Pape Diouf, l’ancien président de l’Olympique de Marseille de 2005 à 2009 qui avait remis l’équipe de la cité phocéenne sur les chemins de la victoire, a été emporté par le coronavirus.

Journaliste sportif, agent de joueurs, président de l’OM, puis candidat à la Mairie de Marseille, il aura eu mille vies toutes traversées avec une volonté de fer et une énergie de feu. 

Né au Tchad, ce fils d’un ancien combattant de la Libération grandit au Sénégal, puis en Mauritanie avant de revenir à Dakar. Mais – était-ce ces pérégrinations et ces arrachements successifs ? – sa scolarité fut erratique. C’est dans l’espoir qu’il s’engage dans l’Armée, comme lui jadis, son père l’envoie en France. Il n’a pas 18 ans lorsqu’il accoste à Marseille. De là, il doit se rendre à l’école militaire d’Avignon, mais il n’ira pas jusqu’au bout du chemin. Et sa halte marseillaise deviendra un terminus, sa destination ou plutôt son destin. 

Le jeune Pape fréquente le quartier Belsunce, assiste bouleversé à son premier match de l’OM, celui de Skoblar, de Magnusson, de Loubet, de Maya et du titre de champion de France de 1971 : il apprivoise le club de son cœur et la ville de sa vie. 

En 1975, il s’immisce dans les colonnes du journal La Marseillaise par l’entremise d’un ami, et en devient vite un pilier. D’abord affecté aux résultats sportifs, puis correcteur, il gagne ses galons de journaliste. Préposé au suivi de l’OM, il observe aux avant-postes ce club qui va devenir le sien. Avec son amour du football et sa passion des mots, il n’a pas son pareil pour mettre de belles images sur de belles actions et pour restituer le souffle épique des grands matchs. De sorte qu’en 1987, lorsque le quotidien Le Sport est lancé et tente de faire trembler l’hégémonie de L’Equipe sur le terrain de l’information sportive, Pape Diouf fait partie des appelés. Mais le journal fait long feu : un an après son départ sur les chapeaux de roue, l’aventure s’arrête net.

Cependant, un joueur, le gardien camerounais Joseph-Antoine Bell, fait bifurquer la trajectoire de Pape Diouf en lui demandant de devenir son agent. Il devient alors l’un des maestros de cet art délicat, capable d’orchestrer simultanément la carrière de 70 joueurs, parmi les plus talentueux de cette génération. Dans les rangs de ses protégés, on compte des champions du monde de 1998 – Bernard Lama, Marcel Desailly, mais aussi Abedi Pelé, Samir Nasri, Didier Drogba ou encore Grégory Coupet. A tous, il prodiguait à foison non seulement ses conseils, mais aussi sa tendresse, et quelques grands morceaux de littérature qu’il récitait le cœur aux lèvres. Pour Pape Diouf, ses joueurs étaient comme des fils. Eux l’aimaient comme un père. 

En 2004, alors que tous les Marseillais rêvent d’un exploit en coupe UEFA onze ans après le coup de tête victorieux de Basile Boli à Munich, l’Olympique de Marseille veut s’attacher les lumières de cette étoile montante et l’appelle comme manager de l’équipe avant de lui confier les rênes du club l’année suivante. Sa popularité dépasse bientôt le cercle des joueurs et l’enceinte des stades : il est aimé partout, à Marseille, dans toute la France, jusque dans les équipes concurrentes, et en Afrique. Sous sa direction, les Phocéens collectionnent les places sur le podium du championnat, de bons résultats en coupe d’Europe et deux finales de Coupe de France. 

Pape Diouf, qui fut le premier président noir d’un club de football européen, et le seul à ce jour, n’oubliait jamais de mener hors des stades d’autres combats qui lui tenaient à cœur, pourfendant notamment le racisme dans le sport comme dans la société. Après avoir rempli sa mission à l’OM, il reprit la plume, devint expert de paris sportifs, participa à l’ouverture d’une école de communication et de journalisme à Marseille, ville chérie qu’il voulait servir encore et toujours au point de se porter candidat à sa mairie en 2014.

Le Président de la République salue un géant du journalisme sportif, un grand dirigeant de club et une haute figure de Marseille, de la France et du Sénégal. Il adresse à sa famille et ses proches, aux Marseillais et aux supporters de l’Olympique de Marseille ses condoléances attristées.

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