Retrouvez la déclaration à la presse du Président Emmanuel Macron avec le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis :

25 avril 2024

DÉCLARATION CONJOINTE À LA PRESSE DU PRÉSIDENT MACRON ET DU PREMIER MINISTRE MITSOTAKIS

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Mesdames, messieurs, Monsieur le Premier ministre, cher Kyriakos, je suis très heureux de votre venue à Paris après votre première visite au mois d'août dernier et tous les échanges que nous avons pu avoir, ensemble, ces derniers mois. Nous avons, en effet, beaucoup échangé à Bruxelles, à Londres et dans des endroits communs et je dirais de manière constante, et aujourd'hui nous avons pu faire le point sur à la fois le contexte bilatéral, les sujets stratégiques et de sécurité, le contexte européen et une discussion politique approfondie.

Nos deux pays - je veux ici le dire avec beaucoup de force - sont liés par une même vision stratégique, géopolitique de l'Europe et de la Méditerranée. Et nous voyons ensemble la Méditerranée comme un espace d'échanges commerciaux et humains, de croisements intellectuels et culturels dont la stabilité et la sécurité ont toujours déterminé celle de l’Europe toute entière.

C’est pourquoi nous avons principalement échangé aujourd’hui sur les questions de sécurité, notamment sur la situation de la Méditerranée orientale, du Proche et du Moyen-Orient.
Je veux ici redire nos positions constantes, toujours fermement rappelées dans le cadre de l’Union européenne, comme de l’OTAN. La France soutient la Grèce, Chypre, quant au respect de leurs souverainetés, dans leurs espaces maritimes, en condamnant avec nos partenaires européens les intrusions et provocations de la Turquie à cet égard.

À ce titre, nous avons réévoqué l’accord récemment signé entre le gouvernement d’entente nationale libyen et la Turquie pour le condamner avec la plus grande fermeté. Je veux aussi dire ici ma préoccupation quant aux agissements en ce moment même de la Turquie, en contravention explicite avec ce que le Président ERDOGAN s'était engagé à faire lors de la conférence de Berlin. Nous voyons ces derniers jours, des navires turcs accompagner des mercenaires syriens arrivant sur le sol libyen. C'est une contravention explicite et gravissime à ce qui a été conclu à Berlin. C'est un non-respect de la parole donnée. C'est attentatoire à la souveraineté de la Libye et c'est attentatoire à la sécurité de tous les Européens et des Sahéliens. Je veux le dire ici avec la plus grande fermeté. Preuve, si besoin en était, que les préoccupations que nous avions évoquées ensemble avant, monsieur le Premier ministre, étaient avérées.

Nous souhaitons, au-delà de ces prises de position commune sur la Méditerranée orientale et des initiatives prises ensemble, renforcer notre coopération bilatérale en mettant en place d'ici la fin du mois de juin un véritable partenariat stratégique de sécurité. Ce partenariat stratégique sera précisé dans les prochaines semaines avec, fin février, la visite de la ministre des Armées françaises dans votre pays. Ce partenariat stratégique de sécurité impliquera des consultations politiques régulières entre nos ministres des Affaires étrangères et des Armées, une présence navale accrue de la Marine française dans la région, une coopération industrielle renforcée et des opérations communes, maritime comme terrestre, que nous sommes en train de finaliser. Ce partenariat pourra être progressivement ouvert à d'autres pays de la région. Il n'est tourné contre personne, mais il doit permettre d'assurer la pleine sécurité d'une région stratégique pour l'Europe et au-delà.

Au niveau européen, je me félicite du désir de la Grèce de contribuer à l'initiative européenne d'intervention et réitère mon soutien à ce qu'elle puisse être intégrée à cette initiative dès que possible.

Nous avons également ensemble évoqué les relations économiques entre nos deux pays. Elles sont anciennes, ancrées, et les entreprises françaises, j'en suis fier, ont su rester aux côtés de la Grèce pendant la crise économique et financière.

Mais elles doivent désormais faire davantage pour accompagner la reprise, accélérer la hausse des investissements qui forment en quelque sorte le nouveau chapitre de l'histoire de votre pays et de nos relations. Là aussi, vous pouvez compter sur notre engagement et je sais que ce matin, les échanges qui se sont tenus lors du forum d'affaires avec nos entreprises ont permis de mobiliser. Je vous remercie d'avoir déployé cinq de vos ministres lors de ce forum qui a été ouvert par le ministre de l'Économie et des Finances français et nous allons poursuivre cet engagement commun.

