes ses dépenses, et évitons les caricatures, mais chaque fois quil y a un déficit que ce soit pour lassurance maladie, pour les retraites, pour la famille, cest par lemprunt - je dis bien par lemprunt - que nous couvrons les comptes sociaux. Ce qui revient à dire que ce sont les générations futures qui vont payer pour nos dépenses daujourdhui.
Un mécanisme avait été prévu à lorigine quand je dis à lorigine, cétait en 1995 - et cela été raffiné depuis. Chaque fois quil devait y avoir constatation dun déficit, il devait y avoir augmentation dune contribution pour éviter que la dette sociale puisse semballer. Cette contribution na jamais été activée et des reports déchéance ont été, hélas, décidés.
Nous, nous avons considéré que nous devions rééquilibrer les comptes sociaux. Et le faire là-encore dans la justice. Cela a été mené pour la famille, ce nétait pas facile, et jai veillé, avec le Premier ministre, à maintenir luniversalité des allocations familiales, quand beaucoup et avec de bons arguments évoquaient le plafonnement ou la modulation. En revanche, ce qui nous paraissait plus juste était de passer par le quotient familial, cest à dire par limpôt qui, en réalité, permettait à des familles aisées davoir un avantage fiscal parfois élevé alors même que des familles, qui nétaient pas redevables de limpôt sur le revenu, navaient aucun retour en terme de fiscalité.
Nous avons également clarifié un certain nombre de prestations, et cétait nécessaire. Nous ne nous sommes pas arrêtés là, puisquil y a eu - et cest les partenaires sociaux qui en ont décidé - une réforme courageuse des retraites complémentaires, et du côté de lassurance maladie, je dois relever que les dépenses ont été contenues par rapport aux objectifs qui avaient été fixés.
Voilà, préparer lavenir cest se désendetter. Mais préparer lavenir cest surtout renforcer notre appareil productif. Il faut en finir, tous les constats ont été faits, tous les rapports ont été délivrés. Il faut en finir avec le décrochage industriel, avec les pertes demploi, avec le déficit de nos échanges commerciaux. Cest le sens du pacte de compétitivité que le gouvernement a adopté en novembre dernier et du crédit dimpôt qui lui est attaché. Cest une amélioration des marges des entreprises - chacun doit en être bien conscient - de 20 milliards deuros.
Ce dispositif, il a plusieurs mérites : il est simple, il est net de toute imposition fiscale, à la différence dune baisse des charges et il simpute dès 2013, contrairement à bien des idées reçues. Il prévoit un mécanisme de préfinancement pour les entreprises qui veulent tout de suite en avoir lavantage en terme de trésorerie, et sans quil soit besoin de lourdes démarches. La Banque publique dinvestissement (la BPI) a mis en uvre ces avances pour 2 milliards deuros, 500 millions ont déjà été utilisés.
Par rapport à cet enjeu de lallègement du coût du travail, qui fait débat, mais dont le gouvernement a pris la responsabilité, faut-il aller plus loin ? Cela suppose avoir des marges de manuvre, chacun les connaît. Faut-il envisager la réforme de lassiette ou de nouvelles modalités pour les prélèvements sociaux ? Cela fait toujours partie de la discussion dans le cadre de la conférence sociale.
Jai évoqué la BPI, nouvelle institution qui rassemble des éléments éparts qui avaient vocation à soutenir linnovation, linvestissement des entreprises, mais, cette fois-ci, nous avons mis en place une banque qui a une force de frappe, 40 milliards deuros, et qui est capable de servir aussi bien des prêts pour la trésorerie que des concours pour linnovation, que lapport en fonds propres pour les entreprises qui affrontent avec talent des nouvelles étapes de développement.
Cette BPI est un instrument au service du financement de léconomie. Elle nest pas un substitut au financement de léconomie. Ce sont les banques qui doivent continuer à alimenter en crédit les entreprises. Et ce serait dailleurs un risque très sérieux davoir fait penser quil y aurait comme une forme dexonération de la responsabilité des banques. Cest pourquoi, nous avons avec la loi bancaire, bien fixé les objectifs et séparer ce qui relevait justement de lactivité de dépôt et de crédit, de lactivité de spéculation. Nous avons besoin de banques qui prêtent à léconomie. Je lai dit, les taux dintérêt sont parmi les plus faibles de ceux que nous avons connus ces dernières années.
