Fait partie du dossier : L'écologie, combat du siècle.

(Re)voir la présentation du Contrat de Transition écologique de la Communauté (CTE) d’Agglomération de Pau :

14 janvier 2020 - Seul le prononcé fait foi

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Allocution du Président de la République à l’occasion de la signature du Contrat de Transition Ecologique (CTE) de la communauté d’agglomération de Pau.

Merci Madame la ministre. 
Monsieur le maire, cher François, 
Mesdames, Messieurs les élus, 
Mesdames, Messieurs. 

D'abord, je suis très heureux d'être parmi vous aujourd'hui. Vous l'avez dit tout à l'heure, Monsieur le maire, il y a évidemment le sceau de l'amitié, il y avait aussi l'hommage rendu à nos soldats. Et si Pau avait été choisi pour le sommet hier, c'est aussi parce que le régiment que vous abritez, le 5ème RHC avait payé le prix du sang dans le combat que nous menons contre le terrorisme au Sahel, et donc hommage devait être rendu, a été rendu par l'ensemble des chefs d'État présents après la cérémonie que nous avions tenue aux Invalides au mois de décembre. Vous l'avez dit avec cette volonté de ne pas céder et de porter, cet esprit de résistance à ces terres et cher à notre pays et qui, je crois, est au cœur de ce que nous portons à l'international et sur beaucoup de sujets, et ce dont vous venez de parler relève en effet de la même philosophie. 

Beaucoup cèdent sur le sujet de l'écologie : les uns au catastrophisme, les autres à l'immobilisme. Et il est souvent dit : on est pris entre ces deux camps qui, en quelque sorte, ont établi leurs deux cadres de référence, comme diraient certains, et il y a une vérité bien établie dans le monde, tout ça est un faux problème « le changement climatique n'est pas une vérité, la biodiversité, finalement, nul ne sait dire si vraiment elle est atteinte ». Et donc le mieux, ce serait de ne pas changer parce que c'est ce qui crée le plus d'emplois. On fait comme ça depuis tant de décennies. De l'autre côté, il y a un discours qui aussi s'installe, qui consiste à nous dire : on est déjà foutu. Tout est fini et on n'ira pas assez vite et il faudrait en fait complètement changer de modèle, renoncer à l'économie de marché, à l'ouverture, à ce qui a porté nos sociétés depuis des décennies, si on voulait véritablement répondre au défi climatique. 

Là aussi, je pense qu'il y a, je n'ose dire sur ses terres, une voie médiane - tout au moins un chemin de crête, comme il en existe dans nos Pyrénées, qui sont juste derrière nous, qui permet précisément de traverser et de franchir ce qui paraît infranchissable. Et qui consiste à regarder le problème en face et à regarder comment on peut changer nos comportements en redonnant une place à chacun. Nos défis sont simples : nous devons réduire les émissions de CO2 et tout ce qui conduit justement à produire davantage ces émissions. Ce qui veut dire : produire de l'électricité qui dépende moins, en effet, du charbon, du gaz traditionnel, ça, c'est la production du mix électrique, avec plutôt un avantage dans le modèle français, c'est que nous avons une dominante du nucléaire - mais on doit encore faire beaucoup plus sur le renouvelable. C'est ensuite émettre moins de CO2 quand on se déplace, et donc utiliser moins là aussi d'hydrocarbures pour se déplacer avec des nouvelles mobilités, comme on dit, c'est-à-dire des véhicules équipés différemment ou des transports collectifs différents, soit en allant vers des modes plus hybrides, soit en réduisant la consommation d'énergie et en développement des transports urbains ou électriques ou hydrogènes et avec la capacité à développer les infrastructures qui permettent, comme vous l'avez parfaitement dit, d'aller vers là aussi mobilité plus propre. 

C'est ensuite comment on produit dans nos entreprises en émettant moins de CO2. De la même manière, en changeant les habitudes. Vous avez été plusieurs à le décrire aussi. C'est comment se loger en consommant moins d'énergie et ce faisant, en émettant moins de CO2 aussi. Et puis, face au défi de la biodiversité, c'est comment produire en préservant les espèces, en luttant contre l'artificialisation des sols, et donc comment réussir ce défi qui consiste à préserver ou reconstituer de la biodiversité en continuant à avoir une vie équilibrée et en nous alimentant sainement. Parce que quand on entend parler de circuits courts, ce sont deux problèmes qu'on traite, la capacité à recréer ou entretenir la biodiversité sur notre territoire, mais à réduire le bilan carbone de notre alimentation. Parce que plus on importe de loin, plus on se nourrit avec un bilan carbone qui est dégradé. Ça, c'est les grands problèmes ainsi posés. 

