13 octobre 1999 - Seul le prononcé fait foi

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Lettre conjointe de MM. Jacques Chirac, Président de la République et Gerhard Schröder, Chancelier d'Allemagne, adressée à M. Paavo Lipponen, Président en exercice du Conseil européen et premier ministre de Finlande, sur les propositions françaises et allemandes relatives à la politique étrangère et de sécurité de l'Union européenne et les attributions de M. Javier Solana Madariaga, Paris, Berlin, le 13 octobre 1999.

Monsieur le Président,
En application du Traité d'Amsterdam entré en vigueur le 1er mai 1999, le Conseil européen a désigné, lors de sa dernière réunion les 3 et 4 juin 1999 à Cologne, M. Javier Solana Madariaga pour assumer les nouvelles fonctions de Secrétaire général du Conseil et Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune. Nous avons en outre réaffirmé à Cologne notre détermination de doter l'Union européenne des moyens et capacités nécessaires pour lui permettre d'exercer ses responsabilités en matière de politique étrangère et de sécurité.
Nous partageons une même conviction : il est crucial que la politique étrangère et de sécurité commune devienne un véritable instrument de la représentation commune des intérêts européens sur la scène politique internationale. Si nous voulons faire valoir pleinement nos valeurs et nos intérêts dans le monde, il est nécessaire que l'Union européenne soit représentée à l'extérieur de façon visible par un représentant respecté par tous et solidement ancré dans l'Union. C'est pourquoi, notamment eu égard aux efforts que nous déployons pour développer une politique européenne de sécurité et de défense, nous considérons qu'il est particulièrement important que M. Javier Solana soit sûr, lors de son entrée en fonction le 18 octobre 1999, que les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union européenne soutiennent et défendent entièrement ses pouvoirs et l'exercice de ses fonctions.
Monsieur le Président,
Compte-tenu de ces réflexions et de la responsabilité du Conseil européen concernant la définition des principes et des orientations générales de la politique étrangère et de sécurité commune, telles qu'énoncées dans le Traité, nous suggérons que le Conseil européen extraordinaire qui se réunira sous votre présidence à Tampere, les 15 et 16 octobre 1999, c'est-à-dire deux jours avant l'entrée en fonctions de Javier Solana, précise à nouveau, dans une déclaration, sa conception des tâches et des pouvoirs du nouveau Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, et l'assure de son plein soutien dans ses efforts pour renforcer le rôle de l'Union européenne dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité. Ce serait en même temps émettre un signal indiquant à nos partenaires du monde entier que l'Union européenne est déterminée à défendre conjointement ses intérêts en matière de politique étrangère et de sécurité et à renforcer sa capacité d'action dans ce domaine conformément aux dispositions du Traité d'Amsterdam.
En outre, les chefs d'Etat et de gouvernement pourraient examiner leur souhait de voir le Haut Représentant contribuer de manière décisive à augmenter la visibilité, l'efficacité, la cohérence et la continuité de la politique étrangère et de sécurité commune.
Pour améliorer la cohérence et la continuité de la politique étrangère et de sécurité commune, nous considérons que le Haut Représentant devrait régulièrement introduire des délibérations du Conseil européen en matière de politique étrangère et de sécurité. En même temps, cela permettrait de garantir des délibérations sur une base homogène s'articulant en priorité autour des intérêts communs de l'Union.
Afin d'être en contact permanent avec les représentants des Etats et de pouvoir disposer de tout leur soutien, nous proposons que le Haut Représentant préside le Comité Politique et de Sécurité qui, dans la ligne des conclusions adoptées à Cologne, devrait s'installer à Bruxelles prochainement. Le Comité politique, devenu permanent, serait composé de représentants de haut rang attestant l'importance prioritaire que nous accordons à l'affirmation de la PESC et du projet européen de Défense.
Le Conseil européen devrait également demander au Haut Représentant de s'employer à entretenir des relations de travail étroites et empreintes de confiance avec le Parlement européen et tout particulièrement avec sa commission des affaires étrangères.
La France et l'Allemagne sont profondément convaincues que le Haut Représentant devrait jouer un rôle éminent dans la représentation extérieure de l'Union européenne. C'est pourquoi le Conseil européen devrait demander au Conseil de prendre les mesures nécessaires pour que le Haut Représentant puisse jouer tout son rôle dans le dialogue politique de l'Union européenne avec les Etats tiers et au sein des organisations internationales, notamment lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre des stratégies communes et des actions communes. Lors du Conseil européen d'Helsinki, nous devrions identifier les principales priorités auxquelles le Haut Représentant devrait se consacrer au cours des premiers mois de l'an 2000. Selon notre conviction, nous devrions également adopter à Helsinki les décisions institutionnelles nécessaires au développement et au renforcement de la politique européenne de sécurité et de défense.
Dans les années à venir, la poursuite de l'approfondissement et du renforcement de la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne jouera un rôle majeur dans nos travaux. A cet égard, le développement d'une politique européenne de sécurité et de défense, comme convenu au Conseil européen de Cologne, revêt une grande importance. C'est pourquoi nous devrions demander au Haut Représentant de suivre ces travaux avec une attention particulière.
Monsieur le Président,
Nous sommes tous d'accord que l'Union européenne doit mieux faire valoir son poids et ses intérêts dans le monde. Il importe maintenant que nous donnions au futur Haut Représentant le soutien et le mandat nécessaires du Conseil européen pour lui permettre de remplir pleinement ses tâches ainsi que de répondre entièrement aux attentes placées en lui. Cela est d'une importance décisive pour la future position de l'Europe et pour le succès de nos valeurs et de nos intérêts communs sur la scène politique internationale.
Monsieur le Président, nous nous permettons de transmettre également ce messages aux autres membres du Conseil européen.
Veuillez croire, Monsieur le Président, à l'assurance de notre haute considération.

Gerhard SCROEDER Jacques CHIRAC