8 octobre 1980 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Déclaration télévisée de M. Giscard d'Estaing à l'issue du Conseil des ministres, à propos de l'attentat raciste commis à la synagogue de la rue Copernic à Paris, le 3 octobre, Palais de l'Élysée, le mercredi 8 octobre 1980

Un odieux attentat à la bombe a été commis contre la synagogue de la rue Copernic `à Paris`. Il a fait quatre morts, dont trois passants. Cette synagogue était, sur instruction expresse, gardée par un agent de police.Ï J'ai exprimé par une lettre au Grand Rabbin `Jacob KAPLAN` de France, l'indignation et la solidarité du peuple français tout entier.Ï Au caractère criminel de l'acte s'ajoute l'écho douloureux qu'il éveille dans la communauté juive, en lui rappelant les persécutions, les déportations et les massacres systématiquement organisés par le régime hitlérien.Ï Concernant les Français juifs qui sont des Français parmi d'autres Français, ma règle et ma préoccupation constantes sont qu'ils se sentent reconnus et traités en Français comme les autres et parmi les autres, tout en conservant, comme ils le souhaitent et comme les autres communautés françaises, leur religion et leur personnalité culturelle.\
Dans cette épreuve, la communauté de tous les Français doit se resserrer, et non se diviser et se séparer.Ï C'est pourquoi, je prescris au ministre de l'Intérieur `Christian BONNET` d'inviter les préfets à réunir autour d'eux vendredi prochain les représentants locaux des différents cultes, des syndicats et des associations qui luttent pour la tolérance et contre le racisme, afin de témoigner entre elles de leur solidarité, et d'examiner les données locales des problèmes de sécurité.Ï Je demande au ministre de l'Education `Christian BEULLAC` d'inviter les recteurs à organiser, le même jour, en concertation avec les enseignants, un cours aux élèves sur le caractère pluraliste, tolérant et fraternel dela société française.Ï Enfin, la directive expresse a été donnée à la police sous le contrôle de la justice de poursuivre leurs investigations par tous les moyens légaux, pour découvrir les coupables, leurs complices ou leurs inspirateurs.\
Il y a trois attitudes qui appellent une mise en_garde de ma part :Ï L'interprétation donnée à cet acte criminel, à l'intérieur ou à l'étranger, comme démontrant la diffusion dans le corps social français des idéaux pervers du racisme et du nazisme. De telles actions, qui sont manifestement l'oeuvre de petits groupes retranchés de la communauté nationale, n'autorisent pas une interprétation aussi basse.Ï L'insinuation que la police ferait preuve de complaisance vis-à-vis de tels actes est injuste et condamnable. Elle s'apparente à la délation collective, de triste mémoire. Elle est d'autant plus injuste que les personnels de police et de gendarmerie ont été cruellement éprouvés ces temps derniers, dans des conditions qui appellent l'émotion et la reconnaissance. Le Gouvernement a multiplié les efforts et les moyens au_cours des dernières années pour lutter contre le terrorisme. Il n'y a pas toujours été aidé. Il continue à faire confiance aux institutions démocratiques que sont la police et la justice pour assurer la sécurité et la liberté de tous les citoyens français.Ï L'idée enfin qu'il faut répondre à la violence par la violence. Qui n'aperçoit la profondeur du piège, faisant monter la haine et appelant aux actes irréparables. La société française est une société de fraternité et de justice. C'est tous ensemble que nous ferons face aux menaces et que nous rejetterons au loin des germeshideux de l'intolérance, du terrorisme et du racisme.\