Cette voie, ce chemin de crête, il passe sur certains de ces sujets des politiques internationales et européennes. Si on veut garder des industries compétitives, il faut emmener tout le monde vers une industrie plus décarbonée. C'est le combat que nous menons à l'Europe. C'est ce que nous avons mené dans le cadre des élections européennes, et c'est ce qui a été repris par la Commission actuelle avec ce qu'on a appelé le plan vert, ce green deal où on dit : "on va augmenter le prix du carbone, on va mettre un mécanisme d'ajustement aux frontières", ce qui veut dire, toutes celles et ceux qui polluent en produisant, ça va leur coûter plus cher. Et on va compenser aussi tout ce qu'on apporte en faisant payer le prix du carbone importé quand il vient de Chine, d'Inde ou d'ailleurs. C'est d'avoir une politique agricole commune qui défend notre modèle agricole raisonné, la souveraineté alimentaire européenne et en même temps l'aide dans ces transitions. Ça, c'est ce qu'on peut faire au niveau européen. 

Il y a ce qu'on fait ensuite au niveau national, fermer les centrales à charbon. La ministre, dans le cadre d'ailleurs d'un de ses contrats l'a fait il y a quelques jours au Havre. On en a plusieurs. On va toutes les fermer d'ici 2022. Et donc, transformer les choses, aller vers la prime à la conversion pour les véhicules, au changement de chaudières pour les particuliers, les systèmes de rénovation thermique etc... Et puis, la manière, à mes yeux la plus efficace, c'est de faire que chacun soit acteur de cette transformation. Parce que quand on est face justement à une montagne comme celle-ci, les grands plans fonctionnent assez rarement. Et on ne peut pas faire les téléphériques pour franchir chaque vallée. Le chemin de crête marche mieux. 

C'est exactement l'idée de ces contrats de transition, on a commencé à les expérimenter en 2018 avec un peu plus d'une quinzaine. On les généralise progressivement et on est maintenant, comme le ministre l'a dit, à 80. C'est ce que vous venez formidablement d'illustrer. Et vous avez, par vos prises de parole et les projets qui sont ainsi articulés, parfaitement illustré la manière de répondre à tous les grands défis que je viens d'exposer. 
Par vos projets, on va réduire l'artificialisation des sols, ce qui est l'un des grands défis en matière de biodiversité, et produire davantage d'alimentation de plus près, donnant des perspectives à nos agriculteurs et permettant de réduire le coût carbone. Par la reconversion des friches, on aide aussi à ne pas artificialisés de nouveaux sols. D'abord, on fait du beau et on évite d'aller conquérir pour faire de l'activité économique des territoires qui étaient donnés à la nature ou à l'agriculture. 

Par la capacité à développer le solaire et l'hydro, on a deux réserves formidables de ce qui est un modèle français du renouvelable. Et je le dis en toute amitié parce que soyons lucides là aussi, la capacité à développer massivement de l'éolien, pour être lucide, elle est réduite. Peut-être des porteurs, on pourra le faire là où il y a du consensus, mais le consensus sur l'éolien est en train de nettement s'affaiblir dans notre pays. Il y a l'éolien offshore qu'on a développé et relancé très fortement, mais de plus en plus de gens ne veulent plus voir d'éolien près de chez eux. Ils considèrent que leur paysage est dégradé, ils ne veulent plus avoir de l’éolien qui s’installe. Je regarde les choses comme vous telles qu’elles se passent sur le territoire. On ne peut pas l’imposer d’en haut. Le solaire et l’hydro ce sont pour l’hydroélectrique le modèle français qu’on peut encore développer en étant respectueux de la nature, des écosystèmes à la fois en effet des réserves piscicoles et des équilibres des écosystèmes. Et le solaire est un levier formidable de création d’énergies renouvelables en particulier sur beaucoup de nos friches. Et lorsque j’ai demandé au Gouvernement il y a l’idée aussi de reconvertir beaucoup de friches militaires que nous avons en mettant du solaire. 

Nous avons la capacité de recréer aussi une filière, je suis ici devant plusieurs acteurs, parce qu’on a raté la bataille au niveau européen, on a été idiot il y a quelques années en laissant beaucoup aux chinois mais on peut recréer du solaire de plus grande qualité avec des capteurs, de la vraie technologie en reproduisant chez nous. La mobilité elle se développera par les infrastructures, c’est les bornes électriques qui sont dans le grand plan national, les bornes en effet de GNL et la capacité à développer. Simplement là aussi il y a les grands plans nationaux mais il y a la confiance que les acteurs se font sur un territoire quand ils partent sur un projet commun. 
Si on veut réussir tout cela il y a aussi la capacité à moins produire d’énergies gaspillées et à réussir à réutiliser l’énergie perdue comme les matériaux perdus. C’est en ça qu’au coœur de cette lutte contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité il y a la bataille pour l’économie circulaire. Une loi vient aujourd’hui de passer mais ce que vous avez démontré dans le secteur du bâtiment est admirable. L’un des leviers que nous avons en effet c’est par le bâtiment, c’est un coût pour les acteurs du bâtiment, c’est un coût pour les communes. Je ne vais pas parler ici du sujet des décharges, il y a trop de maires qui pourraient l’enseigner mais on sait très bien que c’est pour nos collectivités locales un véritable défi parce que cela vient à la charge de la collectivité et c’est un vrai problème. 