Mais à quoi sert-il davoir des taux dintérêt faibles sil ny a pas des crédits qui sont délivrés ? Il y a donc là une mobilisation pour le financement des entreprises. Parce que préparer lavenir, cest investir.
La France a toujours connu de grands défis pour porter son avenir. Et ces défis passent par lavance technologique. Aujourdhui, nous avons besoin dinvestissements pour la transition énergétique, dinvestissements nouveaux pour le numérique, pour les nouvelles technologies, dinvestissements pour léconomie de la santé, dinvestissements pour les infrastructures de transport, même pour les industries de défense. Ce sont autant de grands projets qui dessineront la France de demain.
Et ce sera le sens du nouveau programme dinvestissements davenir que le Premier ministre présentera le mois prochain. Et qui permettra de nouer des partenariats entre le public et le privé. Parce que lenjeu cest de redresser notre production dans tous les domaines : industriels, agricoles, services, et même tourisme. Et nopposons pas les secteurs les uns par rapport aux autres, tout doit concourir à élever le niveau de la production, de la qualité et de lemploi. Nous avons à la fois à valoriser nos atouts, soutenir la marque « France », attirer des investissements étrangers, et exporter davantage.
Aussi, depuis un an, le gouvernement a défini une stratégie à travers 12 contrats de filière qui visent à adapter les normes - il y en a parfois trop à valoriser les formations, à développer linnovation, à faciliter lexportation, et à fédérer les grandes entreprises et les petites autour dobjectifs communs. A y mettre autant que possible la recherche avec les moyens publics, mais aussi le crédit dimpôt recherche et faire en sorte que nous soyons leader dans un certain nombre de domaines. Et que, là où nous sommes plus en retard, nous puissions être demain en avance avec le nouveau champion industriel.
Voilà ce qui relève de la responsabilité de lEtat. Non pas se substituer aux entreprises, ce sont elles qui décident de leurs alliances, de leurs investissements, de leurs innovations et de leurs recherches, mais de fédérer tous ces efforts et en lien avec les partenaires sociaux.
Jen arrive à notre conférence sociale. Cest un espace de concertation, de dialogue. Cette conférence nous permet de connaître ce que sont les chantiers sur lesquels lEtat et lensemble des partenaires vont se mobiliser.
Si je devais retenir quun seul enjeu, cest celui de lemploi. Cest un défi qui nous concerne tous. Plus de 10 % de la population active sont aujourdhui privés demploi. 3 millions de demandeurs demploi, 5 millions si nous prenons toutes les catégories. Cest un gâchis pour léconomie compte tenu de lensemble des savoir-faire, de ses disponibilités. Surtout quand on regarde le chômage des jeunes. Plus de 25 % aujourdhui des moins de 25 ans sont au chômage. Cest aussi un risque pour la société, de fracture, de fracture générationnelle, de fracture sociale, de fracture civique, on le voit bien.
Cest aussi une angoisse pour ceux qui sont concernés par le chômage ou une inquiétude pour ceux qui craignent de lêtre et pour toutes les familles. Alors, parlons franchement, le chômage, qui progresse depuis cinq ans, va continuer, hélas, encore à progresser jusquà la fin de lannée. Je nai jamais caché cette réalité. Car quand il ny a pas de croissance, il ny a pas de créations suffisantes demplois £ cela ne veut pas dire quil ny ait pas dembauches, il y a toujours des embauches ! Mais il y a aussi des pertes demplois, et il y a une population active qui augmente, 150 000 par an, et qui ne trouve pas les débouchés nécessaires. Mais jai aussi affirmé un engagement : inverser inverser durablement la courbe du chômage, pas un mois, pas deux mois, durablement, la courbe du chômage à la fin de lannée.
Je veux, ici, réaffirmer ma volonté, mais aussi vous dire ma conviction, pourquoi nous pouvons y arriver, pourquoi nous devons y arriver. Dabord, il y a des signes de reprise économique, en France et en Europe parce que léconomie mondiale est en expansion, les pays émergents, un ghetto de croissance de 7 à 8%, les Etats-Unis, qui vont connaître une croissance de 2 à 3%, les pays dAsie, et même les pays dAfrique, qui connaissent des croissances aujourdhui supérieures à 5%. Nous avons donc un problème en Europe, nous avons réglé les questions liées à la zone euro, à sa stabilité, à son intégrité, nous devons tout faire pour que la croissance reparte. Et elle va repartir.
