Le 22 janvier 2019, le Président de la République française, Emmanuel MACRON, et la Chancelière de la République fédérale d'Allemagne, Angela MERKEL, ont signé un nouveau traité de coopération et d'intégration franco-allemand. La cérémonie de signature aura lieu dans la salle du couronnement de l'hôtel de ville d'Aix-la-Chapelle.

Le traité d’Aix-la-Chapelle s’appuie sur le socle fondateur du Traité de l’Élysée de 1963, qui a largement contribué à la réconciliation historique entre la France et l’Allemagne, pour viser un nouvel objectif de convergence accrue entre la France et l’Allemagne et préparer les deux pays aux défis auxquels ils sont confrontés au XXIe siècle.

Le traité d'Aix-la-Chapelle renforce les liens déjà étroits entre l'Allemagne et la France, notamment dans les domaines de la politique économique, de la politique étrangère et de sécurité, de l'éducation et de la culture, de la recherche et de la technologie, du climat et de l'environnement, ainsi qu’en matière de coopération entre les régions frontalières et entre les sociétés civiles. Les deux pays visent ainsi à approfondir leur engagement commun en faveur de la sécurité et de la prospérité de leurs citoyens, dans le cadre d’une Europe plus souveraine, unie et démocratique.

Retrouvez le discours d'Emmanuel Macron :

22 janvier 2019 - Seul le prononcé fait foi

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Retranscription du discours du Président de la République à Aix la chapelle

Madame la Chancelière de la République fédérale, chère Angela MERKEL,
Monsieur le maire d’Aix-la-Chapelle,
Monsieur le ministre-président du Land de Rhénanie-Nord-Westphalie,
Monsieur le président de la Roumanie,
Monsieur le président du Conseil européen,
Monsieur le président de la Commission européenne, chers amis,
Monsieur le président du Sénat,
Monsieur le président de l’Assemblée nationale,
Monsieur le président du Bundesrat,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,
Mesdames et Messieurs les ministres,
Monsieur le président de la Cour constitutionnelle fédérale,
Mesdames et Messieurs les ministres-présidents, présidents de région, de conseils départementaux, Mesdames et Messieurs les maires,
Mesdames et Messieurs les ambassadeurs,

Chers amis,

Lorsque Konrad ADENAUER et le Général DE GAULLE signèrent en janvier 1963 le Traité de l’Elysée, ils scellèrent une réconciliation entre nos deux pays, préparée et cimentée dès la sortie de la guerre. Ils allaient à l’encontre de tout ce qui, naturellement, les auraient conduits à nouveau à la division.

Aujourd’hui cette réconciliation est actée, elle est une évidence et nous sous-estimons sans doute parfois la puissance de ce miracle historique pour nos deux pays, comme pour l’Europe. Nous avons depuis franchi tant d’étapes. Nous avons appris à regarder nos histoires en face.

En 2018, du Hartmannswillerkopf à l’Arc de Triomphe, de la clairière de Rethondes au Bundestag, nous avons pu faire mémoire de nos luttes fratricides d’hier parce que notre amitié d’aujourd’hui est plus forte. Et je veux dire ici à mon tour ma reconnaissance à l’égard des responsables de nos deux pays qui nous ont précédés, ma reconnaissance à l’égard de l’ensemble des responsables politiques qui pendant tant de décennies ont construit sur le terrain, pas à pas, les liens entre nos régions, nos villes, ma reconnaissance à l’égard de tous ceux qui ont rapproché durant ces décennies nos sociétés civiles et nos jeunesses pour faire aujourd’hui ce qui alors semblait impossible.

Cette amitié s’est fortifiée depuis 1963, même quand le vent de l’histoire venait bousculer les lignes. Et je veux rendre un hommage particulier au Chancelier ADENAUER et au Général DE GAULLE : ce qu’ils ont accompli est unique et je crois qu’ils auraient été fiers et émus que, 56 ans plus tard, leur traité vive et demeure, que notre amitié se soit élargie à l’Europe entière, enfin réunie, et que nous trouvions la force, envers et contre tout, d’écrire ensemble une nouvelle page.

