29 août 1984 - Seul le prononcé fait foi

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Echange de lettres entre M. François Mitterrand, Président de la République, et M. Valéry Giscard d'Estaing, ancien Président de la République, au sujet de la convocation de ce dernier par la commission d'enquête parlementaire sur les "avions renifleurs", Paris, les 10 et 29 août 1984.

Monsieur le Président,
- J'ai reçu, de la part d'une Commission parlementaire d'enquête, la demande d'audition dont vous trouverez la copie ci-jointe. Cette convocation ne me pose aucun problème du fait du sujet qu'elle traite. Mais, à ma connaissance, cette demande d'audition d'un ancien Président de la République par une Commission parlementaire, à propos de faits qui se sont déroulés pendant la durée de son mandat, n'a jamais eu lieu depuis l'origine de la Vème République. Elle est de -nature à créer un précédent.
- J'observe en effet que la Constitution définit minutieusement, dans ses articles 10 à 18, les règles qui régissent les rapports du Président de la République et du Parlement dans l'exercice de leurs responsabilités respectives. Faut-il considérer que ces règles cessent de s'appliquer, à propos des mêmes responsabilités, dès lors que les fonctions s'achèvent ?
- La Constitution vous confiant par son article 5, la mission "d'assurer par votre arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat", je désire connaître votre sentiment avant de répondre à la demande d'audition de la Commission parlementaire.\
Monsieur le Président,
- Vous fondant sur les attributions que me confère l'article 5 de la Constitution, vous m'avez demandé mon appréciation sur la convocation qui vous a été adressée pour le 18 septembre prochain par une commission parlementaire d'enquête de l'Assemblée nationale. Il me paraît clair qu'en vertu d'une longue et constante tradition républicaine et parlementaire, confirmée par la Consitution du 4 octobre 1958, et notamment par ses articles 18 et 68, premier alinéa, la responsabilité du Président de la République ne peut être mise en cause devant le Parlement. Cette immunité s'applique au Président de la République non seulement pendant toute la durée de ses fonctions, mais également au-delà pour les faits qui se sont produits pendant qu'il les exerçait.
- En conséquence, j'écris ce jour à M. le Président de l'Assemblée nationale `Louis Mermaz` afin qu'il invite la commission parlementaire d'enquête concernée à se conformer aux règles constitutionnelles qui vous sont applicables.\