Il y a donc ces signes de reprise, mais en attendant la reprise, ce qui est le travail quotidien que nous avons à faire pour créer de lemploi, pour être plus compétitifs, nous avons aussi à mettre en place des instruments de la politique de lemploi, ce quon appelle les emplois aidés. Logiquement, ils vont monter en puissance pour atteindre, progressivement, 440 000 contrats, parce que cest le niveau généralement atteint dans les périodes de chômage élevé.
Bien sûr, nous pourrons dire enfin, certains diront que ce sont des emplois aidés, mais il y a toujours eu des emplois aidés. Quand il y a un chômage élevé, certains diront : mais ce ne sont pas des emplois durables. Ce sont des emplois qui, pour certains dentre eux, peuvent aller jusquà trois ans. Dautres ajouteront : mais cela ne peut pas remplacer les emplois dans le secteur privé. Ils auront raison, parce que lemploi doit être essentiellement dans le secteur privé. Et lorsquil est dans le secteur public, cest avec des procédures de recrutement. Mais nous avons besoin de contrats aidés à condition quils soient utiles, pas simplement pour régler momentanément une difficulté, mais pour former, qualifier ceux qui en sont les bénéficiaires.
Premier objectif, cest datteindre 100 000 emplois davenir dici la fin de lannée. Ces emplois vous le savez sont destinés aux jeunes les moins qualifiés, à ceux qui nont aucune chance, dans létat actuel de notre économie, daccéder à un emploi dans le secteur privé. 33 000 à la fin du mois de juin sont déjà dans ce dispositif. Nous devons accélérer la montée en charge. Et, ici, je lance un appel, une fois de plus, aux collectivités locales et aux associations, je sais ce qui leur est demandé à travers ces emplois davenir, former des jeunes, cest indispensable, cest leur devoir. Mais je rappelle ce qui est lampleur de la participation de lEtat, 75%. Et jinsiste sur les perspectives dinsertion que ces emplois représentent pour les moins de 25 ans.
Jai demandé au ministre du Travail de faire plein usage de toutes les souplesses prévues par la loi pour permettre lembauche de jeunes non qualifiés, mais aussi de jeunes qualifiés, sils sont issus des quartiers les plus difficiles. Jai également souhaité que ces emplois davenir soient élargis dans certaines conditions et dans certaines limites au secteur privé, parce quil y a des branches, comme le tourisme, les services à la personne et la santé, qui peuvent se montrer disponibles, ce qui suppose, bien sûr, une participation de lEtat beaucoup plus faible, et un effort de formation pour ces jeunes.
Deuxième dispositif, les contrats de génération : ils sont entrés en vigueur il y a à peine trois mois, ils connaissent un indéniable succès dans les petites entreprises. La procédure est simple, et aujourdhui, il y a 1 000 contrats qui sont signés par semaine, avec la prime de 4 000 euros qui est attachée à chacun de ces contrats. Dans les autres entreprises, une négociation entre partenaires sociaux est nécessaire, ce qui peut entraîner du temps, et je le comprends. Il y a déjà eu un premier accord de branche dans le secteur de lassurance, cest bien, mais cest beaucoup trop peu.
Loccasion mest donc, là encore, donnée. Je demande aux entreprises concernées, aux organisations professionnelles, aux acteurs sociaux, dengager, au plus vite, toutes les discussions, branche par branche, entreprise par entreprise, pour favoriser le déploiement de ces contrats. Notre objectif, cest 75 000 contrats dici mars prochain. Ce qui veut dire en fait 150 000 personnes concernées, les 75 000 jeunes recrutés par un contrat à durée indéterminée, et les 75 000 seniors qui vont être maintenus dans lemploi. Mais, au-delà de ces deux dispositifs, dont nous devons tout faire pour quils montent le plus rapidement possible en régime, dans lintérêt des jeunes, dans lintérêt des activités qui sont proposées à ces personnes, et dans lintérêt même des entreprises, je souhaite que la conférence sociale ouvre dautres pistes.
