22 juin 2012 - Seul le prononcé fait foi
Déclaration de M. François Hollande, Président de la République, sur les relations franco-italiennes, la résolution de la crise de la Zone euro et sur les Français de l'étranger, à Rome le 22 juin 2012.
Monsieur l'Ambassadeur,
Merci de me recevoir dans ce Palais Farnèse qui a accueilli tant de personnalités prestigieuses et abrité tant de réunions historiques. Je salue aussi l'Ambassadeur de France auprès du Saint-Siège et l'Ambassadrice auprès de la FAO. Je veux également remercier le Consul général d'être ici, des personnalités nombreuses, présidents d'associations, mais je voulais vous rencontrer, vous, citoyens français vivant en Italie, et comme l'a dit l'Ambassadeur, représentant la France ici et travaillant pour la France.
Je viens à Rome pour la troisième fois depuis trois mois. Vous voyez, je prends mes habitudes. La première fois, c'était comme candidat. J'avais quelques difficultés à rencontrer les autorités.
Puis, la deuxième fois, comme Président de la République.
La semaine dernière, j'étais dans la relation bilatérale, c'est-à-dire que j'avais le plaisir de rencontrer mon homologue, Giorgio Napolitano, qui est une personnalité, non seulement respectée ici en Italie mais qui a une très haute réputation partout en Europe. Avec lui, nous avons rappelé ce qu'était la relation entre nos pays, son histoire mais aussi son avenir. Je l'ai invité à venir en France pour une visite d'Etat avant la fin de son mandat.
J'avais rencontré aussi la semaine dernière Mario Monti, Président du Conseil, qui mène une politique courageuse pour redresser les comptes publics. Il n'est jamais facile de redresser les comptes publics. Il le fait avec une ténacité, une obstination qui n'est pas récompensée par des taux d'intérêt qui restent très élevés sur la dette souveraine italienne. Ce qui nous amène au sujet qui a été le nôtre aujourd'hui. Mais avant de l'évoquer, j'ai, avec le Président Monti, rappelé ce qu'était notre rendez-vous annuel : le sommet bilatéral qui se tiendra cette année en France à Lyon sans doute, et où nous aurons l'occasion de faire progresser un certain nombre de projets, notamment d'infrastructures. On parle, depuis tant d'années, du Lyon --Turin que cela devra bien se faire. Mais on m'a interpellé, tout à l'heure, sur le Paris -- Rome ou le Rome -- Paris qui ne circule plus. Nous aurons à évoquer les infrastructures, les projets de haute technologie.
Monsieur l'Ambassadeur rappelait que l'Italie a une grande industrie. Nous avons vocation à nouer des partenariats. Nous parlerons aussi de la politique de la Méditerranée car la France et l'Italie sont tournées vers les pays du printemps arabe que nous devons soutenir, dans des conditions très difficiles, dans leur transition. Nous avons encore à approfondir notre relation- je ne dis pas améliorer, car la relation entre la France et l'Italie, au-delà des sensibilités politiques, au-delà des personnalités qui ont conduit la destinée de chacun de nos pays, a toujours été excellente. Mais nous pouvons encore être plus être exigeants avec elle.
Aujourd'hui, je suis à Rome, de nouveau, pour une rencontre à quatre. Les quatre grandes économies de la zone euro, qui ont la responsabilité de redonner confiance dans la monnaie unique, celle que nous avons voulue, celle qui a longtemps fait notre fierté et qui, aujourd'hui, est regardée comme une faiblesse alors que c'est une chance.
Nous avons des responsabilités parce que nous sommes quatre grands pays, dont trois fondateurs de l'Europe de l'après-guerre. L'Espagne nous a rejoints quand elle est sortie elle-même de la dictature. Il y avait là, outre Mario Monti, Angela Merkel, le Président Rajoy et moi-même. Je voulais vous rendre compte de cette réunion, avant de le faire devant les Français rassemblés, je saisis cette occasion. C'est comme une intervention à la télévision que de venir ici au Palais Farnèse. Quel plus beau décor trouver ? Donc, je voulais vous en rendre compte.
