22 août 2014 - Seul le prononcé fait foi

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Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les efforts gouvernementaux en faveur de Mayotte, à Dzaoudi le 22 août 2014.

Monsieur le maire de Dzaoudzi Labattoir, Cher Saïd Omar OILI,
Mesdames, Messieurs les élus, les parlementaires,
Mesdames, Messieurs qui êtes venus ce soir à ma rencontre, nombreux, chaleureux, généreux, comme toute la population mahoraise, depuis le début de ce voyage, à l'égard du Président de la République, c'est-à-dire à l'égard de toute la République. Merci pour votre accueil.
Vous êtes venus à la rencontre du chef de l'Etat. Au-delà de ma personne, vous êtes venus rappeler votre attachement indéfectible à la France et à la République, dont vous êtes partie intégrante, dont vous êtes une chance, un atout pour son avenir. A chaque consultation, chaque fois que Mayotte a été interrogée sur son avenir, ce fut toujours la même réponse : oui à la France, oui à la République. Pendant des années, des décennies, vous vous êtes battus les uns avec les autres, non pas pour une lutte entre vous, mais pour le plus juste combat qui soit, la plus juste cause, la départementalisation.
Vous voulez que Mayotte puisse être un département de la République, le 101ème département de la République. Vous êtes aujourd'hui dans la République, pleinement dans la République. Ce ne fut pas une tâche facile pour y parvenir, il a fallu que des générations, et des générations s'engagent, des femmes comme des hommes. Ici, à côté, il y a les chatouilleuses. Je veux les saluer. Cela ne dira pas forcément grand-chose aux plus jeunes, mais ce sont elles qui ont, à leur façon, démontré leur attachement à la République.
D'autres noms, d'autres grands personnages ont lutté pour y parvenir à cette départementalisation. Je pense à Zakia MADI qui a trouvé la mort le 13 octobre 1969, lors d'affrontements entre partisans et adversaires de l'indépendance. Je pense à Zaïna MERESSE, qui nous a quittés le 12 avril dernier, et que la population mahoraise a pleuré à Pamadzi. Je pense à Zoubert ADINANI qui lui aussi est décédé le mois dernier. Je pense à beaucoup d'autres, à Georges NAHOUDA qui aujourd'hui a donné son nom à un très beau bateau qui permet de passer de Petite terre à Grande terre. Je pense à Marcel HENRY et à Henry JEAN-BAPTISTE, à tous ceux qui ont voulu que Mayotte soit un département français. C'est fait, c'est acquis. Vous avez réussi et la République est fière, que Mayotte puisse être son 101ème département.
Mais qu'est-ce que cela veut dire « être un département de la République » ? Cela veut dire être à égalité de droits et de devoirs dans la République. Cela veut dire que vous devez avoir accédé aux mêmes prestations que dans le reste du territoire français. Depuis 2012, j'en avais pris l'engagement et cela a été pour moi ma ligne directrice, j'ai fait en sorte qu'à chaque fois qu'il y avait une prestation, elle puisse être alignée à Mayotte par rapport au reste de la République.
Le SMIC sera au 1er janvier de l'année prochaine, à Mayotte, au même niveau que partout en France, parce que c'est un droit fondamental. C'est un défi, parce que cela oblige à être encore plus compétitif, encore être plus efficace je pense aux chefs d'entreprise. Mais c'était un élément essentiel, pour vous à Mayotte, que de penser que vous étiez payés comme les autres, dès lors qu'il y avait le même travail qui était effectué.
Nous avons également, et j'y ai veillé personnellement avec la ministre de l'Outre-mer, revalorisé le RSA de 50%. Non pas parce que nous voudrions simplement offrir une prestation aux Mahorais, mais parce que c'était le droit qui devait leur être reconnu, dès lors qu'ils étaient dans cette situation.
J'ai voulu aussi que pour l'allocation au logement, pour l'allocation de rentrée scolaire, ce soit les mêmes niveaux de prestation à Mayotte que dans le reste du territoire. J'ai voulu que les règles pour l'indemnisation du chômage soient les mêmes que partout en France £ que pour les retraites, les Mahorais puissent appartenir à l'une des trois fonctions publiques pour leur pension, dès lors qu'ils avaient été agents de l'Etat ou des collectivités locales.
J'ai voulu aussi que l'allocation personnalisée d'autonomie, la prestation compensatrice de handicap puissent être versées ici à Mayotte, comme dans toutes les communes de France et dans tous les départements de France.
J'ai demandé que les droits à la santé puissent être reconnus, ici à Mayotte, que la carte vitale puisse être lancée ici aussi pour que chacune, chacun, puisse accéder aux soins de la même manière que partout en France. Il y aura un moment où il faudra aussi, que la couverture maladie universelle puisse être étendue, à Mayotte. Il y aura la question de l'alignement des allocations familiales, dont nous devrons trouver le rythme, pour ne pas déséquilibrer les comptes sociaux, mais aussi pour offrir cette perspective aux familles de Mayotte.