Je pars dun constat simple qui nous rassemble, ce sont les entreprises qui créent des emplois, encore faut-il quelles réussissent à les pourvoir. Nous avons donc un effort considérable à mener de formation, jy reviendrai. Nous avons également à regarder une réalité, elle nest pas nouvelle : il y a à peu près de 200 000 à 300 000 recrutements dailleurs, personne na la véritable statistique - qui sont entamés, puis abandonnés, parce quil ny a pas des candidats suffisamment qualifiés par rapport aux emplois qui sont proposés. Si je veux prendre juste un exemple, nous sommes dans la semaine du Salon du Bourget, de nombreux contrats et je men félicite ont été signés pour des AIRBUS, et la filière aéronautique nous annonce déjà, depuis plusieurs mois, que, compte tenu de lampleur de la charge, il est nécessaire de pouvoir tout de suite pas dans quelques années tout de suite avoir les salariés qualifiés qui correspondent à ses commandes. Mais cet exemple, il vaut pour dautres.
Nous devons donc regarder cette réalité, sans pour autant poser des questions inutiles. Le débat je lai dit nest pas nouveau, et la seule interrogation qui vaille, cest : comment remédier à ces demandeurs demploi qui ne demandent quà travailler, et à ces entreprises, qui ne trouvent pas les personnels qui correspondent à leurs besoins. Sil sagit donc dun manque de personnels qualifiés, alors, quavons-nous à faire ? Nous tous, former les demandeurs demploi pour quils y répondent dans les meilleurs délais et les meilleures conditions. Sil sagit dun problème de mobilité, alors, réglons-le par des incitations financières, des facilités de logement. Sil sagit dun différentiel de salaire, cela peut arriver, alors, comblons-le, cela peut être la responsabilité de lEtat, parce que, mieux vaut un tel soutien que la poursuite dune indemnisation de chômage, cela coûtera moins cher et cela permettra de favoriser le recrutement, et donc lembauche.
Nous devons nous donner cet objectif : former rapidement et massivement les demandeurs demploi pour les secteurs qui sont en manque structurel de main-duvre qualifiée. Je vous propose donc et le Premier ministre y reviendra une action conjointe de lEtat, de Pôle Emploi, des régions, des partenaires sociaux, des organismes de formations, et des entreprises, pour que nous puissions atteindre lobjectif. Quest-ce que nous avons à faire ? Evaluer les métiers concernés, territoire par territoire, filière par filière, réaliser les formations indispensables et accompagner les futurs salariés jusquà lembauche.
Ce sujet me conduit à évoquer le chantier de la réforme de la formation professionnelle. Là-aussi, le constat est connu, la France consacre plus de 30 milliards deuros à la formation professionnelle, et les critiques qui sont adressées à ce système sont les suivantes : trop opaque dans son organisation, trop concentrée sur les salariés déjà qualifiés, et trop dispersée pour les demandeurs demploi. Et il est vrai que les chômeurs ne représentent que 13% de la dépense totale de formations. De même, les salariés des grandes entreprises bénéficient trois fois plus que ceux des plus petites des actions de formation professionnelle.
Enfin, les salariés âgés, ceux-là même qui peuvent être concernés par des départs à la retraite, repoussés de quelques mois ou de quelques années, ont rarement accès à une nouvelle chance. Doù dailleurs, le chômage particulièrement élevé des seniors. Nous devons donc revenir à lesprit de la grande loi de 1971 sur la promotion sociale et professionnelle. Ce qui suppose de clarifier les rôles de chacun. A lEtat, le cadre légal, aux régions, de former les jeunes et les demandeurs demploi en complémentarité avec Pôle Emploi, aux partenaires sociaux, dans le cadre des organismes de formation professionnelle, de fixer les objectifs au sein des entreprises pour élever le niveau de qualification £ niveau de qualification qui est un élément essentiel pour la compétitivité de notre économie.
Je souhaite et le Premier ministre y reviendra au terme de la conférence sociale que la réforme aboutisse avant la fin de lannée. Elle devra aussi traiter de lapprentissage et de lalternance. 70% des jeunes qui sortent dune formation en alternance sont en emploi dans les six mois qui suivent. Six mois qui suivent ! Je rappelle que lapprentissage ou lenseignement professionnel nest plus seulement limité au niveau 4 et 5, il peut aller jusquau BTS, à la licence professionnelle et même au diplôme dingénieur. Il faut changer limage de lalternance, de lenseignement professionnel, de lapprentissage. La France compte actuellement 450 000, soyons plus précis, 435 000 apprentis en formation. LAllemagne en compte 1,5 million. Cest un autre système, jen conviens. Mais cela en dit long sur la manière de préparer les emplois de demain. Lobjectif que je fixe est plus modeste, cest au moins darriver à 500 000 dans les prochaines années, dans les trois prochaines années. Là-encore, le pilotage doit être régional, parce que cest à cette échelle que lon doit adapter loffre de formation aux besoins économiques.