Je veux saluer aussi ici l’engagement de la Chancelière Angela MERKEL qui n’a jamais cessé de se tenir aux côtés de la France et qui n’a jamais cessé de se tenir aux côtés de l’Europe. Depuis que je suis président de la République, trois choix européens nous ont constamment guidés, je crois pouvoir le dire, l’un l’autre : ne jamais céder à la confrontation mais toujours nous parler en vérité et sans tabou, renforcer toujours le socle franco-allemand qui reste indispensable à une Europe bousculée, comme nous le faisons aujourd’hui, et élargir notre action à l’ensemble de nos partenaires de l’Union. Car aucun succès européen ne peut se construire dans l’isolement, seul ou même à deux. C’est pour cela que ce traité aujourd’hui est essentiel, et c’est pour cela que votre présence, Messieurs les présidents des institutions européennes, cher Jean-Claude, cher Donald, cher Klaus, est bien plus qu’un symbole.

Entre l’Allemagne et la France, c’est aujourd’hui par ce traité d’Aix-la-Chapelle un nouveau chapitre qui s’ouvre. Sur les fondations de la réconciliation nous construisons une nouvelle étape. Au moment où notre Europe est menacée par les nationalismes qui se développent en son sein, où notre Europe est bousculée par un Brexit douloureux, où notre Europe est inquiète des grands changements internationaux, qui dépassent largement l’échelle des nations, le climat, le numérique, le terrorisme, l’immigration, des chocs qui percutent souvent, d’ailleurs, le modèle européen, et interrogent notre identité, dans ce monde et cette Europe, l’Allemagne et la France doivent assumer leurs responsabilités et montrer la voie. La voie de l’ambition et de la souveraineté réelle, et de la protection des peuples. Elles doivent, en particulier, montrer combien des nations adultes, vivant en paix, soucieuses de l’avenir des peuples, gagnent à converger dans des domaines qui rendent plus fortes, et finalement, plus indépendantes, nos nations et notre continent. Parce qu’au fond, la menace aujourd’hui ne vient plus du voisin. Elle vient de l’extérieur de l’Europe et de l’intérieur de nos sociétés, si nous ne sommes pas capables de répondre à la colère qui gronde.

C’est par la convergence ambitieuse de nos règles sociales, de nos politiques d’innovation, de nos normes, de notre défense, de notre culture stratégique, par ce nouveau rapprochement de nos citoyens, de nos jeunes, de nos cultures, de nos collectivités, par l’affirmation d’une nouvelle solidarité face à ces menaces, que nous pourrons exercer ensemble cette nouvelle responsabilité franco-allemande pour l’Europe.

Vous venez de décrire ce traité, Madame la Chancelière. Beaucoup de ce qui est inscrit là semblait impossible il y a encore quelques années. La solidarité en matière de défense, que nous actons entre nous, est unique. Elle vient conjurer des décennies de division. Elle porte un projet de protection et de défense. Ce que nous portons en matière de culture, d’éducation, d’innovation, c’est notre capacité à préparer nos peuples face à toutes ces menaces, tous ces défis, pour pouvoir porter une part de l’ambition du monde. Ce que nous actons, en matière de convergence économique et sociale, c’est le rapprochement progressif de nos sociétés, de ce qui, depuis trop d’années, bien souvent, diverge. Ce que nous actons, c’est le rapprochement de régions frontalières, de la création d’une dynamique nouvelle, qui correspond à la réalité vécue au quotidien par tant de nos concitoyens. C’est par les symboles comme par les gestes du quotidien, en facilitant la vie des dizaines de milliers de frontaliers, qui habitent d’un côté et travaillent de l’autre, que nous construisons aussi cette unité.

