29 septembre 1980 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution prononcée par M. Valéry Giscard d'Estaing lors de sa visite aux parachutistes au Camp de Caylus, lundi 29 septembre 1980

J'ai voulu être parmi vous en ce jour de la Saint-Michel, fête des parachutistes.
- Et j'ai voulu aussi que pour la première fois dans l'histoire de la division parachutiste française, celle-ci soit réunie au complet. Il n'y a pas de précédent de réunion de cette -nature.
- Je tiens en effet à vous témoigner la gratitude de la nation pour la bonne exécution des missions qui vous ont été confiées, et vous dire ma satisfaction pour votre tenue, votre discipline et votre dynamisme.
- Dans le monde dangereux dans lequel nous vivons, la première règle de la défense d'un grand pays comme la France, c'est qu'on ne peut pas faire d'impasse en-matière de sécurité. La France doit être en_mesure de faire face à toutes les menaces, quels que soient leur déroulement, leur localisation ou leur -nature.
- C'est pourquoi la France a besoin de forces très mobiles et très disponibles, capables d'intervenir immédiatement pour préserver la paix et défendre ses intérêts là où ils sont menacés.
- Nos forces d'action extérieure répondent à ce besoin. Elles sont constituées de deux divisions d'élite : la 9ème et la 11ème.
- Aujourd'hui, jour de la Saint-Michel, je rends visite à la 11ème, au début de l'année prochaine, je rendrais visite à la 9ème.
- Une place particulière revient à la 11ème division parachutiste. Dernières nées dans la très ancienne famille militaire de la France, les unités parachutistes ont amassé un exceptionnel capital de gloire lors de la dernière guerre, puis dans les combats d'Indochine et d'Afrique du Nord.
- La paix revenue, elles ont poursuivi leur dur entraînement dans une ambiance de dynamisme, de discipline et de totale disponibilité.
- Elles ont été en_mesure d'intervenir là où le besoin se faisait sentir, et où l'ordre leur en a été donné. Elles l'ont fait avec une rare efficacité.\
Aujourd'hui même, 1550 parachutistes, représentant 11 compagnies, sont présents outre-mer, aujourd'hui, jour de la Saint-Michel 1980. Ainsi, la 11ème division parachutiste est présente sur quatre continents. Tous les Français se souviennent de Kolwezi, action menée par un des régiments de votre division, mais les autres actions menées dans des styles chaque fois différents ont aussi démontré vos qualités.
- Notre participation à la FINUL `Force d'intervention` au Liban vaut à la France le respect et la considération des Nations-unies. Et j'ai eu plusieurs fois l'occasion d'en recueillir le témoignage de la bouche même du secrétaire général des Nations-unies. Je souligne que notre détachement est composé d'une majorité d'appelés, tous volontaires, qui rivalisent de courage et d'efficacité avec leurs camarades engagés, ce qui montre la complémentarité de ces deux modes de recrutement. Et j'ai été heureux d'observer tout à l'heure, pendant la prise d'armes et pendant le défilé, sur les poitrines de beaucoup d'entre vous la présence du ruban bleu et blanc de cette opération. De même que d'autres portaient le ruban rouge du Zaire.
- Récemment, l'intervention humanitaire en Ouganda, au moyen de nos hélicoptères et de leur environnement parachutiste, a aidé à faire reculer le fléau de la famine et de la maladie.
- Il y a quelques mois, à N'Djaména, après une longue présence au Tchad, nos forces ont permis l'évacuation sans aucune perte humaine de tous ceux qui étaient menacés, Français ou étrangers, après avoir longuement tenté de sauver la paix dans ce pays malheureusement ravagé par des luttes fratricides. J'ai décoré ce matin quelqu'uns d'entre vous, c'est-à-dire que laques-uns des acteurs de ces actions difficiles qui ont demandé sang-froid, courage et valeur militaire.
- La présence, parmi les décorés, d'aviateurs, rappelait les liens étroits qui unissent les parachutistes et les aviateurs. Sans avion de transport, il n'y a pas de parachutiste, chacun d'entre vous le sait. Mais sans avion de chasse et de soutien leur action est souvent privée d'appui ou de la sécurité nécessaire.\
Dans les plans de réorganisation de l'armée de terre les unités parachutistes devaient subir une certaine déflation. J'ai été amené à modifier ce plan pour garder intacte cette composante de nos forces, et ceci pour les trois raisons suivantes :
- la nécessité de disposer d'un volume suffisant d'unités immédiatement disponibles.
- La qualité de l'entraînement qui fait de votre division une grande unité aussi apte au combat en Europe qu'à l'intervention au-delà des mers et dont la capacité militaire se situe au premier rang dans le monde. Et, il est bien entendu qu'elle doit continuer à se situer à ce niveau.
- L'ambiance dynamique de vos régiments qui marque les jeunes du contingent qui y servent d'une empreinte durable. D'où la nécessité de conserver des unités d'appelés.
