23 novembre 2017 - Seul le prononcé fait foi

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Discours du Président de la République Emmanuel Macron au 100ᵉ congrès des maires de France.

SEUL LE PRONONCE FAIT FOI.

Monsieur le Président du Sénat,

Madame, Messieurs les Ministres,

Monsieur le Président du Conseil économique, social et environnemental,

Messieurs et Mesdames les Députés et Sénateurs,

Monsieur le Président de l’Association des maires de France, cher François BAROIN,

Mesdames et Messieurs les Présidents d’association d’élus locaux,

Madame le Maire de Paris, chère Anne HIDALGO,

Mesdames et Messieurs les Maires et Présidents d’intercommunalité,

Mesdames et Messieurs les Élus,

Mesdames, Messieurs,

J’ai bien entendu votre défi, Monsieur le Président, qui consiste à ne pas m’arrêter tant que je n’ai pas convaincu. Pour ceux qui ont eu à subir précédemment mes discours, je pense que vous prenez un risque certain parce qu’il paraît qu’ils peuvent durer longtemps et, en quelque sorte, vous m’infligez le supplice de Shéhérazade consistant à parler pour ne pas être exécuté mais je peux tout à fait être Shéhérazade.

Plus sérieusement, « nous sommes enserrés dans les règlements rédigés par les bureaux des ministères. Règlements uniformes pour toute la France qui ne tiennent compte ni des usages locaux ni des règles déjà appliquées ni de la situation géographique et topographique des villes ». Ce n’est pas de moi, ça pourrait être de vous et nous pourrions largement partager ce que je viens de vous lire.

Non, ces mots, ce sont ceux prononcés précisément en 1907 par Paul-Émile SARRADIN, maire de Nantes et fondateur de votre association cette même année. Et ce qui est cruel dans la lecture de ces quelques mots, c’est que je pense que vous auriez pu, il y a quelques instants, les dire à peu près exactement.

Sans doute l’Histoire bégaie-t-elle et sans doute ce bégaiement est-il à l’origine du doute qui s’installe, de la fatigue, du fait qu’on ne croit pas en la parole dite ou en l’action dans laquelle on s’engage. C’est le défi qui est aujourd’hui le mien qui est celui du Premier ministre et de son gouvernement et vous l’avez rappelé.

On hérite d’une Histoire mais c’est ainsi. Mais accordez-moi une chose, vous l’avez rappelé il y a un instant, j’ai pris des engagements, j’ai dit des choses durant la campagne présidentielle. J’ai une caractéristique, c’est qu’il m’est arrivé de dire des choses qui ne plaisaient pas ; j’en ai une autre, c’est qu’immanquablement, je les applique.

Donc, ce que je vais vous dire aujourd’hui, a vocation non pas à vous satisfaire automatiquement, non pas toujours à vous contenter, parfois à répondre à des inquiétudes que je considère comme légitimes ou des reproches que je sais reconnaître comme étant justes, mais cela a vocation en tout cas à être appliqué.

Parce que vous l’avez très bien dit tous les trois, il y a dans la relation entre l’État et les communes quelque chose qui relève d’un compagnonnage républicain. La République, elle n’est pas détenue par quelques-uns, ni par le président de la République ni par le gouvernement ni par celles et ceux qui incarnent l’État sur le territoire. C’est faux ! Elle est en partage avec ses représentants de la République élus que sont les maires.

La République, cette chose publique, cette chose commune qui nous unit, ce qui chaque instant tient notre pays, c’est ce que nous avons en partage. Alors il y a des moments d’incompréhension, parfois de division, il y a immanquablement – il y en a parfois au sein de l’État – des désaccords, mais il y a une chose plus forte, plus importante que nous qui nous oblige, c’est le fait que notre République tient dans et par cette relation.

Nous avons par conséquent le devoir de réussir ensemble pour la France et pour nos concitoyens et pour ma part, je ne crois pas une seule seconde que l’État puisse réussir sans les communes ni que les communes puissent avoir un avenir meilleur parce qu’elles auraient gagné contre l’État ou l’auraient emporté malgré lui.

C’est pour cela que je suis devant vous aujourd’hui, parce que nous avons cette République en partage et que c’est toujours pour en retrouver le sel profond, une République des engagés. Vous êtes des engagés. Vous avez rappelé que l’écrasante majorité des maires, des conseils municipaux sont des bénévoles et je ne le mésestime pas. Je le sais, je le vois et, chaque fois sur le terrain, je le mesure.

Cette République des engagés, mais que vous avez en partage avec les parlementaires, avec les autres élus locaux, avec aussi les fonctionnaires de l’État et de la fonction publique hospitalière et territoriale dont je veux ici reconnaître tous les mérites, c’est celle qui fait que lorsqu’un drame arrive, lorsqu’un de nos concitoyens se trouve totalement démuni, il se retourne vers l’un de celles ou ceux qui représentent la République, qui la portent, qui la font vivre, qui la tiennent.

Dans ces moments que nous vivons, faits de division parfois profonde, de doutes, de drames, mais aussi d’ambition indispensable pour que notre pays puisse redevenir conquérant dans ce siècle qui s’ouvre, j’ai besoin de vous. Je n’ai pas besoin de vous pour venir vous dire ce qui vous plaît ou venir, comme disaient certains dans les heures ou les jours qui précédaient cet échange, vous faire plaisir ou avoir une forme, en quelque sorte, d’accord tacite qui consisterait à céder à qui ou à quoi.

Non, du tout ! J’ai besoin de vous en ce que vous portez dans la République parce que vous avez décidé de vous engager ! Vous l’avez fait en prenant sur vos vies, votre temps, vos familles et de cela, je vous en remercie.

Mais j’ai besoin de vous parce que le pays ne se redressera pas avec quelques décisions, quelques lois, quelques règlements ou l’action de quelques-uns. Il ne réussira que parce que partout sur le territoire, il y a les engagés et les convaincus que vous êtes.

Rien ne sera possible sans cette relation de confiance et de responsabilité. C’est pour cela que j’ai souhaité, dès le début de mon mandat, vous adresser ces messages de considération, d’attention, de profond respect en étant, bien entendu, à chaque fois aux côtés des maires dans les moments difficiles comme dans les moments de joie, pour aller gagner des compétitions internationales, Madame le Maire, et nous continuerons à être à vos côtés, dans les moments de tristesse, à Paris ou à Nice, au cœur du drame, dans les communes de Saint-Martin, de Saint-Barthélemy, vous l’avez justement rappelé.

J’ai vu à chaque fois dans mes déplacements les maires se battre avec vigueur, s’emportant légitimement parfois contre le président de la République qui devient le dernier ressort lorsque tel ou tel accident industriel survient ou qu’un malentendu s’est installé parce que c’est à chaque fois la traduction de cet engagement.

Cette considération, c’est aussi la raison pour laquelle j’ai souhaité lancer dès le début de mon mandat la conférence nationale des territoires. Vous l’avez dit et je l’ai dit alors, c’était une de vos propositions – on vit paraît-il plus vieux lorsqu’on cite ses sources – afin de faire qu’aucune décision concernant les collectivités territoriales ne soit prise sans leur association préalable. Et sur ce point, vous avez raison, l’été n’a pas été à la hauteur de cet engagement.

Pourquoi ? Parce que des habitudes se sont installées dans les fonctionnements politiques, administratifs et ces habitudes d’ailleurs parfois, elles sont de votre côté aussi. On s’habitue à toujours reprocher à l’État les vicissitudes qui nous tombent dessus et c’est difficile de revenir sur des habitudes. Et donc il est vrai que des mesures prises durant l’été qui touchaient les collectivités n’ont pas été dument concertées, présentées alors même que cette conférence était lancée, je le reconnais parfaitement.

Ce que je veux maintenant, c’est qu’elle vive pleinement et donc qu’elle soit, de manière très régulière, réunie par le Premier ministre et les ministres, que les ministres – et je sais leur engagement et je veux les en remercier –, ils n’ont pas ménagé leur peine et ils continueront – réunissent et concertent dans le cadre de cette conférence à chaque fois que des mesures touchent les collectivités.