Unité, solidarité, cohésion, ce sont les maîtres-mots du traité que nous signons. L’Europe ne survivra pas à une désunion, elle en mourrait. La nouvelle responsabilité franco-allemande pour l’Europe est bien là. Lui donner les instruments de sa souveraineté en matière de défense, de sécurité ou d’accès à l’espace, en matière migratoire face aux transitions écologiques et numériques.

Les conflits entre la France et l’Allemagne ont mis le monde à feu et à sang, et il était de notre devoir d’y mettre un terme définitif. C’est chose faite. Notre ambition commune, désormais, doit être que l’Europe soit le bouclier de nos peuples contre les nouveaux tumultes du monde. C’est cela, notre défi contemporain. Ce sont ces nouvelles protections, c’est notre capacité à enfin expliquer, montrer et démontrer que l’amitié entre l’Allemagne et la France, que nos projets communs, que notre ambition pour l’Europe est ce qui protège vraiment et ce qui permet vraiment de retrouver le contrôle de nos vies, et de construire nos destins librement choisis dans le monde qui s’ouvre.

Et ceux qui oublient la valeur de la réconciliation franco-allemande se rendent complices des crimes du passé. Ceux qui caricaturent ou répandent le mensonge font mal à notre histoire et à nos peuples qu'ils prétendent défendre en voulant faire bégayer nos histoires. Je préfère regarder en face notre Europe. Elle va mal, parfois. Nous n'allons pas assez vite de temps en temps. Mais regardez aussi tout ce que nous avons accompli durant ces décennies passées, tout ce que nous avons encore accompli durant ces derniers mois et tout ce qui nous attend. Et je préfère regarder en face notre Europe qui tient bon, que nous devons chaque jour renforcer au-delà de l'étape que nous franchissons aujourd'hui, parce qu'il faudra peupler les mots de ce jour d'actes qui viendront demain, mais aussi parce que le monde et chacun de nos citoyens en a besoin, est de plus en plus incertain et appelle une réponse de plus en plus forte.

Oui, je préfère avec vous, tous ensemble, regarder cette Europe qui avance, que nous construisons avec ambition, avec force, et qui se bâtit aussi sur cette amitié solide, sur nos nouvelles convergences et sur cette ambition nouvelle que nous actons aujourd'hui.

Mesdames et messieurs, chers amis, nous aimons nos patries avec force, et parce que nous les aimons, nous ne voulons pas chérir ce qui les a parfois meurtries : la haine de l'autre, le ressentiment morbide, l'oubli de ce que nos cultures se sont mutuellement constamment apportées. Oui, nous aimons nos patries et nous aimons l'Europe, parce que nous savons qu'elles sont profondément, irrémédiablement inséparables. Et Madame la Chancelière, chère Angela, vous le disiez : nous sommes ici dans ce lieu qui symbolise les racines profondes de cette Europe qui nous a faite, et étant là, nous retrouvons le cœur vibrant de cette histoire qui s'est comme constamment répétée. Mais ce que, depuis 70 ans, nous avons inventé, est unique. Ça n'est pas ni l'histoire romaine, ni l'histoire carolingienne, ni tant de rêves d'empire qui nous ont parfois réunis sous la domination ou la dépendance l'un de l'autre. Non, c'est un projet nouveau, sans hégémonie, profondément démocratique, c'est une invention que nous avons conçue ensemble, celle d'un projet librement consenti, choisi, chaque jour réinventé, où l'un ne décide pas pour l'autre ni pour les autres mais où tous les membres, constamment, choisissent ensemble pour eux-mêmes. Notre Europe n'est pas un nouveau rêve d'empire. C'est un projet démocratique d'un souffle nouveau, et c'est cela, ce que nous célébrons aujourd'hui. Et dans cette ville de Charlemagne, ce que nous célébrons, c'est au fond, passant d'une langue à l'autre, passant d'un rêve à l'autre, le fait que, sachant toutes nos différences, nous savons à chaque instant ce que la différence de l'autre nous apporte.