Je souhaite également que nous puissions étendre cet objectif à lenseignement professionnel qui doit être renforcé, valorisé, qualifié. Il y a une idée aussi que je veux lancer, il y a des entreprises, je le disais, notamment des PME, qui accueillent des alternés, et qui souhaitent être davantage associées au contenu des formations qui sont délivrées, et qui doivent correspondre à ce qui est attendu de technologies nouvelles ou de savoir-faire, y compris traditionnel.
Cette demande est légitime mais elle doit avoir une contrepartie, cest-à-dire la garantie dun débouché pour le jeune. Alors pourquoi ne pas imaginer que lentreprise qui contribuerait à la définition de la formation dun jeune en alternance, qui laccompagnerait tout au long de son parcours, puisse signer un contrat dapprentissage avec engagement dembauche, sous réserve, bien sûr, de lobtention du diplôme. Oui, cela serait une formule nouvelle qui partirait du contrat dapprentissage existant, mais qui enverrait un signe fort aux jeunes, aux familles sur la réussite et lexcellence des parcours professionnels.
Lenjeu, cest de mettre plus de jeunes dans lemploi, et dans lemploi durable, cest une obligation pour aujourdhui, mais cest également une nécessité pour demain, si lon veut financer les retraites. Et je veux arriver à cette réforme qui nous attend, la conférence sociale est saisie de cette question, et cest bien légitime. Parler des retraites, cest parler de lavenir. Cest parler de cette promesse que la société fait à chaque génération et à chacun de ses membres. Parler des retraites, cest envoyer un message de confiance, et non pas de peur. La peur est là aujourdhui. La peur, cest celle des pensionnés de voir remises en cause leurs retraites. La peur, cest celle des actifs qui arrivent en fin de carrière de ne pas pouvoir partir dans de bonnes conditions à la retraite. La peur, cest celle des jeunes qui pensent trop nombreux aujourdhui quils ne pourront jamais accéder à une retraite convenable.
La réforme que nous avons donc à faire nest pas pour ajouter une peur à une autre, cest au contraire pour donner une confiance et une espérance dans le système des retraites par répartition. Les jeunes ne sont dailleurs pas les seuls je le disais gagnés par le scepticisme, les aînés le sont aussi, il y a eu pas moins de trois réformes ces vingt dernières années, présentées, chacune comme définitives. Il y a eu beaucoup de sacrifices qui ont été demandés, et malgré les promesses qui ont été faites, sans doute de bonne foi, les chiffres, eux, sont implacables, 20 milliards de déficit en 2020, 7 milliards pour le seul régime général, la dernière réforme, elle ne date pas dil y a longtemps, de 2010, qui devait régler tous les problèmes, aussi bien de court terme que de long terme, connaît ses limites £ la crise, il est vrai, est passée par là et a fait perdre des recettes qui étaient attendues.
Pour autant, léquilibre à long terme de nos régimes fondés sur la répartition nest nullement hors datteinte. Car la France dispose, à la différence de tous ses voisins en Europe, dun atout majeur, cest notre démographie, cest-à-dire notre taux de natalité, et pas simplement depuis quelques années, depuis maintenant une vingtaine dannées, et qui continue, grâce aux efforts que nous pouvons faire dans le cadre de la politique familiale et de la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale. Ce qui fait que notre modèle est regardé comme original et même exemplaire. Alors, si notre démographie nous protège durablement, en même temps, elle ne nous règle pas les conséquences heureuses de lallongement de la vie. Nous avons donc deux obligations, renflouer les régimes dici 2020, et, au-delà, les équilibrer durablement. Un rapport a été donc demandé à Mme Yannick MOREAU. Ce rapport a porté un diagnostic, il a ouvert des pistes, et je nentends pas fermer le débat avant même quil nait été ouvert.
Mais je veux ici rappeler les trois principes qui guideront le gouvernement au moment des choix. Le premier principe, cest celui de la responsabilité, être responsable, cest assurer léquilibre de la branche vieillesse et être capable de financer le paiement des retraites au cours des six prochaines années. Des efforts seront demandés, nous aurons à en discuter, ils devront être équitablement répartis. Etre responsable, cest aussi tirer toutes les conséquences de cette chance formidable qui est lallongement de lespérance de la vie.
