26 septembre 2012 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse de M. François Hollande, Président de la République, sur la situation politique au Mali, à New York le 26 septembre 2012.

Mesdames, Messieurs,
Ce matin, cet après-midi pour la France, s'est tenue une réunion très importante sur le Sahel qui a été initié par le Secrétaire général et a mobilisé d'une manière exceptionnelle, les chefs d'Etats et de gouvernements.
Cette réunion, traduisait bien l'inquiétude de la communauté internationale par rapport à ce qui se joue au Sahel. Ce n'est pas seulement une affaire interne au Mali, ce n'est pas simplement une question qui concerne les Etats voisins, mais véritablement une menace sur l'ensemble du monde, dès lors qu'un mouvement terroriste s'est structuré sur une partie d'un territoire, pour la première fois depuis longtemps, avec en plus des trafics de toutes sortes qui alimentent le terrorisme. Trafic de drogues. Trafic d'armes, dont certaines viennent de ce qui s'est produit en Libye il y a quelques mois. Le caractère exceptionnel, ça a été aussi de la part de beaucoup d'intervenants - je reviendrai sur ma propre déclaration - de considérer que le préalable devait être le retour à l'intégrité territoriale du Mali. Si des questions du développement doivent être traitées, et certaines dans l'urgence, notamment la crise alimentaire et la question des réfugiés, il ne peut pas être imaginable de différer la solution de retour à la sécurité au Mali.
Je suis donc intervenu dans ce sens, pour demander une convocation, la plus rapide possible du Conseil de sécurité, pour engager le processus au titre de ce qu'on appelle le chapitre 7 de la charte permettant l'autorisation d'une force de stabilisation qui pourrait être organisé par la CEDEAO et l'Union africaine et dont la France pourrait soutenir le déploiement, sur le plan logistique. Simplement sur le plan logistique, mais c'est le plus que nous pouvons faire, dès lors que c'est aux Africains et aux Africains eux-mêmes d'organiser cette intervention.
Cette résolution du Conseil de sécurité offrirait donc un cadre légal à la mise en uvre d'une telle intervention.
Les autorités maliennes ont longtemps hésité à saisir la Communauté internationale, pour des raisons qui tenaient à la situation politique au Mali et à la volonté qui pouvait être la leur de régler par les autorités maliennes elles-mêmes la question. Le fait même que maintenant, le Président et le Chef du gouvernement aient pu saisir directement la CEDEAO, l'UA et l'ONU, lève le dernier obstacle à l'intervention.
J'ai approuvé la désignation d'un envoyé spécial des Nations Unies pour coordonner, non pas l'intervention, mais l'organisation de l'aide, du soutien et des politiques de développement des Nations Unies dans la région.
Ce qui m'a frappé lors de cette réunion, c'est l'extrême clarté d'un certain nombre de chefs d'Etat et de gouvernement pour appeler la communauté internationale à prendre ses responsabilités. Je ne parle simplement de mon intervention ou de celle de la secrétaire d'Etat américaine, mais des chefs d'Etat ou de gouvernement les plus concernés : le Nigéria, le Sénégal, le Niger se sont pleinement impliqués dans ce processus. Je salue également ce qu'a été la position du président de l'Union africaine et je sais ce qu'est la position du président de la CEDEAO. Voilà, une étape importante peut être franchie ! C'est à dire que cette Assemblée générale des Nations Unies, à travers cet évènement qui avait été convoqué par le Secrétaire général, peut ouvrir un processus de retour à la sécurité dans la région du Sahel et un retour à l'intégrité du Mali.
La France, je le rappelle ici, je le confirme, prendra toutes ses responsabilités tout en laissant aux Africains la capacité, la légitimité de mener cette intervention.
QUESTION - M. le Président, certaines voix pensent que l'intervention est plutôt une question de mois, voire d'un an. Il y a notamment Herman Van ROMPUY qui a parlé d'élections £ certaines personnes disent qu'il faut tenir des élections dans le pays avant une intervention. Est-ce que l'on est en train de parler de semaines, de mois ou d'un an ?
LE PRESIDENT - J'ai moi-même insisté sur le fait que toute perte de temps serait une complication supplémentaire. Qu'il y ait des négociations qui puissent continuer, entre des forces qui veulent prendre leur place dans le Mali de demain, je n'y vois pas de réserve et d'obstacle. Mais il ne peut pas être question de négocier avec des terroristes. Donc il ne peut pas y avoir de délais qui seraient demandés pour trouver des solutions qui ne peuvent pas, par définition, être cherchées avec des forces qui veulent diffuser le terrorisme, non seulement au Mali, mais dans toute la région.
Quant à l'organisation d'élections, souhaitable, nécessaire, elle ne peut intervenir que lorsque le Mali aura retrouvé son intégrité. Comment organiser des élections avec un Nord-Mali occupé par des mouvements terroristes et qui appliquent une loi qui n'est pas celle de la démocratie ? Donc le président VAN ROMPUY, lui, s'est impliqué dans ce qui est la responsabilité de l'Europe et à laquelle la France se joint, c'est-à-dire, le développement, le soutien humanitaire, la question de la crise alimentaire. Je pense qu'il a eu raison d'être dans une perspective de moyen terme. Mais je l'ai dit, le préalable, c'est le retour à l'intégrité du Mali.