Nous avons avancé, notamment, sur l'objectif de croissance. Il y a un ralentissement partout dans le monde mais aussi et surtout en Europe, et nous ne pouvons pas l'accepter. Parce que cela se traduit en termes de chômage, de plans sociaux, de difficultés de pouvoirs d'achat, de doutes par rapport à notre avenir. Je me suis présenté devant les Français pour que la croissance soit mise au cur de tous nos engagements et de toutes nos réunions. Cette fois-ci, avec les quatre et bientôt au Conseil européen, nous aurons un paquet de croissance, comme l'on dit, qui représentera 130 milliards d'euros, 1% du PIB. Certains diront que c'est beaucoup, d'autres diront que c'est trop peu. C'est déjà une première étape.
Nous avons aussi convenu d'améliorer, en tout cas d'utiliser pleinement les instruments permettant la stabilité financière. Parce que nous ne pouvons pas accepter qu'il y ait des différences de taux d'intérêt entre les dettes souveraines des différents pays. Nous ne pouvons pas admettre que la spéculation s'installe parce qu'il n'y aurait pas de pare-feu suffisants. Nous ne pouvons pas comprendre que des marchés doutent de la zone euro alors que nous voulons la consolider davantage. Donc, utilisons pleinement tous les instruments sans qu'il soit besoin, à ce stade, de changer les traités, pour que nous puissions être efficaces dans l'exigence de stabilité financière.
Nous avons également admis le principe de la taxe sur les transactions financières. Les quatre, en tout cas, y sont prêts. Nous aurons, dans le cadre de la coopération renforcée, à introduire ce nouvel instrument. Je ne dis pas qu'il va changer la réalité de la finance mais, au moins, ce sera une façon de prélever sur les mouvements de capitaux.
Et puis, enfin, ce sera aussi l'enjeu du Conseil européen du mois de juin, nous voulons approfondir l'Union européenne. C'est là-dessus que nous avons les débats les plus difficiles. Certains disent : commençons par fixer une nouvelle étape de la construction politique de l'Europe et nous trouverons les instruments. D'autres disent, j'en suis : commençons par bâtir des instruments et puis nous ferons l'étape suivante sur le plan politique. Si nous restons sur ces positions-là, nous n'avancerons pas. Donc, faisons étape par étape. Instruments nouveaux, solidarité supplémentaire, Union renforcée.
Voilà ce dont nous avons débattu au milieu de la journée avant que Madame Merkel n'aille voir le match dont je ne connais pas le résultat mais qui, de toute façon, sera très commenté entre la Grèce et l'Allemagne. Nous avons fait en sorte, j'avais donné des consignes, que l'équipe de France de football ne rencontre pas l'Italie, pour ne pas vous mettre dans une situation trop difficile.
Je voulais, au-delà de cette réunion très importante, et j'en remercie le Président Monti, saisir l'occasion de m'adresser à vous, Français qui vivez ici en Italie, Français que l'on appelle de l'étranger, Français tout simplement qui vous trouvez en Europe pour de multiples raisons, professionnelles, économiques, personnelles, liées à des rencontres qui ont pu faites, des mariages qui se sont faits. Certains sont double nationaux. C'est aussi pour moi une identité que d'être avec deux nationalités. Certains voudraient qu'il n'y en ait qu'une. Je vois toujours ceux qui ne parlent pas au nom de la raison mais au nom de la passion. On peut épouser deux nationalités et aimer son propre pays, la France.
Je voulais vous rencontrer, parce que vous avez une mission très difficile : représenter la France à l'étranger, même si, ici, nous ne sommes pas à l'étranger- en tout cas, nous n'en avons pas le sentiment. Représenter la France, d'abord sur le plan économique. Je salue tous les cadres, employés des entreprises françaises, qui travaillent ici, qui réussissent bien. 1 200 entreprises à participation française, présentes en Italie, employant 240 000 salariés. Je crois à l'investissement français à l'étranger parce que c'est une source de développement de nos échanges, une manière, aussi, d'exporter, à la condition que les entreprises de taille mondiale cherchent à s'implanter pour faire travailler la base arrière qui est la nôtre, notre propre territoire.
Mais je crois aussi aux investissements étrangers en France. Nous accueillons autant de capitaux venant d'Italie qu'il sera nécessaire, là-encore, pour développer nos échanges.
Je veux saluer les Chambres françaises de commerce et d'industrie, celle de Milan a une réputation excellente. Je veux aussi dire tout le bien que je pense du réseau des conseillers du commerce extérieur dont l'expertise est appréciée. Non pas que je mette l'économie d'abord -- mais nous avons besoin de renforcer encore notre partenariat.
