5 octobre 2012 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations franco-maltaises et entre les deux rives de la Méditerranée, à La Valette (Malte) le 5 octobre 2012.

Madame la Députée,
Monsieur l'Ambassadeur,
Mesdames et Messieurs,
Merci de nous accueillir dans ce magnifique jardin pour rencontrer les Français de Malte. Je viens en compagnie du ministre des Affaires étrangères, Laurent FABIUS et je suis en retard.
Je constate que la communauté des français de Malte est particulièrement jeune et je peux imaginer ce qui vous a fait venir ici, à la fois un cadre extraordinaire, des conditions de travail, j'imagine agréables, mais aussi la volonté de défendre les intérêts de la France.
Il m'a été dit, j'en ai pris toute la mesure, presque avec fierté, que j'étais le premier chef d'Etat républicain à venir ici à Malte. Certes, Bonaparte était passé, je ne veux pas faire de comparaison qui pourrait ensuite être rapportée, et puis, il n'était pas un chef d'Etat, c'était le Général qui venait ici à Malte pour partir en campagne.
Je suis là, non seulement pour vous rencontrer, mais aussi pour participer à ce que l'on appelle une initiative « 5+5 », qui peut paraître mystérieuse à beaucoup, c'est-à-dire cinq pays du nord de la méditerranée, cinq pays du sud, représentés par des chefs d'Etat ou de gouvernement et qui veulent inscrire leur action dans une communauté qui peut être celle d'un destin.
Il y avait près de 10 ans que ces pays ne s'étaient pas rencontrés à ce niveau. Les conditions ont radicalement changées en 10 ans. Au sud de la méditerranée des dictatures sont tombées, des nouvelles équipes se sont constituées. Il y avait autour de la table le chef de l'Etat Libyen qui va constituer dans les heures qui viennent son gouvernement, il y avait le Président de la République de Tunisie qui avait connu la prison et l'exil en France et qui désormais s'exprime au nom du peuple tunisien. Il y avait le chef du gouvernement du Maroc qui représente un parti, celui de l'Islam démocratique et qui aspire aussi à avoir de bonnes relations avec le nord de la Méditerranée.
Bref, nous sommes devant une configuration politique tout à fait nouvelle qui appelle de la part des pays du Nord, et notamment du nôtre, très lié à la Méditerranée, lié par l'histoire, la situation géographique, lié par la population, les échanges, une responsabilité particulière.
Nous sommes aussi dans une configuration qui est nouvelle parce que la situation économique en Europe ne permet pas aux pays du Sud d'être autant soutenus qu'ils l'espéraient. Et nous, Pays européens, nous voyons bien quel est notre défi. Nous devons mettre de l'ordre dans la zone euro, étape après étape, et c'est long, et en même temps, retrouver de la croissance, retrouver de la perspective, retrouver de la confiance, pour ensuite la mettre au service, à la fois du redressement de notre pays mais aussi du niveau de coopération que nous souhaitons établir avec le sud.
Alors ici, à Malte, vous êtes, comme il est dit souvent, le trait d'union ou le pont entre les deux rives de la Méditerranée, vous êtes particulièrement engagés dans cet enjeu. Je n'oublie pas d'ailleurs, dans ces responsabilités qui sont les nôtres, je parle des pays du Nord comme des pays du sud de la Méditerranée, la question de la sécurité, parce que nous avons hélas, dans la partie ouest de l'Afrique, des mouvements terroristes qui se sont installés, qui se sont particulièrement structurés au Mali et qui appellent une réaction de la communauté internationale, que le ministre des Affaires étrangères français a engagé depuis plusieurs mois et qui va déboucher sur une résolution du Conseil de sécurité. Voilà, je voulais vous parler de ce que nous avons fait aujourd'hui et qui explique notre retard.
Nous avons eu aussi, parallèlement à cette rencontre « 5+5 », une réunion avec nos partenaires, chefs d'Etat ou de gouvernement de la zone euro qui ont à préparer la prochaine réunion du Conseil européen les 18 et 19 octobre.
Mais je voulais aussi vous rencontrer et vous féliciter pour ce que vous faites ici, pour les relations que vous permettez de renforcer entre Malte et la France, et pour les activités que vous menez. Ici, il y a des femmes, des hommes qui sont dans des entreprises, et nous avons une représentation significative en termes d'activité économique ici à Malte. Il y a aussi des concitoyens qui sont venus pour l'Education, pour la Culture, pour la langue et nous devons promouvoir notre langue, même ici, où l'on parle l'anglais, et où l'on parle aussi l'italien, et où on doit aussi parler le français.