QUESTION -- M. Le Président, sur les otages, vous avez justement dit hier, que la nécessité de libérer les otages ne devait pas empêcher le Mali de recouvrer sa souveraineté. Jusqu'où la France est prête à aller de mettre la vie de ses otages en danger ? Ou en est-on ? Ya-t-il des négociations ou pas du tout ? Tout est au point mort ? Où en est-on dans ce dossier ?
LE PRESIDENT -- Sur les otages, la discrétion est sans doute la plus sage des précautions. J'ai reçu les familles des otages, il y a maintenant plusieurs jours et déjà l'idée d'une intervention de la communauté internationale était dans tous les esprits. J'ai rappelé que la France ferait tout pour la libération de ses ressortissants. Dans cette vidéo qui avait été diffusée dans des conditions que l'on sait, il y avait visiblement l'appel à des contacts. Nous utiliserons tous les contacts possibles mais nous ne pouvons pas conditionner notre position par rapport au Nord-Mali, par rapport à la question des otages. C'est finalement deux objectifs que nous devons poursuivre. Premier objectif : Obtenir leur libération. Cela fait maintenant deux ans que les quatre, ceux d'Arlit sont détenus. Il y en a deux autres, je le rappelle qui ont été également capturés, cela va bientôt faire deux ans. Je recevrai également les familles. Cela est le premier objectif et le second objectif : Celui que la communauté internationale, je ne dis pas la France, la communauté internationale, doit décider à travers une résolution du Conseil de sécurité.
QUESTION -- M. le président on imagine que le Conseil de sécurité va donner son feu vert avec cette résolution à une intervention africaine alors après on va rentrer dans une période qui risque d'être très longue, c'est qui aller au Mali ? Quelles sont les armées de la CEDEAO, de l'Union africaine qui peuvent aller au Mali et cette force combien de soldats doit-elle avoir ? Et est-ce que vous pensez qu'il y a des contingents africains qui sont capables, qui ont la force d'aller au Mali, la capacité de s'y engager dans cette force ?
LE PRESIDENT -- La CEDEAO commence à réfléchir avant même que la résolution du Conseil de sécurité n'ait été votée. Il y a des pays qui ne sont pas membres de la CEDEAO qui pourraient également ajouter des contingents, le Tchad notamment. Il ne peut pas être question d'une intervention si elle n'est pas dotée de moyens suffisants. Donc, c'est aux Africains de la préparer et à la communaut?? internationale dont la France, de favoriser sur le plan logistique cette intervention, mais je dis bien c'est d'abord aux Africains.
Tout à l'heure la question m'a été posée : quel délai ? Vous vous me dites : quelle force ? Et c'est la même question. A partir de quel niveau de mobilisation peut-on espérer une intervention rapide ? C'est ce que nous allons faire dans les prochaines semaines parce que je pense que ça ne doit pas être dans les prochains mois.
QUESTION -- Vous disiez hier lors de la conférence de presse que vous n'aviez pas l'intention de rester aux Etats-Unis, vous allez donc rentrer en France. Vous disiez également qu'il y avait urgence à agir sur la scène internationale. N'y a-t-il pas également urgence à agir dans notre pays. Les plans sociaux s'accumulent, le chômage explose, il y a des tensions dans votre majorité. Comment vous appréhendez ces évènements et notamment la présentation du projet de loi budget 2013 vendredi en Conseil des ministres ?
LE PRESIDENT -- Ma responsabilité, c'est de défendre les positions de la France et c'est de préparer la France à relever ses défis. Venant ici, à l'Assemblée générale des Nations Unies, je viens porter des valeurs, des principes mais également permettre que nous puissions régler un certain nombre d'urgences et notamment le Sahel. J'avais évoqué hier la Syrie et l'Iran mais aussi la question du développement à travers les financements innovants, un thème très important que je vais continuer inlassablement et pas simplement au nom de la France mais avec l'Europe à évoquer dans les instances internationales.
Sur le chômage, j'aurai l'occasion de m'exprimer, je l'ai déjà fait. Nous avons 3 millions de chômeurs dans notre pays. Ils ne sont pas venus depuis 4 mois, ils sont là, c'est une situation dont nous héritons et nous allons tout faire, le gouvernement de Jean-Marc AYRAULT et moi-même pour endiguer puis ensuite faire reculer le chômage, mais j'aurai à m'exprimer en France. Je rentre cet après-midi donc dès jeudi matin et sans que je n'ai été coupé du gouvernement et des responsables qui ont vocation à agir, j'aurai à préparer la communication qui sera faite sur le budget avec une présentation du projet de loi de finances sur lequel nous avons travaillé ces dernières semaines.
La question a été posée. Je vous remercie beaucoup de nous avoir accompagnés dans ce déplacement et nous aurons donc à nous revoir très rapidement.