Monsieur l'Ambassadeur le disait : la France est le deuxième partenaire commerciale de l'Italie et l'Italie est le deuxième partenaire commerciale de la France, l'Allemagne étant le premier pour les deux. Nous devons encore consolider, renforcer, améliorer, ces échanges économiques.
Mais il y a plus que l'économie. Quand nous parlons de l'Italie, de la France, et c'est aussi un facteur de création d'activités et d'emplois, je parle de la culture. Je parle de tout ce qui fait l'attractivité de nos deux pays et aussi du lien que nous avons tissé, qui permet de développer un grand nombre d'échanges sur le plan culturel. Notre réseau, ici, est l'un des plus dynamiques d'Europe : 38 Alliances françaises et une présence de l'Institut français dans six villes. C'est considérable. C'est souvent menacé sur le plan budgétaire. C'est vrai qu'il y aura, sûrement, des pressions pour nous dire : est-ce que c'est aujourd'hui absolument indispensable qu'il y ait ce réseau ? Oui, et nous y veillerons. Il y a eu trop de diminutions, trop de destructions mêmes d'instituts, de réseaux culturels français à l'étranger pour que je puisse abandonner cette dimension-là de notre action.
J'ai eu le privilège d'être accueilli, en demi-pension seulement, à l'Académie de France à Rome à la Villa Médicis. J'avais dépassé la limite d'âge. C'est vrai que c'est une grande fierté. Je veux saluer ici son directeur, Eric de Chassey. Pour des générations d'artistes, c'est le lieu de découverte de l'art italien, de la création, des expositions de grand prestige, des rencontres qui se font, des directeurs qui ont laissé un nom pour l'histoire.
La première fois que j'ai été reçu -- je vous le dis là, car je commence à avoir le privilège de l'âge -- à la Villa Médicis, c'était Balthus qui en était encore le directeur. Il y a laissé des uvres considérables. Je suis fier de représenter un pays qui est celui de la création. Nous n'en avons pas le monopole mais nous avons encore ces outils qui permettent d'accueillir des artistes jeunes, féconds dans leur travail, français mais aussi étrangers parce que, pour nous, la culture n'a pas de frontière. La conception que nous avons de la culture, c'est une culture ouverte qui s'enrichit des autres et qui est capable de porter des valeurs et des idéaux.
Je pense aussi à ce qui se fait ici, je pense à l'Ecole française de Rome. Je salue sa directrice, Catherine Virlouvet. Là-encore, les plus grands chercheurs sont présents, ceux qui travaillent dans l'archéologie, dans les sciences sociales, sur l'Italie.
Je veux vous dire un mot de la langue française. Il y a, dans le gouvernement, une ministre de la francophonie. Je considère que c'est une bataille, la langue française, non pas une bataille pour la France, une bataille pour la diversité culturelle, une bataille pour le pluralisme. Si je peux vous faire quelques confidences -- même si j'ai l'impression que je suis écouté, et même surveillé -- cela ne me fait pas plaisir quand je participe, depuis peu il est vrai, à des conférences internationales et que la langue française est aussi peu utilisée et parfois même par des Français. Chaque Français doit parler la langue française, où qu'il se situe.
Cela ne veut pas dire, qu'on ne doit pas connaître d'autres langues, d'Europe et du monde, mais nous devons défendre notre langue. Qui nous le dit ? Pas seulement les Français. Quand je rencontre des Canadiens, des Québécois, donc des Canadiens -- et là encore, je prends des risques -- quand je rencontre des Africains, Monsieur Diouf, qui représente la francophonie, ils me disent : défendez la langue française, défendez la, non pas pour vous, mais pour nous, tous les locuteurs, des centaines de millions, et notamment beaucoup d'Africains qui veulent défendre cette langue.
Là-aussi, en Italie, nous devons faire tout ce que nous pouvons. Je veux remercier les Italiens : y compris dans les conférences internationales, ils parlent le français. Nous devons donc faire l'effort de diffuser davantage notre langue, au collègue, au lycée, de multiplier les échanges en matière d'enseignement supérieur, de recherche. Ici, il y a des accords de coopération- plus de 2 500, c'est considérable, entre les universités.
