Le Président de la République a accueilli Abdel Fattah Al-Burhan, Président du Conseil de souveraineté de la République du Soudan et Abdallah Hamdok, Premier ministre de la République du Soudan, à l’occasion de la Conférence internationale d’appui à la transition soudanaise au Grand Palais Éphémère, à Paris.

Ce Sommet s'inscrivait dans la continuité de l’engagement pris par le Président Emmanuel Macron de soutenir la transition soudanaise, qui est un exemple de transition démocratique en Afrique.

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17 mai 2021 - Seul le prononcé fait foi

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DISCOURS D’OUVERTURE DE LA CONFÉRENCE INTERNATIONALE D’APPUI À LA TRANSITION SOUDANAISE.

Mesdames, Messieurs les Présidents, 
Mesdames, Messieurs les Premiers ministre, 
Mesdames, Messieurs les Ministres, 
Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs, 
Mesdames, Messieurs les acteurs de la Révolution soudanaise, 
Mesdames, Messieurs. 

Je voudrais avant tout exprimer ma reconnaissance de vous être toutes et tous mobilisés pour cette conférence. Je suis particulièrement heureux de vous accueillir à Paris, Monsieur le président du Conseil de Souveraineté, Monsieur le Premier ministre et vous, les jeunes femmes et les jeunes hommes qui représentez tous ceux qui se sont battus avec courage pour porter les aspirations démocratiques du peuple soudanais depuis le début de la Révolution de décembre 2018. Je veux remercier l'ensemble des chefs d'Etat, de gouvernements, d'organisations internationales, les ministres venant d'Europe et d'au-delà de l'Europe, d'être ici présents avec nous aujourd'hui pour porter ce soutien. 

Nous sommes aujourd'hui rassemblés sur le Champ de Mars, que vous voyez derrière moi et qui a abrité la fête de la Fédération, le 14 juillet 1790, une manifestation de concorde et de réconciliation que nous commémorons chaque année lors de la Fête nationale. Ce sont les mêmes idéaux que nous célébrons aujourd'hui. 

Votre présence aujourd'hui est un signe fort quant au caractère historique de ce qui est en jeu au Soudan, et qui pourrait se résumer à trois mots : 
HOURRIYA, SALAM, ADALAH.
Liberté, Paix, Justice.
Trois mots qu'ont scandés les acteurs de la révolution soudanaise. 
Trois mots qui résonnent fort dans l'Histoire de notre pays, la France. 
Trois mots qui traduisent des aspirations universelles. 

Liberté, Paix, Justice. Ces mots ont, pendant des mois, rythmé les manifestations pacifiques qui ont entraîné la chute du régime autoritaire d'Omar El Bechir. Ces jeunes et ces femmes qui ont manifesté à partir du 19 décembre 2018 ne demandaient rien de plus que de vivre en liberté, guidés par les mots inoubliables de l'écrivain soudanais Tayeb Salih : « Je veux arracher mon droit à la vie, donner avec générosité, aimer comme un torrent ». Ils ont inspiré le chant d’Alaa SALAH, qui a popularisé, dans le monde entier, la révolution soudanaise et que nous allons entendre maintenant. 

Aux côtés des jeunes qui continuent de porter les idées de la révolution, dont certains sont parmi nous aujourd'hui, il y a tous ceux qui ont donné leur vie lors de la révolution de décembre, comme ceux tombés lors des révolutions qui ont précédé. Il y a aussi les milliers de Darfouris, de Kordofanis, de Soudanais de toutes les périphéries, victimes des conflits qui ont déchiré votre pays. A ces victimes, à tous les héros qui ont donné leur vie pour que le Soudan puisse jouir de la liberté et de la justice, je rends hommage au nom de la France et de tous les pays et partenaires qui sont rassemblés ici et sont aux côtés du peuple soudanais. J'ai une pensée particulière cet après-midi pour le jeune Hazaa Azeddine qui a perdu la vie lors des évènements de septembre 2013 et salue avec respect sa mère, Om Hazaa, qui est devenue le symbole du courage de toutes les femmes soudanaises. 

La révolution de décembre n'est pas un accident de l'histoire. Elle a puisé ses racines dans les longues luttes de votre peuple pour sa liberté et sa dignité. Rarement des luttes dans le monde n'ont été à ce point aussi marquées par la continuité, par la persévérance. Rarement une révolution n'aura été aussi imprégnée d'expressions artistiques si diverses, de poèmes, de chants, d'œuvres littéraires. Vous avez montré au monde entier qu'on pouvait gagner une révolution aussi avec des poèmes et des chants. D'abord la révolution d'octobre 1964, qu’illustra le célèbre poème du poète soudanais Mohammed Mekki Ibrahim, chanté par l'icône de la chanson soudanaise Mohammed Wardi : 
« Révolution, en ton nom verdoyant chante la terre ; 
Promesse de prés ardents et d'espoir ». 