Ces derniers mois ont fait naître aussi plusieurs exercices qui vous impliquent directement et j’y reviendrai sur l’agriculture, sur la mobilité dans nos territoires et c’est aussi dans cet esprit que je veux poursuivre le travail.

Mais le gouvernement aurait pu en quelque sorte continuer comme avant, comme durant les sept années que vous venez d’évoquer. Il aurait pu continuer à imposer des ajustements de manière unilatérale sur le plan budgétaire, à dire : on va baisser les dotations parce qu’il le faut. Bruxelles est là et notre situation financière, la dette pour nos enfants, notre responsabilité collective, c’est précisément de continuer à baisser les dotations que donne l’État.

Comme je m’y étais engagé devant vous en mars dernier, cela n’a pas été fait. Non pas parce que le gouvernement et moi-même, nous craignions une grogne. Je n’ai pas peur de les affronter lorsque l’action publique l’exige. Non, parce qu’en effet, ça n’est pas la bonne méthode et parce que, vous l’avez parfaitement dit, vous êtes arrivés au bout de cette méthode. Parce que ces baisses de dotations ont touché toutes les collectivités pendant sept années durant. Elles ont non seulement atteint parfois la capacité même à rendre le service public, mais aussi les capacités d’investissement. Or, c’est bien ce service public et cet investissement qui sont au cœur de votre action.

J’aurais pu aussi vous dire que tout va bien, que l’État prendra seul la charge, que nos finances publiques ne sont plus un problème, que finalement, nous pouvons laisser la dette qui est la nôtre à nos enfants, que le déficit public courant peut continuer à filer, que ça ne serait le problème que d’une partie de la dépense publique, mais je ne serais pas responsable parce que c’est faux ! Parce que nous avons cette dépense publique en partage, l’État, les collectivités publiques territoriales et les administrations sociales.

Parfois, les mêmes qui reprochent qu’on puisse partager cet effort entre ces trois types de collectivités sont les mêmes qui, le jour d’après, reprochent à l’État la moindre de ces économies. « Ne touchez pas à l’armée, diable ! Ne touchez pas à telle prestation ou à telle autre ! » Au fond, notre pays – et pardonnez cette facétie, vous l’avez un peu illustrée sur votre propos sur la taxe d’habitation – aime la finance magique. Il aime cette finance où on peut baisser les impôts sans que jamais la dépense publique quant à elle ne baisse. Il veut que l’économie soit toujours le problème de l’autre mais à la fin, nous nous y retrouvons et ma fonction m’oblige à une chose, la cohérence, à la responsabilité devant tous les Français et à la responsabilité devant tous nos partenaires devant des engagements que nous avons librement consentis.

Quelle crédibilité aurait la France si elle ne tenait pas ses engagements vis-à-vis de ses propres concitoyens ? Quelle serait notre crédibilité pour bouger une Europe qui va à tâtons si nous ne respectons pas nous-mêmes nos propres engagements ? Et donc, oui, il fallait bien aller vers ce discours de vérité et de responsabilité partagée.

Aussi ce sur quoi je souhaite que nous engagions l’action commune durant les cinq années qui viennent, c’est autour de trois combats, trois combats communs. Le premier combat, c’est celui de la préservation de vos moyens financiers. Le deuxième combat, c’est celui d’une plus grande autonomie parce que nous ne pouvons plus vivre dans un schéma, en effet, centralisateur et parisien et je veux sur ce point partager quelques convictions. Et le troisième combat, c’est celui qui fait que l’État doit pleinement vous accompagner dans les grandes transitions que vous avez à conduire sur le logement, le numérique, l’environnement, les accès des territoires. Autant de combats qui font l’entrée dans ce siècle qui advient et pour lesquels les communes sont un acteur essentiel et pour lesquels les maires sont en effet ces premiers de cordée que vous avez évoqués.

Le premier combat, je l’ai dit, c’est celui de la préservation de vos moyens financiers. Si nous avons des collectivités territoriales, c’est pour qu’elles disposent de réelles marges de manœuvre. Elles ne peuvent être réduites à une fonction de guichet pour délivrer des prestations. C’est pourquoi j’ai décidé – et je m’y étais engagé –, pour la première fois depuis sept ans, la stabilité des concours financiers aux collectivités territoriales. Dans un contexte de baisse continue des concours de l’État, c’est historique.

Là aussi, j’entends que ce n’est pas cru. J’invite – et je crois que ce matin, les ministres présents ont pu vous le dire – à lire les textes qui ont été votés, à consulter les parlementaires ici présents. Les chiffres sont là mais la réalité sera là demain. Le Premier ministre vous l’a détaillé avant-hier et je vous le redis aujourd’hui, nous nous engageons à une stabilité des concours financiers aux collectivités territoriales.

Vous avez ensuite évoqué une contrepartie, et je veux répondre aux points de votre résolution et à vos discours. D’abord avec une remarque de principe.

J’entends cette idée qu’en quelque sorte il y aurait une intangibilité des finances des communes. En quelque sorte il serait impossible de négocier quelques modifications que ce soit. Je vous invite à regarder le fonctionnement des communes et à vous regarder vous tous ; parce que cette grande concorde ne vit que par une solidarité organisée par l’Etat et ses dotations.

Les communes ne sont pas des corps séparés qui vivent de manière totalement autonome. Elles ne vivent en permanence que par des transferts qui sont d’ailleurs le fruit de tant d’ajustements mais qui marquent aussi une solidarité nationale indispensable et qui continuera à persister. Et quand bien même on dirait « on ne touche plus à rien, la responsabilité complète que vous demandez on vous la donne, vous voulez l’autonomie, elle sera totale », là commencera le drame de l’AMF, je vous le dis. Les divisions seront incessantes entre les communes rurales et les communes urbaines, et pour qui vit les débats budgétaires chaque année qui concernent les solidarités au sein de la région Ile-de-France ou les solidarités entre tel et tel type de communes, c’est une toute petite illustration de ce qui adviendrait si l’Etat n’avait pas ce rôle légitime qui consiste justement à préserver la solidarité entre les différentes communes, et la cohérence du territoire.

Ensuite, dire qu’on donne la stabilité à ces dotations suppose en effet une responsabilité. Mais pour qui ? Non pas comme c’était le cas lorsqu’on baissait les dotations de manière brutale, une année pour l’année suivante, qui concernait toutes les communes. Non ! C’est un peu plus de 300 communes, 300 collectivités – pardon- qui sont concernées. Les régions, les départements et les plus grosses intercommunalités et communes. Evidemment les métropoles agglomérations.

Pourquoi ? Parce que comme cela a été dit c’est là que se concentre le plus gros de la dépense publique. A ces collectivités, qu’est-ce qu’il est demandé ? De contractualiser mais dans le cadre d’un dialogue où les ministres prendront leur part. Non pas un dialogue qui serait une convocation déjà prédéterminée mais je veux ici le dire très clairement avec un objectif qui faut partie du texte financier, une augmentation de 1,2 % par an – certains disent que c’est inatteignable, d’autres ont montré que non – mais surtout avec un taux qui sera adapté pour tenir compte des éventuelles difficultés économiques et sociales du territoire, pour tenir aussi compte des efforts faits précédemment parce que vous n’êtes pas tous égaux devant ces efforts à venir même parmi ces 319 collectivités concernées par la contractualisation.

Je sais combien certains ont déjà agi pour maitriser les recettes et les dépenses ces dernières années ; et donc cette contractualisation, c’est précisément pour cela que nous n’avons pas retenu une mesure uniforme à vocation à être intelligente, nourrie par un échange des projets de territoire et la prise en compte des réalités du terrain.

Au-delà, l’Etat a demandé à ce que les collectivités territoriales s’engagent sur une trajectoire de désendettement.

Sur ce point j’ai entendu vos remarques. Et je propose que la trajectoire de désendettement soit également adaptée aux situations spécifiques sans devenir ce que vous appelez « la double règle d’or ». Il est vrai que la loi prévoit d’ores et déjà des encadrements, il est vrai que si l’on veut avoir un vrai dialogue constructif il est important d’en parler de l’inclure dans le cadre de cette contractualisation ; il est donc nécessaire que ce dispositif puisse être dument discuté lors de la conférence nationale des territoires de décembre.