Et en vous écoutant, Madame la Chancelière, Monsieur le Président, à l'instant, je me souvenais avec émotion de ce que Madame de Staël disait parfois : « Lorsque mon cœur cherche un mot en français et qu'il ne le trouve pas, je vais parfois le chercher dans la langue allemande. » Il y a des mots qu'on ne comprend pas, il y a des mots qu'on ne traduit pas, mais chacun de nos pas réduit l'écart de ces intraduisibles, et il y a des mots dont nos cœurs ont besoin, d'une langue l'autre. Parce que cette part d'incompréhensible nous rapproche. Parce que la part que je ne comprends pas en allemand a un charme romantique que le français, parfois, ne m'apporte plus. C'est indicible, c'est irrationnel, mais nous devons chérir cette part d'indicible et d'irrationnel qui ne sera dans aucun de nos traités, et qui est la part vibrante, magique, de ce qui nous rassemble aujourd'hui et de ce qui nous fait. Alors, oui, nous aimons nos patries, nous aimons notre amitié même et ce qui nous unit, et nous aimons l'Europe, et parce que nous l'aimons, nous avons décidé de continuer à la faire, avec force, avec enthousiasme, avec détermination.

Vive notre amitié, et vive l'Europe.

L'intégralité du traité :

22 janvier 2019

Traité entre la République française et la République fédérale d’Allemagne sur la coopération et l’intégration franco-allemandes

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La République française et la République fédérale d’Allemagne,

Reconnaissant le succès historique de la réconciliation entre les peuples français et allemand à laquelle le Traité du 22 janvier 1963 entre la République française et la République fédérale d’Allemagne sur la coopération franco-allemande a apporté une contribution exceptionnelle et dont est né un réseau sans précédent de relations bilatérales entre leurs sociétés civiles et leurs pouvoirs publics à tous les niveaux,

Convaincues que le temps est venu d’élever leurs relations bilatérales à un niveau supérieur et de se préparer aux défis auxquels les deux États et l’Europe sont confrontés au XXIe siècle, et souhaitant faire converger leurs économies et leurs modèles sociaux, favoriser la diversité culturelle et rapprocher leurs sociétés et leurs citoyens,

Convaincues que l’amitié étroite entre la France et l’Allemagne a été déterminante et demeure un élément indispensable d’une Union européenne unie, efficace, souveraine et forte,

Attachées à approfondir leur coopération en matière de politique européenne afin de favoriser l’unité, l’efficacité et la cohésion de l’Europe, tout en maintenant cette coopération ouverte à tous les États membres de l’Union européenne,

Attachées aux principes fondateurs, droits, libertés et valeurs de l’Union européenne, qui défendent l’État de droit partout dans l’Union européenne et le promeuvent à l’extérieur,

Attachées à œuvrer en vue d’une convergence sociale et économique ascendante au sein de l’Union européenne, à renforcer la solidarité mutuelle et à favoriser l’amélioration constante des conditions de vie et de travail conformément aux principes du socle européen des droits sociaux, notamment en accordant une attention particulière à l’autonomisation des femmes et à l’égalité des sexes,

Réaffirmant l’engagement de l’Union européenne en faveur d’un marché mondial ouvert, équitable et fondé sur des règles, dont l’accès repose sur la réciprocité et la non-discrimination et qui est régi par des normes environnementales et sociales élevées,

Conscientes de leurs droits et obligations en vertu de la Charte des Nations Unies,

Fermement attachées à un ordre international fondé sur des règles et sur le multilatéralisme, dont les Nations Unies constituent l’élément central,

Convaincues que la prospérité et la sécurité ne pourront être assurées qu’en agissant d’urgence afin de protéger le climat et de préserver la biodiversité et les écosystèmes,

Agissant conformément à leurs règles constitutionnelles et juridiques nationales respectives et dans le cadre juridique de l’Union européenne,

Reconnaissant le rôle fondamental de la coopération décentralisée des communes, des départements, des régions, des Länder, du Sénat et du Bundesrat, ainsi que celui de la coopération entre le Plénipotentiaire de la République fédérale d’Allemagne chargé des Affaires culturelles dans le cadre du Traité sur la coopération franco-allemande et les ministres français compétents,

