1 novembre 1988 - Seul le prononcé fait foi

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Lettre de M. François Mitterrand, Président de la République, adressée aux électeurs en vue du référendum du 6 novembre 1988 sur l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, Paris, novembre 1988.

Françaises, Français,
- Je vous demande d'apporter à nos compatriotes de Nouvelle-Calédonie la garantie de la France pour un avenir pacifique, une économie plus forte, une société plus juste.
- Il y a peu de mois, deux communautés s'affrontaient. Souvenons-nous des événements tragiques qui les ont déchirées et faisons en sorte que de tels drames ne se reproduisent plus. Or, l'enchaînement qui conduisait à la guerre civile a été rompu. Les responsables calédoniens ont su refuser la violence et décider de vivre ensemble, en paix.
- Lorsqu'il y a 135 ans, il fut pris possession de cette terre au nom de la France, des femmes et des hommes y vivaient depuis des millénaires, les Canaques. D'autres hommes et d'autres femmes, partis de la métropole, contre leur gré ou librement, les ont rejoints. D'autres encore sont venus du Pacifique, d'Asie ou d'Afrique du Nord. Chaque groupe humain a, en Nouvelle-Calédonie, son histoire et les Calédoniens n'imaginent pas, pour leurs enfants, d'espoir hors de cette terre.
- La question qui vous est posée est simple : approuvez-vous le projet de loi qui organise l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, conformément à l'accord signé le 26 juin par les responsables des deux principales communautés `Jacques Lafleur, Jean-Marie Tjibaou`, réunis par le Premier ministre, M. Michel Rocard, à l'Hôtel Matignon ?
- Cet accord prévoit qu'après une période de dix ans, c'est-à-dire en 1998, les habitants du territoire décideront librement de leur destin par un scrutin d'autodétermination. D'ici là, la République devra assurer le dialogue entre tous, rétablir le droit partout où cela se révélera nécessaire, reconnaître au peuple canaque la légitimité de son enracinement sur sa terre, veiller à l'épanouissement des diverses cultures, faire disparaître les injustices et les exclusions, garantir l'égalité des chances et la formation de chacun.
- Pourquoi recourir au référendum ? Parce que les Calédoniens ont demandé que la France engage sa parole contre tout retour en arrière et que cette parole soit donnée solennellement par le peuple français. Sans référendum, il n'y aurait pas eu l'accord. Il en sera la consécration et en assurera la pérennité. Plus vous serez nombreux à dire oui, plus les Calédoniens seront encouragés à poursuivre dans la voie de la réconciliation, plus grandes seront les chances de l'avenir.
- Le référendum ne marquera ni le triomphe d'un camp, ni la défaite d'un autre, aussi bien en Nouvelle-Calédonie qu'en métropole. Il consacrera la victoire de la paix. C'est ce que je vous demande aujourd'hui.\