Il y a deux options qui sont possibles et qui sont évoquées, première option : augmenter lâge légal de départ à la retraite, cela a été fait, cétait le principe de la réforme de 2010. Jai considéré que cela revenait à pénaliser ceux qui ont commencé à travailler tôt. Lautre option, cest de prolonger la durée de cotisation, cest la mesure la plus juste, à condition de lappliquer à tous, et à tous les régimes, et de tenir compte de la pénibilité des tâches, mais aussi dun autre élément qui doit être dans la discussion, qui est lallongement de la période des études et qui appellera nécessairement un effort contributif, calculé dune manière différente daujourdhui.
Etre responsable donc, cest modifier à la fois le regard quon doit porter sur les jeunes, qui rentreront plus tard sur le marché du travail, mais aussi le regard sur les salariés seniors, le taux demploi des seniors est de lordre de 42%, au-delà de 56 ans. Il a progressé. Mais quand même, nous sommes loin de la moyenne européenne qui est près de 50%, et si nous ne parvenons pas à retenir les seniors dans lemploi, alors nous naurons fait quaugmenter la durée du chômage des plus de 60 ans sans faire déconomies pour le régime général.
Lenjeu, cest donc le travail des seniors £ des plans ont été négociés dans les entreprises depuis 2009. Nous devons les reprendre. Et le contrat de génération, quest-ce que cest, si ce nest de permettre à des jeunes de rentrer dans lemploi avec un contrat à durée indéterminée, mais aussi de permettre à des salariés de plus de 57 ans, 58 ans, de pouvoir rester eux-mêmes dans lentreprise pour avoir leur retraite à taux plein au moment où ils décideront de partir. Cest en fonction de ces principes de responsabilité que nous réussirons la réforme des retraites.
Le second principe, cest la justice. Or, les inégalités sont encore nombreuses dans notre système, et notamment au détriment des femmes, mais aussi des travailleurs qui ont connu des métiers pénibles. Sagissant de la justice, le rapport de Mme Yannick MOREAU aborde la question des différences qui existent entre le système privé et le système public. Les modalités cest vrai de liquidation de la retraite sont différentes. Mais la durée, comme le taux de cotisation sont les mêmes. Et surtout et cest ce que le rapport fait apparaître le taux de remplacement servi aux fonctionnaires est équivalent à celui dun salarié du secteur privé. Et si je regarde lévolution depuis quelques années, elle est moins favorable pour les fonctionnaires que pour les agents du secteur privé. Il ne sagit donc pas de faire silence sur le sujet, mais de regarder objectivement la réalité, et de voir les conclusions quil convient den tirer.
Le troisième principe dune réforme réussie des retraites, cest le pilotage à moyen et long termes, si nous voulons redonner de la confiance, si nous voulons lever les suspicions, les doutes, les inquiétudes, les angoisses par rapport à lavenir, il convient davoir, non pas des réformes des retraites tous les trois ans ou tous les quatre ans, qui, finalement, peuvent apparaître comme inutiles, puisquil faut y revenir, mais davoir un pilotage, non pas automatique, parce que cela doit être justement fondé sur le dialogue et la responsabilité, mais que nous puissions disposer dune visibilité à moyen et long termes, et faire évoluer de manière compréhensible et objective les paramètres dans le temps, de façon à ce que les actifs, comme les retraités, puissent comprendre que leur système de répartition sera garanti.
Voilà le sens de la réforme £ elle ne nous est imposée par personne, dailleurs, je refuserai quon puisse nous dire de lextérieur ce que nous avons à faire. Sil y a une réforme des retraites, ce nest pas parce quelle nous aurait été exigée dans le cadre dun programme de stabilité, ce qui nous a été demandé, et cest bien légitime, cest de remettre de lordre dans nos finances publiques, qui ont été dégradées depuis trop longtemps. Mais sur les retraites, ce nest pas de lextérieur que lon nous demande de les réformer, jallais dire cest de lintérieur que nous devons comprendre lenjeu et le défi, parce quil sagit tout simplement de la solidarité entre les générations, et du message que nous devons adresser à la jeunesse par rapport à son avenir.