- Si les régiments doivent être spécialisés pour être disponibles et adaptés à leur mission, les cadres doivent tourner entre les différentes unités de l'armée de terre. Cette "osmose" est indispensable car l'armée de terre tout entière doit bénéficier du dynamisme et de l'expérience que vous acquérez en servant dans les unités parachutistes.
- Enfin sur-le-plan de l'organisation de votre division, je pense qu'un détachement féminin devrait avoir sa place chez les parachutistes, afin de donner un prolongement humanitaire à certaines actions de combat. Ces jeunes soldats pourraient accueillir, soigner et convoyer les blessés et porter immédiatement secours et aide aux populations éprouvées. C'est pourquoi je demande au ministre de la Défense `Yvon BOURGES` et au chef d'état-major de l'armée de terre d'étudier la création d'un tel détachement parachutiste féminin.\
Je dis le chef d'état-major de l'armée de terre, il s'agit du général LAGARDE, qui vit au milieu de vous l'avant-dernière journée de son commandement. Et c'est pour moi l'occasion de rendre hommage et témoignage à son action. C'est en effet lui qui, sous l'autorité de M. le ministre de la Défense `Yvon BOURGES`, du chef d'état-major des armées, successivement le général MERY et le général VANBREMEERSCH et sur ma directive, a conduit depuis quatre ans la réorganisation de l'armée de terre. Cette réorganisation avait pour but de rendre plus opérationnelle, plus mobile et structurée en_vue du combat, l'ensemble de notre armée de terre. C'est ainsi, vous le savez, qu'elle a été désormais entièrement constituée sous forme de divisions, 15 divisions d'active pourront être portées à 29 divisions après un préavis de mobilisation, toutes ces divisions étant désormais organisées en corps d'armée, ou en structure d'intervention comme la vôtre. Pour concevoir, conduire cette réorganisation, il fallait de grandes qualités de caractère, de compétence, de gestion, de décision, et ce sont ces qualités dont le général LAGARDE a fait _montre dans son commandement. Et il s'inscrit ainsi dans la grande tradition des organisateurs de l'armée française, une tradition qui comporte par exemple un nom aussi illustre que, sous le premier Empire, celui du général puis maréchal BERTHIER.\
J'ai été conduit à faire connaître récemment mon refus catégorique des propositions imprudentes de raccourcissement de la durée du service national. Une telle décision aurait fait douter dans le monde entier de la volonté de défense de la France dans les circonstances actuelles et aurait sans doute fait douter de sa volonté tout court.
- Par contre, je demande au ministre de la Défense et au Chef d'état-major des Armées, d'améliorer encore l'utilité et l'intérêt du service pour les jeunes, notamment par les trois dispositions suivantes :
- l'établissement d'un plan de cinq ans pour développer le sport et les activités de plein air dans l'ensemble de nos forces, sport et activités de plein air que vous connaissez naturellement dans vos unités mais qui doivent être la règle pour l'ensemble de l'armée française, afin que l'année du service soit aussi l'année d'activité sportive et d'entraînement physique de tous les jeunes Français.
- ensuite mettre à la disposition des appelés des matériels modernes de combat, afin qu'ils se familiarisent avec des techniques d'avant-garde. C'est le motif pour lequel j'ai demandé au ministre de la Défense de doubler, à-partir de 1981, la cadence de fabrication du nouveau fusil automatique, afin que rapidement l'ensemble des jeunes appelés puisse en être doté pendant leur service.
- Enfin pour suivre l'amélioration de l'organisation des réserves, comme d'ailleurs votre division a été amenée à en faire récemment l'expérience, afin qu'à côté de chacune des unités, il y ait une unité filleule, convenablement équipée et capable de participer, avec un court préavis, aux mêmes combats.
- Il y a en effet une idée que je demande qu'on ne retienne pas, c'est que ces unités de réserve auraient d'autres fonctions dans l'hypothèse d'un combat que les fonctions des grandes divisions d'active elles-mêmes, il faut au contraire qu'elles puissent après un court préavis les rejoindre pour les mêmes types de missions et de combats.\
Messieurs, pour terrasser les dragons, Saint-Michel, Prince des armées célestes, n'avait, vous le savez, que sa foi, la force de ses muscles et une modeste arme blanche. Et pourtant suivant l'étymologie araméenne d'où vient son nom, "il était comme Dieu". C'est ce que signifie son nom.
- Comme lui vous avez la foi dans votre mission, maintenez votre disponibilité physique, mais soyez sûrs que vous aurez de meilleures armes.
- Comme lui, soyez fiers de ce que vous êtes et de ce que vous faites.
- J'ai pu constater depuis ce matin la qualité de votre présentation. J'apprécie à travers elle la rigueur et le haut niveau de votre commandement et de votre entraînement. Je mesure ce que le saut au loin et le combat qui peut le suivre exigent d'audace et de résolution.
- Je sais que la France peut compter sur vous. Je vous exprime ici, pour le jour où ce serait nécessaire, la confiance du Président de la République.
- Et maintenant vous pouvez vous joindre à moi dans les acclamations traditionnelles. "Et par Saint-Michel, vivent les paras" !
- Vive la République !
- Vive la France !\