Notre objectif commun c’est de poursuivre cet effort de maitrise des dépenses sur le quinquennat simplement en s’inscrivant justement dans une logique de contractualisation que je crois possible et pour éviter le caractère aveugle de baisse de dotations ou de mesures unilatérales.

Mais je veux ici souligner un point essentiel, plus de 99 % des communes ne sont pas visées par cette contractualisation. Plus de 99 % des communes auront simplement la préservation des dotations, une pleine visibilité et une préservation inédite de leurs moyens financiers pour faire. C’est aussi la réalité qu’il ne faut pas masquer.

Cela signifie que pour l’immense majorité d’entre vous, la situation est simple : les concours financiers de l’Etat à votre commune seront maintenus et l’Etat ne vous demandera aucune contrepartie.

C’est une approche différenciée, assumée, reposant sur la réalité des situations des collectivités territoriales. Et c’est au cœur de l’esprit que je veux ici porter, celui d’un pragmatisme qui reconnait la différence des situations sur le terrain.

C’est dans cette perspective qu’il convient de comprendre la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des contribuables. J’ai entendu sur ce point évidemment vos inquiétudes, vos propos, je veux apporter ici quelques clarifications et prendre un engagement

D’abord je veux vous dire ce que j’évoquais tout à l’heure, on peut baisser des impôts en faisant des économies, c’est même comme ça qu’il faut baisser des impôts et c’est même comme ça que l’Etat va le faire.

Cette réforme elle coûte 10 milliards sur trois ans, ces 10 milliards sur trois ans c’est dans la Loi de Finances pluriannuelle, ils sont financés comment ? Non pas par de la dette, par des économies faites par l’Etat. Ça a été travaillé par le gouvernement, travaillé par les parlementaires et voté en première lecture ; la discussion se poursuit.

C’est financé par ces économies, donc c'est une mesure aussi simple en terme de financement que si on avait décidé de baisser de 10 milliards l’impôt sur le revenu.

Ensuite pourquoi la taxe d'habitation ? Moi j'entends tous ceux qui voudraient la défendre, c'est tous ceux qui aujourd'hui la dénonçaient ! A peu près tous ceux qui aujourd'hui font l’apologie de la taxe d’habitation sont ceux qui depuis des décennies disent « il faut réviser les valeurs locatives ». Ça ne marche plus, les valeurs sont obsolètes, et qui ont à chaque fois renoncé à le faire. Ça fait plus de 40 ans dans notre pays qu'on dit « cet impôt est injuste, il faut en revoir les bases, la grammaire, l’architecture et à chaque fois on renonce ». Et qui est la victime de cette affaire ? Je vais vous le dire : les territoires les plus modestes et les classes moyennes.

Les territoires les plus modestes pourquoi ? Parce que c'est un impôt qui est injuste territorialement. Madame la maire, pardonnez-moi de prendre cet exemple mais le montant moyen pour un couple avec deux enfants est à Paris de 481 euros – c’est une très bonne chose, la taxe est basse – mais il est de 1207 euros à Saint-Denis de la Réunion, il est de 1440 euros à Argenteuil. Mais pourquoi ? Parce qu'il y a moins d'entreprises, parce qu'il y a moins de ressources par ailleurs et donc on taxe qui ? Un peu davantage les classes moyennes !! Donc c’est un impôt qui est injuste territorialement. Et il touche qui ? Les communes les plus rurales, les communes périphériques où les classes moyennes vont loger parce qu'elles ne peuvent plus habiter dans l'agglomération et la métropole. Il touche qui ? Le centre-bourg qui a les charges de centralité et qui doit fiancer les équipements pour les voisins et donc qui monte la taxe d’habitation. C’est profondément injuste cet impôt !! Alors pourquoi le défendre ?

Il est injuste socialement. Il est injuste socialement parce qu'il est aveugle sur la capacité contributive, parce que pour une même surface, dans les trois exemples que j'ai donnés, on peut gagner deux SMIC ou cinq SMIC et en payer la même taxe d'habitation. Ça n'est pas juste ! Et d’ailleurs nos concitoyens qui le vivent ne considèrent pas que ce soit juste. Mais ce n’est pas juste pour les classes moyennes, parce que d’ores et déjà c’est un impôt dont 20 % est payé par l'Etat. Donc ne découvrons pas les choses !

Pour les classes populaires cet impôt il a déjà payé par l’Etat, donc vous-mêmes lorsque vous protestez contre ce remboursement par l’Etat de 80 % vous semblez oublier que 20 % est d’ores et déjà payés par l’Etat ! Parce que des mesures de justice ont auparavant été prises.

Mais qui aujourd’hui est la victime de cet impôt ? Les classes moyennes françaises. C’est ça la réalité. C’est les classes moyennes, comme souvent.

Donc pour toutes ces raisons, je l’assume totalement, et le gouvernement l’applique strictement, sur trois années la taxe d’habitation sera supprimée en trois tranches pour 80 % de la population française.

Alors pour cela, vous pouvez être en désaccord, j'ai toujours - vous savez j'ai fait campagne, il y a beaucoup de candidats pendant la campagne présidentielle qui aimaient faire siffler les autres candidats, je pense avoir été abondamment sifflé, peut-être l’un des plus sifflé, donc les sifflets en m’ont jamais beaucoup étourdi ; mais j’ai toujours demandé aux gens dans mes meetings de ne pas siffler, c’était des militants. Je peux demander la même chose aux maires -

Alors ensuite votre angoisse légitime c'est de dire qui va payer puisque 80 % d'ici trois ans ne paieront plus. L'Etat, comme je l’ai dit, sur ses économies, en procédant par dégrèvement, c'est-à-dire que l'Etat prendra en charge la part non payée par le contribuable local. Cela n’enlèvera donc aucun centime aux collectivités puisque vous serez compensés en montant mais aussi en base. C’est le principe même du dégrèvement. Et ce sera discuté lors des conférences nationales territoriales dans un dialogue d'ailleurs que je veux contradictoire pour qu'il n'y a aucune ambiguïté, et instruit par les Chambres régionales des comptes et la Cour des Comptes sur les trois années durant lesquelles justement cette disposition se développera. Très concrètement, cela veut dire que vous serez intégralement compensés.

Mais, là aussi je vous ai entendus, et si vous m’avez entendu en juillet dernier j'ai d'ores et déjà à ce moment-là ouvert une piste, une réflexion. J’ai dit ce que je crois véritable, si cet impôt est mauvais pour 80 % des citoyens français il y a peu de chance qu’il soit bon pour les 20 % restants.

Vous avez raison, vous dites « le président de la République s'engage à ce qu'on soit remboursé au centime durant les trois années qui viennent », faites-moi la grâce de me croire, je suis devant vous et sauf contre ordre j’ai vocation à être là durant les trois années qui viennent, et donc à pouvoir m’en porter garant, mais vous vous dites « on la connait cette musique ; dans quatre ans, dans cinq ans, huit ans, c’est l’Etat qui payera, donc il reprendra ». Ça aussi je l’entends.

Donc, pour toutes ces raisons je pense que cette réforme ne doit être qu’un début. Un début nécessaire et juste parce qu’il enclenche quelque chose qu’on a refusé de faire depuis quarante ans dont les victimes étaient les Français.

Mais je souhaite en effet que nous allions plus loin. Je veux garantir pleinement votre autonomie financière et fiscale. Et donc je veux, qu’à l’issue de la réforme que nous aurons à conduire, les collectivités territoriales et en particulier les mairies, aient retrouvé leur autonomie fiscale pleine et entière. Et je veux que vous puissiez avoir sur ce point une pleine visibilité.

C’est pourquoi c’est une refonte en profondeur de la fiscalité locale et en particulier communale que nous allons engager. Je veux un impôt cohérent avec vos missions et avec les missions de chacune des collectivités territoriales.

