27 février 2001 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse conjointe de MM. Jacques Chirac, Président de la République, Gerhard Schroeder, Chancelier de la République fédérale d'Allemagne et Aleksander Kwasniewski, Président de la République de Pologne, sur l'élargissement de l'Union européenne, la politique agricole commune, l'aide aux éleveurs français et la coopération franco-allemande pour contrôler les frontières face au flux d'immigrés clandestins, Neustadt le 27 février 2001.

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Je voudrais d'abord remercier chaleureusement le chancelier pour son accueil ici. C'était à la fois historiquement justifié et puis, sur le plan personnel, j'y ai vu une marque d'affection. Je voudrais remercier également le président Kurt Beck, ministre-président, qui nous a accueillis avec beaucoup de gentillesse, le maire de Neustadt et la population de Neustadt qui nous a réservé un accueil extrêmement chaleureux à l'occasion de notre petite tournée dans la vieille ville qui est si belle.
Notre réunion à trois était particulièrement intéressante, au lendemain du Traité de Nice. Certes, la Pologne, l'Allemagne et la France forment un noyau dur de l'Europe en construction mais, au lendemain des décisions qui permettent de prévoir concrètement l'élargissement, c'est tout à fait symbolique que nous ayons pu en parler tous le, trois.
Et aussi bien l'Allemagne que la France ont exposé au président polonais notre claire détermination commune à faire en sorte que l'élargissement se poursuive au rythme le plus rapide possible et aussi notre souci commun, compte tenu de la situation politique que je viens d'évoquer, de voir la Pologne se mettre en situation de pouvoir être parmi les premiers adhérents nouveaux après la première phase de l'élargissement.
Nous avons évoqué tous les autres sujets que vient de dire le chancelier. Je ne reviendrai pas dessus parce que ce qu'il a exprimé correspond tout à fait à ce que je pense et j'ai d'ailleurs été relativement impressionné, bien que pas étonné, par la convergence de vues sur les sujets à la fois européens et internationaux entre le président polonais, le chancelier et moi-même, ce dont je me suis naturellement réjoui.
En conclusion et en clair, je trouve que ce qui caractérise cette séance de travail, c'est au fond une conviction commune pour ce qui concerne l'Europe de demain, une approche et une conviction communes. C'est très important et, je le répète, nous sommes tous les trois un élément essentiel de cette Europe.
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Q - Monsieur le Président, Monsieur le Chancelier, vous avez parlé évidemment des questions fondamentales pour l'Europe. Il y a une question qui intéresse aussi, en ce moment, nos pays, aussi la Pologne peut-être, c'est l'agriculture, Monsieur le Président de la République française, est-ce que vous êtes pour une remise à plat de la Politique agricole commune ? Et même question au Chancelier.
R - Je voudrais tout d'abord vous faire remarquer que la Politique agricole commune a évolué au cours des dix ou quinze dernières années et qu'on a procédé à de nombreuses et importantes modifications, aménagements. Donc, il est bien évident que l'on doit en permanence, sur une politique de cette nature, l'adapter à l'évolution des choses et des hommes. D'ailleurs, vous aurez remarqué qu'au Sommet de Berlin où nous avons arrêté les décisions pour ce qui concerne, notamment, l'agriculture, nous l'avons fait jusqu'en 2006. Alors, naturellement nous considérons qu'aucune modification ne peut être apportée jusqu'en 2006 mais que, dés maintenant, nous devons commencer à réfléchir aux adaptations qui seront nécessaires au lendemain de cette échéance.
Je dis qu'on ne peut pas modifier 1es choses maintenant parce que les agriculteurs, les paysans, sont des entrepreneurs et qu'on ne peut pas changer les règles du jeu tous les deux ans, naturellement. Mais, en revanche, et en concertation étroite avec la profession sur le plan européen, il faut dès maintenant que nous réfléchissions aux adaptations qui s'imposeront à partir de cette échéance. Et, d'ailleurs, nous avons déjà décidé, nos amis allemands et nous-mêmes, de réfléchir et de discuter de ces sujets.
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Q - Monsieur le Président, n'êtes-vous pas déçu de l'attitude de vos partenaires européens au Conseil agricole à Bruxelles, qui ont tous refusé, et notamment l'Allemagne, toute aide supplémentaire aux éleveurs français ?