Nous avons aussi discuté ensemble des principaux dossiers européens du moment. Le premier, la question migratoire. Sur ce point, je veux le dire là aussi, nous avons une vision profondément convergente. Je sais combien la Grèce est confrontée à une situation très difficile en ce moment. Le secrétaire d'Etat Laurent NUNEZ était à Athènes il y a quelques jours et la France sera à vos côtés dans ce moment d'urgence en accueillant 400 personnes en besoin de protection et en déployant des soutiens très concrets, c'est-à-dire des personnels de l’OFPRA, des policiers, un appui aux vols de retour pour reconduire rapidement les migrants illégaux. Et donc je veux ici vous réaffirmer l'engagement très concret de notre pays face à cette pression migratoire. Mais plus largement, nous souhaitons ensemble faire avancer les réformes indispensables en la matière. La Commission européenne, sous l'autorité du Vice-Président SCHINÁS, présentera dans les prochaines semaines un nouveau pacte européen sur l'asile et l'immigration. Je souhaite qu'il puisse être adopté rapidement pour que l'Europe se dote enfin cette année d'une politique migratoire commune en renforçant la protection de ses frontières, en définissant mieux la responsabilité des pays de première entrée et en organisant une solidarité efficace dans l'accueil des réfugiés, qui doit prévoir justement une solidarité automatique avec les bons mécanismes qui la rendront acceptable partout et en fixant des règles d'asile communes identiques pour que les mouvements migratoires au sein de l'Europe soient enrayés. Nous en avons là aussi longuement discuté et souhaitons prendre ensemble une initiative prochaine avec d'autres pays pour appuyer justement la bonne décision en la matière.

L'autre sujet crucial sur lequel nous devons avancer de manière unie et efficace, c'est notre relation au Royaume-Uni. Dans deux jours exactement, le Royaume-Uni quittera l'Union européenne. C'est un jour triste dont nous ne devons pas minimiser l'ampleur, car c'est un échec et une leçon pour nous tous Européens. Nous devrons surtout regarder l'avenir pour le Royaume-Uni, bien entendu, mais avant toute chose pour l'Union européenne, son unité, son intégrité et nos avancées futures. Quand je disais que nous devons regarder l'avenir, c'est d'abord et avant tout en rappelant que le Royaume-Uni, s'il quitte l'Union européenne, ne quitte pas l'Europe. Il y reste ancré et tout l’y rattache : sa géographie, son histoire, son identité. Mais il nous faut bâtir un nouveau partenariat unique, très étroit en matière de défense, de sécurité, de commerce. Et cette relation devra renforcer l'Union européenne et non l'affaiblir. Et comme nous l'avons partagée avec Monsieur le Premier ministre, nous devons construire une Europe plus forte, plus souveraine, plus efficace. Et nous ne céderons dans la définition des relations futures avec le Royaume-Uni à aucune pression ni aucune précipitation. La priorité, c'est de définir à court, moyen et long terme les bons intérêts de l'Union européenne et de les préserver.

Pour construire cet avenir européen, cette décennie européenne que j'appelle de mes vœux et que je sais possible, nous travaillerons aussi étroitement ensemble au sein de la conférence sur l'avenir de l'Europe qui débutera au printemps, et nous souhaitons aussi travailler ensemble à d'autres sujets d'avenir où nos convergences de vue, je dois le dire, sont aussi manifestes.
Nous avons discuté des perspectives financières avant que Monsieur le Premier ministre ne se rende à Bruxelles dans quelques instants et nous avons en la matière des ambitions communes, qu'il s'agisse de la politique agricole ou justement des politiques de solidarité régionale, une même volonté d'avoir des critères permettant une plus grande convergence sociale. Nous avons d'ailleurs signé ensemble une contribution en la matière et nous portons aussi une ambition climatique. Et je salue les efforts faits par la Grèce sur ce sujet tout particulièrement, et nous soutenons à ce titre le Pacte vert, le Green Deal, proposé par la Commission.Nous avons également évoqué le sujet de l'élargissement aux Balkans occidentaux et plusieurs autres points durant notre échange. La Grèce et la France sont au rendez-vous de l'engagement européen.

Je me félicite des échanges que nous avons depuis le début, Monsieur le Premier ministre, et nous continuerons, cher Kyriakos, à échanger ainsi pour partager, avancer, multiplier aussi les rendez-vous et je souhaite pouvoir aussi me rendre en Grèce prochainement pour en particulier fêter aussi des rendez-vous historiques ô combien importants qui ont toujours vu la France aux côtés de votre pays. Mais je dois dire que nous avons aussi la même vision tragique, si je puis dire, du monde et notre environnement. Elle n’empêche pas d'être optimiste mais nos deux pays, nos deux peuples ont toujours été lucides sur l'histoire. C'est aussi pour cela que nous nous tiendrons côte à côte face à l'adversité, comme pour préparer l'avenir. Nous serons là. Merci cher Kyriakos, merci Monsieur le Premier ministre.

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