Et, je voulais aussi vous rencontrer pour vous dire que vous êtes, vous aussi, pleinement engagés dans le redressement de notre pays qui est conduit par le gouvernement. Vous avez une représentante, une députée dont je salue la présence, et vous avez participé aux élections. Mais aujourd'hui, les scrutins sont achevés, les responsabilités sont confiées, et je dois, parce que je suis le Président de la République, rassembler autour d'une perspective. Laquelle ? Il ne s'agit pas simplement de demander un effort pour un effort. Les Français ont le sentiment d'ailleurs de l'avoir déjà consenti depuis tant d'années, il ne s'agit pas simplement, même si c'est en soi plutôt une bonne intention, de demander de la justice et de faire en sorte que les sacrifices soient davantage sollicités du côté de ceux qui ont le plus, plutôt que de ceux qui ont le moins. Non, il s'agit de bien comprendre où nous allons, ce que nous voulons faire.
Nous avons une dette trop importante, nous devons maîtriser nos comptes publics. Nous avons une compétitivité dégradée, nous devons renforcer l'innovation, l'investissement, réfléchir à la question des coûts qui ne sont pas simplement ceux du travail, ceux de l'ensemble de l'activité de production et nous devons aussi réfléchir à comment mieux exporter.
L'idée d'une diplomatie économique a été avancée, cela veut dire quoi ? Cela veut dire que chacun à sa place lorsqu'il est dans un pays qui n'est pas le sien, en l'occurrence ici à Malte, doit participer à ce mouvement, à ces échanges, à cette influence que la France peut espérer à travers votre propre participation.
Je sais aussi que nous avons ensemble à comprendre si notre pays a encore un avenir. Cette question taraude nos concitoyens, où qu'ils se situent, en France ou comme vous dans un pays où vous avez choisi de résider. Qu'est-ce que cela veut dire être français aujourd'hui ? Qu'est-ce que cela signifie comme projet ? Est-ce que la France peut encore tenir son rang, avoir sa place dans la mondialisation ? Est-ce qu'elle peut porter une voix utile ? Oui, à condition qu'elle ait la force économique, parce que maintenant, dans l'ensemble des instances on nous regarde, bien sûr au nom des valeurs que nous portons, et la France a un message exceptionnel à délivrer, toujours exceptionnel. Mais on nous regarde aussi selon la capacité qui est la nôtre, de fournir des biens, des services, d'être les meilleurs dans la compétition. Donc, nous sommes finalement, les uns et les autres en responsabilité.
L'autre question que nous nous posons, c'est dans cette France qui doit trouver sa place, trouver son rang, est-ce que chacune, chacun peut encore vivre avec l'autre ? C'est-à-dire est-ce que nous sommes capables de vivre ensemble, où que nous soyons et c'est ce que je veux vous dire. Nous avons besoin de chacune et de chacun et c'est le message que je porte à l'égard de tous les Français qu'ils soient au plus haut de la responsabilité économique, politique ou qu'ils soient des citoyens qui doutent, qui s'interrogent, qui souffrent. Nous avons 10% de chômage et beaucoup de jeunes qui ne trouvent pas leur place sur le marché du travail. Mais je le dis aussi aux Français qui sont loin, comme vous, même si vous revenez régulièrement, pour que vous sachiez bien que nous sommes liés les uns aux autres, nous devons vivre ensemble. Nous devons être capables de porter ce destin commun.
Voilà, Mesdames et Messieurs, je pourrais vous parler de tout ce que nous avons à faire ici à Malte, mais vous me le direz directement plus précisément, je sais qu'il y a aussi beaucoup de touristes français qui viennent à Malte, je les ai rencontrés, ils n'étaient pas loin des lieux où nous étions réunis, les chefs d'Etat et de gouvernement, et c'est aussi important que nous puissions multiplier ces échanges. Et, je ne me plains pas que le tourisme se soit développé à ce point. Si, en contrepartie, nous sommes capables aussi d'attirer des touristes en France.
Je pourrais aussi vous parler de la difficulté de la scolarisation de vos enfants, de la présence d'administration consulaire, de ces missions qui sont portées par le ministre des Affaires étrangères, parce que nous avons, et Madame la Députée le sait mieux que d'autres, à préserver un certain nombre d'outils, d'établissements, de services que nous devons à la communauté française à l'étranger.
Mais je veux surtout vous adresser un message d'amitié, parce que finalement vous ne me connaissez que de loin, et donc, il était important que celui qui est en charge de la responsabilité principale soit auprès de vous aujourd'hui pour vous dire toute la confiance que je vous porte, toute la responsabilité que je vous confie pour défendre nos intérêts ici à Malte et toute la qualité qui doit être celle des relations entre nos deux pays, la France et Malte et enfin, vous dire ce que nous avons à faire ensemble, qui est un bel idéal : porter au plus haut, la France et être capables de faire que nous puissions vivre tous ensemble en étant fiers d'être français.
Je vous remercie.