Je vous parler aussi de démocratie. Vous avez des représentants. Ils doivent se faire entendre et j'y veillerai. J'ai donné consigne au gouvernement de le faire. Une ministre a été désignée, représentant donc cette attribution des Français de l'étranger, Mme Hélène Conway. Elle viendra, je l'espère, bientôt, ici en Italie.
Vous avez aussi les conseillers français de l'étranger, certains sont présents parmi nous. Je les salue et notamment un qui ne peut pas être là mais dont on me dit qu'il est une référence- 43 ans de mandat, cela fait rêver- Monsieur Raymond Petri-Guasco, qui a représenté longtemps les Français de l'étranger dans l'assemblée qui leur est dédiée.
Merci à tous ceux qui se dévouent pour cette représentation, les conseillers, les sénateurs, maintenant les députés, puisque vous avez élu une députée le 17 juin dernier. Je suis très heureux qu'il y ait cette façon, maintenant, de traduire les revendications au plus haut niveau des Français de l'étranger. Même si, je le rappelle, les sénateurs sont des législateurs à part entière et qui ne représentent aucun territoire de la République et encore moins un territoire qui nous serait étranger. Ce sont des représentants de la République.
L'éducation sera une des priorités de mon quinquennat et donc, aussi, l'éducation pour les Français qui vivent à l'étranger. Je salue le proviseur du lycée Chateaubriand, ses personnels, ses enseignants, tous ceux qui se dévouent, enseignants ou pas, pour la diffusion du savoir et pour l'encadrement des enfants. Six établissements scolaires français en Italie accueillent plus de 4 000 élèves. Il y a le succès d'une très belle opération, Esabac, avec 3 500 élèves qui sont engagés dans un parcours bilingue d'excellence. Tout cela traduit une coopération de très bon niveau.
Mais je sais aussi les problèmes qui sont posés, pour le coût de cet enseignement et, notamment, à Rome où il y a eu une hausse de 30 % en cinq ans. Il y a eu la gratuité pour la terminale, la première, mais qui n'a été, en définitive, qu'un leurre, puisqu'elle a conduit à renchérir encore le coût et à exonérer un certain nombre d'entreprises qui prenaient en charge ces frais et à mettre en difficulté d'autres compatriotes qui ne peuvent pas accéder aux bourses. Je pense que la solution c'est d'augmenter le niveau des bourses et le nombre des bourses pour assurer la démocratisation de l'enseignement français à l'étranger.
Le dernier point que je voulais évoquer même si, ici, il n'est pas, sans doute, ressenti comme ailleurs dans d'autres pays, c'est le réseau consulaire de proximité. C'est important d'avoir des consuls et même ces consuls honoraires. Vous savez, ces bénévoles qui représentent la France et qui peuvent donner assistance à nos compatriotes. Je salue donc tous les agents consulaires, ce service public essentiel et je souhaite, là-encore, en préserver la présence.
5 millions de nos compatriotes viennent en vacances en Italie. J'ai appris qu'il y avait 6 millions d'Italiens qui venaient en France. Tout à l'heure, dans l'échange que nous avions à quatre, la question se posait de savoir qu'elle était la plus belle ville du monde. Nous en avons plusieurs en Europe. C'est vrai que Paris et Rome font partie des plus belles. C'est bien qu'il y ait ces échanges mais cela veut dire aussi que nous devons accueillir ces touristes qui quelquefois rencontrent des difficultés de tous ordres, d'où l'importance du réseau consulaire et l'importance d'avoir aussi une politique d'accueil des touristes italiens en France.
Voilà, ce que j'étais venu vous dire dans ce beau palais. Ce palais de la France en Italie. On n'a qu'un bail emphytéotique qui se termine en 2036, m'avez-vous dit. Je ne sais pas où je serai en 2036 mais je dirai à nos successeurs de veiller à cette partie de la France en Italie.
Je suis venu vous dire de nous rassembler au-delà de nos différences, de nos sensibilités, pour le redressement de notre pays. Parce que, quelles que soient nos conditions, quels que soient nos âges, quelles que soient nos origines, nous avons des valeurs communes à faire partager, les valeurs de la République. Nous avons assuré la réussite de la France qui affronte une situation très délicate. Nous avons à construire l'Europe, à l'approfondir, à en faire une belle référence pour le monde. Nous avons aussi à faire que la France et l'Italie se retrouvent dans cette destinée commune, celle d'une Europe forte, démocratique et celle aussi d'une volonté de porter les valeurs de la démocratie partout dans le monde, et la culture, non pas comme un supplément mais comme notre propre identité.