Aujourd'hui, on le sait bien, la fiscalité locale est par trop illisible, la dynamique même de la base fiscale ne correspond pas aux missions des collectivités, les départements et les régions le savent parfaitement, et la dynamique amorcée avec le transfert d’un point de TVA aux régions va dans ce sens.

Nous devons aller plus loin. Aussi, la mission confiée à Alain RICHARD et à Dominique BUR, les travaux des deux assemblées sous la conduite des rapporteurs généraux, messieurs GIRAUD et De MONTGOLFIER, mais également les réflexions du comité des finances locales, cher André LAIGNEL, permettront d’alimenter nos travaux dont les conclusions seront très largement débattues dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.

Ils doivent remettre leurs conclusions courant 2018 et nous prendrons la décision en 2019. Je veux que pour les textes budgétaires de 2020 et des années suivantes soit mise en œuvre une refonte en profondeur de la fiscalité locale qu’il s’agisse des communes, des départements comme des régions. C’est une vraie refonte qu’il nous mener et ces missions devront également se saisir de l’enjeu de la péréquation verticale comme horizontale pour garantir à toutes les collectivités des ressources suffisantes pour faire face à leurs enjeux.

Je pense notamment à la réflexion qui doit être reprise sur la répartition de la dotation globale de fonctionnement mais aussi aux nombreux fonds de péréquation existants qui permettent de mieux répartir la richesse sur notre territoire. Nous devons notamment assurer aux collectivités territoriales les plus pauvres, souvent dans les territoires les plus en difficulté, les moyens de mieux accomplir leurs missions.

Au total, vous l’avez compris, je veux une réforme ambitieuse, cohérente dont la taxe d’habitation n’est que le premier acte. Et j’attends sur ce sujet beaucoup de vous puisque je souhaite que cette réforme soit pleinement débattue et instruite dans le cadre de la Conférence nationale des territoires.

Je pense aussi lorsqu’on évoque les sujets financiers à la profusion des normes. Vous l’avez évoqué dans votre résolution, il y a un coût caché comme un transfert non dit, c’est celui que l’Etat crée lorsqu’il augmente les normes qui sont à la charge des communes. Et là-dessus je veux prendre quelques engagements simples mais aussi peut-être leur donner une crédibilité à la lumière de ce que nous avons conduit depuis quelques mois.

En juillet dernier, une circulaire a été prise par le premier ministre, toute simple, qui impose pour chaque norme créée la suppression de deux normes existantes. Cette circulaire est prise, on n’en a pas beaucoup parlé, pas assez à mon goût, mais c’était un engagement que j’avais pris durant la campagne et je l’avais pris d’ailleurs devant vous au mois de mars dernier et elle touche évidemment les ministères, les services de l’Etat. Mais je peux vous donner sur les quelques premiers mois d’application, au fond septembre, octobre, novembre, il y avait auparavant cinq à six décrets créant une nouvelle obligation par mois, cinq à six par mois ! Depuis cette toute petite circulaire il n’y a eu aucun décret, aucun. Qui conduisent à l’augmentation justement de ces transferts de normes parce que c’est très compliqué surtout pour un même ministère, qui vient rajouter une norme, d’en supprimer deux.

Je souhaite que cette vigilance renforcée de l’Etat se poursuive notamment en veillant à l’équilibre financier entre les normes ajoutées et retranchées car l’objectif n’est pas tant le nombre de normes que leur impact sur votre quotidien et les finances de vos collectivités.

Au-delà, j’ai demandé à chaque ministre d’établir un coût national complet pour chaque norme proposée et de procéder à une concertation préalable avec les associations d’élus locaux avant de prendre tout texte impactant les collectivités territoriales.

Je considère par ailleurs que le Conseil national d'évaluation des normes dans lequel vous êtes représentés doit voir ses missions renforcées tant dans l'amont de l’édiction de la norme que dans le cadre de la procédure parlementaire qu’en aval par le renforcement de ces capacités d’évaluation des normes. Je fais confiance au président du CNEN pour proposer des dispositions en ce sens qui seront prises dans les prochaines semaines et je sais combien sur ce sujet, Monsieur le Président du Sénat, vous êtes engagé.

J’ai par ailleurs demandé à Jean-Claude BOULARD, maire du Mans, de passer en revue le stock des normes qui pèsent sur votre quotidien, travail qui sera là aussi débattu dans le cadre de la Conférence des territoires.

Enfin, les préfets seront chargés de veiller à une application facilitatrice des normes et je souhaite qu'un dialogue soit entretenu avec les collectivités territoriales dans un esprit positif, une meilleure résolution des problèmes socio-économiques des territoires en privilégiant l’esprit des textes plutôt qu’une application tatillonne et j’y reviendrai dans quelques instants en vous parlant de la réforme de l'Etat indispensable pour vous accompagner.

Vous savez faire des économies d’abord parce que vous en avez souvent fait, que vous avez envie d’en faire pour porter des projets dans vos communes et parce que beaucoup d’entre vous ont des vies à côté où ils en font, j'ai besoin de vous pour que nous soyons plus efficaces. C'est donc dans cet esprit de partenariat que sur ce combat j'entends avec vous en prenant les engagements que je viens de tenir continuer à avancer avec pragmatisme, responsabilité et transparence.

Le deuxième combat c’est précisément celui de l'autonomie des territoires, de l'organisation territoriale, de ce qu'évoquait Paul-Emile SARRADIN que je faisais parler il y a quelques instants. Là-dessus vous m’avez posé quelques questions franches, je vais donc y répondre clairement. D'abord quelle organisation pour nos territoires, quelle carte territoriale, quelle structuration et quelle vision des choses ? Ce que je vous dois légitimement c'est de vous donner une vision claire pour que l'organisation qui en découlera le soit.

Là-dessus je serai également conforme aux engagements que j’avais pris en mars devant vous, il n'y aura pas une nouvelle grande transformation institutionnelle pour les collectivités territoriales. Je le dis pour l'ensemble de celles-ci, est-ce que les cartes territoriales sont parfaites ? Sans doute pas, parfois vous avez à vivre avec, mais je pense que nous perdrions du temps et de l'énergie à les revoir et donc c'est la stabilité institutionnelle des collectivités territoriales qui sera retenue et je veux ici vous le garantir.

Je veux aussi vous garantir que l’Etat ne forcera pas à des regroupements de communes ni à des modifications de la carte intercommunale. C'était là aussi un des engagements, il sera tenu. Pourquoi ? Parce que là aussi c'est du pragmatisme, il y a deux raisons simples, la première c’est que vous savez mieux que moi où sont les bons regroupements, donc mieux faire confiance à ceux qui savent qu’à ceux qui le définiraient d’en haut avec une doctrine préétablie.

La deuxième instruite par l’expérience, c’est que si d'aventure j'étais tenté de le faire quand on observe la situation sur le terrain ça marche mieux quand vous l'avez voulu que lorsque cela vous a été imposé. Et donc l’Etat, et là-dessus le ministre d’Etat, ministre de l’Intérieur y tient beaucoup, le ministre de la Cohésion des territoires aussi, l’Etat vous accompagnera pour que les solutions pragmatiques sur le terrain puissent être facilitées. Nous jouerons un rôle de facilitateur dans le cadre des coopérations volontaires, dans les créations de nouvelles communes, dans les regroupements intercommunaux souhaités pour engager les mutualisations voulues entre le niveau communal et intercommunal parce que parfois certaines compétences gagnent à l'être et sur ce point je souhaite qu'il n'y ait aucun a priori. Nous serons aux côtés avec souplesse de toutes celles et ceux qui veulent évoluer.

C’est tout le sens d’ailleurs de la souplesse qui a été apportée par les parlementaires pour le développement des communes nouvelles dans le projet de loi de finances en cours de débat. L'Etat est aussi dans son rôle lorsqu'il construit avec les acteurs locaux l'organisation territoriale qui permettra à notre pays de tenir son rang dans la compétition mondiale. Et donc à côté de cette liberté préservée de territoires qu’on accompagne j’avais aussi pris un engagement qui était de simplifier la carte entre les métropoles et les départements. Et là-dessus je tiendrai l'engagement pris y compris devant les départements de France, Cher Dominique BUSSEREAU, avec pragmatisme.