J'ai également, à la demande des élus, fait en sorte que les fonctionnaires puissent bénéficier de l'indexation de leur traitement comme dans les autres départements d'Outre-mer. Ce processus a commencé au 1er janvier 2013. C'est une mesure d'équité, c'est une mesure d'égalité, mais il n'y a pas que les prestations, il n'y a pas que les droits, il n'y a pas que les rémunérations, il y a aussi ce que vous attendez de la République, ce que la République vous doit. Vous avez fait le choix de marquer votre attachement à la France. Vous avez offert à la France l'un de ses plus beaux paysages, l'un de ses plus beaux territoires. Vous êtes le 101ème département de France, mais vous êtes l'un des plus beaux départements de France. Alors, comme l'a dit le maire, comme l'ont rappelé les élus, nous devons être à la hauteur des défis qui sont devant nous, ici, à Mayotte. Quels sont-ils ?
D'abord l'éducation, la formation. Vous êtes le département le plus jeune de France. 60% de la population a moins de 25 ans, alors est-ce que cette chance en est une ? Est-ce que cette vitalité sera un traumatisme ou sera un atout supplémentaire ? La réponse c'est l'éducation, la formation, l'insertion et donc le devoir pour l'Etat mais aussi pour les collectivités locales de construire des écoles, de construire davantage de classes. Lorsque je vois qu'il y a des crédits qui sont prévus, qui sont dégagés et qui ne sont pas consommés, je dis que là nous ne pouvons pas l'accepter parce que tout retard dans la construction est un handicap de plus pour Mayotte. C'est une chance gaspillée pour les jeunes. Nous devons faire en sorte qu'il y ait le plus possible, dans les prochaines années, de construction de classes et d'enseignants au service du savoir et de la connaissance.
Je veux saluer, ici, s'ils sont là tous les personnels de l'Education nationale, tous ceux qui font vivre la culture, la langue française. Je leur exprime ma gratitude parce que nous ne pouvons pas accepter le fléau de l'illettrisme. La France est un grand pays, elle s'honore d'avoir des territoires partout dans le monde, à être présente sur tous les continents. Alors nous ne pouvons pas accepter, nous ne pouvons pas tolérer qu'il puisse y avoir un jeune Français, une jeune Française qui ne puisse pas posséder toutes les conditions pour parler le français, pour écrire le français et pour accéder ensuite à la dignité et à l'emploi.
Je sais aussi que nous devons tracer, depuis que vous êtes maintenant un département de la République, la perspective pour les dix prochaines années Mayotte Avenir 2025 avec une feuille de route, avec des équipements qui devront être prévus. Je les vois déjà surgir ces équipements : l'hôpital de Petite-Terre bientôt à l'horizon 2018 £ l'université qui vient d'ouvrir un nouvel amphithéâtre £ des plateformes de traitement de déchets, une centrale électrique, des bateaux, et même des équipements qui sont nécessaires : prison, centre de rétention. Oui, il convient que Mayotte puisse disposer des équipements indispensables pour son développement. C'est l'enjeu des prochaines années.
Je sais aussi combien vous êtes préoccupés par les questions de sécurité, combien c'est devenu un souci pour des familles. Là encore, comment accepter qu'il soit nécessaire d'accompagner des bus scolaires pour éviter qu'ils soient agressés ? Nous mettrons tous les effectifs nécessaires, tous les moyens pour que nous puissions lutter contre les causes de la délinquance, mais aussi contre la délinquance, parce que vous avez le droit à la sécurité. C'est aussi un principe de l'égalité de la République.
Alors dans cette feuille de route pour 2025, nous dégagerons les priorités d'investissement, nous fixerons le calendrier des mesures sociales, nous élaborerons, avec les élus et les forces vives, la stratégie de développement de Mayotte et nous fixerons, là aussi, une nouvelle espérance, un nouveau défi comme l'a été la départementalisation. Ici, notre seule priorité c'est la jeunesse, la jeunesse de Mayotte qui est l'avenir, non seulement de votre département mais l'avenir de la France.
Je sais aussi combien nous devons imaginer des solutions nouvelles. Ce que j'ai vu sur le service militaire adapté ici à Mayotte est une grande réussite. Je veux saluer les militaires qui se dévouent pour l'insertion des jeunes Mahorais pour leur permettre d'avoir une formation, une qualification et demain un emploi.
Enfin, je veux saluer ce qu'est votre diversité. Ce que je vois ici, sous mes yeux, une population riche de sa diversité, pauvre parfois mais unie £ une population qui exprime sans doute ses identités et parfois ses convictions religieuses £ une population qui demande, comme l'a dit le maire, que l'on soit dans la modernité, dans l'évolution, dans la transformation, que l'on respecte cette diversité, cette pluralité, ces identités.
Sachez que la République n'écrase jamais aucune singularité et fait en sorte de conjuguer toutes les différences, au nom de l'unité nationale, pour tirer le meilleur parti de notre richesse collective. Merci d'avoir fait confiance à la France. Merci de croire en la République. Merci davoir fait en sorte de vous hisser au rang de département français. Merci de croire à ce que nous pouvons faire ensemble.
Mayotte 2025, c'est la réussite. La France également doit se projeter. Il n'y a pas de nation, il n'y a pas de territoire qui puisse vivre sans un grand projet, sans une grande ambition, sans une grande démarche. Alors chers amis Mahorais, je vous dis « bonne chance », parce que vous êtes une chance pour la République, parce que vous êtes une chance pour la France.
Vive Mayotte ! Vive la République et vive la France !