Merci à tous et à toutes de m'avoir accueilli ici.
Merci de me recevoir dans ce Palais Farnèse qui a accueilli tant de personnalités prestigieuses et abrité tant de réunions historiques. Je salue aussi l'Ambassadeur de France auprès du Saint-Siège et l'Ambassadrice auprès de la FAO. Je veux également remercier le Consul général d'être ici, des personnalités nombreuses, présidents d'associations, mais je voulais vous rencontrer, vous, citoyens français vivant en Italie, et comme l'a dit l'Ambassadeur, représentant la France ici et travaillant pour la France.
Je viens à Rome pour la troisième fois depuis trois mois. Vous voyez, je prends mes habitudes. La première fois, c'était comme candidat. J'avais quelques difficultés à rencontrer les autorités.
Puis, la deuxième fois, comme Président de la République.
La semaine dernière, j'étais dans la relation bilatérale, c'est-à-dire que j'avais le plaisir de rencontrer mon homologue, Giorgio Napolitano, qui est une personnalité, non seulement respectée ici en Italie mais qui a une très haute réputation partout en Europe. Avec lui, nous avons rappelé ce qu'était la relation entre nos pays, son histoire mais aussi son avenir. Je l'ai invité à venir en France pour une visite d'Etat avant la fin de son mandat.
J'avais rencontré aussi la semaine dernière Mario Monti, Président du Conseil, qui mène une politique courageuse pour redresser les comptes publics. Il n'est jamais facile de redresser les comptes publics. Il le fait avec une ténacité, une obstination qui n'est pas récompensée par des taux d'intérêt qui restent très élevés sur la dette souveraine italienne. Ce qui nous amène au sujet qui a été le nôtre aujourd'hui. Mais avant de l'évoquer, j'ai, avec le Président Monti, rappelé ce qu'était notre rendez-vous annuel : le sommet bilatéral qui se tiendra cette année en France à Lyon sans doute, et où nous aurons l'occasion de faire progresser un certain nombre de projets, notamment d'infrastructures. On parle, depuis tant d'années, du Lyon --Turin que cela devra bien se faire. Mais on m'a interpellé, tout à l'heure, sur le Paris -- Rome ou le Rome -- Paris qui ne circule plus. Nous aurons à évoquer les infrastructures, les projets de haute technologie.
Monsieur l'Ambassadeur rappelait que l'Italie a une grande industrie. Nous avons vocation à nouer des partenariats. Nous parlerons aussi de la politique de la Méditerranée car la France et l'Italie sont tournées vers les pays du printemps arabe que nous devons soutenir, dans des conditions très difficiles, dans leur transition. Nous avons encore à approfondir notre relation- je ne dis pas améliorer, car la relation entre la France et l'Italie, au-delà des sensibilités politiques, au-delà des personnalités qui ont conduit la destinée de chacun de nos pays, a toujours été excellente. Mais nous pouvons encore être plus être exigeants avec elle.
Aujourd'hui, je suis à Rome, de nouveau, pour une rencontre à quatre. Les quatre grandes économies de la zone euro, qui ont la responsabilité de redonner confiance dans la monnaie unique, celle que nous avons voulue, celle qui a longtemps fait notre fierté et qui, aujourd'hui, est regardée comme une faiblesse alors que c'est une chance.
Nous avons des responsabilités parce que nous sommes quatre grands pays, dont trois fondateurs de l'Europe de l'après-guerre. L'Espagne nous a rejoints quand elle est sortie elle-même de la dictature. Il y avait là, outre Mario Monti, Angela Merkel, le Président Rajoy et moi-même. Je voulais vous rendre compte de cette réunion, avant de le faire devant les Français rassemblés, je saisis cette occasion. C'est comme une intervention à la télévision que de venir ici au Palais Farnèse. Quel plus beau décor trouver ? Donc, je voulais vous en rendre compte.
Nous avons avancé, notamment, sur l'objectif de croissance. Il y a un ralentissement partout dans le monde mais aussi et surtout en Europe, et nous ne pouvons pas l'accepter. Parce que cela se traduit en termes de chômage, de plans sociaux, de difficultés de pouvoirs d'achat, de doutes par rapport à notre avenir. Je me suis présenté devant les Français pour que la croissance soit mise au cur de tous nos engagements et de toutes nos réunions. Cette fois-ci, avec les quatre et bientôt au Conseil européen, nous aurons un paquet de croissance, comme l'on dit, qui représentera 130 milliards d'euros, 1% du PIB. Certains diront que c'est beaucoup, d'autres diront que c'est trop peu. C'est déjà une première étape.
