12 décembre 2006 - Seul le prononcé fait foi

Télécharger le .pdf

Lettre de M. Jacques Chirac, Président de la République, adressée à l'association Le Cercle sur la question du nucléaire iranien, le 12 décembre 2006.

Monsieur,
L'appel aux dirigeants européens sur l'Iran que vous m'avez fait parvenir a retenu toute mon attention. J'estime, comme vous, que le refus de ce pays de se conformer à ses obligations internationales dans le domaine nucléaire ainsi que les déclarations des dirigeants iraniens appelant à la destruction d'Israël ne sont pas acceptables, pas plus que celles menaçant les Etats européens de destruction. Cette attitude appelle une réponse ferme et unie de la communauté internationale.
S'agissant du dossier nucléaire, notre objectif est d'amener l'Iran à se conformer à ses engagements internationaux dans le cadre du TNP. Nous souhaitons un règlement politique de cette crise. Nous devons placer l'Iran devant un choix clair : la coopération avec la communauté internationale ou un isolement croissant.
La stratégie que la France a définie avec ses partenaires britanniques et allemands, est d'allier le dialogue, l'incitation et la fermeté pour amener l'Iran à faire le choix de la coopération.
C'est ainsi que les trois Européens ont présenté en juin dernier une offre de coopération à laquelle se sont joints les Russes, les Chinois et les Américains. Cette offre est assortie d'une condition claire : la suspension de l'enrichissement d'uranium. Nous avons ensuite obtenu que le Conseil de sécurité, par sa résolution 1696, endosse cette offre ainsi que la demande de suspension de l'enrichissement, désormais juridiquement contraignante.
Devant l'absence de réponse positive de l'Iran à notre offre de coopération et son refus de suspendre l'enrichissement, la France et ses partenaires ont décidé de revenir devant le Conseil de sécurité. Nous avons préparé un projet de résolution qui prévoit des sanctions contre les activités sensibles conduites par l'Iran dans les domaines nucléaire et balistique. Ces sanctions seront proportionnelles et réversibles. Le dialogue pourra reprendre si l'Iran se conforme aux demandes qui lui sont adressées, notamment la suspension.
Je souhaite que nous parvenions au plus large accord possible au sein du Conseil de Sécurité, comme ce fut le cas en juillet pour l'adoption de la résolution 1696. L'efficacité des sanctions dépend en effet de la capacité de la communauté internationale à faire preuve d'unité. Cette unité est essentielle pour amener les dirigeants iraniens à choisir, comme nous l'espérons tous, la voie de la coopération dans le respect de leurs engagements internationaux.
J'ai tenu à exprimer avec la plus grande vigueur la préoccupation que suscitaient en France les propos inacceptables du président iranien relatifs à l'existence d'Israël ou à la réalité historique de l'Holocauste. La réprobation de notre pays a été manifestée, à plusieurs reprises et par plusieurs canaux, notamment à l'occasion d'une convocation de l'Ambassadeur d'Iran. La France signifie régulièrement aux autorités iraniennes que les appels répétés de ses dirigeants à la violence et à l'affrontement des civilisations sont incompatibles avec les efforts qu'elle promeut, avec d'autres, en faveur du dialogue entre les cultures et les religions.
Les positions que je suis amené à prendre avec les autres chefs d'Etat de l'Union européenne illustrent la détermination avec laquelle les autorités européennes ont uni leurs voix pour dénoncer des propos inacceptables et exprimer leur préoccupation concernant le rôle des autorités iraniennes dans la région et leurs intentions futures.
J'estime utile que des échanges vous permettent d'exposer vos analyses relatives aux répercussions du programme nucléaire iranien sur les équilibres régionaux et plus largement mondiaux. C'est la raison pour laquelle j'avais demandé au Ministre des Affaires étrangères de recevoir des représentants de votre collectif. Il m'a rendu compte depuis lors de l'entretien qu'il a eu avec plusieurs d'entre vous le 30 octobre dernier.
Je vous prie de croire, Monsieur, à l'assurance de ma considération distinguée.
Bien cordialement
Jacques CHIRAC