Le Premier ministre et le gouvernement ont engagé, ou vont engager, au lendemain de la conférence sociale, une concertation, elle commencera donc dès le début du mois de juillet et se terminera à la fin de lété. Mais, comme je le disais pour sourire, comme il ny a plus dété, il faut donc fixer un certain agenda. Le mieux serait sans doute que, après une discussion qui pourra durer tous le mois de juillet, et si nécessaire, une partie du mois daoût, reprendre au début du mois de septembre, le gouvernement fera connaître ses choix à la rentrée.
Dans les mois qui viennent, les partenaires sociaux auront aussi à se prononcer sur la convention dassurance chômage qui arrive à terme en 2013, et notamment à la fin de lannée. Ce sera loccasion de simplifier, sûrement, les mécanismes, de mettre en uvre les droits rechargeables prévus par la loi de sécurisation de lemploi, et de faire en sorte que, là aussi, il ny a pas dinquiétudes nouvelles pour les demandeurs demploi, dans une période de chômage élevé. En même temps, lEtat doit aussi prendre sa responsabilité, au-delà des partenaires sociaux, et proposer des solutions au titre de la solidarité nationale, et cest la raison pour laquelle le gouvernement aura à définir une nouvelle articulation entre prime pour lemploi et RSA dactivité, et favoriser, autant quil est possible, lincitation au travail.
Vous avez souhaité que la conférence sociale aborde également la dimension européenne, et jen ai convenu bien volontiers, parce que nous sommes à la veille dun Conseil européen important, qui va se tenir le 28 juin. Quels sont les objectifs de la Confédération européenne des syndicats, et quels sont les objectifs de la France ? Ils sont proches, bien sûr chacun doit être à sa place.
Le premier objectif, cest de mettre en uvre le pacte de croissance qui a été décidé il y a un an. Vous allez me dire, mais pourquoi nest-il déjà pas appliqué ? Parce quil y a lenteurs, parce quil y a lourdeurs, parce quil y a résistances, et nous ne devons donc plus perdre de temps. Et je lai dit à mes collègues européens, le problème de lEurope cela peut être celui de son orientation mais cest surtout celui de son exécution. Ce que nous décidons devrait dailleurs être décidé plus vite, et être appliqué dans un délai court. Les procédures, dans une période de crise, nont plus de pertinence.
Sans plus attendre, en France, nous avons fait signer un contrat entre la Banque Européenne dInvestissement et la Caisse des Dépôts, bientôt entre la Banque Européenne dInvestissement et la Banque Publique dInvestissement, pour que tous les moyens qui avaient été dégagés, pour la croissance, puissent avoir des retombées dans notre pays, cela, cest le premier objectif. Il faudrait dailleurs en ajouter un autre, cest que ce programme de 120 milliards deuros, lannée dernière, paraît déjà dépassé, quil faudrait avoir une stratégie dinvestissement à léchelle de lEurope, et que, sil y a un thème, qui est celui de la transition énergétique, cela me paraît tout à fait essentiel de le porter.
Second objectif, lemploi des jeunes. Avec dautres pays, nous avons permis que, dans le budget européen, soit dégagés 6 milliards deuros pour cette cause-là, permettant ce quon appelle une garantie jeunes, c'est-à-dire la possibilité qui sera donnée pour tout jeune européen, sorti du système éducatif, de se voir proposer, dans un délai de 4 mois, un stage, une formation ou un emploi de qualité.
Mettons en uvre cet engagement plus rapidement ! Nattendons pas 2014, il y a des situations explosives, en France, mais aussi en Europe. Je parlais du taux de chômage des jeunes, en Espagne, au Portugal, il dépasse 50 ou 60%, mais en Outre-mer, en France, le taux de chômage des jeunes, cest déjà plus de 50%, utilisons donc ces fonds-là, parfois dailleurs même pas mobilisés, pour lemploi des jeunes, et avec un effet de levier pour que les entreprises, pour que les Etats membres, ajoutent encore à lambition.
Troisième objectif, cest de lutter contre le dumping social et contre la concurrence déloyale. A cet égard, il y a deux dispositions que nous devons faire adopter, cest un salaire minimum dans chaque Etat membre, et lapplication, différente daujourdhui, de ce quon appelle « la directive détachement. » Je ne peux pas accepter quil puisse y avoir, au nom de cette directive, des concurrences faussées qui détruisent de lemploi en France, et quon utilise, parce que cest le cas, le malheur dun certain nombre de pays, pour faire venir des travailleurs européens en les payant à des niveaux qui ne sont pas raisonnables. De la même manière, notre objectif doit être dorganiser une harmonisation fiscale en Europe et de commencer par limpôt sur les sociétés.