Il y a une vingtaine de métropoles, sont-elles toutes de rang européen, international ? Non, on ne va pas se mentir, je sais tous les débats parlementaires qui ont alimenté la volonté d'obtenir le statut de métropole, ils étaient légitimes, il y a une considération, il y a un statut. Mais si je vous disais que Clermont-Ferrand sera fusionnée avec le Puy-de-Dôme je susciterais des inquiétudes légitimes. Ça n’est pas le souhait ni de Clermont-Ferrand ni du Puy-de-Dôme et ça n’aurait pas beaucoup de sens.

Par contre, il y a entre cinq et huit métropoles qui sont d'ambition européenne et mondiale, qui ont une vraie volonté de rayonner et qui rayonnent déjà, dont les interlocuteurs sont d'autres grandes métropoles du reste du monde, qui ont une place éminente dans les départements, il y a même des départements où il ne reste plus qu'une vingtaine de communes hors de la métropole ! Il nous faudra là en organisant les discussions avec toutes les communes et toutes les collectivités concernées procéder à un rapprochement bien légitime dans la concertation et qui nécessitera peut-être si ces dernières le souhaitent un texte législatif et le gouvernement les accompagnera dans ce cadre si c'est leur souhait !

Il faudra aussi quand je parle de métropole donner plus de dynamique, de clarté et de volontarisme au projet du Grand Paris, c’est un beau projet auquel je crois. Le Grand Paris c'est l'ambition de notre métropole capitale et de toute la région qui l'accompagne. A-t-on ces dernières années, je vous parle très franchement, mis toutes les chances de notre côté pour faire réussir la métropole du Grand Paris ? Je n’en suis pas persuadé. Nous avons aujourd’hui six niveaux, une grande complexité, cela a été mené, Cher Patrick OLLIER, avec beaucoup de talent et je veux saluer tous les élus qui sont impliqués dans celle-ci, mais par le travail de concertation et de consultation mené par le préfet de région nous devons arriver à un schéma plus simple, plus volontariste, plus efficace et là aussi il nous faudra peut-être l’accompagner d'une loi.

Pour tout le reste, vous l’avez compris, c’est le pragmatisme, c’est la dynamique locale qui sera encouragée et un Etat à vos côtés. Et je serai attentif aux demandes de certains territoires de pouvoir s'organiser différemment là par fusion de départements entre eux lorsqu'ils sont voulus, ailleurs par la constitution d’une collectivité unique, je pense ici à la Corse, et l’Etat sera toujours là pour adapter les organisations.

Cette énergie que je veux rendre aux territoires implique aussi que nous acceptions de rompre avec une forme d’uniformité de traitement. L’égalité républicaine est un de nos grands principes mais elle ne doit pas se traduire en une uniformité de la norme parce que les territoires ne sont pas plongés dans les mêmes situations. Nous avons donc besoin d’adapter aujourd’hui les normes, les capacités normatives pour répondre aux défis de nos territoires.

Qu’y a-t-il de commun entre un centre-bourg, une métropole, une commune qui relève de la loi Montagne ou celle qui relève toute entière de la loi Littoral de manière parfois totalement inadaptée ? Des rigidités pensées pour parfois toute une catégorie alors que ça ne correspond pas à la réalité locale ! Des spécificités qui parfois créent d’autres contraintes, cela aussi, nous devons le changer.

Ce qui n’a pas été fait depuis plus d’un siècle le sera sous ce quinquennat avec une modification de la Constitution. J’ai pris devant le Congrès en juillet dernier un engagement, celui de réviser notre Constitution. Je souhaite donc que dans ce cadre – les travaux se poursuivront avec le Gouvernement, les présidents des Assemblées – l’article 72 puisse être modifié pour permettre aux collectivités de pérenniser une expérimentation réussie, sans que celle-ci ait vocation à être généralisée au plan national.

Ce qui aujourd’hui vous paralyse, c’est qu’on vous dit « vous pouvez expérimenter, allez-y » ! Mais une expérimentation, de par notre Constitution, c’est quelque chose qui a vocation à être généralisé à tous si ça réussit. Donc, assez légitimement, on expérimente peu. Mais je vous ai entendus, vous, hier encore dans les discussions informelles que nous avions, vous ne demandez qu’une chose, vous ne demandez d’ailleurs pas tant que l’Etat accorde telle ou telle chose, vous voulez la possibilité de faire le droit, la volonté d’innover.

Les communes les plus rurales, elles demandent bien souvent qu’on adapte la règle à leurs réalités de terrain. Qui en matière agricole, qui en matière d’aménagement, elles veulent de la liberté, parce qu’elles sont innovantes. Parce que l’Etat ne doit pas les regarder comme des collectivités en difficulté à qui on devrait verser une obole ou une dotation. Elles ont envie de faire, de réussir, de porter un projet !

Donc, c’est cela ce que je veux qu’ensemble nous inventions. Conférer aux collectivités une capacité inédite de différenciation, une faculté d’adaptation des règles aux territoires et pouvoir, le cas échéant, aboutir aussi à des transferts aux collectivités pour une répartition plus efficace.

Il y a des régions, Monsieur le Président, cher Hervé MORIN, vous le savez bien, où, par exemple, la compétence transport n’était pas adaptée, on l’a fait pour toutes les régions, il y en a d’autres pour lesquelles c’est très pertinent. Il y a des compétences que détient l’Etat dans certaines matières, que certaines régions ont envie de prendre et le feraient mieux. D’autres n’ont pas envie ou ne sont pas encore équipées.

Plutôt que d’avoir des débats théoriques pour savoir comment on traite tout le pays de la même façon, ayons une approche pragmatique, différenciée. Permettons de faire. Laissons les maires innover. C’est cela l’esprit de la réforme qu’avec vous, je veux porter.

Derrière, c’est aussi notre relation, c’est cela la relation de confiance. Hier, la maire de Piana me disait : « Moi, ma commune tout entière est dans la loi Littorale. Comme j’ai des calanques, je suis pour partie dans la loi Montagne et j’ai la moitié de la commune qui n’est concernée au fond, ni pas l’un, ni par l’autre. Ce sont des contraintes partout. Cela coûte cher, cela empêche des projets de développement. »

Donc, quel est le seul moyen ensuite de l’aider ? De verser des dotations, de demander donc des transferts financiers. Là où si nous étions plus pragmatiques, si nous laissions plus de possibilités de faire et d’innover, tout le monde serait gagnant.

C’est donc dans cet esprit, Mesdames et Messieurs, que je souhaite que nous avancions, avec l’engagement de réformer la Constitution, avec l’engagement de prendre aussi les textes de loi qui permettront d’accompagner cela. C’est la reconnaissance institutionnelle attendue depuis longtemps, nécessaire, validée par l’expérience que la vérité se trouve plus près du terrain et non dans les rouages des administrations centrales, quel que soit leur talent, non dans les discussions générales que nous pouvons parfois avoir.

Les Outre-Mer disposent déjà dans cet esprit de dispositions de l’article 73 qui ouvrent parfois la possibilité d’adaptations législatives. Mais la procédure d’adaptation est longue, complexe, du coup, peu utilisée. Là aussi, Mesdames et Messieurs les Maires, je veux que nous puissions simplifier les choses. Les Assises de l’Outre-Mer, qui se concluront au printemps prochain, devront nous permettre d’identifier, collectivité par collectivité, les compétences qui sont voulues, pour permettre de prendre une loi unique et simple qui le permettra.

Je souhaite également que nous puissions reconnaitre effectivement un pouvoir règlementaire aux collectivités territoriales et laisser les acteurs locaux adapter la loi à leurs réalités locales, afin de mettre fin parfois à des rigidités inexplicables.