Reconnaissant le rôle essentiel de la coopération entre l’Assemblée nationale et le Bundestag, en particulier dans le cadre d’un accord interparlementaire, qui constitue une dimension importante des liens étroits entre les deux pays,

Sont convenues de ce qui suit :

 

Chapitre premier

Affaires européennes

Article 1er

Les deux États approfondissent leur coopération en matière de politique européenne. Ils agissent en faveur d’une politique étrangère et de sécurité commune efficace et forte, et renforcent et approfondissent l’Union économique et monétaire. Ils s’efforcent de mener à bien l’achèvement du Marché unique et s’emploient à bâtir une Union compétitive, reposant sur une base industrielle forte, qui serve de base à la prospérité, promouvant la convergence économique, fiscale et sociale ainsi que la durabilité dans toutes ses dimensions.

Article 2

Les deux États se consultent régulièrement à tous les niveaux avant les grandes échéances européennes, en cherchant à établir des positions communes et à convenir de prises de parole coordonnées de leurs ministres. Ils se coordonnent sur la transposition du droit européen dans leur droit national.

 

Chapitre 2

Paix, sécurité et développement

Article 3

Les deux États approfondissent leur coopération en matière de politique étrangère, de défense, de sécurité extérieure et intérieure et de développement tout en s’efforçant de renforcer la capacité d’action autonome de l’Europe. Ils se consultent afin de définir des positions communes sur toute décision importante touchant leurs intérêts communs et d’agir conjointement dans tous les cas où ce sera possible.

Article 4

(1) Du fait des engagements qui les lient en vertu de l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord du 4 avril 1949 et de l’article 42, paragraphe 7, du Traité sur l’Union européenne du 7 février 1992, modifié par le Traité de Lisbonne du 13 décembre 2007 modifiant le Traité sur l’Union européenne et le Traité instituant la Communauté européenne, les deux États, convaincus du caractère indissociable de leurs intérêts de sécurité, font converger de plus en plus leurs objectifs et politiques de sécurité et de défense, renforçant par là-même les systèmes de sécurité collective dont ils font partie. Ils se prêtent aide et assistance par tous les moyens dont ils disposent, y compris la force armée, en cas d’agression armée contre leurs territoires. Le champ d’application territorial de la deuxième phrase du présent paragraphe correspond à celui de l’article 42, paragraphe 7, du Traité sur l’Union européenne.

(2) Les deux États agissent conjointement dans tous les cas où ce sera possible, conformément à leurs règles nationales respectives, en vue de maintenir la paix et la sécurité. Ils continuent de développer l’efficacité, la cohérence et la crédibilité de l’Europe dans le domaine militaire. Ce faisant, ils s’engagent à renforcer la capacité d’action de l’Europe et à investir conjointement pour combler ses lacunes capacitaires, renforçant ainsi l’Union européenne et l’Alliance nord-atlantique.

(3) Les deux États s’engagent à renforcer encore la coopération entre leurs forces armées en vue d’instaurer une culture commune et d’opérer des déploiements conjoints. Ils intensifient l’élaboration de programmes de défense communs et leur élargissement à des partenaires. Ce faisant, ils entendent favoriser la compétitivité et la consolidation de la base industrielle et technologique de défense européenne. Ils sont en faveur de la coopération la plus étroite possible entre leurs industries de défense, sur la base de leur confiance mutuelle. Les deux États élaboreront une approche commune en matière d’exportation d’armements en ce qui concerne les projets conjoints.

(4) Les deux États instituent le Conseil franco-allemand de défense et de sécurité comme organe politique de pilotage de ces engagements réciproques. Ce Conseil se réunira au plus haut niveau à intervalles réguliers.