Voilà ce que je vais porter au cours de ce sommet, au cours des prochains mois, les partenaires sociaux, au niveau européen, doivent trouver toute leur place.
Je veux conclure sur le dialogue social. Nous lavons engagé depuis un an, nous en avons éprouvé, je pense, les uns et les autres, la qualité, la pertinence, lutilité, et, en même temps, nous ne devons pas rester simplement à des procédures. Le dialogue social, cest un état desprit, cest une conviction, cest une volonté, cest une méthode qui ne vaut pas pour un an, ou même pour un quinquennat, cest une méthode qui doit profondément changer les habitudes dans notre pays. M. Jacques DELORS disait dans une formule récemment et cétait un catholique qui sexprimait, quil faut se méfier des grandes messes sil ny a plus la foi. Ma conviction, cest que nous devons avoir la foi dans le dialogue social, car la France navancera et ne réussira que si elle respecte les acteurs.
La représentativité des syndicats, de salariés, est désormais établie, elle permet dasseoir la légitimité des organisations, qui sexpriment, et qui négocient, et donc qui engagent les travailleurs. Elle doit être prolongée par une représentation collective des petites entreprises, mais une démarche similaire doit être menée pour établir la représentativité des employeurs. Des propositions ont pris forme, je souhaite quelles aboutissent dans les semaines qui viennent.
La conséquence, de cette représentativité, de cette légitimité, de cette conviction dans le dialogue social, dans la démocratie sociale, cest de conforter le syndicalisme, en clarifiant ses moyens, quil sagisse de ressources dédiées aux organisations, ou au parcours professionnel des responsables syndicaux. Je suis favorable à louverture dune discussion tripartite sur le financement de la démocratie sociale.
Le dialogue social exige du temps, concertations, négociations, transpositions, et ce nest pas toujours compatible avec limpatience de nos concitoyens, ou lurgence des situations. Certains nous disent, « mais, il conviendrait daller plus vite, lEtat pourrait décider tout seul, et, au sein de lEtat le chef de lEtat, nous gagnerions du temps, cela serait fini de ces palabres, de ces pourparlers, de ces discussions. La crise est là, il faut aller vite. » Aller vite, cest aller nulle part. Aller vite, cest rester sur place. Aller vite, cest mettre chacun en opposition avec lautre. Donc, la méthode, ce nest pas de perdre notre temps, cest davoir nos rythmes, nos calendriers, nos chantiers. Cest le sens de la feuille de route de la conférence sociale. Et, en plus, cest une fausse vision du dialogue social, parce que, dans les entreprises et dans les branches, si cela négocie, les accords permettent daller bien plus vite quune modification de la loi ou une procédure judiciaire qui peut prendre des mois pour ne pas dire des années.
Voilà pourquoi notre réussite dépendra de notre ambition à régler, ensemble, avec nos points de vue, différents, les grands problèmes de notre pays, le chômage, la compétitivité, lavenir de la protection sociale, les inégalités, sans oublier la modernisation de lEtat, le service public, mais aussi notre réussite dépendra de notre capacité à engager ces réformes dans le respect des partenaires et dans le dialogue. Cest le sens de cette conférence sociale, qui doit permettre dentendre les points de vue, de prendre en compte les initiatives, les propositions, et de déboucher sur un agenda de réformes.
Je vous laffirme, comme nous lavons fait depuis un an, où de grands chantiers ont été menés, nous le ferons encore pour lannée qui vient, car il ny a pas de temps à perdre. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a 3,2 millions chômeurs. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a un endettement qui progresse, il ny a pas de temps à perdre quand il y a, hélas, une jeunesse qui peut douter de lavenir qui lui est réservé. Il ny a pas de temps à perdre quand il y a un effort à engager sur la compétitivité des entreprises, sur lattractivité de notre territoire. Il ny a pas de temps à perdre pour lutter contre les inégalités. Nous sommes dans une bataille, mais pas entre nous, la bataille nest pas entre les uns et les autres, elle nest pas dêtre pour ou contre le gouvernement. La bataille que nous avons à engager, cest celle qui permettra de faire avancer la France et de donner espoir aux Français. Merci.