Nous avons aussi convenu d'améliorer, en tout cas d'utiliser pleinement les instruments permettant la stabilité financière. Parce que nous ne pouvons pas accepter qu'il y ait des différences de taux d'intérêt entre les dettes souveraines des différents pays. Nous ne pouvons pas admettre que la spéculation s'installe parce qu'il n'y aurait pas de pare-feu suffisants. Nous ne pouvons pas comprendre que des marchés doutent de la zone euro alors que nous voulons la consolider davantage. Donc, utilisons pleinement tous les instruments sans qu'il soit besoin, à ce stade, de changer les traités, pour que nous puissions être efficaces dans l'exigence de stabilité financière.
Nous avons également admis le principe de la taxe sur les transactions financières. Les quatre, en tout cas, y sont prêts. Nous aurons, dans le cadre de la coopération renforcée, à introduire ce nouvel instrument. Je ne dis pas qu'il va changer la réalité de la finance mais, au moins, ce sera une façon de prélever sur les mouvements de capitaux.
Et puis, enfin, ce sera aussi l'enjeu du Conseil européen du mois de juin, nous voulons approfondir l'Union européenne. C'est là-dessus que nous avons les débats les plus difficiles. Certains disent : commençons par fixer une nouvelle étape de la construction politique de l'Europe et nous trouverons les instruments. D'autres disent, j'en suis : commençons par bâtir des instruments et puis nous ferons l'étape suivante sur le plan politique. Si nous restons sur ces positions-là, nous n'avancerons pas. Donc, faisons étape par étape. Instruments nouveaux, solidarité supplémentaire, Union renforcée.
Voilà ce dont nous avons débattu au milieu de la journée avant que Madame Merkel n'aille voir le match dont je ne connais pas le résultat mais qui, de toute façon, sera très commenté entre la Grèce et l'Allemagne. Nous avons fait en sorte, j'avais donné des consignes, que l'équipe de France de football ne rencontre pas l'Italie, pour ne pas vous mettre dans une situation trop difficile.
Je voulais, au-delà de cette réunion très importante, et j'en remercie le Président Monti, saisir l'occasion de m'adresser à vous, Français qui vivez ici en Italie, Français que l'on appelle de l'étranger, Français tout simplement qui vous trouvez en Europe pour de multiples raisons, professionnelles, économiques, personnelles, liées à des rencontres qui ont pu faites, des mariages qui se sont faits. Certains sont double nationaux. C'est aussi pour moi une identité que d'être avec deux nationalités. Certains voudraient qu'il n'y en ait qu'une. Je vois toujours ceux qui ne parlent pas au nom de la raison mais au nom de la passion. On peut épouser deux nationalités et aimer son propre pays, la France.
Je voulais vous rencontrer, parce que vous avez une mission très difficile : représenter la France à l'étranger, même si, ici, nous ne sommes pas à l'étranger- en tout cas, nous n'en avons pas le sentiment. Représenter la France, d'abord sur le plan économique. Je salue tous les cadres, employés des entreprises françaises, qui travaillent ici, qui réussissent bien. 1 200 entreprises à participation française, présentes en Italie, employant 240 000 salariés. Je crois à l'investissement français à l'étranger parce que c'est une source de développement de nos échanges, une manière, aussi, d'exporter, à la condition que les entreprises de taille mondiale cherchent à s'implanter pour faire travailler la base arrière qui est la nôtre, notre propre territoire.
Mais je crois aussi aux investissements étrangers en France. Nous accueillons autant de capitaux venant d'Italie qu'il sera nécessaire, là-encore, pour développer nos échanges.
Je veux saluer les Chambres françaises de commerce et d'industrie, celle de Milan a une réputation excellente. Je veux aussi dire tout le bien que je pense du réseau des conseillers du commerce extérieur dont l'expertise est appréciée. Non pas que je mette l'économie d'abord -- mais nous avons besoin de renforcer encore notre partenariat.