Article 5

Les deux États étendent la coopération entre leurs ministères des affaires étrangères, y compris leurs missions diplomatiques et consulaires. Ils procéderont à des échanges de personnels de haut rang. Ils établiront des échanges au sein de leurs représentations permanentes auprès des Nations Unies à New York, en particulier entre leurs équipes du Conseil de sécurité, leurs représentations permanentes auprès de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord et leurs représentations permanentes auprès de l’Union européenne, ainsi qu’entre les organismes des deux États chargés de coordonner l’action européenne.

Article 6

Dans le domaine de la sécurité intérieure, les gouvernements des deux États renforcent encore leur coopération bilatérale en matière de lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée, ainsi que leur coopération dans le domaine judiciaire et en matière de renseignement et de police. Ils mettent en œuvre des mesures communes de formation et de déploiement et créent une unité commune en vue d’opérations de stabilisation dans des pays tiers.

Article 7

Les deux États s’engagent à établir un partenariat de plus en plus étroit entre l’Europe et l’Afrique en renforçant leur coopération en matière de développement du secteur privé, d’intégration régionale, d’enseignement et de formation professionnelle, d’égalité des sexes et d’autonomisation des femmes, dans le but d’améliorer les perspectives socio-économiques, la viabilité, la bonne gouvernance ainsi que la prévention des conflits, la résolution des crises, notamment dans le cadre du maintien de la paix, et la gestion des situations d’après-conflit. Les deux États instituent un dialogue annuel au niveau politique en matière de politique internationale de développement afin d’intensifier la coordination de la planification et de la mise en œuvre de leurs politiques.

Article 8

(1) Dans le cadre de la Charte des Nations Unies, les deux États coopéreront étroitement au sein de tous les organes de l’Organisation des Nations Unies. Ils coordonneront étroitement leurs positions, dans le cadre d’un effort plus large de concertation entre les États membres de l’Union européenne siégeant au Conseil de sécurité des Nations Unies et dans le respect des positions et des intérêts de l’Union européenne. Ils agiront de concert afin de promouvoir aux Nations Unies les positions et les engagements de l’Union européenne face aux défis et menaces de portée mondiale. Ils mettront tout en œuvre pour aboutir à une position unifiée de l’Union européenne au sein des organes appropriés des Nations Unies.

(2) Les deux États s’engagent à poursuivre leurs efforts pour mener à terme des négociations intergouvernementales concernant la réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies. L’admission de la République fédérale d’Allemagne en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies est une priorité de la diplomatie franco-allemande.

 

Chapitre 3

Culture, enseignement, recherche et mobilité

 

Article 9

Les deux États reconnaissent le rôle décisif que jouent la culture et les médias dans le renforcement de l’amitié franco-allemande. En conséquence, ils sont résolus à créer pour leurs peuples un espace partagé de liberté et de possibilités, ainsi qu’un espace culturel et médiatique commun. Ils développent la mobilité et les programmes d’échanges entre leurs pays, en particulier à l’intention des jeunes dans le cadre de l’Office franco-allemand pour la Jeunesse, et définissent des objectifs chiffrés dans ces domaines. Afin de favoriser des liens toujours plus étroits dans tous les domaines de l’expression culturelle, notamment au moyen d’instituts culturels intégrés, ils mettent en place des programmes spécifiques et une plate-forme numérique destinés en particulier aux jeunes.

Article 10

Les deux États rapprochent leurs systèmes éducatifs grâce au développement de l’apprentissage mutuel de la langue de l’autre, à l’adoption, conformément à leur organisation constitutionnelle, de stratégies visant à accroître le nombre d’élèves étudiant la langue du partenaire, à une action en faveur de la reconnaissance mutuelle des diplômes et à la mise en place d’outils d’excellence franco-allemands pour la recherche, la formation et l’enseignement professionnels, ainsi que de doubles programmes franco-allemands intégrés relevant de l’enseignement supérieur.

Article 11

Les deux États favorisent la mise en réseau de leurs systèmes d’enseignement et de recherche ainsi que de leurs structures de financement. Ils poursuivent le développement de l’Université franco-allemande et encouragent les universités françaises et allemandes à participer à des réseaux d’universités européennes.