La solution est dans l’innovation locale, elle est dans la capacité à créer comme vous l’avez admirablement démontré ces réseaux d’économie circulaire qui permettent justement d’avoir une vraie solidarité entre les acteurs, de dépenser moins, de réutiliser et de le faire aussi avec une vocation sociale parfaitement démontrée. Et le projet que vous avez décrit à la fois agricole et de lutte contre l’artificialisation des sols est l’illustration de tout cela. Ce contrat territorial que vous venez de décrire et qu’on va signer permet de résoudre l’intégralité des défis que j’évoquais tout à l’heure et évidemment la mobilité collective à hydrogène s’inscrit pleinement dans ces solutions. 

Elle permet de favoriser la mobilité collective pour se substituer à l’utilisation systématique de la voiture qui est plus polluante. Et elle permet de le faire avec ce qui est aujourd’hui un mode pertinent pour le transport collectif, on l’a vu aussi à Biarritz avec les vélos qui ont eu un grand succès et qui ont été repris d’autres grands projets internationaux. Et là aussi ça fait partie des formes de mobilité qu’on développera. Il y a l’hybride, il y a l’électrique, il faut laisser la place à l’hydrogène. 

Ce que je voudrais vous faire toucher du doigt et pour conclure c’est que face à ce défi extraordinaire qui peut être formidablement anxiogène qu’est la lutte contre le réchauffement climatique et pour la biodiversité, deux combats qui sont jumeaux, il y a cette voie médiane qui n’est ni l’immobilisme ni le catastrophisme, qui est encore un peu de cet esprit d’ambition et de résistance qui est de se dire nous avons la solution dans nos mains si on décide de se mettre ensemble. Elle existe à l’international, à l’européen, au national mais elle a une force et une capacité d’entrainement encore plus probante si elle se construit localement. D’abord parce qu’elle répond aux réalités du territoire : la réalité humaine, la réalité politique, la réalité économique et associative parce que ce sont les acteurs qui justement connaissent les territoires, leur réalité, parfois leurs contraintes mais aussi leurs atouts. Et vous vous êtes appuyés à chaque fois sur l’histoire des territoires et les atouts justement de ce territoire béarnais qui nous est cher et en plus de ce mariage au-delà du Béarn avec je dirais avec des partenariats bigourdans qui me sont aussi chers. Mais nos deux pics sont réconciliés derrière nous, surtout il y a derrière ça la démonstration de ce qui est pour moi le plus important dans cette révolution écologique qu’on mène ; chacune et chacun en est acteur. 

Ce n’est pas l’Etat qui fera le changement, ce n’est pas vrai, parce que la solution n’est pas, en tout cas, je reste prudent, il ne me semble pas qu’elle soit dans une taxe. J’ai payé pour voir. Elle n’est pas dans de règlements qui tombent d’en haut, parce que les territoires sont différents, les acteurs fonctionnent différemment. Elle est dans la capacité à ce que chacun, en quelque sorte, s’approprie sa part de solution, et ce faisant se vive comme une part de la solution. Nos concitoyens sont fiers de mener leur part de transition écologique, environnementale et de lutte pour la biodiversité, et je crois que c’est aussi une révolution citoyenne à cet égard. C’est pour ça que je crois beaucoup à ces contrats de transition. 

Voilà ce que je voulais vous dire, il n’y a pas de fatalité. Je ressors de cette matinée avant d’aller visiter le Fébus avec vous, plein d’un optimisme réel. Nous sommes en train de voir cette transformation au concret et nous sommes en train de voir qu’elle donne une place, un avenir ici même à des dizaines de milliers de nos citoyens en redessinant des perspectives, à nos agriculteurs, à nos artisans, à nos élus, à de nombreuses associations, et en laissant une place à chaque citoyen. 

C’est un projet qui est au coeur de la République, et je crois que c’est ça, dans les prochains mois, qu’il faut continuer à élaborer et dont il nous faut convaincre tous nos concitoyens parce que c’est un formidable vecteur d’espoir, parce qu’à l’esprit de résistance, j’allie toujours cette espérance à laquelle je crois. 

Le chemin, parfois, est difficultueux, mais quand on a passé un col, la vue est belle. 

Je crois que c’est ce qui nous attend. 

Merci pour cela, et vous m’aurez toujours à vos côtés.
 

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