Pour accompagner tout cela, je veux aussi un dialogue renouvelé avec l’Etat. Bien souvent, qu’est-ce qui se passe ? Je l’évoquais en creux tout à l’heure. La loi est prise, le décret derrière, les circulaires ensuite et le préfet se trouve sur le terrain, ligoté par une norme qui ne souffre pas la même application d’un endroit à l’autre du territoire. Le dialogue est quasi impossible. Alors, qu’est-ce qui se passe ? Le préfet vous dit « je vais le faire remonter à Paris » ou le service déconcentré de l’Etat auquel vous avez à faire face. Et vous attendez parfois six mois, huit mois, un an.

Les parlementaires arrivent, sollicités par les maires que vous êtes, avec un amendement pour régler le problème. C’est pour ça qu’on a ensuite des lois si bavardes. J’y ai amplement contribué, portant beaucoup d’amendements de ce genre. Mais le problème se règle dans le Cantal, mais il ressurvient en Lozère ou à Strasbourg d’une autre façon. Parce que ce qu’il manque et qui est l’indispensable corrélat de cette plus grande décentralisation que je suis prêt à accorder sur le plan normatif, c’est une vraie déconcentration de l’Etat.

Nous devons redonner davantage de responsabilités aux fonctionnaires de terrain, aux préfets, aux services déconcentrés, pour que dans un dialogue intelligent et constructif avec leurs élus, ils puissent adapter les choses, apporter de manière rapide une réponse pragmatique.

Cela, c’est ce que nous voulons, c’est ce que nous ferons. Une administration plus déconcentrée, avec plus de responsabilités, resserrée et unifiée autour des préfets, avec un Etat partenaire et un droit à l’erreur reconnu.

Lundi prochain, au Conseil des ministres, ce droit à l’erreur sera inclus dans un texte qui sera soumis au Conseil pour restaurer justement une action de l’Etat dans une société de confiance.

Mon objectif est clair : fixer le cap de la libre administration du 21ème siècle. Une libre administration qui garantisse aux collectivités territoriales les capacités juridiques et les moyens d’agir et un Etat adapté à ce défi qui les accompagne, qui les aide, qui facilite.

La relation de confiance que je souhaite nouer avec vous doit aussi se traduire par plus d’autonomie et de liberté dans la gestion de vos personnels. Je l’avais esquissé, ce sujet, lors de notre échange du mois de mars dernier. Je sais que vous avez besoin de cette capacité d’adaptation pour répondre aux échanges avec vos concitoyens et à leurs légitimes attentes, pour adapter les services publics et disposer des compétences nouvelles.

Cela passe donc aussi par une fonction publique territoriale modernisée. Quelles sont les souplesses de gestion pertinentes ? Faut-il aller vers une différenciation des différentes fonctions publiques qui conduirait à ce que l’augmentation du point, décidée pour la Fonction publique hospitalière et la Fonction publique d’Etat, ne soit pas automatiquement applicable à toute la fonction publique territoriale, conduisant à un milliard de transferts financiers ? Faut-il élargir les possibilités de recrutements hors statut ? Faut-il des souplesses de gestion propres aux défis qui sont les vôtres ? Ces sujets sont sensibles et nécessitent d’être débattus avec les syndicats de fonctionnaires et les élus locaux.

Mais je suis déterminé à mener cette réforme à son terme, après la réflexion et le travail indispensable qui doit être conduit dans les prochains mois.

Je ne saurai terminer ces propos sans vous parler aussi de vous et vous m’avez interpellé sur ce point. Je veux d’abord dissiper un malentendu, celui sur la réduction du nombre d’élus. Mécaniquement, le nombre d’élus va diminuer à travers les rapprochements, les fusions et à travers certains rapprochements et je sais que les régions y sont prêtes, il y aura une réduction.

A travers les rapprochements que j’évoquais tout à l’heure et les fusions, il faut qu’il y en ait pour plus d’efficacité, mais en respectant la bonne représentation de tous les territoires et les équilibres. Mais ensuite, vous ne m’avez jamais entendu parler d’une réduction des conseils municipaux. Quel intérêt ? Quelle pertinence ? Je l’ai rappelé tout à l’heure, vous êtes des bénévoles, ils sont des bénévoles. Donc cette réduction, c’est celle logique qui tire la conséquence de réorganisation voulue dans des contextes où c’est pertinent, pas pour tout le reste et pas pour vous qui êtes des engagés, pas pour les conseils qui sont largement, on le sait, des bénévoles.

Je souhaite par ailleurs que soit engagée avec vous la réflexion indispensable sur le statut de l’élu local pour apporter des réponses concrètes à vos questionnements légitimes sur la responsabilité pénale, sur les protections qui doivent être associées à vos mandats particulièrement exposés. Cela – et ces problématiques sont propres aux maires mais aussi aux exécutifs de toutes les collectivités aujourd’hui –, la loi est arrivée à des aberrations qui, sur le plan financier ou des responsabilités, ne permettront plus demain d’attirer tous les talents et tous les engagés à ces fonctions.

Nous devons l’ouvrir de manière apaisée, responsable, en construisant l’avenir et en ayant une volonté, attirer des gens de talent qui ont envie de servir la République. Nous le ferons dans le cadre de la conférence.

La vitalité démocratique dans notre pays nécessite enfin collectivement que nous engagions en effet un travail pour les mandats nationaux et locaux et une limitation du cumul dans le temps. Vous m’avez mis en porte-à-faux, Monsieur le Président, parce que vous avez dû vous-même, en tant que parlementaire, voter des réformes qui ont conduit à des limitations de mandat dans le temps. Alors ça me met en porte-à-faux parce que ça concerne le président de la République. Et beaucoup qui protestent aujourd’hui – peut-être même, Monsieur le Président du Sénat, que vous avez trempé dans cette affaire –, beaucoup de ceux qui disent : « Un élu, il ne faut pas le limiter dans le temps, ce sont les électeurs qui décideront », eh bien ils étaient d’accord pour limiter celui du Président !

Alors je vous rassure, je ne vais pas ici vous annoncer la fin de la limitation à deux mandats pour le président de la République, ce serait discourtois de ma part et sans doute trop à rebrousse-poil de l’esprit du temps, même si ce n’est pas ce qui, forcément, m’inquiète. Non, l’engagement que j’ai pris durant ma campagne est clair et il a d’ailleurs été déjà traduit dans un texte de loi porté par le garde des Sceaux de l’époque, cher François BAYROU, dans une réforme ambitieuse conduite par la garde des Sceaux actuelle qui vous a succédé mais qui est simple, écrit : « Une limitation du cumul à trois mandats consécutifs pour les maires, les présidents d’intercommunalité, de département et de région. »

Cette limitation s’appliquera à compter du prochain renouvellement des mandats, c’est-à-dire sans tenir compte des mandats précédemment effectués. Toutefois, afin de tenir compte de la spécificité des petites communes, comme c’est inscrit dans le texte et dans l’ensemble des textes constitutionnels organiques et législatifs qui sont passés au Conseil des ministres du mois de juillet dernier, cette réforme ne touche pas les mandats pour les communes de moins de 3 500 habitants. Et donc je suis content d’être applaudi pour une loi qui est déjà passée devant le Conseil des ministres mais il y en aura d’autres qui iront dans ce sens.

Ça veut dire que 90 % des communes de France seront exonérées de cette disposition, que cette disposition, qui est saine pour la vie démocratique, pour les plus importants des exécutifs, commence à partir du moment où elle sera votée, ce qui est bien légitime. Et là aussi, il nous faut agir avec pragmatisme en tenant compte de la diversité des situations locales. La liberté donnée aux acteurs locaux est importante, vous l’avez compris, et c’est cet esprit-là que je veux favoriser.

Enfin, Mesdames et Messieurs les Maires, le troisième combat que j’évoquais, que nous allons mener ensemble, c’est celui des grandes transitions dans lesquelles nous entrons et qui sont l’indispensable condition du succès.

La cohésion territoriale, ce n’est pas rétablir une égalité factice entre tous les territoires qui, chaque jour, sont confrontés à des réalités différentes, Monsieur le Ministre, vous le savez bien, mais c’est avoir des politiques publiques qui permettent justement en même temps la réussite et la solidarité, en même temps la liberté et la protection. Et pour atteindre ces objectifs, je prône une transformation de la relation entre l’Etat et les territoires à travers des grandes politiques publiques que nous devons conduire.