R - La déception n'est pas du tout le mot qui convient. Je regrette que des décisions n'aient pas pu être prises dans ce domaine. Et je le regrette tout simplement parce que ces décisions étaient légitimes. Mais, naturellement, ce n'est pas pour brimer la France que nos partenaires ont pris cette position, c'est pour une raison que, par ailleurs, je peux comprendre et qui tient au fait qu'il n'y avait plus de crédits disponibles dans l'enveloppe agricole pour des aides supplémentaires, des aides par ailleurs parfaitement justifiées par le caractère de sinistre qui a frappé l'agriculture européenne avec l'affairé de la vache folle, et tout particulièrement l'agriculture française en raison de son importance au sein de l'agriculture européenne.
Par conséquent, la position qui finalement a été adoptée sous le contrôle du commissaire Fischler et qui consiste à dire : dans ces circonstances et faute d'avoir de l'argent, eh bien, il appartiendra à chaque Etat membre d'apporter les soutiens justifiés nécessaires me paraît une sage solution. J'étais tout à fait convaincu que nous arriverions à cette solution. Il y a encore quelques jours, lorsque j'avais été interrogé au Salon de l'Agriculture à Paris, j'avais dit qu'à mon avis, nous n'éviterions pas de faire des aides nationales, compte tenu de la situation financière du budget agricole de la Communauté. Mais, naturellement, dans mon esprit, ces aides nationales ne remettent pas en cause la structure de la Politique agricole commune et elles doivent être prises au titre des dispositions particulières de l'article 87 pour faire face à des sinistres spéciaux, qui correspond à ces situations particulières. Autrement dit, ce sont des mesures qui, pour être nationales, restent parfaitement conformes à la Politique agricole commune.
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Q - Ma question s'adresse à la fois au Chancelier Schröder et au président Chirac : pouvez-vous envisager des mesures de rapprochement des familles kurdes qui sont actuellement en France et qui cherchent à gagner l'Allemagne pour rejoindre précisément l'autre partie de leur famille ?
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R - Sur ce point, puisque j'ai égaiement été interrogé, je partage sans réserve l'avis exprimé par le chancelier. Et j'ajoute que cela justifie une fois de plus la nécessité de renforcer la solidarité entre nos pays pour le contrôle des frontières. On peut le faire de façon parfaitement humaine et parfaitement conforme aux principes qui sont les nôtres et aux valeurs que nous défendons en commun. Cela implique également d'intensifier la mise en ¿uvre d'une politique européenne d'aide au développement, qui devrait être d'ailleurs une politique mondiale, car c'est en réalité par ce biais que nous limiterons les demandes, ou les flux extérieurs, qui ne sont pas tous liés à des situations politiques particulières mais généralement à des situations économiques désastreuses. Donc, de ce point de vue, il y a une coopération entre la France et l'Allemagne qui est tout à fait sans réserve et je m'en réjouis.
Q - Une question à M. Kwasnievski. La crise de la vache folle montre qu'en cas de crise très grave, il faut que ce soit les Etats qui paient finalement les dépenses, on le voit pour le soutien aux agriculteurs. Est-ce que cela ne vous inquiète pas pour l'avenir, pour l'agriculture polonaise ? Une question à MM. Chirac et Schröder. La crise de la vache folle vient d'Angleterre. Est-ce que le rabais britannique ne pourrait pas être remis en question, vu la manière dont l'Angleterre est un peu à l'origine de cette propagation de la maladie ?
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R - S'agissant de la remise en cause du rabais britannique, comme vous dites, et je vous laisse la responsabilité de l'appellation, pour dire la vérité, ce n'est pas tout à fait l'idée que nous nous faisons de la solidarité européenne. Surtout au moment où nos amis britanniques font face à une crise très importante en matière agricole, dans le domaine de la fièvre aphteuse. Et nous n'allons pas soulever de problèmes nouveaux particuliers.
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Q - Monsieur le Chancelier, Monsieur le Président, avez-vous un pronostic pour ce soir ? Après tout, c'est un match amical. Comment allez-vous faire ? Avez-vous une télévision dans la grande salle à manger du Château ? Il y a une mi-temps. Comment allez-vous faire et quel est votre pronostic ?
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R - Je reconnais bien volontiers que l'équipe d'Allemagne a fait une remontée spectaculaire, notamment sous l'impulsion d'un très bon entraîneur. Mais, néanmoins, je ne ferai pas de pronostic. Je ne ferai pas de pronostic parce que je ne veux pas être désobligeant./.
(source http://www.diplomatie.gouv.fr. le 1er mars 2001)