15 octobre 2018 - Seul le prononcé fait foi

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Conférence de presse conjointe du Président de la République, Emmanuel Macron et de Moon Jae-in, Président de la République de Corée

Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs,

Avant toute chose, laissez-moi vous dire l’émotion et la solidarité de toute la Nation à l’endroit de nos compatriotes victimes des inondations et de leurs familles dans l’Aude. J’ai demandé au Premier ministre et au ministre de se rendre sur place cet après-midi, ils y sont actuellement. L’ensemble des services de secours sont mobilisés de manière exemplaire et je les en remercie mais je veux ici exprimer la solidarité de toute la Nation française et vous remercie, Monsieur le Président, pour vos mots de soutien à votre arrivée.

Je suis très heureux, Monsieur le Président MOON, de vous accueillir aujourd’hui dans le cadre de votre visite d’Etat en France. C’est un plaisir pour cette première fois à Paris après les échanges que nous avions eus à Hambourg et, évidemment, plusieurs échanges téléphoniques que nous avions eus l’un et l’autre.

Nos deux pays ont des intérêts conjoints croissants à la fois au plan bilatéral et sur la scène internationale et c’est pourquoi nous souhaitons renforcer la dimension stratégique de nos relations et continuer à développer notre dialogue et nos coopérations concrètes. Avec le Président MOON, nous sommes donc convenus de donner une nouvelle impulsion à notre partenariat selon quatre axes prioritaires préparés depuis plusieurs mois : la coopération sur les questions internationales, les relations économiques, notamment dans le domaine de l’innovation, la coopération universitaire et scientifique et la sécurité et la défense.

Pour ce qui est des questions internationales, notre entretien a été l’occasion, bien évidemment, d’évoquer la situation dans la péninsule coréenne. Je veux ici saluer les efforts déployés par la Corée du Sud et le Président MOON, en particulier en faveur de la dénucléarisation de la péninsule coréenne et de la paix. La gestion de la crise nord-coréenne connaît incontestablement une nouvelle étape sous votre impulsion, Monsieur le Président, et je vous en remercie et veux ici vous redire tout le soutien de la France. Nous attendons maintenant des engagements précis de Pyongyang démontrant sa volonté réelle de s’engager dans un processus de démantèlement de ses programmes nucléaires et balistiques.

Dans l’attente, les sanctions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations unies s’appliqueront et la France, pour sa part, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, entend contribuer pleinement aux efforts pour mettre fin à la menace pour la paix mondiale que représentent les programmes de la Corée du Nord et pour parvenir à une dénucléarisation complète, vérifiable et irréversible. Nous sommes prêts dans ce contexte à mettre à disposition notre expertise, à jouer un rôle actif si un processus de négociation venait à s’engager, je l’ai dit au Président MOON, et nous accompagnerons de manière extrêmement claire, transparente le processus de reconstruction de la confiance lancé par le Président. Et à chaque étape qui sera ainsi vérifiable et vérifiée, nous serons acteurs pour faire évoluer le cadre international et pouvoir accompagner les progrès qui seraient ainsi obtenus.

Nous avons également évoqué l’importance d’approfondir notre coopération sur les grands enjeux mondiaux. Nos deux pays ont besoin d’un multilatéralisme fort et du renforcement des organisations internationales. Après la guerre de Corée, la Corée du Sud s’est relevée sur les plans universitaire et scientifique grâce à l’appui de l’UNESCO et, comme la France, la Corée du Sud, dont l’économie dépend largement de ses exportations, a besoin d’une OMC forte. Et donc, qu’il s’agisse de l’UNESCO comme de l’Organisation mondiale du commerce, notre volonté est d’œuvrer ensemble pour renforcer ces structures internationales. Nous sommes donc convenus de travailler davantage ensemble sur la modernisation du système commercial multilatéral dans le cadre du G20 et de l’OMC. Nos deux pays, qui coprésident le groupe de travail du G20 sur l’architecture financière internationale, vont renforcer également leur coopération sur la question de l’endettement des pays en voie de développement.

Nous souhaitons aussi répondre ensemble aux nouveaux enjeux auxquels nos sociétés et nos économies doivent faire face avec le développement des technologies numériques et examiner à cet effet les nouvelles régulations à mettre en place dans un cadre multilatéral. Nous avons donc décidé de mettre en place un Conseil commun à nos deux pays pour avancer dans cette réflexion et la France et la Corée du Sud ont clairement vocation, avec d’autres, à jouer un rôle clé dans ce domaine.

Enfin nous avons évoqué la lutte contre les dérèglements climatiques et la protection de l’environnement. Jamais la situation n’a été aussi grave. Le GIEC, qui vient de se réunir à Songdo, en Corée du Sud, a publié le 8 octobre dernier un rapport spécial particulièrement alarmant à ce sujet et nous comptons donc sur le soutien de la Corée du Sud dans les grandes négociations à venir : la fixation des règles d’application de l’Accord de Paris à la COP24 en décembre prochain à Katowice, l’amélioration de la protection de la biodiversité lors de la COP Biodiversité de Pékin en 2020 et du Congrès mondial de la Nature à Marseille en 2020 également, enfin l’adoption d’un Pacte mondial pour l’Environnement ambitieux dans le cadre des Nations unies.