Je me suis exprimé il y a quelques jours à Tourcoing sur la politique de la ville et les ambitions que nous devons porter. C’est la même ambition que nous porterons aussi sur les ruralités – parce qu’il n’y en a pas qu’une – et les défis de l’ensemble des collectivités soumises aux contraintes que vous connaissez bien. Mais pour faire face à cela, nous devons prendre quelques engagements fermes.

Le premier, c’est que l’État doit parler d’une voix et d’une voix cohérente dans le montage de vos projets, que vous n’ayez pas affaire à des guichets avec chacun sa lecture du sujet et je souhaite que les administrations et les opérateurs de l’État, comme de la Caisse des dépôts et consignations, soient mis au service des projets des territoires de manière cohérente. Je veux un Etat facilitateur de vos projets.

C’est précisément le rôle que je veux assigner à l’Agence nationale de la cohésion des territoires dont j’ai annoncé la création lors de la conférence nationale des territoires, reprenant une de vos propositions, être un outil de mobilisation des ressources, de savoir-faire facilitant vos projets. Ça veut dire que l’Etat, tout en gardant les responsabilités ministérielles légitimes, aura une agence unique qui permettra d’ailleurs de simplifier beaucoup les choses et de supprimer beaucoup d’agences ministérielles qui se sont parfois multipliées, dans laquelle on gère ensemble les grandes politiques d’aménagement du territoire pour réduire la fracture numérique, pour réduire les déserts médicaux, pour lutter justement contre les fractures territoriales, pour apporter les garanties ou les prêts qui sont gérés du côté de la Caisse des dépôts et consignations.

Cette action publique aujourd’hui est éclatée entre des guichets et des acteurs divers. Nous avons parfois recréé encore récemment des administrations centrales pour les gérer. Il faut une simplification de l’État à sa tête pour avoir une agence unique. Chaque ministre y portera sa voix, les crédits qu’il y a développés, défendus à l’Assemblée et la cohérence de sa politique, mais cette agence unique permettra une grande simplicité, avec sur le terrain un interlocuteur, le préfet de région et le préfet de département qui, dans l’esprit que j’évoquais à l’instant, aura la responsabilité, un interlocuteur unique du côté central et évitera de passer un temps fou à vous expliquer que telle direction l’a renvoyé à telle autre, telle autre l’a renvoyé à tel autre ministère, ce qui, malheureusement, je le crains, arrive encore.

Sur l’ensemble de ces sujets, il y aura donc une simplification profonde, un engagement profond et une clarté des crédits alloués et une simplification radicale du côté de l’État. Cette agence aura aussi pour vocation d’apporter des compétences en ingénierie territoriale qui seront envoyées sur le terrain là où c’est nécessaire. Vous parliez à juste titre de nos collectivités ultramarines à qui je rendais hommage il y a un instant. J’étais il y a quelques semaines avec plusieurs d’entre vous en Guyane. La grande difficulté pour porter certains projets, c’est l’ingénierie sur place. Cette agence doit les apporter en soutien aux collectivités.

L’Etat doit pouvoir ensuite se consacrer aux territoires les plus en difficultés, comme ceux touchés par la désindustrialisation, avec des stratégies ad hoc pour les centres-villes des villes moyennes, pour résorber les zones blanches, pour justement porter, à travers cette agence unique et cette simplification, des politiques volontaristes.

L’Etat doit aussi être au rendez-vous de vos attentes sur les grandes politiques publiques. Les ministres ont été durant ces derniers jours à vos côtés et je les en remercie parce qu’ils portent, en partenariat avec vous, plusieurs des politiques indispensables de votre quotidien.

Le ministre d’État, ministre de l’Intérieur vous a expliqué l’engagement en termes de moyens de l’État sur la sécurité avec les créations de postes, mais surtout l’esprit dans lequel la police de sécurité du quotidien sera conduite, en partenariat avec les polices municipales et la sécurité privée parce que c’est la condition d’une réussite et donc en concertation étroite avec vous. Je sais les initiatives prises par beaucoup pour sécuriser l’espace public dans le cadre de la prévention du terrorisme ou à l’occasion des grands rassemblements, et là aussi, l’État doit continuer à être à vos côtés et il le sera.

C’est le cas aussi de la politique volontariste que nous menons en matière de lutte contre le réchauffement climatique et le ministre d’État, Nicolas HULOT, était à vos côtés pour expliquer la déclinaison du Plan Climat sur le territoire, l’accompagnement de l’État dans des projets concrets que cette agence viendra accompagner pour mettre justement tous les financements, y compris ceux de la Caisse des dépôts et consignations, à votre disposition le plus rapidement possible en fonction des projets portés.

Le ministre de la Cohésion des Territoires, Jacques MÉZARD, et son secrétaire d’État vous ont présenté l’engagement pris pour résorber la fracture numérique. Je sais combien vous êtes attendus sur ce point, combien nous sommes attendus et je vais être très clair, les engagements qui seront conclus avec les opérateurs d’ici à la fin de l’année seront contraignants, traduits de manière législative et donneront lieu à des sanctions pécuniaires et à la possibilité pour l’État de se substituer à ces opérateurs qui ne joueront pas le jeu.

J’ai pris un engagement en juillet dernier : le bon débit pour tous d’ici mi-2020 et le très haut débit pour tous d’ici mi-2022. Nous pouvons le tenir, nous le tiendrons, mais ça supposer d’aller vers un peu plus de contraintes pour ce sujet.

Pour ce qui est de la politique de l’eau, je n’ignore rien de vos attentes, j’ai entendu plusieurs voix et demandes et là-dessus, je sais combien le problème est complexe. Alors, cher André LAIGNEL, vous avez raison, la carte des nappes phréatiques ne correspond pas à la carte des intercommunalités, c’est vrai. Dans le même temps, l’honnêteté m’oblige à vous dire qu’elle ne correspond pas davantage à la carte communale. Ça l’est tout autant. Ça ne correspond pas davantage à la carte parfois de quatre morceaux dans la même commune. Donc c’est peut-être plus compliqué que ce qu’on croit.

Le Premier ministre vous a présenté une option, celle, comme cela a été fait pour l’urbanisme, de donner la possibilité justement pour une minorité de blocage, de sortir et de revenir à la compétence communale, les 25 %. Et je remercie la ministre GOURAULT d’avoir fait ce travail qui a permis ces concertations et cette voie de sortie. Mais j’entends certains autres qui me disent : « Chez moi, ce n’est pas une bonne idée parce que ce n’est pas au niveau des communes qu’il faut le remettre, c’est au niveau du département déjà ou du bassin d’eau. »

Donc ce sujet nécessite d’être travaillé lors de la conférence nationale des territoires et de trouver, territoire par territoire, la bonne option. Il y a une option de liberté qui est donnée, mais peut-être faut-il non pas revenir à la commune dans certains endroits, mais aller au département, encourager certains regroupements qui étaient déjà en cours, avoir un pragmatisme qui permettra quoi ? De répondre au vrai besoin qui est un besoin d’investissements, mais en tous les cas, de ne pas priver de manière brutale, unilatérale certaines communes pour qui c’est légitime, qui veulent le garder et pour qui c’est l’espace pertinent.

Vous avez ensuite prononcé une ode aux agences de l’eau. Je l’ai entendu et je sais aussi le combat que mène le ministre d’État pour défendre la pertinence de leur mission. Je ne la conteste pas, pas plus que le ministre de l’Action et des Comptes publics qui est ancien de vos collègues à l’esprit pragmatique. Mais qui a-t-on prélevé ? Les agences de l’eau qui n’utilisaient pas tellement l’argent dont elles disposaient pour faire des grands investissements sur les réseaux, mais qui ont aussi avec le temps pour certaines accumulé des bas de laine et des fonds de roulement qui ne se justifiaient parfois plus tellement et qu’il était légitime de remettre au pot commun.