Ou encore, la chanson du poète Mohamed Fitouri, chantée par Wardi :
« Vint le jour de la liberté ;
Ni geôle ni geôliers ;
De l'aube des ailes battaient ;
Regards emplis de beauté ».

Puis, ce fut la révolution de 1985, avec la poésie de Mahjoub Sharif, chantée par Wardi, toujours : 
« O peuple, la force de ta révolution est tel est un feu ardent ». 

Aujourd’hui, vous avez choisi d’unir vos forces, civils et militaires, pour faire réussir votre révolution. Vous l’avez fait avec l’appui de l’Union africaine, dont je salue ici le rôle subtil et décisif. C’est là aussi une singularité de votre transition et certainement une source d’inspiration pour des pays voisins, qui eux aussi sont confrontés au défi d’une soif de renouvellement, d’un besoin d’unité et de stabilité. L’alchimie que vous avez su créer au Soudan a fait ses preuves. Malgré les difficultés, des progrès considérables ont été accomplis depuis la chute de l’ancien régime. Cette alchimie soudanaise est une inspiration. Elle est un précédent que nous avons la responsabilité collective de faire aboutir. 

Une transition n’est jamais une succession. Elle doit répondre aux aspirations de la jeunesse et elle doit permettre à tous les acteurs politiques du pays d'unir leurs forces pour bâtir ensemble un avenir commun.

Liberté, Paix, Justice.

Liberté pour les femmes comme pour les hommes, la paix pour tous au-delà des appartenances étroites et des tentations de tous les isolements, justice au-delà des origines ethniques ou culturelles pour les femmes et les hommes du Darfour, comme pour les habitants de la vallée du Nil, de l’est ou des Monts Nouba.

C'est le chemin que vous avez tracé. Votre révolution est singulière pour cela aussi, par le rôle inédit des femmes, celles-là même que chantait Mohammed Wardi, pour qui le Soudan n'existe que grâce à, je le cite, « la fierté de ses femmes ». Votre révolution est aussi singulière parce qu'elle est post-islamiste, parce qu'elle a mis fin pour la première fois dans toute la région à un régime utilisant l'arme de l'islam politique pour couvrir ses errements et pour diviser son peuple. Les Soudanaises et les Soudanais ont montré que, musulmans ou non, leur aspiration à la liberté et à la justice était la plus forte, et que personne ne pouvait les asservir. 

C'est le chemin que vous avez choisi, celui de la paix des braves, signée le 3 octobre dernier, entre les ennemis d'hier, devenus frères ayant la patrie en partage, acteurs d'une transition démocratique pleine de promesses. 

Il ne nous appartient pas, à nous partenaires et Amis du Soudan, de vous dire ce qu'il convient de faire. Mais je veux, au nom de tous ceux qui sont réunis aujourd'hui à Paris, vous dire que nous apportons notre plein appui à tous ceux qui veulent prendre leurs responsabilités pour assurer le succès de la transition soudanaise. 

Votre transition doit permettre, à l'issue de cette période, l'organisation d'élections libres, transparentes, conduisant à la mise en place d'un gouvernement civil pleinement légitime. C'est votre horizon, je le sais, Monsieur le Président, Monsieur le Premier ministre, et vous menez ce chemin avec courage et détermination. C'est aussi sur ce cap que veille la jeunesse soudanaise. 

Il importe, pour tendre vers cet horizon, que les accords de paix soient mis en œuvre au plus vite par toutes les parties. Les mouvements non-signataires de ces accords doivent rejoindre cette marche courageuse vers la paix. Les mouvements qui ont encore des forces en Libye doivent les rapatrier sans tarder, car il en va de la sécurité dans l'ensemble de la région, chez vous, chez nous, au sud comme au nord de la Méditerranée. 

Il importe aussi que la boussole des réformes économiques courageuses que vous avez engagées continue de guider la transition. La réduction de la dette soudanaise que nous allons amorcer prochainement est un premier résultat. Il conviendra que cette trajectoire de retour du Soudan dans le concert des Nations soit confortée au plan économique, au plan politique. Mais l'étape d'aujourd'hui est une étape décisive. Elle marque le réengagement de toute la communauté internationale à vos côtés, parce que vous avez eu le courage de vous lever, de conquérir la liberté et de mener ces premières réformes. 

Ainsi tous les Soudanais, au premier rang les jeunes femmes et les jeunes hommes ici présents, qui représentent votre avenir et un peu du nôtre, pourront espérer que la liberté, la paix et la justice ne soient plus seulement des mots mais des réalités concrètes, effectives. La France est fière d'être la porte par laquelle le Soudan réintègre pleinement la communauté des Nations et que ce soit ici, au Champ de Mars, que la transition soudanaise s'offre aujourd'hui comme modèle pour la région et pour le monde.

Je vous remercie.
 

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Ensuite, le Président Emmanuel Macron a tenu une conférence de presse conjointe avec le Président du Conseil de souveraineté de la République du Soudan et le Premier ministre de la République du Soudan.

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