Monsieur l'Ambassadeur le disait : la France est le deuxième partenaire commerciale de l'Italie et l'Italie est le deuxième partenaire commerciale de la France, l'Allemagne étant le premier pour les deux. Nous devons encore consolider, renforcer, améliorer, ces échanges économiques.
Mais il y a plus que l'économie. Quand nous parlons de l'Italie, de la France, et c'est aussi un facteur de création d'activités et d'emplois, je parle de la culture. Je parle de tout ce qui fait l'attractivité de nos deux pays et aussi du lien que nous avons tissé, qui permet de développer un grand nombre d'échanges sur le plan culturel. Notre réseau, ici, est l'un des plus dynamiques d'Europe : 38 Alliances françaises et une présence de l'Institut français dans six villes. C'est considérable. C'est souvent menacé sur le plan budgétaire. C'est vrai qu'il y aura, sûrement, des pressions pour nous dire : est-ce que c'est aujourd'hui absolument indispensable qu'il y ait ce réseau ? Oui, et nous y veillerons. Il y a eu trop de diminutions, trop de destructions mêmes d'instituts, de réseaux culturels français à l'étranger pour que je puisse abandonner cette dimension-là de notre action.
J'ai eu le privilège d'être accueilli, en demi-pension seulement, à l'Académie de France à Rome à la Villa Médicis. J'avais dépassé la limite d'âge. C'est vrai que c'est une grande fierté. Je veux saluer ici son directeur, Eric de Chassey. Pour des générations d'artistes, c'est le lieu de découverte de l'art italien, de la création, des expositions de grand prestige, des rencontres qui se font, des directeurs qui ont laissé un nom pour l'histoire.
La première fois que j'ai été reçu -- je vous le dis là, car je commence à avoir le privilège de l'âge -- à la Villa Médicis, c'était Balthus qui en était encore le directeur. Il y a laissé des uvres considérables. Je suis fier de représenter un pays qui est celui de la création. Nous n'en avons pas le monopole mais nous avons encore ces outils qui permettent d'accueillir des artistes jeunes, féconds dans leur travail, français mais aussi étrangers parce que, pour nous, la culture n'a pas de frontière. La conception que nous avons de la culture, c'est une culture ouverte qui s'enrichit des autres et qui est capable de porter des valeurs et des idéaux.
Je pense aussi à ce qui se fait ici, je pense à l'Ecole française de Rome. Je salue sa directrice, Catherine Virlouvet. Là-encore, les plus grands chercheurs sont présents, ceux qui travaillent dans l'archéologie, dans les sciences sociales, sur l'Italie.
Je veux vous dire un mot de la langue française. Il y a, dans le gouvernement, une ministre de la francophonie. Je considère que c'est une bataille, la langue française, non pas une bataille pour la France, une bataille pour la diversité culturelle, une bataille pour le pluralisme. Si je peux vous faire quelques confidences -- même si j'ai l'impression que je suis écouté, et même surveillé -- cela ne me fait pas plaisir quand je participe, depuis peu il est vrai, à des conférences internationales et que la langue française est aussi peu utilisée et parfois même par des Français. Chaque Français doit parler la langue française, où qu'il se situe.
Cela ne veut pas dire, qu'on ne doit pas connaître d'autres langues, d'Europe et du monde, mais nous devons défendre notre langue. Qui nous le dit ? Pas seulement les Français. Quand je rencontre des Canadiens, des Québécois, donc des Canadiens -- et là encore, je prends des risques -- quand je rencontre des Africains, Monsieur Diouf, qui représente la francophonie, ils me disent : défendez la langue française, défendez la, non pas pour vous, mais pour nous, tous les locuteurs, des centaines de millions, et notamment beaucoup d'Africains qui veulent défendre cette langue.
Là-aussi, en Italie, nous devons faire tout ce que nous pouvons. Je veux remercier les Italiens : y compris dans les conférences internationales, ils parlent le français. Nous devons donc faire l'effort de diffuser davantage notre langue, au collègue, au lycée, de multiplier les échanges en matière d'enseignement supérieur, de recherche. Ici, il y a des accords de coopération- plus de 2 500, c'est considérable, entre les universités.
Je vous parler aussi de démocratie. Vous avez des représentants. Ils doivent se faire entendre et j'y veillerai. J'ai donné consigne au gouvernement de le faire. Une ministre a été désignée, représentant donc cette attribution des Français de l'étranger, Mme Hélène Conway. Elle viendra, je l'espère, bientôt, ici en Italie.