Parce que, qu’est-ce que nous devons faire sur l’eau ? Deux choses simples : remettre à la discussion avec les territoires l’organisation et les compétences juridiques lors de la conférence de décembre ; et la deuxième chose, c’est que nous devons lancer pour l’eau des assises qui permettront justement de regarder, cher Jean LAUNAY, dans le détail comment financer les indispensables investissements sur nos réseaux.

C’est un problème dont on parle trop tôt, mais la vraie crise qu’il y a sur l’eau, c’est la vétusté des réseaux ! C’est la vétusté de certains réseaux qu’on n’arrive pas à remplacer. C’est l’incapacité de certaines communes ou certains territoires à investir. Ce sont les risques sanitaires auxquels nous aurons à faire face demain. C’est le gâchis lié justement aux fuites massives qui existent sur des réseaux devenus trop vétustes. Et donc nous avons sur l’eau le même problème que sur les infrastructures, c’est que nous ne finançons plus les réseaux.

Ces Assises de l’eau, qui seront lancées dans les prochaines semaines et conduites par le ministre d’État, ministre de la Transition, auront pour vocation de répondre de manière interministérielle à ce défi.

J’ai également entendu vos inquiétudes sur le logement. Elles sont légitimes mais le choix du Premier ministre, du ministre de l’Action et des Comptes publics et du ministre de la Cohésion des Territoires l’était tout autant. Ça fait des années, pour ne pas dire des décennies, qu’on dit que la politique du logement fonctionne mal en France. Les mêmes qui aujourd’hui d’ailleurs la défendent sont là aussi ceux qui l’ont souvent dénoncée. Nous dépensons 40 milliards d’euros dans la politique du logement pour avoir 4 millions de mal-logés. Et là aussi, le système fonctionne mal !

Est-ce que tout est parfait dans la réforme lancée par le gouvernement ? Non, moi, j’entends les protestations et il est vrai qu’il y avait d’ailleurs des choses qui devaient être corrigées. Le Premier ministre a engagé un travail important de conciliation qui a justement permis de commencer à corriger certains points, d’améliorer certains éléments et de répondre aux premières préoccupations. Mais il y a aujourd’hui plus de 750 acteurs et les organismes que vous défendez sont d’ores et déjà ceux parfois qui ne peuvent plus construire, là où d’autres ont accumulé également des réserves qu’ils n’utilisent depuis des années absolument pas pour financer de nouveaux logements. Ces inégalités viennent généralement accroître des inégalités territoriales qui existent.

Alors, je ne vais pas vous donner satisfaction en vous disant « on ne va rien faire ». Parce que si je disais ça je trahirais l’engagement que j’ai pris devant nos concitoyens et je pense que nous serions comptables d’une forme de lâcheté. Par contre, nous pouvons rendre cette réforme plus intelligente, plus efficace parce que les bailleurs sociaux sont des partenaires indispensables de l’ambition que nous avons aussi bien pour la ruralité que justement pour la politique des villes et parce que nous avons besoin de restaurer la confiance.

Aussi, j'ai fait mienne la proposition du président du Sénat de réunir une Conférence du consensus sur le logement. Cette concertation devra associer étroitement les collectivités territoriales, monsieur le président du Sénat et les acteurs du logement pour permettre de finaliser un projet de loi sur le logement dès le début de l’année prochaine qui permettra de répondre justement de manière équitable à ce défi. Le ministre en charge des Relations avec le Parlement a longuement travaillé avec les parlementaires sur ce sujet et je l'en remercie, je pense que nous pouvons améliorer les choses et la Conférence nationale des territoires sera aussi une enceinte privilégiée dans ce cadre.

Je souhaite que nous trouvions les bons équilibres entre les économies légitimes et les éléments de taxation, que nous puissions construire des économies là où elles puissent être faites mais en s’engageant à recapitaliser certains bailleurs sociaux avec un engagement de l’Etat ou de la Caisse des dépôts et consignations. Et je veux que cette Conférence de consensus puisse aussi être le lieu de certaines améliorations attendues dans le monde rural, par exemple pour simplifier la loi ALUR qui a conduit à des contraintes sans doute inattendues, en tout cas peu identifiées au départ, et qui empêchent certains élus de construire là où ils le voudraient alors que ça n’a rien à voir avec l’objectif de la loi.

Durant le premier semestre 2018 nous aurons à présenter un texte, Messieurs les Ministres, ambitieux qui conduira à un choc de simplification pour la politique du logement là aussi en simplifiant radicalement les contraintes d'urbanisme, les recours inutiles qui bloquent aujourd’hui la construction et surtout qui en accroissent le coût pour les opérateurs privés comme les opérateurs publics ! Ce projet de loi sera soumis au Parlement au premier semestre prochain suite à cette concertation.

Voilà, Mesdames et Messieurs les Maires, ce que je voulais vous dire, j’avais encore d’autres choses mais je crains que le défi de Shéhérazade ne se trouve confronté au défi de la SNCF et des horaires légitimes de retour vers vos communes et souhaitant éviter de jouer la symphonie des Adieux je préfère ici conclure en vous disant quelque chose simple ?

La première c’est que j’ai décidé d’être un président de la République engagé, vous avez un Premier ministre engagé, vous avez des ministres engagés pas simplement pour venir à des réunions, pour faire.

Le ministre de l’Intérieur quelles que soient ses contraintes par ailleurs, et je l’en remercie, n’a pas compté ses heures et son énergie à chaque fois pour passer du temps avec vous et il continuera à le faire. Parce que nous voulons transformer le pays et nous ne sommes pas là pour faire plaisir en renonçant à faire et donc vous n’aurez jamais dans mes discours des discours de renonciation par complaisance mais vous aurez toujours de la considération et du respect quand il y a des erreurs qui sont faites, quand il y a parfois des choses inachevées, quand il y a parfois des oublis. Parce que je sais que vous aussi vous êtes des élus engagés et j’en ai besoin.

Moi j’attends de vous que vous continuiez à entreprendre, à faire, à innover, à tester, que vous ne cédiez en rien à la morosité ambiante ni à l’esprit de défaite parce que ce qui nous tient là c’est l’esprit de conquête, ce qui vous a conduit à obtenir la confiance de vos concitoyens. Ça n’est pas de dire que tout était fichu, que les contraintes étaient au-delà du raisonnable, c’est parce que vous y croyiez à ce moment-là, c’est parce qu’ils ont cru en vous, c’est parce qu’à un moment ils ont senti cette volonté, cette envie farouche de faire, c’est cette envie farouche de faire que je veux pas simplement récompenser, accompagner, laisser libre parce que c'est cela aussi ce que j'attends du Premier ministre et du gouvernement.

Cet engagement conjoint c’est notre responsabilité commune pour notre pays parce que nous partageons cette responsabilité du moment présent. Ne vous trompez pas, nous ne sommes pas dans des temps normaux, ne vous trompez pas, nous ne reviendrons pas à avant 2010 et il ne faut pas chercher un retour à une normalité qui n’a jamais existé ! Non, nous entrons dans une ère nouvelle où nous voulons garder nos racines, ce qui fait notre force, ce qui tient la France et la République, mais nous voulons le faire en inventant ce siècle nouveau pour pouvoir en décider, pour pouvoir en choisir les règles, pour pouvoir y porter notre ambition et nos valeurs.

Ce combat conjoint c’est le nôtre, Mesdames, Messieurs, c’est celui pour lequel vous me trouverez toujours à vos côtés. Aussi, si vous l’acceptez, Monsieur le Président, Cher François BAROIN, je suis venu à ce centième anniversaire, il est peu probable que je vienne au cent-dixième, au cent-vingtième ou au cent-trentième mais je m’engage à une chose si vous l’acceptez, c’est venir chaque année rendre compte des engagements que je viens de prendre parce que c'est cela l'esprit de responsabilité dans la République.

Voilà ce que je voulais vous dire, Mesdames et Messieurs, Chers Amis, merci pour votre engagement de chaque jour, merci pour votre détermination, merci pour vos colères, merci pour vos indignations parce que je sais que vous ne répercutez parfois qu'un peu de celles que vous subissez, merci pour votre engagement pour la République.

Vive la République et vive la France !

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