Article 12

Les deux États instituent un Fonds citoyen commun destiné à encourager et à soutenir les initiatives de citoyens et les jumelages entre villes dans le but de rapprocher encore leurs deux peuples.

 

Chapitre 4

Coopération régionale et transfrontalière

 

Article 13

(1) Les deux États reconnaissent l’importance que revêt la coopération transfrontalière entre la République française et la République fédérale d’Allemagne pour resserrer les liens entre les citoyens et les entreprises de part et d’autre de la frontière, notamment le rôle essentiel des collectivités territoriales et autres acteurs locaux à cet égard. Ils entendent faciliter l’élimination des obstacles dans les territoires frontaliers afin de mettre en œuvre des projets transfrontaliers et de faciliter la vie quotidienne des habitants de ces territoires.

(2) À cet effet, dans le respect des règles constitutionnelles respectives des deux États et dans les limites du droit de l’Union européenne, les deux États dotent les collectivités territoriales des  territoires frontaliers et les entités transfrontalières comme les eurodistricts de compétences appropriées, de ressources dédiées et de procédures accélérées permettant de surmonter les  obstacles à la réalisation de projets transfrontaliers, en particulier dans les domaines économique, social, environnemental, sanitaire, énergétique et des transports. Si aucun autre moyen ne leur permet de surmonter ces obstacles, des dispositions juridiques et administratives adaptées, notamment des dérogations, peuvent également être accordées. Dans ce cas, il revient aux deux États d’adopter la législation appropriée.

(3) Les deux États demeurent attachés à la préservation de normes strictes dans les domaines du droit du travail, de la protection sociale, de la santé et de la sécurité, ainsi que de la protection de l’environnement.

Article 14

Les deux États instituent un comité de coopération transfrontalière comprenant des parties prenantes telles que l’État et les collectivités territoriales, les parlements et les entités transfrontalières comme les eurodistricts et, en cas de nécessité, les eurorégions intéressées. Ce comité est chargé de coordonner tous les aspects de l’observation territoriale transfrontalière entre la République française et la République fédérale d’Allemagne, de définir une stratégie commune de choix de projets prioritaires, d’assurer le suivi des difficultés rencontrées dans les territoires frontaliers et d’émettre des propositions en vue d’y remédier, ainsi que d’analyser l’incidence de la législation nouvelle sur les territoires frontaliers.

Article 15

Les deux États sont attachés à l’objectif du bilinguisme dans les territoires frontaliers et accordent leur soutien aux collectivités frontalières afin d’élaborer et de mettre en œuvre des stratégies appropriées.

Article 16

Les deux États faciliteront la mobilité transfrontalière en améliorant l’interconnexion des réseaux numériques et physiques entre eux, notamment les liaisons ferroviaires et routières. Ils agiront en étroite collaboration dans le domaine de la mobilité innovante, durable et accessible à tous afin d’élaborer des approches ou des normes communes aux deux États.

Article 17

Les deux États encouragent la coopération décentralisée entre les collectivités des territoires non frontaliers. Ils s’engagent à soutenir les initiatives lancées par ces collectivités qui sont mises en œuvre dans ces territoires.

 

Chapitre 5

Développement durable, climat, environnement et affaires économiques

 

Article 18

Les deux États s’emploient à renforcer le processus de mise en œuvre des instruments multilatéraux relatifs au développement durable, à la santé mondiale et à la protection de l’environnement et du climat, en particulier l’Accord de Paris du 12 décembre 2015 et le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies. À cet effet, ils agissent en rapport étroit afin de formuler des approches et des politiques communes, notamment en mettant en place des dispositifs en vue de la transformation de leurs économies et en favorisant des actions ambitieuses de lutte contre les changements climatiques. Ils garantissent l’intégration de la protection du climat dans toutes les politiques, notamment par des échanges transversaux réguliers entre les gouvernements dans des secteurs clés.