Je tiens aussi à ce que la France et la Corée du Sud soutiennent des projets concrets de lutte contre les dérèglements climatiques. C’est pourquoi j’ai proposé au Président MOON de rejoindre plusieurs initiatives comme l’Alliance pour la décarbonation des transports, la Déclaration Tony DEBRUM sur les transports maritimes ou l’initiative relative aux systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques. Ces défis sont essentiels et seront au cœur de la présidence française du G7 en 2019 et seront également abordés dans le cadre du G20.

Nous avons bien sûr évoqué le renforcement du caractère stratégique des relations entre l’Union européenne et la Corée du Sud et c’est le sens du déplacement en Europe du Président MOON qui participera également le 19 octobre à mes côtés au sommet Union européenne-Corée du Sud à Bruxelles et l’ASEM sera le cadre d’un tel échange où nous pourrons justement évoquer l’ensemble de ces sujets de partenariat.

Deuxième axe stratégique, c’est sur le plan économique. Nos échanges commerciaux sont aujourd’hui de plus de 8 milliards d’euros et ont triplé durant les vingt dernières années, notamment grâce à l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et la Corée du Sud. Ils sont de plus en plus diversifiés, couvrant les secteurs de l’aéronautique, du spatial, de l’automobile, de l’électronique, de la chimie et de la santé ou de l’agroalimentaire. Nous devons continuer à lever les obstacles qui demeurent et j’évoquais à cet égard l’importance de l’accès de nos produits au marché sud-coréen, notamment notre attachement à une réouverture rapide du marché sud-coréen à la viande bovine française. Nous nous réjouissons aussi de l’intérêt croissant marqué par des investisseurs sud-coréens pour la France et je tiens à cet égard à saluer les récentes décisions d’investissement prises par des sociétés sud-coréennes comme Samsung et Naver dans le secteur technologique, ou le groupe SPC dans l’industrie agroalimentaire ainsi que les nombreux investissements immobiliers. Nous souhaitons également unir nos efforts en matière d’innovation, beaucoup de choses, là aussi, ont été faites. Nous entendons développer la coopération entre les écosystèmes coréens et français en nous appuyant notamment sur la French Tech Hub de Séoul. J’ai proposé au Président MOON de mettre en place d’ici à la fin de l’année un conseil franco-coréen sur les nouvelles technologies et l’innovation.

Troisième axe de ce partenariat, c’est la coopération universitaire et scientifique. Nous souhaitons en effet qu’elle soit renforcée dans le cadre de la relation bilatérale. Les ministres sud-coréen et français de la Recherche viennent d’adopter à cet effet un plan d’action bilatéral en science et technologie. Nous devons élargir encore notre coopération exemplaire dans le secteur spatial et travailler ensemble dans les secteurs tels que l’intelligence artificielle.

Nous pouvons nous appuyer sur une mobilité étudiante très active que nous souhaitons encore renforcer entre nos deux pays. La France est le premier pays d’accueil des étudiants sud-coréens en Europe continentale, ce qui est un point très important. Et les étudiants français constituent la première communauté étudiante européenne en Corée du Sud et donc c’est une force sur laquelle il nous faut nous appuyer.

Nous sommes également convenus d’amplifier notre coopération concernant l’apprentissage du français en Corée et du coréen en France. La France a pris des mesures ces dernières années qui portent déjà leurs fruits, comme la possibilité de présenter le coréen au baccalauréat français comme première ou deuxième langue vivante, et j’ai demandé aussi au Président de nous aider à promouvoir le français comme, justement, langue possible dans l’enseignement secondaire sud-coréen.

Enfin, quatrième et dernier axe, c’est notre coopération en matière de défense et de sécurité. La ministre des Armées et le ministre de la Défense tiendront un dialogue annuel qui portera notamment sur la sécurité régionale et les possibilités de coopération dans la zone Asie-Pacifique. Nous renforcerons également le dialogue entre les hauts fonctionnaires et les militaires des deux ministères et notre souhait est de pouvoir fortement renforcer cette coopération d’ici à la fin de l’année.

Je remercie le Président MOON pour son invitation à me rendre en Corée, je le ferai l’année prochaine et ce sera l’occasion à ce titre de pouvoir consacrer les avancées dans ces différents domaines. Je voudrais conclure en saluant l’engagement du Président MOON, l’engagement en faveur de la paix et de la réconciliation coréenne, comme je l’ai déjà dit, engagement également en faveur des droits de l’homme. Je connais la profondeur, y compris personnelle, de celui-ci lorsque, avocat et jeune militant dans les années 1980, vous avez milité fortement et vous êtes battu pour ces droits de l’homme, puis tout au long de votre carrière politique. Et je sais aussi que le Président réfléchit aujourd’hui à l’abolition formelle de la peine de mort en Corée du Sud. C’est un combat particulièrement cher à la France et vous pourrez là aussi compter sur notre soutien inconditionnel. Je vous remercie, Monsieur le Président, pour votre présence, cette visite d’Etat et l’honneur que vous nous faites d’être à nos côtés à Paris aujourd’hui.

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