Vous avez aussi les conseillers français de l'étranger, certains sont présents parmi nous. Je les salue et notamment un qui ne peut pas être là mais dont on me dit qu'il est une référence- 43 ans de mandat, cela fait rêver- Monsieur Raymond Petri-Guasco, qui a représenté longtemps les Français de l'étranger dans l'assemblée qui leur est dédiée.
Merci à tous ceux qui se dévouent pour cette représentation, les conseillers, les sénateurs, maintenant les députés, puisque vous avez élu une députée le 17 juin dernier. Je suis très heureux qu'il y ait cette façon, maintenant, de traduire les revendications au plus haut niveau des Français de l'étranger. Même si, je le rappelle, les sénateurs sont des législateurs à part entière et qui ne représentent aucun territoire de la République et encore moins un territoire qui nous serait étranger. Ce sont des représentants de la République.
L'éducation sera une des priorités de mon quinquennat et donc, aussi, l'éducation pour les Français qui vivent à l'étranger. Je salue le proviseur du lycée Chateaubriand, ses personnels, ses enseignants, tous ceux qui se dévouent, enseignants ou pas, pour la diffusion du savoir et pour l'encadrement des enfants. Six établissements scolaires français en Italie accueillent plus de 4 000 élèves. Il y a le succès d'une très belle opération, Esabac, avec 3 500 élèves qui sont engagés dans un parcours bilingue d'excellence. Tout cela traduit une coopération de très bon niveau.
Mais je sais aussi les problèmes qui sont posés, pour le coût de cet enseignement et, notamment, à Rome où il y a eu une hausse de 30 % en cinq ans. Il y a eu la gratuité pour la terminale, la première, mais qui n'a été, en définitive, qu'un leurre, puisqu'elle a conduit à renchérir encore le coût et à exonérer un certain nombre d'entreprises qui prenaient en charge ces frais et à mettre en difficulté d'autres compatriotes qui ne peuvent pas accéder aux bourses. Je pense que la solution c'est d'augmenter le niveau des bourses et le nombre des bourses pour assurer la démocratisation de l'enseignement français à l'étranger.
Le dernier point que je voulais évoquer même si, ici, il n'est pas, sans doute, ressenti comme ailleurs dans d'autres pays, c'est le réseau consulaire de proximité. C'est important d'avoir des consuls et même ces consuls honoraires. Vous savez, ces bénévoles qui représentent la France et qui peuvent donner assistance à nos compatriotes. Je salue donc tous les agents consulaires, ce service public essentiel et je souhaite, là-encore, en préserver la présence.
5 millions de nos compatriotes viennent en vacances en Italie. J'ai appris qu'il y avait 6 millions d'Italiens qui venaient en France. Tout à l'heure, dans l'échange que nous avions à quatre, la question se posait de savoir qu'elle était la plus belle ville du monde. Nous en avons plusieurs en Europe. C'est vrai que Paris et Rome font partie des plus belles. C'est bien qu'il y ait ces échanges mais cela veut dire aussi que nous devons accueillir ces touristes qui quelquefois rencontrent des difficultés de tous ordres, d'où l'importance du réseau consulaire et l'importance d'avoir aussi une politique d'accueil des touristes italiens en France.
Voilà, ce que j'étais venu vous dire dans ce beau palais. Ce palais de la France en Italie. On n'a qu'un bail emphytéotique qui se termine en 2036, m'avez-vous dit. Je ne sais pas où je serai en 2036 mais je dirai à nos successeurs de veiller à cette partie de la France en Italie.
Je suis venu vous dire de nous rassembler au-delà de nos différences, de nos sensibilités, pour le redressement de notre pays. Parce que, quelles que soient nos conditions, quels que soient nos âges, quelles que soient nos origines, nous avons des valeurs communes à faire partager, les valeurs de la République. Nous avons assuré la réussite de la France qui affronte une situation très délicate. Nous avons à construire l'Europe, à l'approfondir, à en faire une belle référence pour le monde. Nous avons aussi à faire que la France et l'Italie se retrouvent dans cette destinée commune, celle d'une Europe forte, démocratique et celle aussi d'une volonté de porter les valeurs de la démocratie partout dans le monde, et la culture, non pas comme un supplément mais comme notre propre identité.
Merci à tous et à toutes de m'avoir accueilli ici.