Article 19

Les deux États feront progresser la transition énergétique dans tous les secteurs appropriés et, à cet effet, développent leur coopération et renforcent le cadre institutionnel de financement, d’élaboration et de mise en œuvre de projets conjoints, en particulier dans les domaines des infrastructures, des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique.

Article 20

(1) Les deux États approfondissent l’intégration de leurs économies afin d’instituer une zone économique franco-allemande dotée de règles communes. Le Conseil économique et financier franco-allemand favorise l’harmonisation bilatérale de leurs législations, notamment dans le domaine du droit des affaires, et coordonne de façon régulière les politiques économiques entre la République française et la République fédérale d’Allemagne afin de favoriser la convergence entre les deux États et d’améliorer la compétitivité de leurs économies.

(2) Les deux États instituent un « Conseil franco-allemand d’experts économiques » composé de dix experts indépendants afin de présenter aux deux gouvernements des recommandations sur leur action économique.

Article 21

Les deux États intensifient leur coopération dans le domaine de la recherche et de la transformation numérique, notamment en matière d’intelligence artificielle et d’innovations de rupture. Ils promouvront à l’échelle internationale des directives sur l’éthique des technologies nouvelles. Ils mettent en place, afin de promouvoir l’innovation, des initiatives franco-allemandes qui sont ouvertes à la coopération au niveau européen. Les deux États mettront en place un processus de coordination et un financement commun afin de soutenir des programmes conjoints de recherche et d’innovation.

Article 22

Les parties prenantes et les acteurs intéressés des deux États sont réunis au sein d’un Forum pour l’avenir franco-allemand afin de travailler sur les processus de transformation de leurs sociétés.

 

Chapitre 6

Organisation

 

Article 23

Des réunions entre les gouvernements des deux États ont lieu au moins une fois par an, alternativement en République française et en République fédérale d’Allemagne. Après l’entrée en vigueur du présent Traité, le Conseil des ministres franco-allemand adopte un programme pluriannuel de projets de coopération franco-allemande. Les secrétaires généraux pour la coopération franco-allemande chargés de préparer ces réunions assurent le suivi de la mise en œuvre de ce programme et en font rapport au Conseil des ministres.

Article 24

Un membre du gouvernement d’un des deux États prend part, une fois par trimestre au moins et en alternance, au conseil des ministres de l’autre État.

Article 25

Les conseils, structures et instruments de la coopération franco-allemande font l’objet d’un examen périodique et sont, en cas de nécessité, adaptés sans retard aux objectifs fixés d’un commun accord. Le premier de ces examens devrait avoir lieu dans les six mois suivant l’entrée en vigueur du présent Traité et proposer les adaptations nécessaires. Les secrétaires généraux pour la coopération franco-allemande évaluent régulièrement les progrès accomplis. Ils informent les parlements et le Conseil des ministres franco-allemand de l’état général d’avancement de la coopération franco-allemande.

Article 26

Des représentants des régions et des Länder, ainsi que du comité de coopération transfrontalière, peuvent être invités à participer au Conseil des ministres franco-allemand.

 

Chapitre 7

Dispositions finales

 

Article 27

Le présent Traité complète le Traité du 22 janvier 1963 entre la République française et la République fédérale d’Allemagne sur la coopération franco-allemande au sens du paragraphe 4 des Dispositions finales de ce Traité.

Article 28

Les deux États s’informent mutuellement, par la voie diplomatique, de l’accomplissement des procédures nationales requises pour l’entrée en vigueur du présent Traité. Le présent Traité entre en vigueur à la date de réception de la dernière notification.

La France et l’Allemagne mettront en œuvre le Traité d’Aix-la-Chapelle par le biais de 15 projets prioritaires, dont le suivi sera assuré par le Conseil des ministres franco-allemand.

Concrètement le traité d'Aix-la-Chapelle c'est ça :

Projets prioritaires pour la mise en œuvre du Traité d’Aix-la-Chapelle

La VÉRITÉ (rien que la vérité) sur le traité franco-allemand d'Aix-la-Chapelle.

Non, l’Alsace et la Lorraine ne quitteront jamais la France…

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